ARBITRAGE EN VERTU DU RÈGLEMENT SUR LE PLAN DE GARANTIE DES BÂTIMENTS RÉSIDENTIELS NEUFS
(Décret 841-98 du 17 juin 1998)
(Loi sur le bâtiment, L.R.Q., c. B-1.1
Organisme d’arbitrage autorisé par la Régie du bâtiment :
Centre canadien d’arbitrage commercial inc. (CCAC)
ENTRE : Martin Soulière
(ci-après « le Bénéficiaire »)
ET : Les Habitations Michel Bourdages Inc.
(ci-après « L’Entrepreneur »)
ET : La garantie de construction résidentielle (GCR)
(ci-après « l’Administrateur »)
No dossier CCAC : S18-021501-NP
Arbitre : |
|
Albert Zoltowski |
|
|
|
Pour le Bénéficiaire : |
|
Monsieur Martin Soulière |
|
|
|
Pour l’Entrepreneur : |
|
Me Denis Huet |
|
|
|
Pour l’Administrateur : |
|
Me Pierre-Marc Boyer
|
|
|
|
Date de la sentence : |
|
le 14 mai 2019. |
Identification complète des parties
Arbitre : |
|
Albert Zoltowski, arbitre 1010, de la Gauchetière Ouest Bureau 950 Montréal (Québec) H3B 2N2 |
|
|
|
Bénéficiaire : |
|
Monsieur Martin Soulière [...] Saint-Philippe (Québec) [...] |
|
|
|
Entrepreneur : |
|
Les Habitations Michel Bourdages Inc. 3340, chemin Marlington Ogden (Québec) J0B 3E3
À l’attention de Monsieur Michel Bourdages, président |
|
|
|
Administrateur : |
|
La garantie de construction résidentielle (GCR) 7171, rue Jean-Talon Est, bureau 200 Anjou (Québec) H1M 3N2
À l’attention de Me Pierre-Marc Boyer |
SENTENCE :
Introduction :
1. Cette sentence découle de la demande d’arbitrage du Bénéficiaire. Ce dernier était en désaccord avec le rapport décisionnel de l’Administrateur dans lequel il a rejeté 5 points de réclamation.
2. Les décisions de l’Administrateur à l’égard de chacun de ces 5 points de réclamation sont consignées dans son rapport décisionnel (aussi appelé le « rapport de conciliation » ou la « décision de l’Administrateur ») ») daté du 19 janvier 2018. Il est signé par Monsieur Normand Pitre, T.P., conciliateur décisionnaire.
3. Immédiatement avant l’audition, les parties, leurs témoins, leurs procureurs et le soussigné ont visité la maison du Bénéficiaire. Il s’agit d’une maison unifamiliale semi-détachée située au [...] à Saint-Philippe, province de Québec (ci-après le « bâtiment »).
4. L’audition s’est déroulée le 24 octobre 2018 au Centre d’affaires de l’Université de Sherbrooke à Longueuil.
5. Les personnes suivantes ont témoigné devant l’arbitre soussigné (ci-après le « Tribunal » ou le « Tribunal arbitral ») :
- Monsieur François Dussault,T.P., l’ expert du Bénéficiaire;
- Madame Line Pion, pour le Bénéficiaire;
- Madame Stéphanie Guénette, pour le Bénéficiaire;
- Monsieur Jean-Pierre Soulière, pour le Bénéficiaire;
- Monsieur Martin Soulière, le Bénéficiaire;
- Monsieur Normand Pitre, conciliateur, pour l’Administrateur;
- Monsieur Michel Bourdages, pour l’Entrepreneur.
6. Les numéros des points de réclamation qui apparaissent ci-dessous sont les mêmes que ceux qui apparaissent au rapport décisionnel du conciliateur daté du 19 janvier 2018.
Point 7. Fenêtre de la salle à manger
La preuve du Bénéficiaire
7. Monsieur François Dussault, T.P. (technologue professionnel), reconnu par le Tribunal comme un expert en bâtiment en général, était le premier à témoigner. Il a déposé son rapport daté du 22 juin 2018 (pièce B-22).
8. Selon son inspection qui a précédé la rédaction de ce rapport, il a pris des mesures détaillées de la fenêtre à l’aide d’un appareil laser, de deux (2) niveaux conventionnels de différentes longueurs et d’un galon à mesurer.
9. Selon ses constatations, le cadrage inférieur et supérieur en pvc de la fenêtre fixe de la salle à manger sur le côté gauche du bâtiment, est hors niveau. La partie inférieure de ce cadrage a une pente descendante se dirigeant de la la droite vers la gauche de la fenêtre, d’un quart (1/4) de pouce. La partie supérieure de ce cadrage de pvc est hors niveau démontrant une pente descendante qui se dirige de la gauche vers la droite de la fenêtre, d’un quart (1/4) de pouce également.
10. Comme une mesure corrective, il recommande d’enlever la fenêtre et de la réinstaller à niveau. De plus cette fenêtre, devra être réinstallée parallèle au plafond, ce qui n’est pas le cas présentement.
11. Il opine que la cause de cette problématique n’est pas un mouvement du bâtiment ou un assèchement de sa structure en bois après la réception du bâtiment. Ceci découle de son observation qu’il n’y a pas de fissure dans la plaque de plâtre ou dans l’encadrement en bois de la fenêtre. Il déclare qu’il n’y a aucune tolérance, c’est-à-dire de déviation permise du niveau d’une fenêtre, selon les règles de l’art. Même le manuel intitulé «Le Guide de performance de l’APCHQ » ne traite pas de niveau d’installation d’une fenêtre. Donc, selon lui, une fenêtre doit être installée à niveau.
12. Selon Monsieur Dussault, la problématique de la fenêtre est visible à une distance de quelques 6 pieds et demi. Cependant, il n’a pas constaté cette problématique lors de son inspection pré-réception du bâtiment et il ne l’a pas notée dans son rapport d’inspection pré-réception daté du 28 octobre 2016 qui a été déposé comme la pièce A-5. Pour bien cerner ce problème, ça prend un niveau et une règle. Lors de son inspection pré-réception, le témoin n’a utilisé aucun instrument ou outil.
13. Il y avait tellement de points à vérifier lors de cette inspection pré-réception et tellement de personnes présentes, qu’il n’a pas constaté la problématique de la fenêtre.
14. Lors de cette inspection pré-réception, les personnes présentes étaient Monsieur Michel Bourdages, soit le président de l’Entrepreneur, le Bénéficiaire, sa conjointe et son père. L’inspection a duré 2 heures et demie.
15. Le représentant de l’Entrepreneur, Monsieur Michel Bourdages questionnait les compétences du témoin et il l’a même menacé de le jeter en bas de l’escalier du premier étage. C’est la première fois que le témoin a été victime de menaces lors d’une inspection.
16. Un autre témoin, Monsieur Jean-Pierre Soulière, qui est aussi le père du Bénéficiaire était présent lors de cette inspection pré-réception, avec la permission de Monsieur Bourdages. Il a corroboré les paroles menaçantes dirigées par Monsieur Michel Bourdages vers Monsieur Dussault.
La preuve de l’Administrateur
17. Le prochain témoin est Monsieur Normand Pitre, T.P. Il est l’auteur du rapport décisionnaire de l’Administrateur. Lors de sa visite d’inspection le 6 décembre 2017, il n’a constaté visuellement aucune dénivellation de la fenêtre.
18. Lors de cette inspection, le père du Bénéficiaire lui a prêté un outil, soit un niveau de 4 pieds. Il déclare que selon cette prise de mesure « le niveau (de la fenêtre) était presque parfait ».
19. Selon lui, il n’y a aucune malfaçon.
20. Dans le Code du bâtiment il n’y a pas de normes de tolérances du niveau des fenêtres.
21. Il fait référence à un document qu’il identifie comme le CSA 4440. Il n’a pas apporté de copie de ce document à l’audition et ne témoigne pas sur son contenu.
La preuve de l’Entrepreneur
22. Selon le témoignage de Monsieur Michel Bourdages « c’était l’enfer tout le long de la construction » à cause des communications entre lui et le Bénéficiaire. Il dit qu’il recevait tous les jours des courriels de la part du Bénéficiaire.
23. Il explique que durant l’inspection pré-réception il voulait connaître l’identité et les compétences du professionnel du bâtiment désigné par le Bénéficiaire, Monsieur François Dussault. Selon lui, Monsieur Dussault « était arrogant ». Lors de cette inspection « tout le monde qui était présent prenait des mesures, Monsieur Dussault, le Bénéficiaire, sa conjointe et son père. »
Les prétentions du Bénéficiaire
24. Selon le Bénéficiaire, le dénivellement défectueux des fenêtres n’est pas une situation qui était apparente lors de la réception. Il ne l’a pas constatée lors de la réception. Pour la constater, il faut l’intervention d’un expert et l’utilisation d’un niveau et d’autres outils.
25. Pour savoir si la dénivellation de la fenêtre est conforme ou pas, il faut connaître les tolérances de niveau de son installation. Il ne les connaissait pas.
26. Le niveau de la fenêtre est croche depuis le moment de la réception du bâtiment
Les prétentions de l’Administrateur.
27. Selon l’Administrateur, il s’agit d’une situation qui était apparente lors de la réception du bâtiment et qui aurait dû être dénoncée par écrit dans le rapport pré-réception signé par le professionnel du bâtiment, Monsieur Dussault.
28. Pour les fins du Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs [1] (ci-après le « Règlement »), il suffit de voir une situation inappropriée pour la dénoncer. Pour une dénonciation valable d’une situation, le Règlement n’exige pas une connaissance technique que cette situation constitue une malfaçon.
Les prétentions de l’Entrepreneur
29. Sur ce point et sur tous les autres points, l’Entrepreneur confirme les prétentions de l’Administrateur.
30. En ce qui concerne l’aspect « apparent » ou « non-apparent » de ce point 7 et des autres points mentionnés au rapport de consultation technique de Monsieur Dussault du 22 juin 2018 (pièce B-22), ( incluant les points 8 et 9) le Bénéficiaire a dû les constater personnellement avant de confier leur vérification à M. Dussault. Ceci signifie, selon l’Entrepreneur, que tous ces points étaient apparents .
ANALYSE DU POINT 7 ET SENTENCE
Le fardeau de la preuve
31. Étant donné que la demande d’arbitrage a été soumise par le Bénéficiaire, le fardeau de la preuve lui appartient. Pour s’en décharger, il doit convaincre le Tribunal en présentant une preuve de faits qui soutiennent ses prétentions. Sa preuve sera suffisante si l’existence des faits présentés au Tribunal est plus probable que leur inexistence (article 2804 du Code civil du Québec). C’est ce qu’on appelle la règle de la prépondérance des probabilités.
32. Si le Bénéficiaire ne se décharge pas de son fardeau de la preuve à l’égard d’un point, comme le point 7, de la décision de l’Administrateur, le Tribunal arbitral ne pourra pas modifier ou annuler cette décision sur ce point.
Malfaçon existante et non apparente au moment de la réception du bâtiment
33. Selon le Bénéficiaire il s’agit d’une malfaçon existante et non apparente lors de la réception du bâtiment.
34. La réparation d’une telle malfaçon est prévue au paragraphe 10(3) du Règlement qui se lit comme suit :
« 10. La garantie d’un plan dans le cas de manquement de l’entrepreneur à ses obligations légales ou contractuelles après la réception du bâtiment doit couvrir :
1) ………..
2) ………..
3) la réparation des malfaçons existantes et non apparentes au moment de la réception et découvertes dans l’année qui suit la réception, visées aux articles 2113 et 2120 du Code civil et dénoncées, par écrit, à l’entrepreneur et à l’administrateur dans un délai raisonnable de la découverte des malfaçons;
35. Le Tribunal note que ni la preuve, ni les prétentions des parties ne visaient des vices cachés au sens du paragraphe 10(4) du Règlement ou des vices de conception, de construction ou de réalisation et des vices du sol, au sens de l’article 2118 du Code civil, visés au paragraphe 10(5) du Règlement.
36. Le paragraphe 10(3) du Règlement réfère explicitement aux malfaçons « visées aux articles 2113 et 2120 du Code civil ».
37. L’article 2113 du Code civil est court :
« Art. 2113. Le client qui accepte sans réserve, conserve, néanmoins, ses recours contre l’entrepreneur aux cas de vices ou malfaçons non apparents. »
38. L’article 2120 du Code est un peu plus long et se lit comme suit :
« Art. 2120. L’entrepreneur, l’architecte et l’ingénieur pour les travaux qu’ils ont dirigés ou surveillés et, le cas échéant, le sous-entrepreneur pour les travaux qu’il a exécutés, sont tenus conjointement pendant un an de garantir l’ouvrage contre les malfaçons existantes au moment de la réception, ou découvertes dans l’année qui suit la réception. »
39. On peut constater que ni l’article 2113 ni l’article 2120 du Code civil ne donne une définition des malfaçons non apparentes.
40. C’est la doctrine et la jurisprudence qui a élaboré une interprétation de cette expression.
41. Ainsi, dans l’affaire Construction Turcot Inc.[2], l’honorable Juge Tôth, J.C.S. a interprété l’article 2120 du Code civil, et particulièrement la significations de « malfaçons » dans cet article, comme suit :
« 83. Pendant le délai d’un an de l’article 2120 CcQ, l’entrepreneur est débiteur d’une obligation de garantie. Le client n’a qu’à prouver l’existence ou la découverte d’une malfaçon pour que l’entrepreneur soit responsable.
84. Après l’expiration de ce délai,…
85. L’inexécution contractuelle peut avoir deux sources : ou bien l’entrepreneur n’a pas respecté le contrat, les plans ou les devis ou bien l’entrepreneur n’a pas respecté les règles de l’art ou les normes de la construction. » (souligné par le Tribunal)
42. Ce Tribunal retient comme une définition de malfaçon ce que le Juge Tôth écrit au paragraphe 85 de sa décision : une non-conformité au contrat, aux plans ou aux devis ou une non-conformité aux règles de l’art ou aux normes de la construction .
43. Dans une cause antérieure, [3] l’Honorable Gérald Bossé, J.C.Q. a décrit les sources de ces « règles de l’art » :
« 10….. En matière de contrat d’entreprise, l’entrepreneur a une obligation de résultats. L’article 2120 C.c.Q. l’oblige en outre à une obligation légale de garantie contre les malfaçons. Dès que le propriétaire a établi la présence d’une non-conformité de certains travaux aux stipulations contractuelles ou aux « règles de l’art », qu’elles soient celles suivies généralement en construction ou qu’elles découlent d’une règlementation énonçant des règles minimales de construction comme le Code national du bâtiment, les personnes tenues à la garantie doivent répondre de ces malfaçons à moins de prouver que, dans les circonstances précises de l’espèce, la garantie ne trouve pas application . » (souligné par le Tribunal arbitral).
En ce qui concerne le caractère apparent ou non-apparent d’une malfaçon, le Tribunal arbitral réfère à un jugement de l’Honorable Michel Rivard [4] dans lequel ce magistrat a écrit ceci au sujet de vices et malfaçons apparents :
« 130. Des vices et malfaçons sont apparents lorsqu’ils sont facilement visibles et qu’ils peuvent être découverts par un examen général de l’ouvrage ne nécessitant pas une vérification spécifique par un professionnel ayant une connaissance dans le métier (9). Notons également que l’appréciation du caractère apparent doit se faire selon un caractère objectif, soit celui de la personne raisonnable (10). On peut parler ici de malfaçons apparentes. »
En interprétant la définition de vices et malfaçons « apparents » du juge Rivard dans le sens contraire, on peut conclure que les vices et les malfaçons non-apparents sont ceux qui ne sont pas facilement visibles et qui ne peuvent pas être découverts par un examen général de l’ouvrage ne nécessitant pas une vérification spécifique par un professionnel ayant une connaissance dans le métier. L’appréciation de ce caractère doit se faire selon un critère objectif, soit celui de la personne raisonnable.
La dénivellation de la fenêtre
44. Revenons maintenant au Point 7 que nous analysons. Est-ce que la problématique de la fenêtre était apparente ou non-apparente lors de la réception du bâtiment?
45. La preuve révèle que l’expert Monsieur François Dussault qui est un professionnel du bâtiment en général, ne l’a pas constaté lors de son inspection pré-réception. Le Bénéficiaire non plus. Même Monsieur Pitre, le conciliateur avec une expérience de quelques 3 000 conciliations effectuées, n’a constaté visuellement aucune dénivellation. C’est seulement quand le père du Bénéficiaire, Monsieur Jean-Pierre Soulière, lui a fourni un niveau de 4 pieds de longueur, qu’il a pu observer que le niveau du cadre de la fenêtre était presque parfait, ou « pratiquement parfaitement de niveau » selon ses propres mots.
46. De plus, selon lui, il n’y a aucune malfaçon.
47. Il n’y a aucune preuve à l’effet que Bénéficiaire a constaté cette problématique lors de la réception.
48. De plus, il n’y a pas de preuve suffisante qu’ il aurait pu la constater lors de la réception par un examen général. Oui, il l’a constatée plus tard, soit, entre la date de la réception et sa dénonciation qui a eu lieu quelques 11 mois plus tard. Ceci est tout à fait normal qu’après une certaine période d’habitation et d’observations spécifiques et détaillées, l’occupant d’une résidence constate une légère dénivellation d’une fenêtre. Cependant ceci ne peut pas automatiquement transformer une malfaçon qui était non apparente ( selon sa signification mentionnée ci-haut) au moment de la réception du bâtiment en une malfaçon apparente lors de cette réception.
49. De plus, et selon le témoignage non contredit du témoin expert, Monsieur Dussault, les dérangements qu’il a subis lors de son inspection pré-réception et le nombre des problèmes qu’il a identifiés lors de cette inspection (63 selon son rapport produit comme la pièce A-5) peuvent expliquer pourquoi même un professionnel du bâtiment n’a pas remarqué cette problématique lors de son inspection.
50. En ce qui concerne la non-conformité du niveau de la fenêtre aux règles de l’art qui y sont applicables, le Tribunal réfère au témoignage de l’expert Dussault qui est suffisant et crédible sur cet aspect.
51. Pour tous ces motifs, le Tribunal conclut que la problématique de la fenêtres de la salle à manger constitue une malfaçon existante et non apparente lors de la réception du bâtiment. Elle est visée par le paragraphe 10(3) du Règlement.
Point 8. Plancher au premier étage
La preuve du Bénéficiaire
52. Selon le témoignage et le rapport de l’ expert, Monsieur François Dussault, les planchers en lattes de bois ne sont pas parallèles au mur adjacent à trois endroits au deuxième étage. Il s’agit de trois endroits qui sont identifiés avec les lettres A, B et C dans son rapport ( la pièce B-22, à la page 10) :
A. Dans le corridor, le long d’un mur nain qui sépare le corridor de la cage d’escaliers, sur une distance de 1 143 mm ou 45 pouces, l’écart de parallélisme est de 18 mm.
B. Dans la chambre à coucher avant, le long du mur gauche, sur une distance de 3 226 mm ou 127 pouces, l’écart de parallélisme est de 14 mm.
C. Dans la chambre à coucher arrière du côté de l’escalier, le long de la cloison intérieure face à l’autre chambre à coucher arrière : sur une distance de 2 336 mm ou 92 pouces. L’écart de parallèlisme est de 14 mm.
Selon le témoin, ces écarts de parallélisme sont contraires aux règles de tolérance prévues à la section 11-2 du manuel « Guide de performance de l’APCHQ » qui indique que « L’écart du parallélisme entre le revêtement et les murs adjacents ne doit pas dépasser un quart de pouce (6 mm) sur 6 pieds (1,8 m); ». (la première page de cette section 11-2 de ce manuel a été déposée comme la pièce A-17.)
53. Le témoin explique, qu’un écart d’un quart de pouce ou 6 mm sur une distance totale de 6 pieds ou 1,8 m est égale à un ratio de 0,0033.
54. Aux trois endroits mentionnés ci-haut, les écarts du parallélisme qu’il a mesurés sont supérieurs à ce ratio comme suit :
· À l’endroit A, le ratio est de 0,0157;
· À l’endroit B, le ratio est de 0,0043;
· À l’endroit C, le ratio est de 0,0060.
55. Pour prendre ses mesures, Monsieur Dussault a utilisé un niveau laser et un niveau conventionnel ainsi qu’un galon à mesurer.
56. En contre-interrogatoire, le témoin a déclaré que l’on peut voir ce manque de parallélisme « de loin ». Il ajoute que le corridor n’est pas large.
57. Il déclare qu’il n’a pas vu cette situation lors de son inspection pré-réception.
La preuve de l’Administrateur
58. Monsieur Normand Pitre a témoigné que, lors de sa visite avant la rédaction de sa décision, il a pu constater que les lattes ne sont pas parfaitement parallèles aux murs adjacents.
59. Selon lui, il n’est pas rare que les murs ne soient pas à 90 degrés, ce qui pourrait affecter le parallélisme des lattes.
60. Selon ses observations, il n’y a aucune malfaçon.
61. En contre-interrogatoire par le Bénéficiaire, le témoin déclare que la situation qu’il a observée est acceptable.
62. En ce qui concerne le « Guide de performance de l’APCHQ » - « On peut en prendre et laisser ». Parfois « on l’utilise ou pas le Guide ». Selon lui, ce Guide n’a pas la force de loi.
63. Ses constations sont basées sur ses 3 000 inspections antérieures à l’audition.
64. Il admet que dans une décision antérieure qu’il a rendue concernant le bâtiment du Bénéficiaire en date du 10 mars 2017, au point 4 intitulé « Finition des murs (placoplâtre) », il a non seulement reconnu l’autorité du « Guide de performance de l’APCHQ » mais il a aussi annexé une copie de la page identifiée comme la section 10-1 de ce Guide, à sa décision.
65. Le témoin ajoute que le problème du parallélisme des planchers n’est pas mentionné sur le formulaire d’inspection pré-réception (pièce A-3) ni sur le rapport d’inspection pré-réception de Monsieur Dussault (pièce A-5).
La preuve de l’Entrepreneur
66. L’Entrepreneur n’a soumis aucune preuve spécifique concernant ce point.
Les prétentions du Bénéficiaire
67. Le Bénéficiaire soumet que le plancher n’est pas conforme aux critères prévus au Guide de performance de l’APCHQ.
68. Le problème est visible mais ça prendrait un expert pour constater qu’il s’agit d’une malfaçon.
69. Il soumet que dans sa décision, Monsieur Pitre n’a pris aucune mesure avant de conclure qu’il ne s’agissait pas d’une malfaçon.
Les prétentions de l’Administrateur
70. Quant à l’aspect de l’apparence ou non apparence du parallélisme des planchers, l’Administrateur réfère à ses prétentions sur le même aspect qu’il a fait à l’égard du point précédent numéro 7.
71. Il réfère au témoignage de Monsieur Pitre à l’effet que le parallélisme n’est pas parfait mais qu’il est acceptable et donc il n’y a pas de malfaçon.
Les prétentions de l’Entrepreneur
72. L’Entrepreneur n’a pas de prétentions spécifiques à ce point.
73. Il réfère à ses prétentions qu’il a déjà soumises à l’égard du point numéro 7 concernant l’aspect apparent/non apparent.
ANALYSE ET SENTENCE CONCERNANT LE POINT 8
74. Est-ce que le Bénéficiaire s’est déchargé de son fardeau de preuve que le manque de parallélisme de son plancher en bois aux murs adjacents constitue une malfaçon non-apparente lors de la réception du bâtiment?
75. Le témoignage non contredit de Monsieur Dussault prouve l’existence d’un manque de parallélisme aux trois endroits qu’il a identifiés sous les lettres A, B et C dans son rapport et lors de son témoignage. Cet écart de parallélisme est contraire aux tolérances qui sont prévues à la page 236, section 11-2 du Guide de Performance de l’APCHQ (pièce A-17) qui prévoit que l’écart de parallélisme entre le revêtement en lattes de bois et les murs adjacents ne doit pas dépasser un quart de pouce ou 6 mm sur une distance de 6 pieds ou 1,8 m.
76. La question se pose si les tolérances prévues au Guide de performance de l’APCHQ, qui est une association provinciale d’entrepreneurs en construction, devraient ou pas être considérées comme une preuve suffisante des règles de l’art sur la question du parallélisme des planchers en bois aux murs adjacents.
77. Les règles de l’art prévues à ce Guide ont été invoquées par l’expert du Bénéficiaire Monsieur François Dussault.
78. Dans son témoignage, le conciliateur Monsieur Pitre a tenté de démontrer que le Guide n’est pas toujours reconnu comme une source probante des règles de l’art. Le Tribunal note, toutefois qu’il a lui-même fait référence à ce Guide de performance de l’APCHQ dans une décision antérieure concernant le même bâtiment.
79. Étant donné que la seule preuve devant le Tribunal des règles de l’art qui pourraient s’appliquer à la situation du parallélisme des planchers en bois est contenue dans le Guide de performance de l’APCHQ ( l’édition de 2006) le Tribunal l’ accepte pour les fins de cette cause.
80. De plus, le témoignage de Monsieur Pitre que, selon son expérience fondée sur 3 000 inspections antérieures dans le domaine de la construction, l’écart dans le parallélisme des planchers au 2e étage du bâtiment ne constitue pas une malfaçon, n’ affaiblit pas l’opinion contraire de l’ expert Dussault. Cette opinion ressort du témoignage clair et précis de Monsieur Dussault, appuyé par les mesures qu’il a prises lors de son inspection, le tout tel que décrit à l’audition et dans son rapport (pièce B-22 aux pages 10 à 17).
81. En ce qui concerne les prétentions des parties sur la question de l’apparence ou de la non-apparence de cette situation lors de l’inspection pré-réception, le Tribunal adopte la même analyse et la même conclusion que celles qu’il a déjà invoquées à l’appui de son analyse et sentence sous le point 7 ci-haut.
Point 9. Élévation du terrain avant
82. Dans sa décision, le conciliateur Monsieur Normand Pitre écrit ce qui suit :
« Le bénéficiaire mentionne avoir reçu un courriel de la municipalité mentionnant que le terrain en façade de sa propriété serait trop élevé d’une hauteur de six ( 6 ) pouces.
Lors de notre visite, nous avons demandé que ce courriel nous soit transmis, demande de laquelle nous sommes demeurés sans nouvelles.
Pour cette raison et sans réception d’un avis de non-conformité provenant de la municipalité, l’administrateur ne peut reconnaître la situation. »
La preuve du Bénéficiaire
83. Le Bénéficiaire témoigne qu’il a reçu un courriel de Monsieur François Rioux, Chef de division - Génie, de la Ville de Saint-Philippe le 11 août 2017, qui se lit comme suit :
« Bonjour monsieur Soulière,
Après vérification l’arrière de votre terrain semble correct. Par contre, à partir du coin avant de la maison jusque dans la rue, le terrain est trop haut. (près de 10 pouces au coin de la maison). Je vous rappelle que le point bas, entre le terrain et la rue, devrait être vis-à-vis le centre du fossé et non sur le bord de la route. À cet effet, il est près de 6 pouces trop haut. » (déposé comme la pièce A-11 par l’Administrateur et la pièce B-9 par le Bénéficiaire)
84. Le 16 mai 2018, le conciliateur, Monsieur Normand Pitre, envoie un courriel à Monsieur François Rioux de la municipalité lui demandant le numéro du règlement municipal auquel Monsieur Rioux faisait référence dans son courriel du 11 août 2017 à Monsieur Soulière (cité au paragraphe précédent).
85. Monsieur Rioux répond à Monsieur Pitre dans son courriel du 5 juin 2018 en lui mentionnant qu’il s’agit de l’article 343 du Règlement de zonage numéro 401 de la municipalité et lui envoie un extrait de ce règlement. (pièce B-12 en liasse)
86. Le même jour, à la suite de sa réception de ce courriel (dont le Bénéficiaire était en copie), Monsieur Pitre pose des questions concernant la signification de certaines expressions qui apparaissent à l’article 343. De plus, dans son courriel, il demande si la municipalité va émettre un avis de non-conformité, ou accepter l’implantation de la résidence et le niveau de terrain tel qu’il est? Il écrit aussi : « Est-ce qu’une demande de dérogation devra être faite? » Il s’agit du courriel du 5 juin 2018 de Monsieur Pitre (pièce B-12 en liasse).
87. Monsieur François Rioux répond aux interrogations de Monsieur Pitre par son courriel du 24 août 2018 adressé à l’avocat de l’Administrateur, avec copie à Monsieur Pitre, comme suit :
« Tout d’abord, nous souhaitons préciser que l’application de cet article nous cause souvent des problèmes, car on peut l’interpréter de différentes façons.
……….
La ville n’émettra donc aucun avis de non-conformité dans le présent dossier. Nous ne le faisons que très rarement pour ce type de problème, notamment en raison du manque de clarté de notre règlementation. »
88. Le 9 septembre 2018, soit un mois et demi avant la tenue de l’audition, le Bénéficiaire adresse une lettre à l’avocate et greffière de la municipalité, Me Manon Thériault. Cette lettre se lit en partie comme suit :
« Il est important de clarifier clairement la position de la ville maintenant qu’elle semble vouloir se rétracter de la position initiale rendue en mai 2017. Par conséquent, je demande à la ville d’émettre un avis de non-conformité ou un avis de conformité qui acceptera que le terrain soit encore plus élevé qu’il est présentement une fois les travaux de pavage du stationnement obligatoire effectué.
Je vous donne un délai de 10 jours afin de répondre à ce courriel et de faire les corrections nécessaires pour rendre votre position compréhensible et sans ambiguïté. Ainsi que pour émettre un avis de conformité ou de non-conformité. » (pièce B-13 en liasse).
89. Dix jours plus tard, soit le 19 septembre 2018, il reçoit un courriel de Me Manon Thériault, avocate, greffière et directrice au Service du Greffe et des affaires juridiques de la Municipalité de Saint-Philippe. Ce courriel se lit en partie comme suit :
« Nous n’avons rien à ajouter quant aux précisions concernant l’article 343 déjà transmises à Monsieur Boyer par Monsieur Rioux le 24 août dernier. L’article en question n’est pas un chef d’œuvre de rédaction et nous comptons bien en modifier le texte lors d’une prochaine refonde du règlement. Vous comprendrez que chaque dossier est unique en soit et que chaque cas est un cas d’espèce, surtout en secteur de requalification…
Nous ajoutons que la Ville n’exige pas un très grand degré de précision à cet égard. Dans la mesure où le dénivellement n’est pas trop important au niveau arrière, que l’ensemble du terrain s’égoutte vers l’avant et que le point bas du terrain est bien situé par rapport à la rue, nous n’intervenons pas. C’est ça que nous entendons par tolérance.
Comme déjà précisé dans le message de Monsieur Rioux, la Ville n’émettra aucun avis de non-conformité dans votre dossier…. Quant à l’avis de conformité, il ne s’agit pas d’un document que nous délivrons habituellement. De plus, nous ne pouvons anticiper la conformité de travaux qui n’ont pas encore été effectués. » (pièce B-13 en liasse).
90. Le témoin expert, Monsieur François Dussault, dans son rapport de consultation technique du 22 juin 2018 précise que la question de la pente avant du terrain n’est pas une question d’une pente négative vers le bâtiment.
91. En ce qui concerne le travail correctif à faire, il s’exprime ainsi:
« Travail correctif à faire : suivre les exigences des autorités compétentes de la Ville de Saint-Philippe concernant le niveau/hauteur de votre terrain et la base de gravier du stationnement des automobiles en façade avant, par rapport au terrain des immeubles voisins. Vous devrez donc enlever tout le gravier déposé, creuser le terrain en terre végétale en dessous du gravier et remettre le gravier enlevé pour arriver au niveau qui est exigé.
De plus, suite à la baisse du gravier du stationnement des voitures avant, le crépi du ciment appliqué sur la fondation en béton et sur le côté de l’escalier de béton avant, sera manquant en partie inférieure et le constructeur devra en faire appliquer avec le même produit déjà utilisé sur ces deux ouvrages de béton coulé sur place et ce afin d’harmoniser l’ouvrage de crépi. »
Lors de son témoignage, il ajoute que ces travaux correctifs devront inclure une nouvelle marche et le remplacement ou l’ajustement de le rampe.
92. Le Bénéficiaire témoigne qu’une fois que le terrain en avant de son bâtiment est abaissé conformément au courriel de Monsieur Rioux, la première marche de l’escalier sera trop haute et nécessitera l’ajout d’une nouvelle marche supplémentaire. De plus, l’ajout de cette marche aura une conséquence sur la rampe d’aluminium présente qui sera maintenant trop courte et, selon lui devra être refaite. (voir aussi le document intitulé « Constatation sur la hauteur du terrain » préparé par le Bénéficiaire et déposé sous la côte B-26 en liasse).
La preuve de l’Administrateur
93. Monsieur Pitre déclare qu’il a demandé un avis de non-conformité à la municipalité. Sinon, il ne peut pas intervenir.
94. Il a eu plusieurs conversations avec la municipalité. Il déclare que la ville n’est pas très réceptive et affirme que le procureur de l’Administrateur a dû intervenir concernant un avis de non-conformité ainsi que la possibilité d’une dérogation. Il confirme que la ville a répondu qu’aucun avis de conformité ne sera émis.
95. Il ne se rappelle pas s’il avait vu le courriel du 11 août 2017 adressé par Monsieur Rioux, Chef de division - Génie, de la municipalité au Bénéficiaire, qui apparaît aussi comme la pièce A-11 dans le cartable des pièces déposées par l’Administrateur.
96. À la question du Tribunal si sa décision sur ce point serait différente s’il avait vu ce courriel avant de la rendre, il répond « non ». Ce dont il aurait besoin pour rendre une décision différente serait un avis de non-conformité exigeant des correctifs de la part du Bénéficiaire.
97. Selon lui, les entrepreneurs doivent respecter les règlements municipaux. Dans son expérience, il a vu souvent des entrepreneurs qui sont allés aux municipalités pour chercher des dérogations aux règlements municipaux.
98. Lorsqu’il est contre-interrogé par le procureur de l’Entrepreneur, le témoin déclare que sa décision ne serait pas différente s’il avait en sa possession toute la correspondance entre l’Entrepreneur et la ville de Saint-Philippe.
La preuve de l’Entrepreneur
99. L’Entrepreneur n’a soumis aucune preuve à l’égard de ce point.
Les prétentions du Bénéficiaire
100. Le Bénéficiaire nous rappelle que la municipalité refuse d’émettre un avis de conformité ou un avis de non-conformité quant à la hauteur de son terrain en avant de son bâtiment et ce, malgré les demandes répétées déjà soumises en preuve.
101. Il soumet que la seule communication de la Ville de Saint-Philippe qui est claire est le courriel du 17 août 2017 du Chef de division - Génie, Monsieur Rioux, qui énonce que la dénivellation du terrain devant le bâtiment est trop haute de 10 pouces près du bâtiment et de 6 pouces près de la rue.
102. Si le Tribunal accueille sa demande concernant les travaux correctifs, soit le prolongement de l’escalier de l’entrée principale, le prolongement de la rampe le long de cet escalier et la pose du crépi sur les fondations, il s’engage à abaisser le terrain pour qu’il soit conforme aux exigences de la ville de Saint-Philippe et ce dans les 6 mois de la sentence.
Les prétentions de l’Administrateur
103. L’Administrateur rappelle que l’abaissement du terrain avant, est une exclusion de la garantie en vertu du paragraphe 12(9) du Règlement. Il s’agit d’un ouvrage à l’extérieur du bâtiment qui est spécifiquement exclu par ce paragraphe. La situation sous l’analyse, n’est pas une pente négative du terrain qui, elle, exceptionnellement fait partie de la garantie.
104. En ce qui concerne le courriel de Monsieur Rioux du 11 août 2017, il ne constitue qu’une opinion d’un fonctionnaire de la Ville de Saint-Philippe.
105. En ce qui concerne l’extrait de l’article 343 du règlement de zonage numéro 401 dont le texte a été envoyé à Monsieur Pitre, il déclare que l’expression qui y apparaît et qui se lit « sensiblement égale » est très ambigüe. Cette expression ne constitue pas une preuve suffisante que le niveau du terrain constitue une contravention au règlement de la ville.
Les prétentions de l’Entrepreneur
106. L’Entrepreneur confirme les arguments de l’Administrateur.
107. Il ajoute que le courriel de Me Manon Thériault, avocate et greffière de la Ville, a plus de poids que celui du Chef de la division - Génie, Monsieur Rioux. C’est au Tribunal d’interpréter le courriel de Me Thériault.
ANALYSE ET SENTENCE CONCERNANT LE POINT 9
108. Au tout début de cette analyse, il faut bien préciser qu’aux termes du paragraphe 12(9) du règlement, les ouvrages à l’extérieur du bâtiment, tel que le terrassement, sont exclus de la garantie, à l’exception d’une pente négative d’un terrain.
109. Tel que mentionné par l’expert, Monsieur François Dussault dans son rapport, dans le cas qui nous occupe, il s’agit d’une pente positive plutôt que d’une pente négative. Cette pente positive est donc exclue du plan de garantie.
110. Malgré le fait que les travaux correctifs pour abaisser la pente positive du terrain devant le bâtiment ne sont pas couverts par le plan de garantie, l’abaissement de cette pente, rendraient évidents des problèmes affectant le bâtiment qui existent présentement mais ne peuvent pas être réparés avant que le terrain ne soit abaissé. Il s’agit d’ un manque de crépi sur les fondations jusqu’au nouveau niveau du terrain, la nécessité d’une nouvelle première marche d’escalier et le prolongement de la rampe. Ce sont des malfaçons existantes mais non apparentes lors de la réception du bâtiment, et elles sont couvertes par le Règlement.
111. Selon la compréhension du Tribunal, dans ce dossier l’Administrateur aurait le droit de statuer sur de telles vices ou malfaçons affectant le bâtiment à condition de voir préalablement un avis de la municipalité que le terrain est non-conforme. Cette compréhension est fondée sur la décision de M. Pitre sur le point 9. et son témoignage à l’effet que l’Administrateur ne peut pas intervenir sans voir au préalable un avis de non-conformité de la ville .
112. Or, la preuve révèle que la ville refuse d’émettre un certificat de non-conformité à Monsieur Soulière. Elle lui refuse également, selon la lettre de Me Thériault, l’émission d’ un certificat de conformité tant que le terrain n’est pas abaissé (« de plus, nous ne pouvons anticiper la conformité de travaux qui n’ont pas encore été effectués »). (la pièce B-13 en liasse).
113. Finalement, ni Monsieur Rioux ni Me Thériault n’ont répondu à la question du conciliateur, Monsieur Normand Pitre, dans son courriel du 5 juin 2018 où il demandait «Est-ce qu’une demande de dérogation devra être faite? » (pièce A-12 en liasse).
114. La réaction de la ville par le Chef de la division - Génie et par sa greffière et procureure démontre un manque de collaboration flagrant. On peut bien se demander qu’est ce qu’un citoyen, comme le Bénéficiaire, qui désire avoir une certitude que son terrain respecte ou ne respecte pas un règlement de la municipalité de Saint Philippe avant de procéder à des travaux, doit ou peut faire de plus?
115. Il est difficile de répondre à cette question.
116. Si l’obligation de respecter le niveau appropriée de la pente du terrain devant son bâtiment incombait au Bénéficiaire, le Tribunal rejetterait la demande du Bénéficiaire. Or, il appert du courriel du 22 mars 2017 de M. François Daneau, inspecteur en bâtiment de Saint-Philippe, que cette obligation reposait sur l’Entrepreneur. À la question du Bénéficiaire « Est-ce que le schéma de drainage doit être respecté par le contracteur? » M. Daneau a répondu : « Oui, car s’il ne le fait pas, il déroge au Code de la construction (pente autour de la fondation) et à la réglementation municipale (pente vers la rue) .(souligné par le Tribunal) (la pièce B-9) Le témoignage du conciliateur M. Pitre que, dans son expérience ce sont les entrepreneurs qui vont chercher des certificats de dérogation à la réglementation d’une ville, est conforme à l’énoncé de l’inspecteur de la ville de Saint-Philippe, M. Daneau.
117. Il ressort de cette preuve que c’est à cause d’un manquement de l’Entrepreneur que le terrain devant le bâtiment est trop haut. Ce manquement de l’Entrepreneur, selon le Tribunal, a causé des malfaçons au bâtiment ( le manque de crépi aux fondations, la nécessité d’une nouvelle première marche supplémentaire et le prolongement de la rampe) qui sont couverts par le paragraphe 10(3) du Règlement. Ils ne pourront pas être réparés avant que le terrain ne soit abaissé.
118. Dans sa plaidoirie, le Bénéficiaire s’est engagé à abaisser son terrain et ainsi essayer de le rendre conforme aux exigences de la ville, dans un délai de 6 mois de la sentence, advenant que sa demande soit accueillie.
119. Malgré le fait que les travaux de l’abaissement du terrain ne sont pas couverts par le plan de garantie , il est juste dans les circonstances de cette cause selon l’article 116 du Règlement, de laisser au Bénéficiaire le soin d’abaisser son terrain et ainsi de permettre que les travaux correctifs requis sur le bâtiment, lesquels sont couverts par le Règlement, soient effectués.
120. Cependant, en tenant compte du fait que les travaux d’abaissement du terrain sont relativement mineurs d’après le rapport de M. Dussault et les observations de l’arbitre soussigné lors de sa visite au bâtiment, le délai de 6 mois après la date de cette sentence demandé par le Bénéficiaire, semble être excessivement long et non justifié. Un délai de 4 mois suivant la date de cette sentence serait plus approprié.
121. Finalement, l’Administrateur et l’Entrepreneur plaident l’absence de preuve que le niveau du terrain est non-conforme à la réglementation municipale de Saint-Philippe.
122. Leur plaidoiries ne tiennent pas compte du courriel de M. Rioux, Chef de division-Génie, de Saint Philippe du 11 août 2017 dans lequel il indique clairement que le niveau du terrain devant le bâtiment est trop haut. Il a certainement le droit, vu sa position, d’exprimer la position officielle de la ville sur cette question.
Point 11. Ventilation de la salle de bain
123. Dans sa décision, le conciliateur écrit que le Bénéficiaire lui a mentionné que le système d’extraction d’air dans la salle de bains ne permet pas l’évacuation de l’humidité lors de l’utilisation de la douche.
124. Il a rejeté cette réclamation du Bénéficiaire car le point dénoncé ne rencontrait pas les critères de la malfaçon non apparente au sens de l’article 10(3) du Règlement et ce malgré le fait que cette situation a été découverte et dénoncée par écrit dans les délais qui y sont mentionnés.
La preuve du Bénéficiaire
125. La preuve du Bénéficiaire qui est retenue par le Tribunal se résume comme suit :
126. Lors de la visite à la maison modèle par le Bénéficiaire en compagnie de son père, Monsieur Jean-Pierre Soulière, et de Madame Line Pion, le Bénéficiaire a demandé si la ventilation dans la salle de bains était suffisante étant donné qu’il prenait des douches très chaudes. À cette question, le président de l’Entrepreneur, Monsieur Bourdages, a répondu qu’il n’y a pas de ventilateur au plafond mais que l’extraction d’air par l’échangeur d’air avec une bouche d’aération dans la salle de bains serait amplement suffisant.
127. La maison modèle lors de cette visite était munie d’un échangeur d’air dont la bouche d’aération était au plafond de la salle de bain, comme au bâtiment du Bénéficiaire.
128. Selon le Bénéficiaire, la capacité d’extraction d’air dans la salle de bain par l’échangeur d’air qui se trouve au sous-sol, est inadéquate. Il déclare qu’il y a des traces sèches de gouttelettes sur les murs de la salle de bains.
La preuve de l’Administrateur
129. Le conciliateur, Monsieur Pitre, témoigne que selon le Code national du bâtiment de 2005, une tire et une entrée d’air qui sont reliées à un échangeur d’air sont exigées.
130. Dans la salle de bains du Bénéficiaire, un interrupteur « on/off » actionne l’échangeur d’air.
131. Il a fait un test avec un papier mouchoir qui lui a démontré que « ça tire ».
132. Dans son expérience, la présence de coulisses sur les murs d’une chambre de bain qui est munie d’une douche n’est pas exceptionnelle. Ceci n’est pas une preuve suffisante que la capacité d’extraction d’air par l’échangeur d’air est insuffisante.
133. Il ne se souvient pas si dans la salle de bain du bâtiment du Bénéficiaire il y avait des coulisses d’eau sur les murs.
134. Il n’a pas non plus vérifié la capacité de l’échangeur d’air ni son installation pour voir si elles sont conformes aux règles de l’art.
135. En contre-interrogatoire par le procureur de l’Entrepreneur, il réitère qu’il a effectué quelques 3 000 conciliations depuis 2002 et qu’il témoigne devant des arbitres et des juges.
La preuve de l’Entrepreneur
136. L’Entrepreneur déclare que le Bénéficiaire n’a pas demandé l’installation d’un ventilateur dans sa salle de bain. Il déclare qu’un tel ventilateur est très peu couteux.
Les prétentions du Bénéficiaire
137. Le Bénéficiaire soumet que la capacité d’extraction d’air de l’échangeur d’air dans sa salle de bain est insuffisante et résulte en un surplus d’humidité dans cette pièce.
138. Selon lui, le conciliateur aurait dû préciser dans sa décision qu’une expertise spécialisée à l’égard de ce problème était nécessaire pour que sa réclamation sur ce point puisse être accueillie.
139. Il déclare qu’il n’avait pas de temps suffisant pour préparer une telle expertise avant la tenue de l’audition.
140. Il accepterait comme une mesure corrective acceptable que le Tribunal ordonne l’installation d’un ventilateur dans sa salle de bain.
Les prétentions de l’Administrateur
141. L’avocat de l’Administrateur réfère au témoignage du conciliateur à l’effet que les traces de gouttelettes d’eau sur les murs d’une salle de bain n’est pas une situation exceptionnelle.
142. Il plaide l’absence de preuve que la capacité d’extraction d’air de l’échangeur d’air contrevient une norme ou une règle de l’art.
143. Il s’oppose à l’admissibilité en preuve par le Bénéficiaire de 3 documents qui semblent provenir des sites web de CAA Québec et Déco Habitation qui donnent des conseils sur des ventilateurs de salle de bains (pièces B-19 et B-20) ainsi que des recommandations pour l’installation d’un VRC (pièce B-21).
144. Il soumet que malgré le fait que le conciliateur, Monsieur Pitre, ne témoigne pas à titre d’expert, néanmoins il est un professionnel du bâtiment qui possède la compétence requise pour rendre sa décision à l’égard de ce point.
Les prétentions de l’Entrepreneur
145. Selon l’Entrepreneur, il n’y a rien dans le contrat entre lui et le Bénéficiaire concernant l’échangeur d’air.
ANALYSE ET SENTENCE CONCERNANT LE POINT 11
146. Pour que le Tribunal puisse accueillir la demande du Bénéficiaire à l’égard de ce point, il faut qu’il prouve l’existence d’une malfaçon existante et non-apparente lors de la réception du bâtiment.
147. Comme on a vu ci-haut, une malfaçon peut être une non-conformité, soit contractuelle soit aux normes ou aux règles de l’art qui s’appliquent à la situation dénoncée.
148. Selon le Tribunal arbitral, seul un expert en ventilation et climatisation pourrait faire la preuve devant le Tribunal des normes et des règles de l’art qui s’appliquent relativement à cette question. Cette preuve n’a pas été faite.
149. De plus, si le Bénéficiaire désirait que l’extraction d’air et d’humidité dans sa salle de bain par l’échangeur d’air puisse atteindre un certain niveau, et s’il doutait que la capacité de l’appareil qui faisait partie de l’installation standard dans son bâtiment était suffisante - il aurait fallu que ceci soit expressément prévu dans le contrat, ses annexes ou les plans et devis. Aucune preuve à cet effet n’a été soumise au Tribunal.
150. Pour ces raisons, le Tribunal ne peut pas accueillir la demande du Bénéficiaire à l’égard de ce point 11.
Point 13. Échangeur d’air
151. Dans sa décision, le conciliateur écrit ce qui suit :
« Le bénéficiaire mentionne avoir discuté avec l’entrepreneur lors de l’achat du bâtiment à l’effet que l’échangeur d’air qui sera mise en place contribuerait à la dispersion dans la résidence de l’air frais en provenance de l’unité de climatisation murale lors de son utilisation.
Le bénéficiaire mentionne cependant que le modèle installé ne possède pas le mode recirculation, ce qui aurait permis de capter l’air intérieur et de le redistribuer.
Lors de notre visite, nous avons constaté que le modèle ALDES H110-TF ne possède pas le mode recirculation, mais malgré ce fait, l’appareil installé s’avère conforme aux normes.
De plus, aucune spécification au contrat ne fait mention que l’échangeur d’air doit posséder un mode de recirculation. »
152. Il rejette ce point au même motif que le point 11 qui précède.
La preuve du Bénéficiaire
153. La preuve retenue par le Tribunal se résume comme suit :
154. Lors de la visite du Bénéficiaire en compagne des membres de sa famille à la maison modèle, le Bénéficiaire a demandé à Monsieur Michel Bourdages qu’elle était le système de climatisation en place. Monsieur Bourdages a répondu qu’il s’agissait d’un système de 12 000 BTU. Le Bénéficiaire a continué à le questionner et Monsieur Bourdages lui a répondu qu’un système de 18 000 BTU « serait en masse avec l’échangeur d’air pour la circulation d’air dans la maison ».
155. Le père du Bénéficiaire,M. Jean-Pierre Soulière qui était présent lors de cette conversation a également confirmé que Monsieur Bourdages a déclaré que l’échangeur d’air ferait la circulation de l’air froid venant du climatiseur.
156. Monsieur Bourdages a aussi assuré le Bénéficiaire qu’il n’aurait pas besoin d’un système de climatisation de 24 000 BTU car l’échangeur d’air ferait la recirculation d’air. Cependant, le Bénéficiaire insistait pour avoir un climatiseur de 24 000 BTU.
157. Le Bénéficiaire soumet en preuve une facture de l’Entrepreneur datée du 5/10/2016 intitulée « Travaux supplémentaires selon contrat préliminaire » dont l’extrait se lit comme suit :
Construction 7 000$
Céramique - option 105$
Air climatisée 24 000 BTU surplus 300$ »
(pièce B-22 en liasse)
158. Le Bénéficiaire soumet en preuve également un courriel du 29 août 2017 d’une personne identifiée comme R. côté qui est adressé à l’Entrepreneur :
« Comme mon amie pense vendre, j’aurais besoin d’une dernière information. Est-ce que c’est standard, dans vos constructions, le système d’échangeur d’air qui aide à la circulation de l’air climatisée ou c’est une option?
OUI STANDARD » est la réponse de l’Entrepreneur .
(Pièce B-17 en liasse)
La preuve de l’Administrateur
159. Monsieur Pitre déclare qu’il n’y a rien dans le contrat entre le Bénéficiaire et l’Entrepreneur concernant le mode de recirculation de l’échangeur d’air.
160. Il affirme que le modèle de l’échangeur d’air installé dans le bâtiment est conforme au CNB 2005.
La preuve de l’Entrepreneur
161. L’Entrepreneur ne soumet aucune preuve à l’égard de ce point.
Les prétentions du Bénéficiaire
162. Selon le Bénéficiaire, les réponses de Monsieur Michel Bourdages à ses questions concernant la circulation d’air par l’échangeur d’air qui rendrait un climatiseur de 12 000 BTU ou 18 000 BTU amplement suffisant et ne nécessiterait un climatiseur de 24 000 BTU - devrait servir à interpréter le contrat entre le Bénéficiaire et l’Entrepreneur.
Les prétentions de l’Administrateur
163. L’Administrateur plaide que c’est au Tribunal arbitral d’apprécier les témoignages qu’il a entendus.
164. Il rappelle que Monsieur Pitre a témoigné que l’échangeur d’air qui est installé au bâtiment, était conforme aux normes.
Les prétentions de l’Entrepreneur
165. L’Entrepreneur plaide qu’il n’y a rien dans le contrat entre lui et le Bénéficiaire concernant un échangeur d’air.
ANALYSE ET SENTENCE CONCERNANT LE POINT 13
166. Tel que déjà mentionné, pour que le Tribunal puisse accueillir la demande du Bénéficiaire concernant ce point, le Bénéficiaire doit le convaincre de l’existence d’une malfaçon existante et non apparente lors de la réception du bâtiment.
167. Il n’y a aucune preuve devant le Tribunal que l’échangeur d’air installé chez le Bénéficiaire et qui ne possède pas le mode de recirculation de l’air à l’intérieur du bâtiment est non-conforme aux normes ou aux règles de l’art. Habituellement, ce genre de preuve doit être faite par un expert dans le domaine de la climatisation et ventilation.
168. Il faut donc analyser si la preuve soumise démontre que l’absence du mode recirculation constitue une non-conformité contractuelle et donc une malfaçon.
169. Le seul contrat qui a été déposé en preuve est le contrat préliminaire sur le formulaire approuvé par l’Administrateur. Il s’agit d’un contrat de 6 pages. Il est identifié comme le contrat préliminaire numéro 810 (pièce A-1).
170. L’article 1 de ce contrat préliminaire fait référence à une maison unifamiliale jumelée faisant partie d’un projet immobilier identifié comme « De Gaule Sud, Phase I ». Dans le même article, la case « maison unifamiliale jumelée » est cochée et d’autres types de maisons ne sont pas cochés. Ensuite, il est prévu qu’il s’agit de la maison « que le vendeur s’engage à construire conformément aux plans et devis de la maison modèle numéro 3172, joints en annexe, (boîte non-cochée) et tel qu’il appert du plan cadastral correspondant au lot numéro 5915779 cadastre du Québec, circonscription foncière de La Prairie, dont un extrait est joint en annexe. Les dimensions de l’immeuble, le cas échéant, sont indiquées au(x) plan(s) joint(s) en annexe(s). ( ci-après : « Immeuble » ). »
171. Tel que déjà mentionné, aucun plan, aucun devis ou autre document n’est joint en annexe à ce contrat.
172. Selon la preuve du Bénéficiaire, la maison modèle qu’il a visité en compagnie des membres de sa famille devait être identique ou très semblable au bâtiment qu’il a acheté. Selon le témoignage de Madame Pion, dans la salle de bain de la maison modèle il y avait une bouche d’extraction et de ventilation d’air au plafond semblable à celle dans la salle de bain du bâtiment du Bénéficiaire.
173. La preuve révèle également que le mode recirculation de l’échangeur d’air n’est pas une option supplémentaire comme un climatiseur de 24 000 BTU qui est spécifiquement prévu à la facture déposée en preuve comme la pièce B-17 en liasse, mais plutôt faisait partie d’un échangeur d’air standard qui est installé dans toutes les constructions de l’Entrepreneur.
174. La preuve par témoignage est admise lorsqu’il s’agit d’interpréter un écrit (article 2864 CcQ). Il ne s’agit pas, dans le cas que nous analysons, de contredire ou changer, par témoignage, les termes de l’article 1 du contrat.
175. Le Tribunal note que le témoignage du Bénéficiaire, de Monsieur Jean-Pierre Soulière et de Madame Stéphanie Guénette concernant les déclarations de Monsieur Michel Bourdages que l’échangeur d’air aiderait à la circulation d’air dans la maison ont été faites à l’audition en présence de Monsieur Michel Bourdages. Lors de son propre témoignage, ce dernier n’a pas essayé de présenter sa version de cette conversation.
176. L’échangeur d’air avec un mode de recirculation constitue un appareil standard des constructions de maisons semblables, comme la maison modèle que le Bénéficiaire a visitée, à celle du Bénéficiaire construites par l’Entrepreneur.
177. Le Tribunal conclut que l’échangeur d’air qui a été installé à la salle de bain du Bénéficiaire est non-conforme au contrat préliminaire soumis comme la pièce A-1 et qui, dans sa définition de « l’Immeuble » acheté par le Bénéficiaire, fait référence à une maison modèle. Cette non-conformité constitue une malfaçon qui était existante et non apparente lors de la réception du bâtiment.
LES FRAIS D’EXPERTISE
178. Le Bénéficiaire a soumis au Tribunal deux factures de son expert, Monsieur François Dussault.
179. La première, datée du 21 juin 2018 ,réfère à une consultation technique pour laquelle les honoraires sont de 500 $ plus 25 $ en TPS et 49,88 $ en TVQ pour un total de 574,88 $.
180. La deuxième est datée du 24 octobre 2018 pour la présence de Monsieur Dussault à l’audition. Elle s’élève au montant de 550 $ plus 27,50 $ (TPS) et 54,84 $ (TVQ) pour un total de 632,36 $.
181. L’article 124 du Règlement énonce que « L’arbitre doit statuer, s’il y a lieu, quant au quantum des frais raisonnables d’expertises pertinentes que l’administrateur doit rembourser au demandeur lorsque celui-ci a gain de cause total ou partiel ».
182. Dans cette cause, le demandeur a eu gain de cause partiel.
183. Les honoraires de l’expert Dussault pour la préparation de la consultation technique (soit son rapport déposé comme la pièce B-22) daté du 22 juin 2018 sont raisonnables et le contenu dudit rapport a été pertinent. De plus, Le témoignage de Monsieur Dussault lors de l’audition a également été pertinent et ses honoraires sont raisonnables.
CONCLUSIONS SUPPLÉMENTAIRES
184. La Loi sur le bâtiment [5] ainsi que le Règlement ne contiennent pas de clauses privatives complètes. L’arbitre a compétence exclusive et sa décision lie les parties. Elle est finale et sans appel.
185. Selon l’article 116 du Règlement, un arbitre statue conformément aux règles de droit; il fait aussi appel à l’équité lorsque les circonstances le justifient.
POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL ARBITRAL :
REJETTE la demande d’arbitrage du Bénéficiaire à l’égard du « Point 11. Ventilation de la salle de bain » de la décision de l’Administrateur du 19 janvier 2018;
ACCUEILLE la demande d’arbitrage du Bénéficiaire à l’égard des « Point 7. Fenêtre de la salle à manger », « Point 8. Plancher au premier étage », « Point 9. Élévation du terrain avant », et le « Point 13. Échangeur d’air » de la décision précitée de l’Administrateur; et ANNULE la décision de l’Administrateur à l’égard de chacun de ces points;
ORDONNE à l’Entrepreneur d’exécuter les travaux correctifs selon les normes et les règles de l’art de l’industrie de la construction applicables, relativement aux Points « 7. Fenêtre de la salle à manger » et « 8. Plancher au premier étage » dans les quarante-cinq (45) jours de calendrier de sa réception de cette sentence et, à défaut par l’Entrepreneur de s’y conformer, ORDONNE à l’Administrateur de les exécuter à l’intérieur d’un délai supplémentaire de quatorze (14) jours de calendrier après l’expiration de ce premier délai;
ORDONNE à l’Entrepreneur d’exécuter les travaux correctifs requis, notamment relativement à la pose de crépi sur les fondations du bâtiment, le prolongement de l’escalier d’entrée en façade du bâtiment et le prolongement de la rampe de cet escalier dans les quarante-cinq ( 45) jours de calendrier suivant la transmission d’un avis écrit par le Bénéficiaire, mais le ou avant le 16 septembre 2019, à l’Entrepreneur et à l’Administrateur leur confirmant que le niveau du terrain devant le bâtiment a été abaissé et, à défaut de l’Entrepreneur d’exécuter ces travaux à l’intérieur de ce délai, ORDONNE à l’Administrateur de les exécuter dans un délai supplémentaire de vingt et un (21) jours de calendrier après l’expiration du premier délai, lesdits travaux correctifs devant être effectués selon les normes et les règles de l’art dans l’industrie de la construction qui s’y appliquent;
ORDONNE à l’Entrepreneur de remplacer l’échangeur d’air présentement installé par un échangeur d’air de qualité au moins égale à l’appareil actuel, mais qui sera aussi muni du mode de recirculation d’air, et d’exécuter tous les travaux d’installation requis au bon fonctionnement de cet appareil de remplacement, le tout selon les normes et les règles de l’art pertinentes dans l’industrie de la construction, de la climatisation et de ventilation, dans un délai de 45 jours de calendrier de sa réception de cette sentence, et à défaut de l’Entrepreneur d’exécuter ces mesures correctives à l’intérieur de ce délai, ORDONNE à l’Administrateur de les exécuter dans un délai supplémentaire de 14 jours de calendrier après l’expiration du premier délai, selon les mêmes normes et règles de l’art.
ORDONNE à l’Entrepreneur et à son défaut, à l’Administrateur, d’effectuer la remise en état du bâtiment et la réparation des dommages matériels causés par les travaux correctifs à l’intérieur des délais mentionnés ci-haut;
ORDONNE à l’Administrateur de rembourser au Bénéficiaire un montant de 632,36 $ (soit 550$ en honoraires, plus 27.50$ de TPS et 54.86$ de TVQ) relativement à la facture de Monsieur François Dussault, T.P., datée du 24 octobre 2018, et un montant de 574,88 $, (soit 500$ en honoraires et 25$ de TPS et 49.88$ de TVQ), relativement à la facture de Monsieur François Dussault datée du 21 juin 2018;
RÉSERVE à l’Administrateur ses droits à être indemnisé par l’Entrepreneur pour tous les travaux, toute(s) action(s) et toute (s) sommes versées, incluant les coûts exigibles pour l’arbitrage (paragraphe 19 de l’annexe II du Règlement) en ses lieux et place, et ce, conformément à la convention d’adhésion prévue à l’article 78 du Règlement.
LE TOUT, avec les frais de l’arbitrage à la charge de l’Administrateur conformément au Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs, avec les intérêts au taux légal majoré de l’indemnité additionnelle prévue à l’article 1619 du Code civil du Québec à compter de la date de la facture émise par l’organisme d’arbitrage, après un délai de grâce de 30 jours.
|
|
Montréal, le 14 mai 2019. |
|
|
|
|
|
ALBERT ZOLTOWSKI Arbitre/CCAC |
Jurisprudence déposée:
· Langevin Lefebvre (Succession) c. Portes et fenêtres H. Bourcier Inc., 2005 CanLII 6614 (QC CQ).
· Rivest c. Démon S.L., Inc., 2010 CanLII 29563 (QC OAGBRN).