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ARBITRAGE EN VERTU DU RÈGLEMENT SUR LE PLAN DE GARANTIE DES BÂTIMENTS RÉSIDENTIELS NEUFS (décret 841-98 du 17 juin 1998)
Organisme d'arbitrage autorisé par la Régie du bâtiment : Le Groupe d'arbitrage et de médiation sur mesure (GAMM)
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ENTRE : |
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Patrick Demers et Mathieu Vézina |
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(ci-après les « bénéficiaires »)
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ET : |
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Construction JPH inc. (en faillite) |
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(ci-après l'« entrepreneur »)
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ET : |
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La Garantie Habitation du Québec inc. |
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(ci-après l'« administrateur »)
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No dossier QH : 20 913-1 No dossier GAMM : 2006-08-004
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SENTENCE ARBITRALE
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Arbitre : |
M. Claude Dupuis, ing. |
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Pour les bénéficiaires : |
M. Patrick Demers |
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Pour l'administrateur : |
M. Sylvain Beausoleil |
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Date d’audience : |
7 décembre 2006 |
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Lieu d'audience : |
Sherbrooke |
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Date de la sentence : |
31 janvier 2007 |
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[1] À la demande de l'arbitre, l'audience s'est tenue à la résidence des bénéficiaires.
[2] L'entrepreneur, ayant cédé ses responsabilités à l'administrateur, n'était pas présent lors de l'audience.
[3] Il s'agit ici d'une propriété résidentielle située au 912, rue Henri-IV, à Sherbrooke, constituée de quatre parties privatives.
[4] Dans la nuit du 1er au 2 août 2006, l'eau s'est infiltrée par le dessous des deux fenêtres du sous-sol et a causé des dommages au plancher des deux chambres de l'appartement no 1; l'eau s'est de plus accumulée sur la dalle de béton et s'est infiltrée par la porte patio de l'entrée latérale.
[5] À la suite de cet incident, les bénéficiaires, en date du 13 août 2006, ont soumis une réclamation à l'administrateur.
[6] Le 12 septembre 2006, l'administrateur a émis son rapport de décision rejetant la demande des bénéficiaires, au motif que cette infiltration avait été causée par la pente du terrain arrière, laquelle dirige toutes les eaux de surface de ce terrain en direction du bâtiment.
[7] Insatisfaits de cette décision de l'administrateur, les bénéficiaires, en date du 3 octobre 2006, ont acheminé au GAMM leur demande d'arbitrage.
[8] Entre la date de la demande d'arbitrage, soit le 3 octobre 2006, et la date de l'audience dans la présente affaire, soit le 7 décembre 2006, les bénéficiaires ont fait effectuer les réparations suivantes :
B le drainage et l'imperméabilisation du solage par la firme Sylvain Tanguay, pour un montant de 8 945,08 $;
B le remplacement du plancher du sous-sol (appartement no 1) par le Centre du Tapis Couture, pour un montant de 3 175,60 $.
[9] Les bénéficiaires réclament donc auprès du tribunal le remboursement d'un montant de 12 120,68 $ pour travaux effectués.
[10] En cours d'enquête, en plus des représentants des parties, les personnes suivantes sont intervenues :
B M. Mathieu Vézina, bénéficiaire
B M. Michel Labelle, conciliateur
[11] Les parties ont accordé à l'arbitre un délai de soixante (60) jours à compter de la date d'audience pour rendre décision dans la présente affaire.
[12] À l'appui de son argumentation, le procureur de l'administrateur a soumis les autorités suivantes :
B Giroux et Thibault c. La Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l'APCHQ inc. et Les Habitations M.G./9067-0142 Québec inc., T. A., arbitre René Blanchet (CCAC), 2006-03-20.
B Lessard et Lok c. Habitations Serge Savard inc. et La Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l'APCHQ inc., T. A., arbitre Robert Masson (CACNIQ), 2001-11-15.
B Syndicat de la copropriété 5125 à 5131 des Ormes et 2157-2235 Québec inc. (Construction L. Max. enr.) et La Garantie Habitation du Québec inc., T. A., arbitre Claude Dupuis (GAMM), 2006-09-14.
[13] Une première infiltration d'eau s'était produite par les mêmes fenêtres en 2004, et l'administrateur, dans son rapport de décision du 27 septembre 2004, avait rejeté la réclamation des bénéficiaires en invoquant le même motif que dans le présent dossier, soit la pente du terrain arrière qui dirige les eaux de surface en direction du bâtiment.
[14] À la suite de cette première infiltration, l'administrateur a tout de même fait inspecter le drain par une firme spécialisée; en réponse à cette expertise, l'administrateur a confié à Mini-Excavation Beloeil inc. le mandat d'excaver le pourtour de l'immeuble afin de reprendre le drain français et de remettre les lieux dans leur état original.
[15] Une deuxième infiltration, qui fait l'objet du présent arbitrage, est survenue en août 2006; il n'y en a pas eu d'autres depuis.
[16] Les bénéficiaires admettent avoir fait remplacer en novembre 2006 le drain posé par Mini-Excavation Beloeil inc. et avoir fait réparer huit fissures dans le solage.
[17] Les bénéficiaires motivent cette action par le fait que leurs demandes auprès de l'administrateur ont toujours été refusées.
[18] Après avoir obtenu des soumissions en bonne et due forme, les bénéficiaires, de bonne foi, ont fait effectuer les travaux, estimant que leur locataire, qui habite l'appartement no 1, méritait un environnement sain.
[19] Les bénéficiaires soumettent qu'avec la venue imminente de l'hiver, ils craignaient que les conclusions de l'arbitrage exigent que les travaux ne soient effectués qu'au printemps 2007.
[20] L'administrateur rappelle au tribunal que le Règlement prévoit deux circonstances pour lesquelles les bénéficiaires peuvent demander un remboursement, soit lors d'un retard de livraison, soit pour des réparations conservatoires et urgentes.
[21] Selon le procureur de l'administrateur, il n'existe aucune preuve à l'effet que les réparations ne pouvaient être effectuées au printemps 2007; de fait, au printemps 2006, il n'y a pas eu d'infiltration.
[22] Selon l'administrateur, les bénéficiaires, en attente de la décision arbitrale, n'ont pas suivi la procédure. La dernière décision de l'administrateur est conforme au Règlement; l'incident du 1er août 2006 résulte d'un événement exceptionnel, en l'occurrence une pluie abondante, laquelle a été dirigée vers le bâtiment à cause du nivellement du terrain. Or, le terrassement est exclu du plan de garantie.
[23] Le procureur rappelle qu'antérieurement, l'administrateur a toujours répondu aux demandes des bénéficiaires; il ne comprend donc pas pourquoi ces derniers, cette fois-ci, ont procédé aux réparations sans faire appel à lui.
[24] Insatisfaits de la décision de l'administrateur datée du 12 septembre 2006, les bénéficiaires, en date du 3 octobre 2006, acheminent au GAMM une demande d'arbitrage.
[25] De consentement des parties, la date d'audience a été fixée au 7 décembre 2006.
[26] Entre-temps, soit en novembre 2006, sans en informer qui que ce soit, les bénéficiaires ont procédé au remplacement du drain, à la réparation de huit fissures sur le solage et au remplacement du recouvrement de plancher à l'appartement no 1 au sous-sol, le tout pour un montant de 12 120,68 $; c'est le remboursement de cette somme qui fait l'objet de la présente réclamation des bénéficiaires.
[27] Pour les bénéficiaires, ces réparations constituaient la solution totale, finale et définitive à l'infiltration d'eau.
[28] En matière de malfaçons, vices cachés ou vices de construction, les règles sont établies à l'article 10 du plan de garantie et se résument comme suit : « La garantie d'un plan dans le cas de manquement de l'entrepreneur à ses obligations légales ou contractuelles après la réception du bâtiment doit couvrir : [...] la réparation des vices et malfaçons apparents [...] la réparation des malfaçons existantes et non apparentes [...] la réparation des vices cachés [...] la réparation des vices de conception [...]. »
[29] En cas d'insatisfaction d'une décision de l'administrateur, le recours prévu au plan de garantie est l'arbitrage. L'article 20 du plan de garantie indique ce qui suit :
20. Le bénéficiaire, l'entrepreneur et l'administrateur sont liés par la décision arbitrale dès qu'elle est rendue par l'arbitre.
La décision arbitrale est finale et sans appel.
[30] Le plan de garantie ne prévoit en aucun cas le remboursement des frais engagés par le bénéficiaire si ce dernier, de son propre chef, procède à la réparation des malfaçons ou des vices.
[31] Le plan de garantie prévoit la réparation des malfaçons et des vices par l'entrepreneur et, à défaut de ce dernier, par l'administrateur.
[32] Les méthodes d'intervention pour corriger les malfaçons et les vices appartiennent à l'entrepreneur et, à défaut de ce dernier, à l'administrateur.
[33] Dans le présent dossier, les bénéficiaires ont déterminé eux-mêmes les méthodes d'intervention et ont procédé à la correction avant d'avoir obtenu la décision arbitrale.
[34] Toutefois, le plan de garantie prévoit, en deux circonstances, le remboursement des frais engagés par les bénéficiaires.
[35] En premier lieu, à l'article 9, le décret prévoit le remboursement des frais de relogement, déménagement et entreposage lorsqu'il y a retard dans la livraison du bâtiment; cette disposition ne trouve pas application dans le présent dossier.
[36] En second lieu, l'article 18.6° prévoit des remboursements pour des réparations conservatoires nécessaires et urgentes.
[37] Dans cette affaire, les bénéficiaires n'ont pas appliqué des mesures conservatoires; ils ont plutôt appliqué la solution qu'eux jugeaient comme finale.
[38] La preuve n'a pas démontré qu'il y avait urgence de procéder immédiatement dans le présent dossier.
[39] Les bénéficiaires craignaient qu'en attente de l'application de la décision arbitrale qui serait rendue en décembre 2006 ou janvier 2007, il puisse y avoir infiltration d'eau au printemps 2007.
[40] Or, la preuve a démontré qu'il n'y a jamais eu infiltration d'eau au cours des printemps antérieurs; les infiltrations se sont plutôt produites en été lors de pluies abondantes.
[41] D'autre part, sur le fond, la visite des lieux a clairement démontré que la pente du terrain arrière dirigeait les eaux de surface directement sur le bâtiment; on a pu constater de plus que les eaux de surface du terrain du voisin arrière étaient dirigées vers le terrain des bénéficiaires, augmentant ainsi le débit d'eau en direction de l'immeuble de ces derniers.
[42] Qui plus est, à l'approche du bâtiment, le terrain présente une pente raide et élevée, contribuant ainsi à accroître la vitesse d'écoulement de l'eau vers le système de drainage.
[43] Notons que l'administrateur avait dès septembre 2004 avisé les bénéficiaires de ces conditions anormales du terrain mais qu'aucune correction à cet égard n'a été apportée depuis.
[44] Notons de plus que selon l'article 12.9° du plan de garantie, les ouvrages situés à l'extérieur du bâtiment, tels que le terrassement, sont exclus de la garantie.
[45] La preuve a aussi démontré qu'en présence de manquement de l'entrepreneur à ses obligations, l'administrateur, depuis 2004, a toujours fait preuve de diligence dans le présent dossier et a toujours répondu aux demandes des bénéficiaires; dans ces circonstances, procéder avant la réception de la décision arbitrale n'était pas justifié.
[46] Pour les motifs ci-devant énoncés, la présente réclamation des bénéficiaires est REJETÉE par le tribunal.
[47] Je cite maintenant le deuxième alinéa de l'article 21 du Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs :
Lorsque le demandeur est le bénéficiaire, ces coûts sont à la charge de l'administrateur à moins que le bénéficiaire n'obtienne gain de cause sur aucun des aspects de sa réclamation, auquel cas l'arbitre départage ces coûts.
[48] En vertu des pouvoirs qui lui sont conférés par cet article, l'arbitre ORDONNE que les coûts du présent arbitrage soient défrayés à parts égales par les bénéficiaires et l'administrateur.
BELOEIL, le 31 janvier 2007.
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__________________________________ Claude Dupuis, ing., arbitre [CaQ] |