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ARBITRAGE EN VERTU DU RÈGLEMENT SUR LE PLAN DE GARANTIE DES BÂTIMENTS RÉSIDENTIELS NEUFS

(Décret 841-98 du 17 juin 1998)

(Loi sur le bâtiment, L.R.Q., c. B-1.1)

 

Organisme d’arbitrage autorisé par la Régie du bâtiment : Société pour la résolution des conflits inc. - SORECONI

 

 

ENTRE :

 

Syndicat de copropriété 4767 à 4827 8e Avenue et 3189 rue Claude-Jodoin

 

 

 

 

 

                   (ci-après « le Bénéficiaire »),

 

 

 

ET :

 

St-Luc Habitation inc.

 

 

                   (ci-après « L’Entrepreneur »),

 

 

 

ET :

 

La Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ inc.

 

 

                   (ci-après « L’Administrateur »).

 

 

 

No dossier SORECONI : 09 1221002

 

 

 

 

DÉCISION ARBITRALE

 

 

Arbitre :

 

Me Albert Zoltowski

 

 

 

Pour le Bénéficiaire :

 

Monsieur Jeremy Wisniewski

 

 

 

Pour l’Entrepreneur :

 

Me Michel Seméteys

 

 

 

Pour l’Administrateur :

 

Me François Laplante


 

 

 

Date de la décision :

 

21 décembre 2010

 

 

Identification complète des parties:

 

 

 

Arbitre :

 

Me Albert Zoltowski

1010, de la Gauchetière Ouest

Bureau 950

Montréal (Québec) H3B 2N2

 

 

 

Bénéficiaire :

 

Syndicat de copropriété 4767 à 4827, 8e Avenue et 3189 rue Claude-Jodoin

Montréal (Québec) H1Y 3P3

 

À l’attention de monsieur Benoît Gaudet

 

 

 

Entrepreneur :

 

St-Luc Habitation inc.

8000, boulevard Langelier

Montréal (Québec) H1P 3K2

 

À l’attention de : Monsieur Patrick Varin, président

 

 

 

Administrateur :

 

La Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ inc..

5930, boul. Louis-H.-Lafontaine

Anjou (Québec) H1M 1S7

 

À l’attention de Me François Laplante

 

 

Mandat :

 

L’arbitre a reçu son mandat de la Société pour la résolution de conflits inc. (SORECONI) le 21 décembre 2009.

 

 

Historique partiel du dossier :

 

24 avril 2009 :

Lettre du Bénéficiaire à l’Administrateur, avec copie à l’Entrepreneur, concernant les fissures au mur de soutènement des garages;

 

 

13 mai 2009 :

Lettre de demande du Bénéficiaire à l’Entrepreneur, avec copie à l’Administrateur;

 

 

4 juin 2009 :

Lettre de l’Entrepreneur au Bénéficiaire, avec copie à l’Administrateur concernant les correctifs proposés;

 

 

6 août 2009 :

Inspection supplémentaire du bâtiment par l’Administrateur;

 

 

11 août 2009 :

Rapport d’expertise de la firme ProspecPlus mandatée par le Bénéficiaire;

 

 

12 août 2009 :

Lettre du Bénéficiaire à l’Entrepreneur avec une copie du rapport d’expertise de la firme ProspecPlus;

 

 

30 septembre 2009 :

Lettre de l’Entrepreneur au Bénéficiaire concernant le mur contre le gel (frost pit) et autres sujets;

 

 

7 octobre 2009 :

Décision de l’Administrateur;

 

 

20 octobre 2009 :

Lettre du Bénéficiaire à l’Entrepreneur (objet : lettre de St-Luc Habitation du 30 septembre 2009 et décision de l’APCHQ du 7 octobre 2009);

 

 

5 novembre 2009 :

Lettre de l’Entrepreneur à l’Administrateur avec copie au Bénéficiaire maintenant sa proposition du 4 juin 2009 et constatant le manque d’accès au bâtiment;

 

 

12 novembre 2009 :

Lettre du Bénéficiaire à l’Administrateur avec copie à l’Entrepreneur concernant la décision du 7 octobre 2009 et la lettre de l’Entrepreneur du 5 novembre 2009;

 

 

18 novembre 2009 :

Lettre de l’Administrateur à l’Entrepreneur, avec copie au Bénéficiaire;

 

 

18 novembre 2009 :

Lettre de l’Administrateur au Bénéficiaire l’enjoignant d’autoriser l’Entrepreneur à effectuer les travaux de correction;

 

 

14 décembre 2009 :

Réception par l’organisme d’arbitrage SORECONI de la demande d’arbitrage du Bénéficiaire;

 

 

21 décembre 2009 :

Nomination de l’arbitre;

 

 

14 janvier 2010 :

Réception par le tribunal d’arbitrage du cahier de pièces de l’Administrateur;

 

 

19 janvier 2010 :

Avis d’audience préliminaire aux parties;

 

 

25 janvier 2010 :

Audience préliminaire par voie téléphonique;

 

 

9 février 2010 :

Avis d’audience;

 

 

8 mars 2010 :

Audience;

 

 

9 mars 2010 :

Réception par le tribunal d’arbitrage de la jurisprudence supplémentaire de l’Administrateur;

 

 

9 mars 2010 :

Réception par le tribunal d’arbitrage de la jurisprudence du procureur de l’Entrepreneur;

 

 

11 mars 2010 :

Courriel du représentant du Bénéficiaire «aucun commentaire additionnel»;

 

 

27 avril 2010 :

1ère Décision arbitrale (délai du dépôt de la demande d’arbitrage et compétence de l’arbitre);

 

 

20 mai 2010 :

Avis d’audience;

 

 

6 juillet 2010 :

Visite des lieux et audience;

 

 

7 juillet 2010 :

Avis d’audience;

 

 

9 juillet 2010 :

Audience;

 

 

23 juillet 2010 :

Avis d’audience;

 

 

13 septembre 2010 :

Audience;

 

 21 décembre 2010 :    2e  Décision arbitrale (mesures correctives).

 

 

 

DÉCISION

 

Introduction

 

[1]           Lors de la 1ère audience du 8 mars 2010 les parties ont convenu de débattre uniquement les questions du délai de dépôt de la demande d’arbitrage par le Bénéficiaire et de la compétence de l’arbitre à ordonner des mesures correctives spécifiques à l’Entrepreneur. Ces questions ont été résolues par une 1ère décision arbitrale datée du 27 avril 2010.[1] Puisque selon cette 1ère décision arbitrale le Bénéficiaire a respecté le délai de dépôt de sa demande prévu par le Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs[2] (ci-après appelé le « Règlement ») et l’arbitre soussigné a statué qu’il possède la compétence d’ordonner à l’Entrepreneur d’effectuer des travaux correctifs spécifiques - les parties ont convenu de soumettre à l’arbitre soussigné (ci-après appelé également le «  tribunal arbitral » ou « le tribunal») 2 méthodes correctives spécifiques en lui demandant de déterminer celle qui serait la plus appropriée dans les circonstances.

 

[2]           Une visite des lieux et une audience ont eu lieu le 6 juillet 2010 et ensuite le 9 juillet 2010 au Palais de justice de Montréal. Une 3e audience a été tenue le 13 septembre 2010 à l’Hôtel Champlain Marriott également à Montréal.

 

[3]           Les personnes qui ont assisté à ces audiences étaient :

 

a)    Monsieur Jeremy Wisniewski, le mandataire du Bénéficiaire;

b)    Monsieur Benoît Gaudet, le président du Bénéficiaire;

c)    Monsieur Claude Guertin, ingénieur;

d)    Me Michel Seméteys, le procureur de l’Entrepreneur;

e)    Monsieur Patrick Varin, le représentant de l’Entrepreneur;

f)     Monsieur Sylvain Parr, ingénieur

g)    Me François Laplante, le procureur de l’Administrateur, et

h)    Monsieur Yvan Mireault, architecte et inspecteur-conciliateur au Service de conciliation de l’Administrateur.

 

Preuve du Bénéficiaire

 

Monsieur Benoît Gaudet - témoin

 

[4]           Monsieur Gaudet est propriétaire d’une unité de condominium faisant partie du bâtiment portant les adresses civiques 4767 à 4827, 8e Avenue et 3189, rue Claude-Jodoin à Montréal (« le bâtiment ») et le président du Bénéficiaire.

 

[5]           Il était un des premiers copropriétaires à aménager dans ce bâtiment en juillet 2003.

 

[6]           Il a personnellement vu certaines phases de la construction du bâtiment et il a pris des photos, y compris celles portant les numéros 6.1, 6.2 et 6.3 qui apparaissent dans le premier rapport d’expert de ProspecPlus  du 11 août 2009 (pièce A-5) commandé par le Bénéficiaire.

 

[7]           Il raconte qu’au printemps 2004, l’Entrepreneur a effectué des travaux de paysagement en arrière du bâtiment sur des terrains qui sont devenus les jardins des copropriétaires. Afin d’assécher la partie arrière de tous ces terrains qui étaient très humides, il a ajouté de la terre aux endroits imbibés d’eau haussant ainsi le niveau des mêmes terrains. Ensuite, il a nivelé ces terrains. Ce faisant il a créé une pente qui descendait vers le mur de soutènement, plutôt qu’en sens inverse.

 

[8]           Le témoin a observé que depuis que ces travaux ont été effectués, l’eau des jardins se dirige vers le mur de soutènement.

 


[9]           Il a observé les premières fissures au mur de soutènement au printemps 2004. Il réfère à la décision de l’Administrateur datée du 5 septembre 2006 qui reconnaît que ces fissures rencontrent les critères d’un vice caché. Dans cette décision, l’Administrateur ordonne à l’Entrepreneur d’apporter les correctifs requis afin d’assurer la solidité et la stabilité structurales du mur de soutènement et de la structure d’acier supportant les terrasses. Cette structure d’acier repose sur ce mur.

 

[10]         Il réfère également aux réparations qui ont été effectuées par l’Entrepreneur entre le 13 septembre 2006 et le 31 octobre 2006 : des plaques de métal ont été posées sur la partie verticale du mur (côté des garages), la base des colonnes en acier a été renforcée avec des plaques en métal plus larges et des boulons plus gros, et les colonnes en acier supportant des poutres en acier ont été renforcées avec des contreventements.

 

[11]         Il raconte que les escaliers menant aux balcons des 8 unités ont bougé à cause de l’inclinaison du mur de soutènement. Au printemps 2007, l’Entrepreneur a redressé 6 des 8 escaliers conformément à l’ordonnance de l’Administrateur dans sa décision du 28 novembre 2006. Malgré ces réparations, tous les escaliers ont continué à bouger.

 

[12]         Ensuite, le témoin réfère à une aggravation majeure d’une demi-douzaine de fissures sur le dessus du mur et en dessous des plaques en acier sur lesquelles s’appuient les colonnes. Cette aggravation est survenue au printemps 2009.

 

[13]         À la même période, des nouvelles fissures sont apparues sur la partie verticale du mur. Une autre fissure est également apparue sur la fondation du bâtiment en dessous de l’unité du témoin, pas loin de la jonction entre la fondation et la partie arrière du mur de soutènement.

 

[14]         Ensuite le témoin révise l’historique de la dénonciation de ces problèmes depuis avril 2009 à l’Administrateur et à l’Entrepreneur, de son échange de correspondance avec eux, de la méthode corrective proposée par l’Entrepreneur pour la première fois le 4 juin 2009 (pièce A-3), du mandat qu’il a confié à ProspecPlus en juin 2009 afin de vérifier cette méthode corrective, de la décision de l’Administrateur du 7 octobre 2009 et celle du 18 novembre 2009 et finalement de sa demande d’arbitrage de cette dernière décision de l’Administrateur.

 

[15]         Il explique que la méthode corrective qu’il demande maintenant à titre de président du Bénéficiaire est la réfection du mur de soutènement plutôt que sa réparation. Cette méthode corrective est nécessaire pour préserver le bâtiment et conserver sa valeur. Le bâtiment est neuf et possède une qualité structurale et esthétique qui doit être conservée.

 


[16]         Il mentionne que non seulement le mur existant devrait être démoli et un nouveau mur devrait être rebâti à sa place, mais que des travaux de remise en état des lieux, y compris les aménagements paysagers dans tous les jardins des copropriétaires, devraient être effectués. Ces aménagements paysagers seraient sérieusement affectés par les travaux correctifs du mur. Après les travaux sur le mur, les lieux devraient être remis en même état que leur état actuel.

 

[17]         Il dépose en preuve (comme pièce B-10) 2 factures de la firme ProspecPlus. La 1ière, datée du 23 juin 2009 est pour un montant de 450 $ (plus TPS et TVQ) faisant  un total de 507,94 $ pour une inspection et une 2e facture est datée du 5 août 2009 pour la rédaction d’une expertise. Le montant de la 2e facture est de 1 100 $ (plus TPS et TVQ résultant en un total de 1 241,63 $). Le témoin indique qu’il transmettra d’autres factures de ProspecPlus  lorsqu’il les recevra.

 

[18]         En contre-interrogatoire, le témoin reconnaît que l’Entrepreneur répondait toujours aux lettres que lui adressait le Bénéficiaire. Il intervenait et procédait aux réparations demandées malgré le fait que il fallait attendre assez longtemps avant qu’elles soient réalisées. L’Entrepreneur n’a pas procédé aux mesures correctives ordonnées par l’Administrateur dans sa décision du 7 octobre 2010.

 

Monsieur Claude Guertin - témoin

 

[19]         Le prochain témoin du Bénéficiaire est monsieur Claude Guertin, bachelier en génie civil. Après un court interrogatoire suivi d’un contre-interrogatoire sur sa formation, son champ de pratique et son expertise en structure de bâtiment, le tribunal l’a reconnu comme un témoin-expert. Il décrit le mandat que sa firme ProspecPlus  a reçu de monsieur Gaudet, le représentant du Bénéficiaire. Il s’agissait de vérifier les mesures correctives proposées par l’Entrepreneur dans sa lettre du 4 juin 2009. Dans le doute, de déterminer les causes des déficiences du mur et d’établir les mesures correctives nécessaires pour régler le problème.

 

[20]         Une inspection du bâtiment avec prise de photos (à l’exception des photos 6.1, 6.2 et 6.3 fournies par monsieur Gaudet) a été effectuée par monsieur Simon Gosselin, qui est ingénieur et un collègue du témoin, le 23 juin 2009. Tous les deux travaillent pour ProspecPlus. Monsieur Gosselin a aussi colligé l’information qui lui a été communiquée par le Bénéficiaire et qui se trouve dans le rapport du 11 août 2009. Monsieur Gosselin a demandé au Bénéficiaire de voir les plans du mur mais ce dernier ne les avait pas en sa possession.

 

[21]         Le témoin a visité le bâtiment et observé le mur pour la première fois lors de la visite des lieux par l’arbitre soussigné en compagnie des procureurs et de tous les témoins, immédiatement avant l’audition du 7 juillet 2010.

 

[22]         Selon le témoin, le mur était bien planifié.

 

[23]         Avec le temps, il s’est incliné sur toute sa longueur vers l’allée de garage. À des endroits, cette inclinaison est de 1 ¾ de pouce sur une hauteur du mur qui dépasse l’allée asphaltée du garage de quelque 5 pieds et 6 pouces. Cette inclinaison est, selon le témoin, très sérieuse et elle continuera de s’aggraver.

 

[24]         De plus, le mur présente des fissures structurales majeures. Selon lui, ces fissures continueront également à se détériorer.

 

[25]         Le témoin qualifie le mur dans son état actuel (il est incliné et fissuré) comme un « ouvrage handicapé ».

 

[[26]        La cause de ces problèmes est le remblai gélif  et un mauvais drainage des terrains des copropriétaires du bâtiment. En hiver ce remblai exerce une poussée contre le mur.

 

[27]      Comme mesure corrective, le témoin recommande que le mur soit démoli et qu’un nouveau mur soit érigé à sa place. Il dépose en preuve (comme pièces B-11 et B-12) deux schémas qui démontrent un nouveau mur de soutènement en béton armé de 10 pouces de largeur reposant sur une nouvelle semelle en béton armé ayant les mêmes dimensions que la semelle existante et ancrée à cette dernière. Des supports en béton armé en forme de triangles et reliés au nouveau mur reposeraient sur la nouvelle semelle et s’élèveraient jusqu’à la surface des terrains. Il recommande l’installation d’un tel support derrière chaque colonne en acier qui repose sur le mur actuel et soutient la structure des balcons. Le but de ces supports triangulaires serait d’assurer la solidité et la stabilité du nouveau mur et lui permettraient d’être plus mince (10 pouces de largeur plutôt que 12 pouces).

 

[28]         Selon le témoin, ce qui reste à déterminer est la grosseur des pierres constituant le futur remblai et la méthode de raccordement du drain français, soit au drain des fondations, au système d’égouts pluviaux de la ville ou à un nouveau puits de captation.

 

[29]         Lors de son contre-interrogatoire par le procureur de l’Entrepreneur, l’expert Guertin reconnaît que l’expertise initiale en date du 11 août 2009 (pièce A-5) qu’il a signée et qui est basée sur les observations de son collègue, l’ingénieur Simon Gosselin, était fondée sur des hypothèses dont certaines se sont révélées fausses lorsque les trois puits d’exploration ont été creusés à la demande de l’expert de l’Entrepreneur en été 2010. Dans ce rapport (pièce A-5), le témoin reconnaît comme étant fausse, l’hypothèse que la semelle existante du mur était trop étroite et n’était pas enfouie à une profondeur suffisante pour être protégée contre le gel. Il explique l’inexactitude de cette hypothèse par le fait que lors de l’inspection précédant la rédaction de ce rapport (pièce A-5) par son collègue l’ingénieur Gosselin, ce dernier n’avait pas accès aux plans du mur de soutènement et, malgré sa recommandation de creuser un puits d’exploration, aucun puits n’a  été creusé.

 

[30]         Il reconnaît également que le plan du mur actuel qui fait partie de ce 1er rapport (pièce A-5) est inexact.

 

[31]         Questionné sur les normes de construction régissant la verticalité d’un mur de soutènement, l’expert Guertin affirme que l’inclinaison actuelle du mur dépasse ces normes. Il réfère au « critère de flèche » prévu au sous paragraphe 9.4.3.1 du Code national du bâtiment - Canada 1995 qui, selon lui, s’applique à tout ouvrage de construction. Selon son calcul, le fléchissement du mur du Bénéficiaire ne doit pas dépasser 1/16 de 1 pouce.

 

Preuve de l’Entrepreneur

 

Monsieur Sylvain Parr - témoin

 

[32]         Monsieur Sylvain Parr témoigne pour l’Entrepreneur. Il possède une maîtrise en génie civil et travaille depuis 20 ans uniquement dans le domaine de la structure. Selon son curriculum vitae produit en preuve, il a déjà agi comme assistant à l’enseignement dans un cours en génie et il est co-auteur de deux publications spécialisées. Le tribunal le reconnaît comme un témoin-expert.

 

[33]         L’Entrepreneur lui a confié le mandat de commenter le rapport initial de ProspecPlus  du 11 août 2009 (pièce A-5) et de lui suggérer une solution de réparation du mur.

 

[34]         Le témoin a demandé que trois puits d’exploration soient creusés le long du mur soit, deux puits du côté de l’allée des garages et un puits du côté des terrains des copropriétaires. Le but de ces puits était de vérifier la largeur et la profondeur de la semelle. Advenant que la semelle était inadéquate, la réparation du mur serait impossible.

 

[35]         Le témoin dépose en preuve 20 photos comme pièce E-2 (en liasse). La photo no 5 de la pièce E-2 démontre la présence de l’eau à une profondeur de 30 cm de profondeur en dessous de l’allée asphaltée du garage. Le témoin ne connaît pas la provenance de cette eau.

 

[36]         Étant donné que le remblai vis-à-vis le mur du côté des terrains consiste en des matériaux cohésifs et gélifs, il opine que la cause de l’inclinaison du mur et des fissures est due à la poussée latérale par le remblai gélif sous l’effet du gel.

 

[37]         Il déclare que malgré les trois puits d’exploration, il n’a pas vu de drain français près du mur. Il ne sait pas si un tel drain existe. S’il existe, ce serait important de savoir s’il est fonctionnel et bien raccordé à un système de drainage.

 


[38]         Selon lui, le mur n’a pas besoin d’être démoli. Il peut être réparé. Il réfère à son rapport daté du 21 juin 2010 ( pièce E-1) avec six dessins identifiés comme SK-01 à SK-06 y annexés. Il explique la nature des réparations décrites dans son rapport. Essentiellement ces réparations consisteraient à construire des pilastres en béton armé dont les dimensions seraient de 12 pouces x 12 pouces. Ils reposeraient sur la semelle existante du mur. Il y aurait 14 pilastres en tout, soit un derrière chaque colonne en métal qui repose sur le mur et un pilastre entre chacune de ces colonnes. Ils seraient reliés au mur et à la semelle avec de l’armature.

 

[39]         Il déclare que malgré la hauteur de ces pilastres (voir le dessin SK-05 de la pièce E-1) ils peuvent être un peu plus courts que sur son dessin. Ils pourraient être complètement enfouis sous le sol (du côté des terrains) et s’arrêter à 8 pouces de la surface des terrains.

 

[40]         Sous le titre « Recommandations » dans son rapport (pièce E-1) on lit ce qui suit :

 

                  «Recommandations :

 

                  Nous recommandons donc de procéder aux travaux suivants :

 

1.    Enlèvement des sols tout venant cohésifs du côté jardin pour les remplacer par des sols non gélifs et drainants.

2.    L’ajout d’un drain français.

3.    L’ajout de pilastres de renfort pour stabiliser le mur existant.

4.    L’ajout de barbacanes au niveau de la voie d’accès.

5.    La réparation du béton du mur vis-à-vis les colonnes d’acier et la modification des bases de colonnes pour les désolidariser du mur (trous oblongs et autres).

 

                  Voir les croquis SK-04 et SK-05 et SK-06. »

 

[41]         En ce qui concerne la réparation des fissures verticales et diagonales qui apparaissent sur le pan vertical du mur du côté des garages, il déclare que les plaques en métal qui les recouvrent présentement pourraient être enlevées et les fissures pourraient être bouchées avec une colle spéciale. Les plaques en métal n’auraient pas besoin d’être remises en place après ces réparations.

 

[42]         Les fissures sur le dessus du mur à proximité des colonnes d’acier devraient être réparées en y injectant de l’adhésif et en y coulant du nouveau béton.

 

[43]         Des barbacanes devraient être percées à travers le mur à tous les 8 à 10 pieds à 1 ou 2 pouces de l’asphalte de l’allée des garages (voir SK-05 de la pièce E-1).

 

[44]         Il recommande également que l’extérieur du mur (du côté des terrains) devrait être recouvert d’une membrane imperméabilisante jusqu’à la semelle.

 

[45]         Il reconnaît que présentement le mur est endommagé mais les nouveaux pilastres seraient capables de prendre 100% de la poussée latérale exercée contre  le mur.

 

[46]         Quant à la solidité du mur, une fois renforcé par les pilastres, il serait aussi solide que s’il était neuf.

 

[47]         Sa solidité ne serait pas affectée par les fissures, une fois qu’elles auraient été réparées.

 

[48]         Esthétiquement, ces fissures une fois réparées demeureront toujours visibles. Pour les cacher, une des méthodes possibles serait de les recouvrir de crépis (du côté des garages).

 

[49]         En contre-interrogatoire par monsieur Gaudet, le représentant du Bénéficiaire, le témoin affirme qu’il n’existe pas de norme de construction qui régit la verticalité d’un mur de soutènement. Il déclare que l’inclinaison du mur de soutènement, après sa réparation, n’aurait pas d’impact sur sa solidité.

 

[50]         Il ne sait pas si le mur deviendra droit lorsque toute la terre (du côté des terrains des co-propriétaires) sera excavée lors de l’installation du drain français. De toute façon, son opinion est à l’effet que l’inclinaison du mur a peu d’importance au niveau esthétique ou fonctionnel. Selon lui, l’espace d’usage du côté des garages ne sera pas diminuée à cause de cette inclinaison.  

 

[51]         Il opine que l’angle de pente des terrains touchant le mur ne pose pas un problème majeur. L’eau sera bien drainée avec un bon remblai.

 

[52]         Il reconnaît qu’il n’a pas procédé à mesurer la quantité d’eau qui se drainait des terrains. Dans son rapport (pièce E-1), il ne corrige pas l’angle des pentes des terrains. Il ajoute que le drainage ne fait pas partie de son mandat et qu’il n’a pas d’expertise concernant cette pente de terrassement.

 

[53]         En ce qui concerne les fissures sur la partie verticale du mur, il réitère qu’une fois colmatées, elles ne poseront plus de problèmes. Toutefois, il précise que la dernière fissure verticale qui se trouve au bout de l’allée des garages et qui est présentement recouverte d’une plaque d’acier est plus importante que les autres fissures verticales. Avant qu’elle soit réparée, il recommande de faire une vérification additionnelle pour voir si un support ou armature additionnels sont  requis ou non.

 

[54]         Il déclare qu’il travaille sur une centaine de murs par année. Il ne connaît pas l’effet qu’aurait l’eau qui se trouve sous l’allée asphaltée du garage si elle gelait et rentrait dans une fissure verticale du mur (côté garages).

 

[55]         Il recommande qu’une membrane soit collée au mur de soutènement (côté des terrains) jusqu’à la semelle afin de l’imperméabiliser. Le coût de cette membrane doit être ajouté à l’évaluation faite par l’Entrepreneur (pièce E-3).

 

[56]         Il ne sait pas si l’armature actuelle à l’intérieur du mur de soutènement où se trouvent présentement les fissures s’est dégradée ou pas. Il ne voit pas la nécessité d’ajouter l’armature aux endroits fissurés à l’exception peut-être de la fissure verticale au bout de l’allée des garages, qu’il qualifie de plus importante, qui devra être vérifiée par un spécialiste.

 

[57]         Il répète qu’une fois que le mur sera réparé selon la méthode qu’il préconise, il sera aussi solide que s’il était neuf.

 

[58]         Quant à la fissure dans le mur de fondation à proximité de l’unité de condominium de monsieur Gaudet, le témoin opine qu’elle a été causée par la poussée du mur de soutènement.

 

[59]         Il ne donne pas d’opinion quant à la façon précise dont le nouveau drain français, dont il recommande l’installation, devrait être raccordé. Il affirme qu’il s’agit d’une question qui reste à déterminer.

 

[60]         Pour ce qui est de la nature exacte du remblai non gélif qui doit remplacer le sol tout venant du côté des terrains, il affirme qu’un autre expert doit la déterminer.

 

[61]         Selon lui, la réparation du mur aurait moins d’impact que sa réfection car tout le travail d’excavation pour l’installation des pilastres, le remplacement du remblai gélif par un remblai non gélif et drainant, l’installation du drain français, etc. serait fait seulement d’un côté du mur, soit du côté des terrains.

 

[62]         Quant à  l’aspect esthétique de sa solution, il déclare que si du crépis est appliqué pour cacher les fissures après leur réparation, il pourrait se fissurer advenant l’apparition de nouvelles fissures. Selon lui, un architecte serait un spécialiste plus approprié que lui pour recommander si le crépis ou une peinture spéciale devraient être utilisés pour cacher ces fissures après leur réparation.

 

[63]         Il explique qu’une des façons de désolidariser du mur les plaques qui supportent les colonnes en acier serait de permettre à chacune de ces plaques de glisser sur le mur entre deux nouvelles plaques qui seraient fixées sur chaque côté d’une plaque existante.

 

Preuve de l’Administrateur

 

Monsieur Yvan Mireault - témoin

 

[64]         L’unique témoin de l’Administrateur est monsieur Yvan Mireault de son Service de conciliation. Il est l’auteur des décisions de l’Administrateur du 7 octobre 2009 et  du 18 novembre 2009.

 

[65]         Lorsque ce témoin a commencé à rendre un témoignage d’opinion sur la ou les méthodes de raccordement du drain français, le Bénéficiaire s’est objecté à ce témoignage en raison du fait que monsieur Mireault ne témoignait pas comme un expert. Le tribunal a pris cette objection sous réserve. Avant de poursuivre son témoignage lors de la troisième et dernière journée d’audience, le 7 septembre 2010, monsieur Mireault a déposé en preuve son curriculum vitae ainsi que son rapport daté du 19 août 2010 (pièce A-16) concernant le drainage du mur de soutènement.

 

[66]         Lors de cette dernière journée d’audience, à la demande du procureur de l’Administrateur et avec le consentement des autres parties, le tribunal a reconnu monsieur Mireault comme un témoin-expert. Le témoin déclare que le Code national du bâtiment - Canada 1995 n’exige pas l’installation d’un drain français le long d’un mur de soutènement. Une telle exigence existe toutefois pour les murs de fondation.

 

[67]         À l’appui de son opinion, il cite l’article 9.13.1.1(3) du Code national du bâtiment, Canada (1995) faisant partie du Code de construction du Québec qui prévoit ce qui suit :

 

                  «9.13.1.1(3)         Il n’est pas obligatoire de protéger contre l’humidité les planchers des garages et des parties non fermées des bâtiments, et les planchers posés sur un remblai granulaire, conformément à l’article 9.16.2.1. » (souligné par le témoin)

 

[68]         Il réfère au témoignage de l’ingénieur Parr à l’effet que les semelles de ce mur sont suffisamment profondes et donc protégées contre les effets du gel et qu’elles sont structuralement de dimensions adéquates.

 

[69]         Du côté des terrains des copropriétaires, il recommande le remplacement du remblai existant par du remblai drainant. Il est d’accord avec la recommandation de l’expert de l’Entrepreneur (monsieur Sylvain Parr) quant à l’exécution de barbacanes à travers le mur aux emplacements indiqués sur les dessins du rapport de monsieur Parr, tout juste au-dessus de l’asphalte et régulièrement espacés.

 

[70]         En ce qui concerne l’installation d’un drain français, il recommande d’installer horizontalement (du côté des terrains), un tuyau perforé de 4 pouces de diamètre le long du mur de soutènement. La position exacte de ce drain est indiquée sur le dessin qui est joint à son rapport (pièce A-16). Selon lui, le rôle de ce drain serait d’évacuer la montée d’eau de la nappe phréatique vers le haut plutôt que l’évacuation des eaux de surface. Il recommande que ce drain soit raccordé au drain du bâtiment existant.

 


Monsieur Sylvain Parr - témoin

 

[71]         L’expert de l’Entrepreneur intervient et témoigne qu’à la lumière du témoignage de monsieur Mireault, il modifie son opinion antérieure concernant l’emplacement exact du drain français tel qu’il apparaît sur son dessin SK-05 annexé à son rapport du 21 juin 2010 (pièce E-1). Il souscrit à l’opinion de monsieur Mireault quant au nouvel emplacement de ce drain selon le rapport de monsieur Mireault (pièce A-16).

 

Contre-preuve du Bénéficiaire

 

Monsieur Claude Guertin - témoin

 

[72]         Témoignant en contre-preuve pour le Bénéficiaire, monsieur Guertin souscrit aussi à l’opinion de monsieur Mireault quant au nouvel emplacement du drain français à condition toutefois que la partie du mur au-dessous de ce drain soit isolée avec du polystyrène.

 

[73]         En ce qui concerne la solution de l’Entrepreneur recommandée par monsieur Sylvain Parr, monsieur Guertin opine que les pilastres de renfort augmenteraient la résistance du mur aux poussées latérales de seulement 10% à 20%.

 

[74]         De plus, selon lui, rien ne garantit que les fissures, une fois colmatées, ne s’ouvriront pas. Pour pallier à cette possibilité, il recommande qu’une membrane caoutchoutée soit collée le long du mur du côté des terrains afin de l’imperméabiliser.

 

[75]         Si sa propre solution est adoptée (réfection du mur) il suffirait que la partie du mur se trouvant sous la terre soit goudronnée seulement, sans membrane caoutchoutée.

 

[76]         En contre-interrogatoire par le procureur de l’Entrepreneur, monsieur Guertin admet qu’il n’a pas fait de calcul de charge du mur selon la solution de l’Entrepreneur (préconisée par monsieur Parr). Monsieur Guertin explique que pour faire de tels calculs, il lui faudrait connaître d’autres informations y compris la présence et la nature de l’armature dans le mur existant et les plans du mur, lesquels ne lui étaient pas facilement accessibles.

 

Contre-contre-preuve de l’Entrepreneur et de l’Administrateur

 

Monsieur Sylvain Parr - témoin

 

[77]         Après avoir entendu le témoignage de monsieur Guertin, monsieur Parr confirme que lui personnellement, ainsi que le personnel de son bureau, ont fait des calculs pour s’assurer que sa méthode corrective (principalement par l’ajout de 14 pilastres) sera suffisante pour résister à la poussée latérale du mur par le sol et par son inclinaison existante. En ce qui concerne la verticalité du mur, il cite le paragraphe 9.4.4.5  1) du Code national du bâtiment-Canada (1995) qui prévoit ceci au sujet des murs de soutènement :

 

                  «Les murs doivent être calculés pour s’opposer à la poussée latérale du sol. »

 

[78]         Sur le sujet de cette verticalité, il contredit le témoignage de monsieur Guertin en affirmant que la norme de flèches à laquelle monsieur Guertin a référé et qui est prévue au sous-paragraphe 9.4.3.1. du Code national du bâtiment - Canada (1995), s’applique seulement à des poutres ou solives de toit ou de plancher mais pas à un mur de soutènement dont les normes sont prévues à l’article 9.4.4.5 du code précité.

 

[79]         Ensuite, monsieur Parr modifie la liste des travaux à faire qui a été soumise par l’Entrepreneur (pièce E-3) selon sa méthode corrective en y ajoutant des éléments supplémentaires soit une membrane imperméabilisante au coût estimé de 2 000 $, des plaques en métal avec réfection dont le coût estimé est entre 500 $ et 1 000 $ et le  crépis.

 

[80]         Il ajoute que la liste des travaux et leur estimation soumise par l’Entrepreneur (pièce E-3) ne contient pas toutes les réparations qui font partie de la solution qu’il préconise et qui sont prévues à son rapport de juin 2010 (pièce E-1).

 

[81]         En contre-interrogatoire, le témoin ajoute qu’advenant que sa solution soit adoptée, la structure en acier qui repose présentement sur le dessus du mur n’aura pas besoin d’être soutenue d’une façon indépendante pendant les travaux.

 

[82]         De plus, il précise que selon ses calculs, les pilastres de renfort sont suffisamment résistants malgré la présence ou l’absence d’armature à l’intérieur du mur existant.

 

[83]         Quant à la durée de l’exécution des travaux selon sa solution, elle n’excéderait pas deux semaines. Ces travaux pourraient être faits en tout temps. Si la température extérieure tombe en dessous de + 5º C le béton devra subir un traitement spécial.

 

[84]         Il ne conseille pas qu’on attende jusqu’au printemps 2011 pour faire les réparations du mur.

 

[85]         Il ne veut pas se prononcer sur l’opinion de l’expert Guertin à l’effet que si le drain français est installé selon la recommandation de l’architecte Mireault, la partie du mur de soutènement du côté des jardins au-dessous de ce drain devrait être isolée avec du polystyrène.

 


Monsieur Yvan Mireault - témoin

 

[86]         Monsieur Yvan Mireault intervient et témoigne que, selon son avis, l’isolation en polystyrène recommandée par l’expert Guertin n’est pas nécessaire.

 

Analyse et décision

 

Retrait de certains éléments de preuve du Bénéficiaire

 

[87]         Le procureur du Bénéficiaire informe le tribunal qu’il retire de sa preuve la liste des aménagements paysagers et autres éléments existants, qui démontre aussi le coût de leur enlèvement et leur remise à la fin des travaux, sur chacun des huit terrains se trouvant d’un côté du mur. Cette liste est datée du 26 juillet 2010 et cotée comme pièce B-15.

 

[88]         Il retire également de sa preuve l’item no 1 intitulé « Enlève./remplac. de l’aménagement paysager exist » qui apparaît sur un document intitulé « Ventilation et détails de la soumission » faisant partie de la soumission de Les Constructions Kodiac inc. du 11 août 2010 pour la réfection du mur et autres travaux (pièce B-16).

 

Remise en état des lieux

 

[89]         Tous les procureurs des parties conviennent que, peu importe la solution que le tribunal pourrait retenir, la remise en état des terrains (côté jardins) comprendrait les travaux suivants :

 

-       L’enlèvement et la remise en place des escaliers;

-       L’enlèvement et la remise en place des clôtures;

-       L’enlèvement et la remise en place des pelouses;

-       L’enlèvement et la remise en place des planches verticales ajourées sur le mur.

 

Réfection (proposée par le Bénéficiaire) ou réparation (proposée par l’Entrepreneur) du mur

 

[90]         Les parties s’entendent que la première et principale question soumise au tribunal est de déterminer si le mur de soutènement devrait être démoli et refait (selon la proposition du Bénéficiaire) ou réparé (selon la proposition de l’Entrepreneur).

 

[91]         Les principales prétentions des parties sur cette question peuvent être résumées comme suit :

 

[92]         Le Bénéficiaire prétend que le mur existant devrait être démoli et un autre mur avec une nouvelle semelle et des renforts en forme de triangles devraient être construits. Il rappelle que les réparations antérieures du mur par l’Entrepreneur qu’il a effectuées à la suite de la décision de l’Administrateur du 13 septembre 2005 par l’ajout de plaques d’acier sur la face verticale du mur, l’ajout de contreventement aux colonnes d’acier, l’ajout de plaques plus épaisses et de boulons plus gros pour les retenir en place. Ces réparations se sont avérées inefficaces car le mur a continué à se fissurer et à s’incliner. S’appuyant sur le témoignage de son expert, l’ingénieur Guertin, il soumet que le mur est affaibli de façon irréparable et qu’il existe un risque que les fissures verticales du mur continueront de s’élargir. Il prétend que sa solution de réfection corrigerait définitivement l’aspect inesthétique causé par l’inclinaison et la fissuration du mur. Finalement, il prétend que sa solution préserverait la valeur de revente des unités de condominium des copropriétaires du bâtiment.

 

[93]         La position de l’Entrepreneur, que partage l’Administrateur, est que sa solution de renforcer le mur avec des pilastres, en colmatant les fissures et en désolidarisant les colonnes d’acier du mur - peut être facilement effectuée et entraînerait moins de difficultés techniques et moins de perturbation aux copropriétaires du bâtiment. L’aspect esthétique du mur, une fois réparé, a relativement peu d’importance.

 

Décision - Réfection ou réparation

 

[94]         Le tribunal note qu’aucun dessin, plan, devis ou description du mur de soutènement qui pourrait démontrer au tribunal ce à quoi l’Entrepreneur s’est engagé initialement à fournir aux copropriétaires du bâtiment et/ou au Bénéficiaire quant à la structure, la solidité, l’usage, l’apparence esthétique ou autre aspect de ce mur - n’ont été mis en preuve.

 

[95]         Commençons par la conception originale de ce mur, y compris sa largeur et sa profondeur d’enfouissement au sol. Dans son premier rapport du 11 août 2009, l’ingénieur Guertin a dénoncé la conception du mur comme étant inadéquate. Après avoir pris connaissance du rapport de l’ingénieur Parr (pièce E-1), monsieur Guertin a corrigé son tir dans son deuxième rapport du 6 juillet 2010 (pièce B-13) où il constate ceci :

 

                  «Bien que l’information concernant les détails de l’armature du mur et de la semelle ne soit malheureusement pas disponible, une analyse de renversement indique que la conception du mur de soutènement existant est adéquate. »

 

[96]         Selon l’expert de l’Entrepreneur, l’ingénieur Parr, la conception du mur original est adéquate.

 

[97]         Est-ce que la solution de l’Entrepreneur assurerait la même solidité et la même stabilité au futur mur que la solution du Bénéficiaire?  Selon l’expert du Bénéficiaire, monsieur Guertin, la réponse à cette question est non. Dans son deuxième rapport du 6 juillet 2010, il critique la solution de l’Entrepreneur en affirmant que l’ajout des pilastres pourrait augmenter la résistance latérale du mur d’environ 10 % à 20 % ce qui est insuffisant pour pallier à la problématique, étant donné la grandeur de la force exercée contre le mur.

 

[98]         Lors de l’audience, l’ingénieur Guertin a reconnu qu’il n’a pas fait des calculs de charges du mur si la solution de l’Entrepreneur était adoptée. De plus, lorsque questionné par le tribunal sur l’effet de l’ajout des pilastres selon la solution de l’Entrepreneur, il n’a pas fourni, selon le tribunal, de réponse satisfaisante. Par conséquent le tribunal retient la preuve de l’Entrepreneur à l’effet que sa solution offrirait la même solidité et la même stabilité au futur mur que s’il était refait. On voit donc que sous l’aspect de la solidité et la stabilité du mur les deux solutions s’équivalent.

 

[99]         Et qu’en est-il de la jouissance d’usage du mur ou des lieux qui y avoisinent qu’offrirait chacune des deux solutions?

 

[100]      Selon la preuve, les deux solutions sont presque identiques. Malgré le fait qu’après sa réparation selon la proposition de l’Entrepreneur, le mur continuerait à être incliné (1 ¾ pouce sur une hauteur de 5 pieds et 6 pouces à certains endroits), il n’y a aucune preuve que cette inclinaison aurait un effet néfaste sur l’utilisation de l’allée des garages ou sur la jouissance des terrains de l’autre côté du mur par leurs propriétaires. De plus, lors de son témoignage, monsieur Parr a modifié la hauteur des pilastres de renforcement qu’il a présentés dans son rapport de juin 2010 (dessin SK-05 de la pièce E-1) en limitant leur sommet à 8 pouces en dessous de la surface des terrains.

 

[101]      En ce qui concerne l’aspect esthétique des deux solutions - celle de l’Entrepreneur est moins attrayante. Si elle est mise en place, le mur en toute probabilité retiendrait son angle d’inclinaison actuel. Les fissures, même si elles sont colmatées et peinturées ou recouvertes de crépis, demeureront toujours quelque peu visibles.

 

[102]      Cependant, et comme l’a souligné l’Entrepreneur lors de sa plaidoirie, l’aspect esthétique des deux solutions ne devrait pas jouer un rôle prédominant lors du choix de la plus adéquate d’entre elles, étant donné que les défauts esthétiques du mur selon la méthode de l’Entrepreneur seraient visibles du côté de l’allée des garages seulement. Cette allée  est caché des yeux du public et son usage est restreint aux copropriétaires du bâtiment lorsqu’ils y circulent dans leurs véhicules.

 

[103]      De plus, le tribunal note que le Bénéficiaire n’a soumis aucune  preuve convaincante pour démontrer l’importance qu’il attache à l’aspect esthétique du mur.

 

[104]      Un critère que le tribunal considère déterminant dans cette cause, et particulièrement à la lumière de son évaluation de la preuve quant aux autres critères mentionnés ci-haut, est la ou les difficultés techniques de l’implantation de chacune des deux solutions.

 

[105]      La preuve révèle que l’implantation de la solution du Bénéficiaire entraînerait beaucoup plus de difficultés techniques que celle de l’Entrepreneur. Selon cette preuve, la réfection du mur souhaitée par le Bénéficiaire nécessiterait les travaux supplémentaires suivants :

 

         a)   Le débranchement et l’installation temporaire à un autre endroit, ainsi que la réinstallation à la fin des travaux, de deux thermopompes qui se trouvent présentement à l’intérieur du garage;

         b)   L’enlèvement des colonnes d’acier et le soutènement de la structure des balcons par des moyens alternatifs pendant la durée des travaux;

         c)   Le sciage de l’allée asphaltée des garages;

         d)   L’excavation d’une tranchée du côté de l’allée des garages jusqu’à la semelle du mur;

         e)   L’entreposage ou l’enlèvement du sol ainsi excavé;

         f)    La démolition du mur existant et l’enlèvement des débris;

         g)   La construction d’un coffrage, de l’armature et l’érection d’une nouvelle semelle en béton;

         h)   La construction d’un coffrage, de l’armature et la confection en béton d’un nouveau mur de soutènement;

         i)    Le remblayage de la tranchée dans l’allée des garages, et

         j)    La réparation de l’asphalte recouvrant l’allée des garages.

 

[106]      Les travaux énumérés ci-haut ne seraient pas nécessaires si la méthode de l’Entrepreneur est choisie. Les deux méthodes exigeraient évidemment d’autres travaux qui se dérouleraient principalement du côté des terrains.

 

[107]      À la lumière de ces difficultés techniques supplémentaires requis par la solution du Bénéficiaire, et étant donné que les autres aspects des deux solutions sont très semblables, le tribunal vient à la conclusion que la solution proposée par l’Entrepreneur et décrite dans son rapport du 21 juin 2010 (pièce E-1) avec les ajouts et modifications à ce rapport effectués par l’ingénieur Parr lors de l’audience, est la plus appropriée des deux.

 

[108]      En ce qui concerne la prétention du Bénéficiaire à l’effet que la solution de l’Entrepreneur pourrait avoir un impact sur le prix de revente des condominiums des copropriétaires, le tribunal note qu’il s’agit seulement d’une hypothèse dont aucune preuve crédible n’a été soumise au tribunal. Quant aux autres prétentions des parties à l’appui de leurs solutions respectives, le tribunal n’a pas besoin de les analyser étant donné sa conclusion sur cette question.

 

 

 

 

 

Système de drainage du mur (côté des terrains)

 

[109]      Toutes les parties recommandent l’installation d’une membrane autocollante et imperméabilisante sur toute la longueur du mur du côté des terrains des copropriétaires, si la solution de l’Entrepreneur est adoptée.

 

[110]      Toutes les parties recommandent également qu’un tuyau perforé communément appelé un « drain français » soit posé le long de ce mur à la hauteur préconisée par l’architecte Yvan Mireault selon le croquis annexé à son rapport du 19 août 2010 (pièce A-16). À la lumière du témoignage de l’architecte Mireault, le tribunal ne retient pas la recommandation de l’ingénieur Guertin quant à la nécessité de poser une isolation en polystyrène contre le mur en dessous du niveau du drain français.

 

[111]      Le tribunal retient également la recommandation de l’architecte Mireault que ce drain français soit raccordé au drain existant du bâtiment.

 

[112]      Finalement, le tribunal accepte  la recommandation unanime des parties à l’effet qu’un nouveau  remblai non gélif et drainant devra séparer le mur du sol tout-venant des jardins des propriétaires sur presque toute sa profondeur  jusqu’à la semelle, selon le croquis annexé au rapport (pièce A-16) de l’architecte Mireault.

 

Drainage du mur (côté de l’allée de garages)

 

[113]      Selon la preuve, lors de l’excavation des deux puits d’exploration à la demande de l’expert de l’Entrepreneur, monsieur Sylvain Parr, à proximité du mur sous l’allée des entrées de garages, les ouvriers ont découvert de l’eau à quelque 30 cm sous l’asphalte.

 

[114]      De plus, selon les photos (pièce E-2 en liasse) aucun système de drainage, que ce soit au moyen d’un remblai drainant, d’un drain français ou autre, n’est en place.

 

[115]      Est-ce qu’un tel système de drainage est requis selon les normes ou les règles de l’art?

 

[116]      Le Bénéficiaire n’a présenté aucune preuve spécifique sur ce point. Malgré le fait que l’étalement d’une bonne couche d’un remblai non gélif sous une large partie de l’allée asphaltée du garage fait partie de la solution du Bénéficiaire décrite dans le premier rapport de ProspecPlus  du 11 août 2009 (page 21 de la pièce A-5) ce premier rapport était fondé sur de fausses hypothèses quant à la profondeur et à la largeur des semelles du mur existant. Ceci a été reconnu par le signataire de ce rapport, l’ingénieur Guertin. Lors de l’audience, monsieur Guertin n’a pas abordé spécifiquement la question du drainage du mur sous l’allée asphaltée.

 

[117]      L’expert de l’Administrateur, l’architecte Mireault, qui appuie la solution de l’Entrepreneur ne prévoit pas non plus de système de drainage du mur du côté des garages selon son rapport du 19 août 2010 (pièce A-16).

 

[118]      Vu l’absence de preuve suffisante sur la question du drainage du mur du côté de l’allée des garages, le tribunal ne peut arriver à aucune conclusion ou rendre une  décision sur ce point.

 

L’aspect esthétique du mur - côté des garages

 

[119]      Le Bénéficiaire plaide que si le tribunal adopte la solution préconisée par l’Entrepreneur, il préfère qu’une fois les fissures réparées, le mur soit repeint plutôt que recouvert de crépis qui, avec le temps, pourrait craquer.

 

[120]      Lors de sa plaidoirie, l’Entrepreneur a consenti à repeindre tout le mur du côté des garages pour cacher les endroits où le mur subira des réparations.

 

[121]      Le tribunal constate cet accord entre les parties sur ce point.

 

L’échéancier

 

[122]      Le Bénéficiaire plaide que l’Entrepreneur doit lui présenter, dans un délai de dix (10) jours de la décision du tribunal, un échéancier détaillant les travaux prévus et la séquence de leur réalisation.

 

[123]      Il justifie cette demande par le besoin des copropriétaires du bâtiment de faire des préparatifs dans leurs jardins respectifs et de prendre des mesures nécessaires pour accéder à leurs garages.

 

[124]      Il demande également que l’Entrepreneur complète ou fasse compléter les travaux correctifs, à ses frais, au plus tard dans les 90 jours de la décision du tribunal.

 

[125]      L’Entrepreneur demande seulement que les copropriétaires lui donnent un accès au bâtiment et à leurs jardins respectifs pour faire les travaux correctifs. Il ne soumet pas d’autres arguments relativement à ces points.

 

[126]      L’Administrateur ne fait aucune soumission sur ces points.

 

Décision

 

[127]      À la fin de l’audience, le tribunal a demandé au procureur de l’Entrepreneur de lui soumettre, à titre indicatif, seulement les dates les plus tardives pour le début des travaux correctifs afférant à chacune des deux solutions. Quelques jours plus tard, ce procureur a informé le tribunal quant au délais d’exécution de ces travaux qui conviendraient à l’Entrepreneur. Étant donné que cette information a été soumise au tribunal à titre indicatif seulement et qu’aucun représentant de l’Entrepreneur n’a témoigné sur ce sujet lors de l’audience, le tribunal considère qu’elle ne fait pas partie de la preuve. 

 

[128]      Ce que par contre  le tribunal retient de la preuve qui lui a été soumise est le témoignage de l’expert de l’Entrepreneur, l’ingénieur Parr, à l’effet que l’exécution des travaux de réparation du mur ne prendrait même pas deux semaines. Il a également spécifié que si ces travaux se déroulent lorsque la température extérieure descend en dessous de 5ºC, le béton devra subir un traitement spécial.

 

[129]   De plus, selon les recommandations des experts de l’Entrepreneur et du Bénéficiaire, les mesures correctives relativement au mur, peu importe laquelle des deux solutions est adoptée, devraient être effectuées avant le printemps pour éviter la possibilité d’une aggravation de l’état du mur sous l’effet du gel. Le tribunal note que selon le témoignage de ces deux experts, cette aggravation est une possibilité seulement plutôt qu’une probabilité.

 

[130]   À la lumière de cette preuve, le tribunal estime qu’il serait approprié que les parties s’entendent dans les 40 jours de cette décision sur les mesures conservatoires que l’Entrepreneur devra prendre afin d’éliminer ou de minimiser au maximum l’aggravation possible du mur et de la structure d’acier sur le dessus de ce mur  par le gel, jusqu’au printemps 2011. En l’absence d’une telle entente, le tribunal juge, à la lumière des témoignages des deux experts, que les travaux correctifs devront être complétés dans les 75 jours de la date de cette décision. Ce long délai tient compte de la période des fêtes de la fin décembre 2010 et des premiers jours de janvier 2011.

 

Supervision des travaux

 

[131]   Le Bénéficiaire plaide qu’une tierce personne qu’il aura le droit de désigner devra superviser les travaux correctifs. Alternativement, il plaide que cette personne pourra être désignée par l’Administrateur. Il demande que cette tierce personne soit rémunérée par l’Entrepreneur ou l’Administrateur pour ses services.

 

[132]   Le Bénéficiaire justifie sa demande par le fait que, selon lui, l’Entrepreneur n’a pas soumis de devis suffisamment spécifiques pour décrire sa solution des mesures correctives.

 

[133]   En outre, il demande (point no 4 de son courriel du 28 janvier 2010 déposé comme pièce B-9) que cette personne désignée soit tenue de remettre, aux bénéficiaires, à l’Entrepreneur et à l’Administrateur, un certificat de fin de travaux et de leur conformité.

 

[134]   L’Entrepreneur ne fait pas de soumission sur ces points.

 

[135]   Selon l’Administrateur, le Règlement ne prévoit pas que la supervision des travaux soit ou puisse être faite par l’expert désigné par le Bénéficiaire et dont les honoraires seraient au frais de l’Administrateur. Toutefois, il reconnaît le droit du Bénéficiaire de désigner une telle personne et de la rémunérer pour ses services.

 

Décision l

 

[136]   Selon le tribunal, la preuve des mesures correctives proposées par l’Entrepreneur qui sont décrites dans le rapport de l’ingénieur Parr (pièce E-1) avec les explications et modifications de M. Parr lors de l’audition (et notamment quant à la hauteur des pilastres, la membrane imperméabilisante, et à l’emplacement du drain français du côté des terrains),  ainsi que le rapport du 19 août 2010 de l’architecte Yvan Mireault (pièce A-16), sont suffisamment claires pour permettre leur réalisation.

 

[137]   Pour cette raison, le tribunal rejette la demande du Bénéficiaire sur ce point.

 

[138]   Par ailleurs, le tribunal note que le Bénéficiaire peut désigner une tierce personne et ce, à ses frais, pour vérifier l’état de l’avancement des travaux, la qualité des matériaux utilisés et celle du travail effectué, mais de manière à ne pas nuire au déroulement de ces travaux. Ceci est expressément prévu à l’article 2117 du Code civil du Québec.

 

[139]   Cet article 2117 du Code civil du Québec se lit comme suit :

           

« À tout moment de la construction  ou de la rénovation d’un immeuble, le client peut, mais de manière à ne pas nuire au déroulement des travaux, vérifier leur état d’avancement, la qualité des matériaux utilisés et celle du travail effectué, ainsi que l’état des dépenses faites ».

 

 

Remise en état des lieux

 

[140]   Selon le tribunal, la remise en état des lieux devra comprendre les travaux énumérés au paragraphe 89 ci-haut conformément à l’entente des parties. De plus, ces travaux de remise en état devront inclure également la réparation de l’allée des garages à la suite de l’excavation des puits d’exploration en été 2010 et des dégâts potentiels futurs qui pourraient être causés lors de la réparation du mur.

 

Frais d’expertises

 

[141]   Le Bénéficiaire demande le remboursement de tous les frais d’expertises facturés par la firme ProspecPlus  soient :

 

a)    507,94 $ (incluant la TPS et la TVQ) pour l’expertise et l’inspection du 23 juin 2009 (facture no 012205);

b)    1 241,63 $ (incluant la TPS et la TVQ) pour la rédaction du rapport et l’évaluation des coûts datés du 5 août 2009 (facture no 012386);

c)    423,29$ (incluant la TPS et la TVQ) pour la préparation de l’expert Guertin avant l’audition du 6 juillet 2010(facture no 013662);

d)    1 410,94 $ (incluant la TPS et la TVQ) pour la présence de l’expert Guertin (une journée) lors de l’audition du 6 juillet 2010 (facture no 013692);

e)    1 083,60 $ pour le deuxième rapport d’expertise daté du 6 juillet 2010 (facture no 013706);

f)     705,47$ (incluant la TPS et la TVQ) pour la présence de l’expert Guertin lors de l’audience du 9 juillet 2010 (une demi-journée) (facture no 013693);

g)    705,47$ (incluant la TPS et la TVQ) pour la présence de l’expert Guertin lors de l’audience du 13 septembre 2010 (une demi-journée) (facture no 013745);

 

[142]   L’article 124 du Règlement prévoit que si le Bénéficiaire a gain de cause total ou partiel, l’arbitre doit statuer, s’il y a lieu, quant aux quantum des frais raisonnables d’expertises pertinentes que l’Administrateur doit rembourser.

 

[143]   Dans ce dossier, le Bénéficiaire a eu gain de cause partiellement. Non seulement il a eu gain de cause à l’étape de la détermination de la compétence du tribunal à statuer sur des mesures correctives spécifiques et du délai de dépôt de sa demande d’arbitrage (voir la première décision du tribunal datée du 27 avril 20101  ) mais aussi, il a réussi à faire rejeter la solution initiale de l’Entrepreneur décrite dans sa lettre du 4 juin 2009 que ce dernier aurait pu réaliser ou tenter de réaliser selon la décision de l’Administrateur du 18 novembre 2009.

 

[144]   Selon le tribunal arbitral, les deux rapports de la firme ProspecPlus, soit celui du 5 août 2009 (pièce A-5) et celui du 6 juillet 2009 (pièce B-12) ainsi que les témoignages de l’expert Claude Guertin lors des audiences du 7 juillet, 9 juillet et 13 septembre 2010, étaient pertinents. Toutefois, eu égard au fait que le taux horaire de monsieur Guertin est de 125 $ et de 90$ dans le cas de l’ingénieur Gosselin, certaines factures décrivant leurs services devraient être réduites :

 

a)   Ainsi la facture du 23 juin 2009 de 450 $ pour l’inspection du mur par monsieur Gosselin seul devrait être réduite de 180$ à 270 $ (3 heures x 90 $) plus la TPS et TVQ;

b)   La facture datée du 6 juillet 2010 de 1 250 $ pour la présence de monsieur Guertin à l’audition à la même date devrait être réduite de  287.50$  à 937,50 $ (7,7 heures x 125 $)plus la TPS et TVQ;

c)    La facture du 13 septembre 2010 de 625 $ pour la présence de monsieur Guertin à l’audition du même jour devrait être réduite de quelque 250 $ à 375 $ (3 heures x 125 $)plus TPS et TVQ.

 

Conclusions supplémentaires

 

[145]   La Loi sur le bâtiment[3] ainsi que le Règlement ne contiennent pas de clause privative complète. L’arbitre a compétence exclusive, sa décision lie les parties et elle est finale et sans appel.

 

[146]   Selon l’article 116 du Règlement, l’arbitre statue conformément aux règles de droit; il fait aussi appel à l’équité lorsque les ciconstances le justifient.

 

 

POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL D’ARBITRAGE :

 

 

ACCUEILLE partiellement la réclamation du Bénéficiaire;

 

DÉCLARE que l’Entrepreneur devra effectuer toutes les mesures correctives qu’il a  proposées et qui sont  décrites dans le rapport du 21 juin 2010 de son expert, monsieur Sylvain Parr, avec les modifications que ce dernier y a ajoutées lors de l’audition concernant la hauteur des pilastres (8 pouces en dessous de la surface des terrains des copropriétaires du bâtiment), le niveau d’installation du drain français le long de ce mur du côté des terrains, et l’ajout d’une membrane autocollante sur sa surface  (côté des terrains);

 

DÉCLARE que ce drain français qui longera tout le mur de soutènement  (côté des terrains) devra être raccordé au système des drains des fondations du bâtiment conformément au rapport de l’architecte Yvan Mireault du 19 août 2010;

 

DÉCLARE qu’un remblai drainant et non gélif devra être répandu contre ce même mur jusqu’à sa semelle  (côté des terrains) conformément aux normes et aux règles de l’art en semblables matières;

 

DÉCLARE que toutes les fissures apparaissant dans ce mur, ainsi que la fissure de la fondation du bâtiment à proximité de l’unité de condominium de monsieur Benoît Gaudet, devront être réparées suivant les recommandations de l’ingénieur Sylvain Parr. En ce qui concerne cette fissure de fondation ainsi que la fissure du mur de soutènement présentement recouverte d’une plaque d’acier qui se trouve au bout de l’allée de garages, elles devront être examinées par un spécialiste désigné par l’Entrepreneur qui déterminera et consignera dans un rapport écrit dont une copie sera transmise au Bénéficiaire et à l’Administrateur dans les 3 jours de sa rédaction,   si elles doivent ou pas  être renforcées avec une armature spéciale ou par tout autre moyen, avant d’être colmatées;

 

DÉCLARE que tout le mur de soutènement du côté des garages devra être recouvert d’une peinture appropriée pour cacher au maximum les fissures après leur réparation;

 

DÉCLARE que la remise en état des lieux devra comprendre les travaux suivants :

 

-       L’enlèvement et la remise en place des escaliers;

-       L’enlèvement et la remise en place des clôtures;

-       L’enlèvement et la remise en place des pelouses;

-        L’enlèvement et la remise en place des planches verticales ajourées               sur le mur, et

-             La réparation de l’allée asphaltée des garages à la suite de     l’excavation des puits d’exploration en juin 2010 et à la suite des dégâts potentiels futurs qui pourraient survenir lors de l’exécution des travaux correctifs au mur de soutènement.

-        

DÉCLARE que l’Entrepreneur devra proposer au Bénéficiaire dans un délai de 40 jours de la date de cette décision la mise en place de mesures conservatoires satisfaisantes au Bénéficiaire pour éliminer ou réduire au maximum la possibilité de l’aggravation par le gel de l’état du mur et de la structure d’acier qui s’y appuie  jusqu’au 15 mai 2011, date à laquelle tous les travaux correctifs devront être complétés. En absence d’une entente entre l’Entrepreneur et le Bénéficiaire sur de telles mesures conservatoires à l’intérieur de ce délai de 40 jours, et leur implantation dans le délai convenu  entre ces parties, - ORDONNE à l’Entrepreneur de compléter tous les travaux correctifs (à l’exception de la remise en place des pelouses qui devra être complétée le ou avant le 15 mai 2011) dans les 75 jours de la date de la présente décision;

 

DÉCLARE que l’Entrepreneur devra transmettre un préavis d’au moins 10 jours au Bénéficiaire avant le début des travaux correctifs et ce dernier devra prendre les mesures nécessaires pour donner à l’Entrepreneur un libre accès aux parties du  bâtiment ( y compris les jardins des copropriétaires) où ces travaux seront réalisés; 

 

 

DÉCLARE que tous les travaux correctifs devront être réalisés dans les délais mentionnés ci-haut par l’Entrepreneur et à défaut de leur réalisation par l’Entrepreneur à l’intérieur de ces délais, ils devront être effectués dans les mêmes délais par l’Administrateur. De plus, DÉCLARE que tous ces travaux, à moins de directives spécifiques prévues ci-haut, devront être effectués selon les normes et les règles de l’art qui leur sont applicables;

 

DÉCLARE que l’Administrateur devra rembourser au Bénéficiaire le montant de toutes les factures de ProspecPlus qui s’élève à 6078.33$ (incluant la TPS et la TVQ)  toutefois en réduisant ce montant d’une somme de 717.50$ plus les TPS et TVQ sur cette somme, et

 

DÉCLARE que tous les frais d’arbitrage dans cette cause sont à la charge de l’Administrateur.

 

 

 

 

Montréal, le 21 décembre 2010

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Me ALBERT ZOLTOWSKI

Arbitre  / SORECONI

 

 



[1]           Syndicat de copropriété 4767 à 4827 8e Avenue et 3189 rue Claude-Jodoin et St-Luc Habitation inc., Me Albert Zoltowski, arbitre, Société pour la résolution de conflits inc. (SORECONI); 09 1221002, 27 avril 2010.

 

[2]           R.Q. c. B-1.1 r.o.2

 

[3]               Loi sur le bâtiment L.R.Q., ch. B-1.1