ARBITRAGE
En vertu du Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs
(Décret 841-98 du 17 juin 1998, tel qu’amendé, c. B-1.1, r.0.2,
Loi sur le bâtiment, Lois refondues du Québec (L.R.Q.), c. B-1.1, Canada) Groupe d’arbitrage Juste Décision – GAJD
ENTRE
CÉLINE BERNIER et GUILLAUME ROY-PROULX Bénéficiaires
Et
QUORUM HIGHLANDS INC.
Entrepreneur
Et
LA GARANTIE DE CONSTRUCTION RÉSIDENTIELLE (GCR) Administrateur
Nos dossiers / Garantie : 102388-1986
No dossier / GAJD : 20192105
No dossier / Arbitre : 35304-27
Arbitre | : | Me Pierre Brossoit |
Pour les Bénéficiaires | : | Céline Bernier |
Pour l’Entrepreneur | : | Pat Gagliardi et L. Rheault |
Pour l’Administrateur | : | Me Éric Provençal |
Date d’audience | : | Le 30 octobre 2019 |
Lieu | : | 800, du Square Victoria, bureau 4600, Montréal, Québec |
Immeuble concerné | : | [...], Montréal, arrondissement LaSalle |
Date de la décision | : | Le 19 novembre 2019 |
LES PIÈCES
[1] Les pièces produites par les Bénéficiaires sont les suivantes :
B-1:Plan de la maison sise au [...], à Montréal;
B-2 : Schéma d’aménagement de la Ville de Montréal, date d’entrée en
vigueur le 1er avril 2015;
B-3 : Compte foncier émis par la Ville de Montréal pour le [...] à Montréal;
B-4 : Permis de construction émis le 30 avril 2015 pour la construction des maisons du [...] au [...] à Montréal;
B-5 : Photos de la façade des immeubles [...] à [...] à Montréal.
[2] Les pièces produites par l’Administrateur sont les suivantes :
A-1: Contrat préliminaire signé par les Bénéficiaires et l’Entrepreneur le 2 juin 2018;
A-2: En liasse – résumé de la déclaration de copropriété et extraits des règlements de l’immeuble signés par les Bénéficiaires et l’Entrepreneur le 2 juin 2018;
A-3: Contrat de garantie signé par les Bénéficiaires et l’Entrepreneur le 2 juin 2019;
A-4: Formulaire d’inspection préréception signé par les Bénéficiaires et l’Entrepreneur le 21 août 2018;
A-5: Contrat de vente signé par les Bénéficiaires et l’Entrepreneur le 29 août 2018;
A-6: Formulaire de dénonciation des Bénéficiaires daté du 23 novembre 2018;
A-7: Formulaire de réclamation signé par les Bénéficiaires le 5 décembre 2018;
A-8: En liasse – courriel de l’avis de 15 jours transmis par l’Administrateur à l’Entrepreneur daté du 6 février 2019, auquel sont joints le formulaire de dénonciation des Bénéficiaires daté du 23 novembre 2018 déjà soumis en A-6, ainsi que l’avis de remise par courriel à l’Entrepreneur daté du 6 février 2019;
A-9: | En liasse – échange de courriels entre les Bénéficiaires, l’Administrateur et l’Entrepreneur datés des 21 (3), 22, 26 (3) et 29 mars 2019 auxquels sont joints un rapport détaillé de permis, des extraits des lignes directrices applicables aux nouveaux aménagements à proximité des activités ferroviaires, ainsi qu’une brève présentation desdites lignes directrices; |
A-10: | Courriel envoyé par l’Entrepreneur à l’Administrateur daté du 27 mars 2019 auquel est joint un rapport d’étude d’impact sonore de la circulation d’une voie ferrée vers une résidence située au [...] à Montréal; |
A-11: | L’état des renseignements d’une personne morale au Registre des entreprises du Québec de Quorum Highlands inc. daté du 10 juin 2019; |
A-12: | En liasse – Décision de l’Administrateur datée du 23 avril 2019 et l’accusé de réception de Postes Canada des Bénéficiaires daté du 26 avril 2019; |
A-13: | En liasse – Courriel de notification de l’organisme d’arbitrage daté du 22 mai 2019, auquel sont joints l’accusé réception et l’avis de demande d’arbitrage, la décision de l’Administrateur datée du 23 avril 2019 déjà soumise en A-12, le formulaire de demande d’arbitrage et le document de vulgarisation du centre d’arbitrage; |
A-14: | Curriculum vitae de M. Normand Pitre. |
[3] Les pièces produites par l’Entrepreneur :
E-1 : Document préparé par Quorum nommé « Proposition de développement résidentiel » et daté du 25 mars 2014;
E-2 : Avis public de la Ville de Montréal concernant l’entrée en vigueur des règlements 2098-LAS-174 et LAS-0014-11.
LES TÉMOINS
[4] Le Tribunal a entendu le témoignage des personnes suivantes :
Pour les bénéficiaires :
Céline Bernier
Pour l’administrateur :
Normand Pitre
Pour l’Entrepreneur :
Pat Gagliardi
Tien-Dat Vu, ingénieur
LES FAITS
[5] Le 2 juin 2018, est intervenu entre Céline Bernier et Guillaume Roy-Proulx (les « Bénéficiaires » et Quorum Highlands inc. (l’« Entrepreneur ») un contrat préliminaire pour l’achat par les Bénéficiaires d’un immeuble résidentiel sis au [...], à Montréal, arrondissement LaSalle (la « Résidence »);
[6] La Résidence fait partie d’un projet résidentiel développé par l’Entrepreneur à l’arrondissement LaSalle et nommé « Highlands LaSalle »;
[7] La Résidence fait partie d’un bloc de 7 ou 8 unités résidentielles de type « maison de ville »;
[8] La Résidence est située à moins de 300 mètres de l’emprise de la gare de triage ferroviaire du CP où circulent des trains de passagers exploitée par Exo (la ligne Candiac) et des trains commerciaux (la « Voie ferroviaire »);
[9] Le 29 août 2018, les Bénéficiaires ont acquis par acte notarié de l’Entrepreneur la Résidence;
[10] Dès la première nuit, les Bénéficiaires ont été réveillés par un bruit strident provoqué par le passage d’un train;
[11] Le 23 novembre 2018, les Bénéficiaires dénoncent par lettre (A-6) à l’Entrepreneur certains éléments dont ils sont insatisfaits en lien avec la construction de la Résidence, mais dont un seul item fait l’objet de la présente décision, soit :
Insonorisation insuffisance due à la proximité de la voie ferrée.
[12] Le 5 décembre 2018, les Bénéficiaires déposent une réclamation (A-7) auprès de l’Administrateur, afin qu’une décision soit rendue au sujet de la dénonciation (A6);
[13] Le ou vers le mois de janvier 2019, en prévision d’une décision de l’Administrateur, l’Entrepreneur mandate l’ingénieur Tien-Dat Vu de la firme Vinacoustik inc. pour réaliser une étude acoustique afin de déterminer l’impact sonore de la Voie ferroviaire;
[14] M. Vu explique en détail à son rapport (A-10) les tests acoustiques effectués en continu (24 heures) du 23 au 28 février 2019 à l’intérieur de la Résidence et en absence d’activité humaine;
[15] M. Vu conclut à son rapport que les mesures de bruit obtenu des tests acoustiques effectués en continu (24 heures), respectent les limites sonores fixées par le Schéma d’aménagement et de développement de l’agglomération de Montréal que l’on retrouve sous le titre « Les contraintes et nuisances »;
[16] Le 23 avril 2019, le conciliateur Normand Pitre, rejette par décision (A-12) la réclamation des Bénéficiaires;
[17] M. Pitre reprend à sa décision (A-12) plusieurs passages du rapport de M. Vu pour conclure que l’Entrepreneur n’a pas fait défaut de se conformer aux règles de l’art ou aux normes applicables;
[18] Le 21 mai 2019, les Bénéficiaires demandent l’arbitrage (A-13) de la décision de l’Administrateur (A-12);
LA PREUVE
[19] En audition, Mme Bernier explique que son sommeil est quotidiennement perturbé par le passage des trains commerciaux sur la Voie ferroviaire;
[20] Mme Bernier soumet qu’une étude acoustique aurait dû être conduite par
l’Entrepreneur avant la construction du projet résidentiel;
[21] Selon Mme Bernier, une telle étude aurait dévoilé à l’Entrepreneur la nécessité d’installer à certaines pièces de la Résidence, des fenêtres suffisamment insonorisées pour réduire, sous un seuil raisonnable, le niveau de bruit causé par les trains passant sur la Voie ferroviaire;
[22] M. Gagliardi, pour l’Entrepreneur, témoigne que l’Entrepreneur s’est conformé à toutes les normes en vigueur;
[23] Le 30 avril 2015, la Ville a d’ailleurs délivré à l’Entrepreneur son permis de construction pour la réalisation du projet, ce qui, selon lui, confirme que la construction de la Résidence est d’autre part conforme au Règlement de construction et de zonage de la Ville de Montréal, arrondissement LaSalle;
[24] D’autre part, les tests acoustiques effectués par l’expert Vu a confirmé que les résultats des calculs acoustiques respectent les limites sonores prévues au Schéma d’aménagement et de développement de l’agglomération de Montréal; QUESTION EN LITIGE
[25] En tenant compte de la proximité de la Voie ferroviaire, l’Entrepreneur a-t-il fait défaut de se conformer aux règles de l’art ou aux normes applicables au sujet de l’insonorisation des fenêtres de la Résidence?
[26] L’expert Vu soumet à son rapport que la limite sonore à l’intérieur d’une chambre à coucher ne devrait pas dépasser ce qui est prévu au Schéma d’aménagement et de développement de l’agglomération de Montréal (janvier 2015) et ci-après reproduit :
« 4.8.3.2 Occupation d’un terrain adjacent à une gare de triage ferroviaire
La réglementation d’urbanisme d’une municipalité ou d’un arrondissement doit prévoir qu’un terrain ou une partie de terrain situé à moins de 300 mètres de l’emprise d’une gare de triage ferroviaire indiquée à la carte 24-Réseaux ferroviaire et routier à fort débit et adjacent à cette emprise ne peut pas être occupé par un des usages sensibles énumérés à la section 4.8.3.1, si le niveau sonore, à l’intérieur du bâtiment ou de la partie du bâtiment dans lequel s’exerce l’usage, est supérieur à 40 dBA Leq (24 h) ou par un espace de détente au sol à l’extérieur du bâtiment si le niveau sonore est supérieur à 55 dBA Leq (24 h). »
[27] À l’audition, l’expert Vu soumet cependant que ces limites ne sont qu’à titre informatif, sans contrainte pour un entrepreneur;
[28] Les mesures de bruit effectuées par l’expert Vu durant la semaine du 23 au 28 février 2019, à l’intérieur de la chambre à coucher de la Résidence, ont fluctué entre 31.7 et 32.3 dBA (journée de fin de semaine) et 31.0 et 33.5 dBA (journée de semaine), soit en deçà de la limite de 40 dBA mentionnée ci-avant à l’article 4.8.3.2;
[29] Le Tribunal note toutefois que durant la période étudiée du 23 au 28 février 2019, de 23h00 à 07h00, le niveau sonore à l’intérieur de la chambre à coucher a été à 12 occasions supérieur à 40 dBA, variant de 40 dBA à 53 dBA (A-10, Annexe 4, p. 41 à 53);
[30] Malgré ce constat, le Tribunal n’a aucun indice d’une infraction de l’Entrepreneur au Code national du bâtiment ou à toute autre norme applicable dans les circonstances;
[31] Les Bénéficiaires n’ont pas su démontrer un manquement de l’Entrepreneur à ses obligations légales et contractuelles envers les Bénéficiaires et dont le fardeau de la preuve leur incombait;
[32] Conséquemment, le Tribunal rejette la réclamation des Bénéficiaires;
[33] La conclusion à laquelle en arrive le Tribunal n’a cependant pas pour effet de limiter les Bénéficiaires de leur droit, le cas échéant, au dépôt d’une plainte auprès de l’Office des transports du Canada et/ou d’un recours auprès de la municipalité concernée, pour que soient mises en place des mesures d’atténuation du bruit causé par l’activité ferroviaire près de la Résidence des Bénéficiaires;
LES FRAIS D’ARBITRAGE
[34] Conformément à l’article 123 du Règlement, les frais du présent arbitrage sont à la charge de l’Administrateur.
POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL D’ARBITRAGE :
REJETTE la réclamation des Bénéficiaires;
ORDONNE que les frais d’arbitrage du présent arbitrage soient payés en totalité par l’Administrateur.
À Montréal, le 19 novembre 2019
Me Pierre Brossoit, arbitre