ARBITRAGE EN VERTU DU RÈGLEMENT SUR LE PLAN DE GARANTIE DES BÂTIMENTS RÉSIDENTIELS NEUFS (Décret 841-98)
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CANADA |
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PROVINCE DE QUÉBEC |
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Groupe d’arbitrage et de médiation sur mesure (GAMM) |
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Dossier no : |
GAMM : 2012-16-009 |
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GHQ: 48447 |
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ENTRE : LOUISETTE LEBLANC ET DANIEL LÉVESQUE (ci-après les «Bénéficiaires»)
ET : LES CONSTRUCTIONS ARSENAULT & FRÈRES INC.
(ci-après l’«Entrepreneur»)
ET : LA GARANTIE QUALITÉ HABITATION INC.
(ci-après l’«Administrateur»)
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DEVANT L’ARBITRE : |
Me Karine Poulin |
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Pour les Bénéficiaires: |
Louisette Leblanc et André Lévesque |
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Pour l’Administrateur : |
Me François-Olivier Godin |
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Pour l’Entrepreneur : |
Lyne Guilbert |
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Date d’audience : |
5 juin 2014 |
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Date de la sentence : |
10 janvier 2015 |
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SENTENCE ARBITRALE
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I
LE RECOURS
[1] Les Bénéficiaires contestent en vertu de l’article 19 du Règlement sur le Plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs (ci-après le «Règlement»), les points 1 à 4 d’une décision rendue par l’Administrateur le 17 octobre 2012 dont voici les conclusions:
1. Mur des fondations latéral droit : une (1) fissure
Les Bénéficiaires nous mentionnent avoir dénoncé (Voir Note A) les deux situations suivantes :
La fissure de la porte du côté est revenue voir photo 4.1-4.2
Porte côté à un jour voir photo 4.3 - 4.4 - 4.5
Monsieur André Lévesque nous avise que cette fissure a été réparée (en 2009) par l’entrepreneur Les constructions Arsenault & frères Inc., et s’interroge du lien causal possible avec le jour au coin supérieur gauche de la porte.
Lors de notre visite, nous avons constaté une fissure au coin inférieur droit de la porte au mur latéral droit, pour laquelle le conciliateur Normand Pitre a déjà statué au point 4 du rapport émis le 24 août 2009 dont voici un extrait :
«Le bénéficiaire nous mentionne que malgré les travaux correctifs exécutés sur la fissure sous la porte d’entrée latérale, des nouvelles fissures sembleraient s’être produites.
Lors de notre inspection, nous avons tout de même procédé à un test d’arrosage, aucune infiltration d’eau ne semble s’être produite. Toutefois, si la situation venait à se détériorer où que les infiltrations d’eau viennent qu’à survenir à cet endroit. Le bénéficiaire devra en aviser promptement l’entrepreneur et La garantie Qualité Habitation afin qu’une inspection supplémentaire puisse être effectuée. »(sic)
Par conséquent, La garantie Qualité Habitation ne peut reconnaître présentement la situation dans le cadre du présent mandat.
2. Galerie en façade : une (1) fissure
Les Bénéficiaires nous mentionnent avoir dénoncé (Voir Note A) la situation suivante:
Le perron avant fissuré voir photo 5.1 - 5.2
Monsieur André Lévesque nous indique la fissure à la jonction de l’escalier et de la galerie, côté gauche vue de face.
N’ayant pas été dénoncé par écrit à l’entrepreneur et à La garantie Qualité Habitation dans l’année suivant la prise de possession de la résidence par le premier acheteur, nous devons nous prononcer dans le cadre d’un vice de construction au sens de l’article 2118 du Code civil du Québec et pour laquelle l’article 6.4.2.5 du contrat de garantie obligatoire de maison neuve s’applique et dont voici l’extrait :
(…)
Or, selon ce qu’il nous a été possible de constater lors de notre inspection, ce point ne peut être considéré comme un vice de construction pouvant entraîner la perte partielle ou totale de l’unité résidentielle.
Par conséquent, La garantie Qualité Habitation ne peut reconnaître ce point dans le cadre de son mandat.
3. Porte principale
Les bénéficiaires nous mentionnent avoir dénoncé (Voir Note A) la situation suivante :
Que la porte avant a un jour en haut voir photo 3.1 - 3.2 (sic)
Monsieur André Lévesque nous montre que la porte ne ferme pas bien et s’interroge sur le lien causal.
N’ayant pas été dénoncé par écrit à l’entrepreneur et à La garantie Qualité Habitation dans l’année suivant la prise de possession de la résidence par le premier acheteur, nous devons nous prononcer dans le cadre d’un vice de construction au sens de l’article 2118 du Code civil du Québec et pour laquelle l’article 6.4.2.5 du contrat de garantie obligatoire de maison neuve s’applique et dont voici l’extrait (sic)
(…)
Or, selon ce qu’il nous a été possible de constater lors de notre inspection, ce point ne peut être considéré comme un vice de construction pouvant entraîner la perte partielle ou totale de l’unit é résidentielle.
Par conséquent, La garantie Qualité Habitation ne peut reconnaître ce point dans le cadre de son mandat.
4. Finition intérieure
Les bénéficiaires nous mentionnent avoir dénoncé (Voir Note A) les deux (2) situations suivantes :
Que les portes miroirs son pas de niveau
Voir photo 1.1 - 1.2
La porte miroir photo 2.1 - 2.2 que le mur de la porte miroir à une fissure voir photo 2.3.(sic)
Monsieur André Lévesque s’interroge du lien causal possible avec l’apparition de fissures au coin supérieur droit de l’ouverture de la porte miroir et au plafond (à gauche)
N’ayant pas été dénoncé par écrit à l’entrepreneur et à La garantie Qualité Habitation dans l’année suivant la prise de possession de la résidence par le premier acheteur, nous devons nous prononcer dans le cadre d’un vice de construction au sens de l’article 2118 du Code civil du Québec et pour laquelle l’article 6.4.2.5 du contrat de garantie obligatoire de maison neuve s’applique et dont voici l’extrait :
(…)
Or, selon ce qu’il nous a été possible de constater lors de notre inspection, ce point ne peut être considéré comme un vice de construction pouvant entraîner la perte partielle ou totale de l’unité résidentielle.
Par conséquent, La garantie Qualité Habitation ne peut reconnaître ce point dans le cadre de son mandat.
II
LES FAITS
[2] Madame Louisette Leblanc et son fils Daniel Lévesque, les Bénéficiaires, se portent acquéreur d’une propriété à être construite et désormais connue comme étant le [...] à Saint-Zotique (ci-après la «Propriété»). Ils signent le formulaire pré-réception le 30 novembre 2007.
[3] En 2008, les Bénéficiaires dénoncent à l’Entrepreneur ainsi qu’à l’Administrateur un certain nombre de vices de sorte que ce dernier rend une première décision le 16 janvier 2008. Par la suite, au cours de l’année 2008, l’Administrateur émet une série de rapports et addendas, soit le 16 avril, le 4 et le 21 août et le 1er octobre 2008. Un autre rapport est émis le 24 août 2009. Aucune de ces décisions n’a été portée en arbitrage.
[4] Le 17 avril 2012, les Bénéficiaires dénoncent de nouveau un certain nombre de problèmes à l’Administrateur, lequel procède à une inspection suite à laquelle une décision est rendue le 17 octobre 2012. Un addenda est par la suite émis le 15 avril 2013 aux seules fins de corriger une numérotation erronée dans la décision du 17 avril précédent. La décision du 17 avril 2012 est contestée sur les quatre (4) points reproduits plus haut.
[5] À l’audience, la Bénéficiaire Louisette Leblanc confirme que c’est bien de ces quatre (4) points dont le Tribunal est saisi aux fins de rendre la présente décision.
III
LA PREUVE
1er témoin
[6] André Lévesque témoigne pour les Bénéficiaires. Son témoignage est à l’effet qu’il est le fils de Madame Leblanc et qu’il n’habite pas la Propriété avec sa mère et son frère Daniel. Toutefois, selon ce qu’il connaît du dossier, sa mère et son frère, les Bénéficiaires, ont dénoncé la problématique de fissure dans la fondation latérale droite, sous le seuil de la porte de côté, dès l’apparition du problème en 2007. Ce problème aurait été réparé par l’Entrepreneur en 2009 suite à une décision de l’Administrateur. À la même époque, l’Entrepreneur aurait également ajouté de l’isolant à la solive de rive. Il dit ne pas comprendre l’apparition d’un jour à la partie supérieure gauche de la porte. (point 1)
[7] Il indique de plus que le balcon avant est fissuré au niveau des marches. Il indique à cet égard qu’il y aurait un écart de «1 pouce au sol». En contre-interrogatoire, il admet qu’il s’agit d’une fissure de la largeur d’un cheveu. (point 2)
[8] Quant à la porte d’entrée avant, elle ne peut être fermée de manière naturelle puisqu’elle n’est plus d’équerre. Selon son témoignage, il est nécessaire de frapper à coup de pied dans la porte pour qu’elle se ferme. (point 3)
[9] Aussi, il ajoute avoir constaté que le cadrage des portes miroirs de la garde-robe d’entrée ne sont plus d’équerre de sorte que d’un côté de l’ouverture des portes, un jour de près d’un pouce au coin supérieur gauche a été créé et le même écart au coin inférieur droit, comme si le cadre de porte avait gauchie. De plus, des fissures sont apparues, partant du cadrage supérieur de la porte jusqu’au plafond.
[10] Il indique avoir pris des mesures afin de vérifier si le plancher est à niveau. Selon ce qu’il rapporte, il y aurait une inclinaison entre le portique et le salon. Il indique, de plus, que le coulis entre les tuiles de céramique est craqué mais confirme que la céramique, elle, n’est pas craquée.
[11] Il dit ignorer si les fissures dénoncées sont apparues toutes en même temps ou graduellement. Il ignore aussi la grosseur des fissures dénoncées.
[12] Il confirme qu’une bonne partie de la finition intérieure a été faite par les Bénéficiaires. (point 4)
[13] Il indique que suite à la décision rendue les Bénéficiaires ont contacté un entrepreneur en pieutage afin d’obtenir une expertise sur les corrections requises à leur Propriété, laquelle est produite sous la cote B-4.
[14] Suite à la première journée d’audience en novembre 2013 avec le précédent arbitre, Me Jeffrey Edwards, un rapport complémentaire est émis, lequel est produit sous la cote B-5. Selon le témoin, ce second rapport ferait suite à une recommandation de Me Edwards. Selon le témoin, Me Edwards aurait recommandé qu’un rapport complémentaire soit préparé. Bien qu’il admette ne pas avoir participé à cette séance d’arbitrage, il soutient avoir été au sous-sol de la résidence en tout temps et avoir tout entendu.
2e témoin
[15] Le second témoin est Sylvain Dagesse, représentant technique chez Héneault & Gosselin inc.
[16] Monsieur Dagesse est diplômé en génie civil depuis 1989 sans toutefois être membre de l’Ordre des ingénieurs. Il est par ailleurs membre de l’Ordre des technologues professionnels. Il travaille dans le domaine du sous-œuvre depuis le début de sa carrière. Il confirme ne pas être arpenteur-géomètre, ni géotechnicien, ni ingénieur géotechnique.
[17] Il confirme que Héneault & Gosselin est une entreprise de pieutage et non de génie-conseil. Elle offre des services d’évaluation technique afin de répondre à la demande grandissante de la clientèle. Monsieur Dagesse assure toutefois agir ici en sa qualité de technologue professionnel.
[18] Il confirme avoir procédé à une analyse visuelle de la situation et réitère les propos de son rapport, à savoir qu’il ne s’agit pas d’une analyse approfondie. De fait, Monsieur Dagesse confirme les mentions faites dans ses 2 rapports à l’effet qu’il n’est pas en mesure de préciser la cause du phénomène observé et que pour connaître la cause exacte, une expertise plus détaillée est requise. Il indique également, tout comme il l’indique dans ses rapports, que ces derniers n’ont pas été rédigés en vue d’un débat judiciaire et qu’ils ne peuvent être utilisés dans le cadre d’une action en justice ou en vue de faire témoigner l’auteur du rapport.
[19] La Bénéficiaire dépose tout de même les rapports et demande à ce que le témoin soit reconnu comme témoin expert. Le procureur de l’Administrateur, pour sa part, s’objecte à ce que le témoin soit reconnu comme témoin expert et qu’il soit autorisé à donner son opinion. Interrogér par le Tribunal sur ce qu’elle veut démontrer à l’aide de ce témoin, la Bénéficiaire est incapable de formuler clairement sa pensée de sorte que le Tribunal prend l’objection sous réserves et permet au témoin de donner son opinion. Ladite objection est tranchée plus loin.
[20] Monsieur Dagesse explique avoir été mandaté par les Bénéficiaires pour prendre des mesures au plancher puisqu’ils observaient des signes de fissure et de mouvement.
[21] Les mesures du plancher du rez-de-chaussée ont été prises avec un appareil au laser, à partir du sous-plancher puisque le plafond du sous-sol est ouvert et non-terminé. Selon ses mesures et les croquis contenus dans ses 2 rapports (B-4 et B-5), il y a un affaissement du mur latéral droit en raison d’un tassement différentiel. Selon son témoignage et ses rapports, il aurait observé un dénivellement supérieur à 1 pouce sur une courte distance. Selon sa connaissance de l’industrie, il est possible de conclure à un affaissement lorsqu’un dénivellement supérieur à 1 pouce est observé sur une distance de 150 pouces. Il appuie son affirmation sur une étude effectuée en 1970. Il conclut donc, vu la dimension de la maison, qu’il y a affaissement par tassement différentiel et que le pieutage de la maison est nécessaire.
[22] Il explique par la suite que suivant la première séance d’arbitrage en novembre 2013, les Bénéficiaires lui ont demandé de revenir prendre des mesures à des fins de comparaison et d’émettre un rapport complémentaire.
[23] Il admet que les mesures prises en vue du second rapport (B-5) n’ont pas toutes été prises aux mêmes endroits que lors de la prise des mesures ayant menée au premier rapport (B-4). Il admet également qu’il puisse y avoir des imprécisions de lectures dans la prise de ses mesures. Toutefois, selon son témoignage, le phénomène d’affaissement est lent. Il demande au Tribunal de n’inférer aucune conclusion négative de l’imprécision de ses mesures mais plutôt de constater que le mur latéral droit s’est affaissé d’environ 1/2 pouce en 13 mois.
[24] En contre-interrogatoire, il affirme ne pas avoir remarqué de nouvelles fissures depuis son premier rapport. Par ailleurs, selon lui, le phénomène d’affaissement n’emporte pas nécessairement l’apparition de nouvelles fissures.
[25] Il indique également, au cours de son contre-interrogatoire, qu’il est possible qu’il ait fourni aux Bénéficiaires des noms d’expert géotechnique et/ou d’arpenteur-géomètre sans pour autant en avoir un souvenir précis. Il affirme néanmoins avoir expliqué aux Bénéficiaires l’importance d’obtenir un rapport géotechnique afin que soit déterminée et documentée la progression du phénomène d’affaissement.
[26] Il affirme, pour conclure, que la mesure corrective appropriée, quelle que soit la cause de l’affaissement, est la stabilisation de la maison sur pieux d’acier.
3e témoin
[27] La Bénéficiaire Louisette Leblanc témoigne ensuite. Elle se dit déçue de la décision de l’Administrateur et souhaite régler définitivement la problématique des fissures. Elle est surprise de l’objection formulée à l’encontre de la qualité d’expert du témoin Dagesse et de la demande de rejet de ses rapports. Selon sa compréhension des propos tenus par Me Edwards en novembre 2013, il n’était pas nécessaire d’embaucher un expert. Selon sa compréhension, un deuxième rapport de Héneault et Gosselin inc. était suffisant.
[28] Elle reproche à l’Entrepreneur de ne pas produire sa contre-expertise.
[29] Elle conteste la conclusion de l’Administrateur à l’effet que la réclamation aurait été faite hors délai en ce qui concerne les garanties contre les malfaçons et contre les vices cachés.
[30] En effet, elle rappelle que la réception du bâtiment a eu lieu le 30 novembre 2007 et que plusieurs décisions sont rendues par l’Administrateur en 2008, dont celle du 1er octobre qui fait suite à la visite du 23 septembre 2008 et qui traite de la fissure au mur latéral droit. Elle conclut donc que le problème de fondation (point 1) a donc été dénoncé dans le délai d’un an suivant la réception et qu’il s’agit toujours du même problème récurrent et jamais réglé. Quant au point 3 qui concerne la porte d’entrée qui ne ferme pas normalement, elle affirme qu’il était parti du rapport du 27 février 2009, soit dans la deuxième année suivant la réception. Quant aux points 2 et 4, ils ont été dénoncés le 17 avril 2012, soit dans la cinquième année suivant la réception.
[31] En contre-interrogatoire sur le point 1 (fissure dans le mur de fondation), elle confirme que l’Entrepreneur a effectué une réparation en 2008 suite à la décision du 1er octobre 2008. Elle est toutefois incapable de dire si la réparation coule, celle-ci se trouvant en partie dans le sol. Elle soutient que l’affaissement du mur latéral droit (dont la fissure située au coin inférieur droit du seuil de la porte serait un indice), est à l’origine du gauchissement du cadre de la porte latérale, d’où l’apparition du jour au coin supérieur gauche. Elle admet toutefois avoir ajouté de la mousse isolante autour de la porte de côté au cours de l’hiver 2008-2009 puisque la laine installée par l’Entrepreneur suite à la décision du 1er octobre 2008 gelait en hiver.
[32] Par la suite, elle dira que la mousse isolante a été ajoutée par l’Administrateur et non par eux.
[33] Quant au point 2, soit la fissure au balcon avant, elle admet ne pas se souvenir du moment de l’apparition, ni de l’ampleur du problème. Elle est incapable de dire si la fissure s’étend sur toute la longueur de la marche ou si elle est située uniquement sur le côté comme celle que nous voyons sur la photo. Elle indique qu’une visite des lieux aurait été souhaitable par le présent Tribunal d’arbitrage.
[34] Par ailleurs, la porte d’entrée principale ne ferme pas naturellement depuis environ 2009. Elle indique que cette porte été installée par l’Entrepreneur. À ce titre, elle précise que Monsieur Pitre lui aurait dit que la porte était mal installée.
4e témoin
[35] La preuve des Bénéficiaires étant close, l’Administrateur fait entendre comme témoin Monsieur Michel Labelle, inspecteur-conciliateur et auteur de la décision du 17 octobre 2012.
[36] Monsieur Labelle était présent lors de la première journée d’audience avec Me Edwards en novembre 2013. Il témoigne à l’effet que lors de la visite des lieux, Me Edwards a indiqué verbalement aux Bénéficiaires de ne pas continuer avec Héneault et Gosselin et d’embaucher un expert en structure. Me Edwards aurait également indiqué verbalement ne pas constater de signes d’affaissement.
[37] Suite à la réception d’une lettre de Me Edwards datée du 21 novembre 2013, Monsieur Labelle dira avoir compris que celui-ci donnait une chance aux Bénéficiaires en leur octroyant un délai d’un (1) mois afin de décider s’ils embauchent, ou non, en expert pour étudier les problèmes allégués. Il est donc surpris de voir un rapport complémentaire de Héneault et Gosselin plutôt qu’un rapport d’expertise tel que suggéré par Me Edwards.
[38] Monsieur Labelle témoigne à l’effet qu’il a traité plus de 100 dossiers d’affaissement par tassement différentiel.
[39] Il explique être le deuxième inspecteur-conciliateur au dossier. En effet, Monsieur Normand Pitre a été en charge du dossier jusqu’en 2012. Dans sa décision du 1er octobre 2008, Monsieur Pitre indique ce qui suit :
«Fissure dans la fondation (Nouvelle dénonciation)
Le propriétaire nous mentionne la présence d’une fissure importante au coin de la porte de service sur le côté droit.
Lors de notre inspection, nous avons constaté la situation, laquelle de toute évidence demande une intervention.
Par conséquent, l’entrepreneur devra faire les vérifications nécessaires et les correctifs requis, selon les règles de l’art, et l’usage courant du marché.»
[40] Ledit rapport de 2008 ne contient aucune photo, aucune observation, ni remarque et se résume, en ce qui concerne le point en litige, à ce que ci-dessus retranscrit.
[41] Par ailleurs, le 24 août 2009, Monsieur Pitre rendait une autre décision, laquelle indique ce qui suit :
«Le bénéficiaire nous mentionne que malgré les travaux correctifs exécutés sur la fissure sous la porte d’entrée latérale, des nouvelles fissures sembleraient s’être produites.
Lors de notre inspection, nous avons tout de même procédé à un test d’arrosage, aucune infiltration d’eau ne semble s’être produite. Toutefois, si la situation venait à se détériorer où que les infiltrations d’eau viennent qu’à survenir à cet endroit. Le bénéficiaire devra en aviser promptement l’entrepreneur et La garantie Qualité Habitation afin qu’une inspection supplémentaire puisse être effectuée. »(sic)
[42] Ledit rapport de 2009 ne contient aucune photo, aucun autre commentaire, et se résume, en ce qui concerne le point en litige, à ce que ci-dessus retranscrit.
[43] Monsieur Labelle, les deux (2) rapports en main, explique que compte tenu des nombreuses décisions rendues par Monsieur Pitre relativement à la Propriété des Bénéficiaire et à sa connaissance des faits, il a alors estimé nécessaire de lui parler avant de rendre sa décision.
[44] Selon ce qu’il rapporte de sa discussion avec M. Pitre, il appert qu’au moment de la dénonciation initiale de la fissure dans la fondation le ou vers le 23 septembre 2008, il s’agissait d’une fissure de retrait découlant du séchage normal du béton.
[45] Selon son témoignage, la règle applicable en la matière veut qu’en présence d’une fissure de retrait par laquelle se produit une infiltration d’eau, une réparation par colmatage doit être faite. Toutefois, aucune intervention de nature structurale n’est requise.
[46] Dans le présent cas, vu l’affirmation de Monsieur Pitre à l’effet qu’il s’agissait d’une fissure de retrait et vu le colmatage effectué par l’Entrepreneur et l’absence de dénonciation à l’effet qu’il y aurait infiltration d’eau depuis le colmatage, Monsieur Labelle a estimé qu’il existait déjà une décision à ce sujet et que la dénonciation des Bénéficiaires était donc sans objet, d’où son refus de reconnaître ce point.
[47] Quant aux points 2 et 3, soit la fissure à la galerie de façade et le jour à la partie supérieure de la porte principale, il indique que Monsieur Pitre n’a rendu aucune décision à ces sujets auparavant. Il s’agit donc d’une nouvelle dénonciation faite en avril 2012. Compte tenu du délai de plus de 4 ans et demi écoulé depuis la réception de la Propriété, ce sont les dispositions relatives aux vices de construction qui s’appliquent.
[48] En l’espèce, la fissure à la galerie de façade mesure au plus 1-2 mm. Lors de son inspection, il n’observe aucun dénivellement, ni aucun cisaillement au niveau des marches, lesquels pourraient suggérer une fissure de nature structurale. Il s’agit, selon son témoignage, d’une fissure de retrait apparue probablement au cours de la première année suivant la réception. Toutefois, celle-ci aurait passée inaperçu jusqu’en avril 2012. Il base sa décision à la fois sur l’article 12 (2) du Règlement qui exclut explicitement les fissures de retrait mais également, il ajoute que la fissure n’étant pas de nature structurale et ne pouvant entraîner la perte totale ou partielle de l’immeuble, il ne peut s’agir d’un vice de construction, seule garantie applicable en l’espèce.
[49] Lors de sa visite, les Bénéficiaires lui ont montré un jour dans le haut de la porte d’entrée principale (point 3). Ils lui ont également indiqué que la porte ne ferme pas bien et ce, depuis longtemps. Il est également informé que les Bénéficiaires ont effectué eux-mêmes plusieurs travaux, dont des travaux d’érection de murs au sous-sol. Il note aussi que l’entrée est en céramique et ne présente aucune flexion. Normalement, s’il y avait un affaissement, l’absence de flexion ferait en sorte que la céramique aurait dû craquer, ce qui n’est pas le cas.
[50] De plus, lorsqu’il y a affaissement, on observe habituellement une augmentation graduelle du nombre de fissures, lesquelles se situent normalement en plus grand nombre aux endroits où il y a le plus de poids. En l’espèce, il s’attendrait à trouver un plus grand nombre de fissures au coin avant droit de la maison des Bénéficiaires de même qu’au niveau des supports. Or, tel n’est pas le cas. Il ajoute également que le nombre de fissures n’a pas augmenté entre 2012 et 2013. À son avis, il n’existe aucun indice d’affaissement de la Propriété.
[51] En conséquence, selon ses observations et son analyse, le jour à la partie supérieure de la porte principale ne semble pas découler d’un affaissement. La présence du jour ne constitue pas un vice de construction pouvant entraîner la perte totale ou partielle de l’immeuble et donc, il se devait de rejeter ce point.
[52] Finalement, le problème de la finition intérieure ayant été dénoncé en 2012, la garantie de 5 ans pour les vices de construction est la seule applicable. Compte tenu qu’il estime de pas être en présence d’un problème d’affaissement, Monsieur Labelle s’est dit d’avis que la cause de la perte de niveau des portes miroir et de l’apparition d’une fissure au gyproc à la partie supérieure, jusqu’au plafond, est d’une autre nature. Il émet l’hypothèse que les travaux de construction faits par les Bénéficiaires au sous-sol, notamment l’érection de murs, pourraient être à l’origine de la situation observée. À tout évènement, il ne s’agit pas d’un vice de construction de nature à mettre en péril la solidité et la pérennité de l’immeuble, d’où son rejet de la demande des Bénéficiaires.
5e témoin
[53] L’Entrepreneur fait entendre comme témoin Madame Lyne Guilbert, la directrice de l’époque.
[54] Madame Guilbert confirme que les Bénéficiaires ont effectué eux-mêmes plusieurs travaux. Elle témoigne à l’effet que selon leur contrat, la maison devait être livrée «sur gypse fini», sans finition intérieure. Elle ajoute que le frère du propriétaire de l’entreprise s’est déplacé pour montrer aux Bénéficiaires comment installer une porte. Elle indique que plusieurs maisons de ce modèle ont été construites dans le quartier et qu’elles présentent toutes la même fissure de retrait au même endroit (mur latéral droit), sans qu’elle puisse indiquer la raison précise.
[55] En contre-interrogatoire, elle explique que bien qu’il ne soit pas requis de la part de l’Entrepreneur d’effectuer un test de sol avant de débuter une construction, celui-ci travaille avec une entreprise d’excavation respectable qui les informe toujours en cas de sol mou. Par ailleurs, si plusieurs maisons auto construites dans le secteur ont nécessité un pieutage, elle affirme qu’aucune des maisons construites par l’Entrepreneur n’a fait l’objet d’un tel pieutage.
[56] Interroger par la Bénéficiaire sur la raison de la non-production de son rapport d’expert géotechnique, elle témoigne à l’effet que l’Entrepreneur n’a fait procédé à aucune expertise géotechnique mais plutôt qu’il a mandaté un expert pour procéder à une prise de mesures. Soutenant que selon le rapport «tout est beau», elle ajoute que le fardeau de la preuve ne lui appartient pas mais appartient plutôt aux Bénéficiaires qui doivent démontrer le bien-fondé de leurs prétentions.
IV
LES PLAIDOIRIES
[57] Madame Leblanc soutient que la maison travaille de partout et qu’elle s’affaisse. Elle rappelle la fissure au mur latéral droit qui est revenue de même que le jour au haut de ladite porte, la fissure au balcon avant de même que le cadre de la porte d’entrée et celui des portes miroir gauchis et, finalement, le fait que la porte d’entrée elle-même ne ferme pas normalement. Elle indique que la porte avant a été installée par l’Entrepreneur et qu’elle n’a rien à voir avec l’installation. Elle rappelle que même Monsieur Pitre avait dit que la porte avait été mal installée. Quant à la mousse isolante ajoutée autour de la porte latérale, elle dira que c’est l’Administrateur qui l’a posée.
[58] Elle demande le pieutage de sa maison. Elle ne réclame toutefois pas le remboursement des frais de Héneault et Gosselin.
[59] Pour sa part, l’Administrateur précise que seules 3 fissures ont été trouvées sur la maison et qu’il est exagéré et prématuré de dire que la maison craque de partout et qu’elle s’affaisse.
[60] Sur le point 1 plus précisément, il rappelle que celui-ci a été traité par Monsieur Pitre et soutient que Monsieur Labelle avait donc raison de s’abstenir d’intervenir à cet égard, d’autant plus que les Bénéficiaires n’ont jamais prétendu que les travaux correctifs exécutés en 2008-2009 n’ont pas tenus, ni que des infiltrations d’eau sont survenues depuis. Il soutient que la décision de l’Administrateur est bien fondée à cet égard.
[61] Sur le point 2 concernant la fissure au balcon avant, Monsieur Labelle a indiqué qu’il n’y avait aucun effritement, ni cisaillement. Il rappelle le témoignage clair de Monsieur Labelle à l’effet qu’il s’agit d’une fissure de retrait et non d’un désordre structural, laquelle fissure de retrait est explicitement exclue du plan de garantie en vertu de l’article 12 (2) du Règlement. La décision de Monsieur Labelle est donc également bien fondée sur ce point.
[62] Quant au point 3 relatif à la porte d’entrée avant, il souligne le long délai de dénonciation du problème alors que celui-ci existe depuis plusieurs années selon le témoignage même de la Bénéficiaire. Manifestement, il ne s’agit pas d’un vice de construction de nature à mettre en péril l’intégrité du bâtiment. Il demande le maintien de la décision de l’Administrateur.
[63] Enfin, quant au point 4 portant sur la finition intérieure, il indique qu’il ne s’agit pas d’un vice de construction au sens de l’article 2118 du Code civil du Québec et, conséquemment, la décision de l’Administrateur doit également être maintenue à cet égard.
[64] Il réitère que le rapport de Héneault et Gosselin ne peut être reçu à titre de rapport d’expert et que l’opinion émise par Monsieur Dagesse ne peut être admise en preuve. Il rappelle que Me Edwards avait suggéré que les Bénéficiaires engagent un expert en structure, ce qu’ils ont fait défaut de faire. Certes, admet-il, la vue d’ensemble peut peut-être laisser croire qu’il existe une source commune aux problèmes dénoncés par les Bénéficiaires. Cependant, à bien y regarder, chaque problème a une cause distincte. Considérant l’absence de preuve prépondérante démontrant un affaissement de l’immeuble et en l’absence de toute autre preuve, la demande des Bénéficiaires doit être rejetée.
[65] Il demande donc au Tribunal de rejeter la demande d’arbitrage des Bénéficiaires. De même, il demande à ce que soit refusé le remboursement des frais de Héneault et Gosselin, le témoin et le rapport n’ayant été d’aucune utilité pour faire avancer le débat. Il s’en remet au Tribunal quant aux frais de l’arbitrage à proprement dit.
[66] L’Entrepreneur fait sien les arguments de l’Administrateur et rappelle l’absence de preuve quant à un problème structural. Il ajoute que la pose de mousse isolante par les Bénéficiaires autour de la porte latérale peut avoir causé le problème dénoncé. Il demande le rejet de la demande d’arbitrage des Bénéficiaires.
V
ANALYSE ET DÉCISION
[67] Le Tribunal doit décider si les Bénéficiaires ont raison de contester la décision de l’Administrateur sur les différents points soumis.
[68] Il m’apparaît pertinent de disposer d’abord de la question de la recevabilité en preuve du rapport et de l’opinion de Monsieur Dagesse.
[69] La Bénéficiaire demande à ce que Monsieur Dagesse soit reconnu expert. Monsieur Dagesse a complété son baccalauréat en génie en 1989 et est présentement membre de l’Ordre des technologues professionnels. Il possède une expérience en réparation de sous-œuvre. À l’audience, le Tribunal avait permis, sous réserves, le témoignage de Monsieur Dagesse à titre d’expert afin de ne pas préjudicier les droits des Bénéficiaires.
[70] Par ailleurs, après avoir entendu la preuve administrée lors de l’audience, le Tribunal comprend que les Bénéficiaires demandent à ce que le Tribunal s’appuie sur les conclusions des rapports soumis (B-4 et B-5) et abonde dans le même sens que Monsieur Dagesse pour en tirer les conclusions soutenues par les Bénéficiaires, à savoir qu’il y a affaissement du mur latéral droit de la Propriété, et ordonner le pieutage de la maison.
[71] Compte tenu des demandes des Bénéficiaires et de la preuve administrée, le Tribunal ne peut faire fi des mentions suivantes contenues dans les deux (2) rapports de Monsieur Dagesse (pièces B-4 et B-5) et réitérées par le témoin lors de l’audience:
Ce rapport d’évaluation visuelle ne constitue en aucun cas une expertise approfondie pouvant être utilisée pour une action en justice ou pour témoignage de l’inspecteur.
(…)
Les défauts constatés peuvent nécessiter de la part du client de demander l’exécution d’une expertise plus détaillée pour connaître la cause du problème.
(…)
Le représentant peut seulement définir et expliquer la nature des travaux et des coûts reliés aux travaux. Il n’est pas un témoin expert sur les causes probables. (extrait du rapport du 18 décembre 2013, pièce B-5)
[72] Le Tribunal tient également compte, en ce qui concerne les propos de Me Edwards rapportés de part et d’autre, de la lettre du 21 novembre 2013 adressée aux parties par Me Jeffrey Edwards, alors avocat et arbitre, dont les extraits pertinents sont reproduits ci-dessous:
Dans cette affaire, l’audience et la visite des lieux ont eu lieu le 14 novembre 2013 à la résidence des Bénéficiaires.
L’arbitre a visité les lieux, examiné les endroits en jeu, et les parties ont exposé leurs prétentions et dans une certaine mesure, leurs preuves.
Les Bénéficiaires allèguent que la maison est affectée d’un problème de structure. Ils se réfèrent à un rapport de Héneault et Gosselin Inc. daté du 19 novembre 2012, soit un rapport préparé après la demande d’arbitrage. Cependant, l’auteur de ce rapport, Sylvain Dagesse, T.P. n’était pas présent à l’audience.
(…)
Selon l’avis du Tribunal d’arbitrage, le dossier n’est pas en état de procéder, en raison de l’absence de l’auteur du rapport produit par les Bénéficiaires et parce que ledit rapport n’est pas complet. Ainsi, l’existence d’un vice de structure n’est pas établie, mais il n’y a pas non plus de preuve permettant d’éliminer la possibilité d’un tel vice de structure.
Dans ces circonstances, le Tribunal d’arbitrage estime qu’il est juste d’accorder un délai d’un mois aux Bénéficiaires, soit jusqu’au 13 décembre 2013, pour qu’ils décident s’ils engagent un expert pour examiner l’état de leur immeuble, en particulier sa structure. (nos caractères gras)
[73] Avec égards, je suis d’avis que les rapports de Monsieur Dagesse de même que l’opinion exprimée à l’audience doivent être écartés.
[74] D’une part, les mentions citées ci-haut et contenues dans les deux (2) rapports du témoin sont claires quant à la valeur à donner à ceux-ci.
[75] D’autre part, j’estime que le témoin n’a ni l’expertise, tel qu’indiqué aux rapports, pour se prononcer sur la cause des problèmes dénoncés par les Bénéficiaires, ni le détachement requis d’un expert afin d’éclairer le Tribunal.
[76] Enfin, Monsieur Dagesse a lui-même indiqué que Héneault et Gosselin n’est pas un bureau de génie-conseils et qu’ils ont décidé de fournir un service d’évaluation technique suite à la demande récurrente de la clientèle. Ce n’est pas leur créneau, ni leur champ d’expertise.
[77] Pour ces motifs, les rapports B-4 et B-5 sont inadmissibles en preuve et le Tribunal n’en tient pas compte pour rendre sa décision.
[78] Par ailleurs, l’article 116 du Règlement permet au Tribunal de juger en équité lorsque les circonstances le justifient. Ainsi, avant de rendre jugement, le Tribunal a évalué la possibilité de procéder à une réouverture d’enquête et d’offrir aux Bénéficiaires la chance d’obtenir un rapport d’expert dans l’éventualité où ceux-ci auraient pu avoir été induits en erreur par les propos de Me Edwards. Toutefois, à la lumière des témoignages entendus et de la lettre de Me Edwards du 21 novembre 2013, le Tribunal ne croit pas que les propos de Me Edwards aient pu induire les Bénéficiaires en erreur. En effet, entre des versions contradictoires, je préfère comme étant plus probante celle corroborée par la lettre envoyée aux parties.
[79] En conséquence, le Tribunal procède à rendre jugement sur la foi de la seule preuve recueillie lors de l’audience.
[80] En ce qui concerne l’absence de visite des lieux par le nouveau Tribunal d’arbitrage, il m’apparaît pertinent de citer un extrait du procès-verbal de la conférence téléphonique tenue le 3 avril 2014 et dûment transmis à toutes les parties :
(…)
M. Lévesque a indiqué qu’il refuse qu’une visite des lieux soit faite le matin de l’audience. Compte tenu des conséquences que cela peut avoir et en toute équité pour Madame Leblanc qui était absente, le Tribunal réserve les droits des Bénéficiaires de demander une visite des lieux au Tribunal, au plus tard 48 heures avant la date de l’audience, par écrit, avec copie à toutes les parties;
(…)
[81] En aucun temps les Bénéficiaires n’ont demandé une telle visite des lieux. Conséquemment, l’absence de visite des lieux ne peut être imputée qu’au défaut des Bénéficiaires de l’avoir demandée.
[82] Conséquemment, à la lumière de la preuve soumise et pour les motifs qui suivent, le Tribunal rejette la demande des Bénéficiaires sur les quatre (4) points.
Point 1 : Fissure à la fondation au mur latéral droit
[83] Sur le point 1 relatif à la fissure au mur latéral droit, la dénonciation des Bénéficiaires est à l’effet que la fissure préexistante est revenue. Ils dénoncent également la présence d’un jour au haut de la porte latérale.
[84] Avec égards pour l’opinion contraire, le Tribunal estime que Monsieur Labelle a commis une erreur en estimant que Monsieur Pitre avait déjà décidé cette question et en rejetant, pour ce motif, la demande des Bénéficiaires. Au contraire, la décision de 2009 de Monsieur Pitre a plutôt invité les Bénéficiaires à s’adresser de nouveau à l’Entrepreneur et à l’Administrateur advenant une aggravation du problème ou une infiltration d’eau.
[85] Selon le témoignage de Monsieur Labelle, l’inspecteur Pitre lui aurait dit qu’à l’origine, la fissure consistait en une fissure de retrait. Il m’apparaît pour le moins étrange que Monsieur Pitre ait qualifié, dès 2008, la fissure à la fondation comme étant une fissure importante qui nécessitait de toute évidence une intervention et qu’en 2012, il puisse affirmer, toujours selon le témoignage de Monsieur Labelle, qu’il s’agissait d’une fissure de retrait.
[86] Sans remettre en cause le fait que Monsieur Pitre ait tenu les propos rapportés par Monsieur Labelle, le Tribunal estime qu’il ne peut accorder de valeur probante à cette affirmation qui qualifie la fissure puisque Monsieur Pitre n’était pas sur les lieux en 2012 pour s’assurer, d’une part, qu’il s’agit bel et bien de la même fissure et, d’autre part, vérifier s’il y a effectivement eu détérioration de la situation par rapport à celle d’origine. Également, le rapport de 2008 ainsi que celui de 2009 ne contiennent aucune photos, ni commentaires. Enfin, il s’agit de propos rapportés et au sujet desquels les Bénéficiaires n’ont pas eu l’opportunité de contre-interroger leur auteur. En conséquence, le Tribunal ne retient pas l’affirmation que la fissure d’origine était une fissure de retrait, sans toutefois en tirer une conclusion contraire, faute de preuve. D’ailleurs, aucune explication n’a été fournie sur la raison du colmatage de la fissure.
[87] Le Tribunal ajoute aussi qu’il ne voit aucune raison d’exclure la possibilité que ce qui aurait pu, au départ, sembler être une fissure de retrait puisse, par la suite, se révéler être d’une toute autre nature. Manifestement, les Bénéficiaires dénoncent une récurrence de la situation qui nécessitait une analyse plus approfondie qu’un simple renvoi à une décision déjà rendue. À cet égard, Monsieur Labelle aurait dû procéder lui-même à qualifier la situation qui lui était présentée, ce qu’il a omis de faire. Il a également omis de se prononcer sur le jour au haut de la porte. Le présent Tribunal doit donc décider de cette réclamation à la lumière de la preuve soumise.
[88] Selon la preuve entendue de même que la preuve documentaire, l’apparition de la fissure au mur latéral droit ayant eu lieu au cours de la première année suivant la réception de la Propriété, c’est la garantie la plus généreuse qui s’applique, soit la garantie contre les malfaçons. Ainsi, si la fissure qui se trouve au mur latéral droit résulte d’une malfaçon, celle-ci devra être réparée.
[89] Si, au contraire et tel que le soutient Monsieur Labelle, il s’agit d’une fissure de retrait exclue par le Règlement puisque résultant du comportement normal des matériaux, la réclamation sur ce point devra être rejetée.
[90] En l’espèce, le fardeau de démontrer que la fissure est réapparue et résulte d’une malfaçon repose sur les épaules des Bénéficiaires.
[91] Dans les faits, les Bénéficiaires n’ont apporté aucune preuve quant à la nature de la fissure, ni quant à la cause de celle-ci ou l’aggravation de la situation. La Bénéficiaire n’a rapporté aucune infiltration d’eau ni indiqué en quoi la situation s’était aggravée ou détériorée depuis le dernier rapport de Monsieur Pitre à ce sujet (2009).
[92] Les Bénéficiaires ont plutôt tenté de faire la preuve que la fissure est le résultat de l’affaissement de l’immeuble. Or, le rapport de Monsieur Dagesse a été rejeté de même que son témoignage d’opinion. Les Bénéficiaires n’ont soumis aucune autre preuve.
[93] Conséquemment, à défaut par les Bénéficiaires d’avoir produit quelque preuve que ce soit tendant à démontrer que la fissure résulte d’une malfaçon, le Tribunal se doit de constater l’absence de preuve de la part des Bénéficiaires à cet égard.
[94] Quant au jour au haut de la porte, rien dans les quelques décisions de Monsieur Pitre rendues en relation avec cette résidence et remises au Tribunal ne traitent de ce problème. Tout au plus, la décision du 1er octobre 2008 réfère à des travaux d’isolation du cadrage de la porte ordonnés dans le cadre de la décision du 16 avril 2008, laquelle n’a pas été déposée au dossier du Tribunal.
[95] De la même manière que pour le problème de la fissure au mur latéral droit, sous le seuil de cette même porte, les Bénéficiaires n’ont offert aucune preuve qui tende à soutenir leurs prétentions à l’effet que le jour est le résultat de l’affaissement de la maison.
[96] La preuve a plutôt démontré que de la mousse isolante a été ajoutée par les Bénéficiaires, ce qui pourrait avoir occasionné le problème dénoncé. Compte tenu de ce qui précède et considérant que le fardeau de la preuve appartient aux Bénéficiaires, le Tribunal se doit de rejeter la demande des Bénéficiaires quant au point 1.
Point 2 : galerie en façade : une (1) fissure
[97] Sur le point 2 traitant de la fissure à la galerie en façade, les Bénéficiaires ont tenté de démontrer que la fissure résultait de l’affaissement de l’immeuble. Ayant échoué sur cet aspect, ils devaient fournir une autre preuve convaincante afin de renverser la décision de l’Administrateur. La dénonciation ayant eu lieu au cours de la dernière année de garantie, la seule protection offerte et disponible concerne les vices majeurs.
[98] Avec égards pour l’opinion contraire, le Tribunal est d’accord avec la décision de l’Administrateur à l’effet qu’il ne s’agit pas d’un vice tel que la pérennité de l’immeuble est en péril. En conséquence, la réclamation des Bénéficiaires est rejetée.
Point 3 : porte principale
[99] En ce qui concerne le point 3, la preuve testimoniale a démontré que la porte principale n’est plus de niveau et ne ferme pas correctement. Selon le témoignage de la Bénéficiaire, la situation aurait été dénoncée antérieurement puisque l’Administrateur aurait rend une décision à ce sujet le 27 février 2009. Or, cette décision n’est pas déposée au dossier du Tribunal. En conséquence, le Tribunal doit considérer que le problème a été dénoncé plus de quatre ans et demi après la réception de la propriété et, conséquemment, la seule garantie applicable et disponible aux Bénéficiaires est celle contre les vices majeurs de nature à mettre en péril la pérennité de tout ou partie de l’immeuble.
[100] Compte tenu que la thèse de l’affaissement n’est pas validée, le seul fait que la porte ferme mal et ne soit pas de niveau, sans autre preuve ni explication plausible, est certes désagréable mais ne peut être considéré comme un vice majeur. Le Tribunal se doit de maintenir la décision de l’Administrateur et de rejeter la réclamation des Bénéficiaires sur ce point également.
Point 4 : finition intérieure
[101] Enfin, les Bénéficiaires ont dénoncé le fait que les portes miroirs de la garde-robe d’entrée ne sont pas de niveau et qu’une fissure est apparue au coin supérieur et s’étend jusqu’au plafond. Ce problème a été dénoncé plus de quatre ans et demi après la réception de la Propriété. Le Tribunal doit donc analyser la situation dénoncée à la lumière de la garantie contre les vices majeurs de construction.
[102] La thèse de l’affaissement étant rejetée, et faute par les Bénéficiaires d’avoir présentée une autre preuve, la demande des Bénéficiaires est également rejetée sur ce point.
[103] Tout comme le constatait Me Edwards dans l’extrait de lettre reproduit ci-haut, la preuve au dossier ne peut servir à établir un vice de structure, mais elle ne permet pas non plus de l’éliminer. Cependant, il appartenait aux Bénéficiaires de convaincre le Tribunal que la décision de l’Administrateur était mal fondée. Malheureusement, le rôle du Tribunal n’est pas d’établir la nature des problèmes dénoncés, ni d’en rechercher la cause. Ce rôle est celui des demandeurs, en l’occurrence les Bénéficiaires. Ces derniers se sont vu offerts la possibilité d’embaucher un expert et ils ont librement choisi de ne pas le faire. S’ils ont pu mal comprendre ce que Me Edwards leur a expliqué, ils n’ont toutefois pas été induits en erreur. Tribunal est forcé de rejeter la demande d’arbitrage dans sa totalité, faute de preuve.
[104] Le Tribunal prend acte du fait que les Bénéficiaires ne demandent pas le remboursement des frais de Héneault et Gosselin.
[105] Conformément à l’article 123 du Règlement, le Tribunal doit départager les frais d’arbitrage entre les Bénéficiaires et l’Administrateur lorsque les Bénéficiaires n’ont gain de cause sur aucun point. Considérant les circonstances particulières de la cause, il m’apparaît juste que les frais du présent arbitrage soient à la charge de l’Administrateur.
POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL D’ARBITRAGE :
REJETTE la demande d’arbitrage des Bénéficiaires;
ORDONNE que le coût du présent arbitrage soit défrayé par l’Administrateur conformément à l’article 123 du Règlement.
Montréal, ce 10 janvier 2015
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__________________________________ Me Karine Poulin, arbitre
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