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Centre national et international

d’arbitrage du Québec

 

No 00-1205

 

 

 

Syndicat de copropriété domaine du Mesnil - phase III

Demanderesse

 

C.

 

Constrobourg (1997) inc

Défenderesse

et

 

La Garantie habitation du Québec

Mise en cause

 

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Sentence arbitrale

_________________________________________________________________________

 

 

À l’été 2000, la demanderesse a demandé un arbitrage en regard de plusieurs plaintes déposées contre la défenderesse.  Un arbitre en a décidé par une sentence du 15 septembre 2000.

 

Au début de décembre suivant, la demanderesse a soumis une autre demande d’arbitrage portant sur un nombre considérable de griefs.  Selon les regroupements,  recoupements ou calculs qu’on peut faire, on peut dénombrer environ 20 items.

 

Dans une décision préliminaire du 22 janvier 2001, le soussigné n’a retenu de ce nombre que quatre sujets de plainte de la part de la demanderesse.   Les sujets de plainte rejetés portaient soit sur des questions déjà décidées par l’arbitre précédent, ou qui avaient été déclarés exclues de la garantie.

 

Sur les quatre sujets retenus, l’arbitre a  ordonné à l’administrateur de la mise en cause de procéder à une inspection des lieux et à la rédaction d’un rapport pour le 15 février suivant.

 

Ce rapport a été porté à la connaissance des intéressés, mais n’a pas permis le règlement amiable du litige.

 

Le 27 mars, après avis aux parties, l’arbitre s’est rendu visiter les lieux en compagnie du représentant de la défenderesse, de l’inspecteur et de l’avocat de la mise en cause.  Par suite d’un malentendu dont il est le seul responsable, le représentant de la demanderesse n’était pas présent lors de cette visite.

 

Il était cependant présent lors de l’audition qui a suivi, ce qui a permis d’examiner les sujets en litige à la lumière des documents, des témoignages et des représentations de toutes les parties concernées.

 

Item # 2  de la lettre du 21 août 2000

 

La demanderesse exige que l’on pose d’un scellant sur les joints de mortier qui se trouvent entre le fer angle du haut des fenêtres et le mur vertical qui borde les dites fenêtres.  Elle le demande en regard de tous les étages de l’immeuble,

 

Les réponses de la défenderesse et de la mise en cause sont les mêmes.  Ni le Code national du bâtiment ni aucune norme de construction connue n’exige la pose de ce scellant.  Aucune preuve contraire ne nous a été soumise.  L’examen des lieux fait ce jour montre que le mortier rejoint et se colle au fer angle.  Il serait bien surprenant que l’humidité y pénètre. Ce n’est pas une malfaçon.  L’arbitre  rejette ce motif de plainte.

 

Item # 14  de la lettre du 21 août 2000

 

Le plancher de la galerie avant de l’immeuble de même que celui des balcons est constitué de panneaux de fibre de verre fixé sur des cadrages de madriers. La demanderesse se plaint que des craquements se font entendre lorsqu’on marche sur le palier de l’entrée de même que sur le balcon du condo  # 1046.

 

L’inspection du représentant de la mise en cause révèle qu’effectivement il a perçu un craquement vers le centre du palier.  Il ajoute :

 

«Quoique ce phénomène n’est pas  régi par une norme comme telle, je pense qu’une vérification de la fixation permettrait de confirmer qu’il s’agit d’un manque de fixation ou d’une réaction entre deux matériaux de composition différente»

 

Il conclut :

« L’entrepreneur devra vérifier la fixation et la corriger s’il y a lieu».

 

Même s’il n’a pas inspecté le balcon du 1036, le représentant de la mise en cause assimile le cas de cet endroit à celui du palier et suggère la même conclusion.

 

Lors de la visite des lieux, l’arbitre a pu constater qu’il s’agissait d’un palier construit de façon solide.  Il ne craquait pas en marchant dessus, ce qui ne veut pas nécessairement dire qu’il ne craque pas en une autre saison ou dans d’autres circonstances. 

 

Personne n’a pu faire de constatations au balcon du 1046, vu l’absence du représentant de la demanderesse ou du propriétaire de ce condo.

 

Même s’il y a doute sur la recevabilité de ce grief, au regard des dispositions et des délais apparaissant au règlement de garantie et au contrat des parties, l’arbitre accepte la suggestion  proposée par la mise en cause et ordonne à la défenderesse de vérifier la fixation du palier et du balcon du  condo # 1046, et de procéder à une fixation plus complète s’il y a lieu. Vu  la difficulté des communications entre la demanderesse et la défenderesse,  il fixera cependant un délai pour effectuer ce travail.

 

Item  # 15  de la lettre du 21 août 2000

 

Le grief porte sur la contremarche du bas de l’escalier de la façade principale de l’immeuble. Selon la demanderesse, elle ne serait pas de la même hauteur que les contremarches supérieures, et, selon l’ajout qu’elle fait à l’audition, elle aurait une configuration légèrement différente de celle des contremarches supérieures.  La photo que la demanderesse dépose à l’enquête montre, à un examen attentif, qu’effectivement il existe une légère différence  de hauteur et d’apparence entre la contremarche du bas et les autres.  Cela est vraisemblablement dû à l’arrimage de l’escalier et du trottoir de blocs de béton qui y donne accès. La différence en hauteur est de 3/8 de pouce.

 

L’inspecteur suggère d’ajouter une cale de la même épaisseur sous les appuis de l’escalier pour régler le problème de hauteur.  Sa suggestion est faite sous la réserve que la situation découle du cycle gel et dégel et de la légère variation qui en découle d’une saison à l’autre. Pour sa part, l’arbitre a constaté qu’il faut un oeil averti pour constater la différence entre la hauteur et l’apparence de la contremarche du bas et celles des autres marches.  Il va sans dire que cette différence minime n’affecte en rien la qualité et la sécurité de l’immeuble.

 

Le dossier révèle qu’à la suite du précédent arbitrage, l’inspecteur avait revisité les lieux pour constater que certains travaux décrétés par le précédent arbitre n’avaient pas été réalisés en entier.  Dans un rapport d’inspection daté du 28 novembre 2000, l’inspecteur écrit :

 

«Les items suivants ont été signalés par monsieur Dufour comme étant à compléter et ont été constatés par le soussigné et l’entrepreneur :

 

1-         Mur de fondation à gauche de l’>entrée du garage à recouvrir d’un isolant et d’un crépi;

 

2          Contremarche de l’escalier principal à changer;

 

3-                  .....

 

Ces items seront complétés dans les prochains jours.»

 

Il faut comprendre de ce rapport rédigé le 28 novembre 2000 que la contremarche de l’escalier principal devait être changée.  On doit maintenant comprendre que la contremarche n’a pas été changée et que l’inspecteur suggère une autre solution.  La défenderesse dit avoir demandé à l’entreprise qui a installé le palier et l’escalier de poser une nouvelle contremarche, mais qu’on lui a répondu que ce n’était pas une solution appropriée.

 

Il est difficile de concevoir qu’on ne peut pas poser une nouvelle  contremarche de la même hauteur que les autres, mais qu’on peut surélever la contremarche existante en lui ajoutant des cales.  Il faut concevoir que l’ajout de cales ne corrigera pas la déficience de l’apparence, si peu visible soit-elle.  Selon le dossier,  l’entrepreneur s’était engagé à remplacer la contremarche.  Il devra donner suite à cet engagement.

 

Il faut ici noter que le grief soulevé relevait de l’arbitrage précédent, et, d’une certaine manière, en constituait un suivi.  Le présent arbitre ne l’a retenu comme sujet qu’en considération du fait que la décision antérieure n’était pas suffisamment explicite et qu’il y aurait eu des difficultés à la faire homologuer et exécuter, et du fait qu’il était nécessaire qu’il y ait un e inspection additionnelle  des lieux. 

 

Item  # 1  de la lette du 6 novembre 2000

 

Dans le même  rapport d’inspection du 28 novembre 2000, fait dans le cadre d’un précédent arbitrage, l’inspecteur de la mise en cause a constaté, tel que cité ci-dessus, que  l’isolant et le crépi n’avaient pas été posés sur le mur de fondation gauche de l’entrée du garage. Incidemment le représentant de la demanderesse soutient que la même situation existe sur le mur de fondation droit.

 

Malgré sa promesse, la défenderesse n’a pas fait le travail «dans les prochains jours».

 

C’est la même situation qui persiste à ce jour.  La défenderesse promet de le faire au printemps, vu qu’elle en a été empêchée à la fin de l’automne.  L’arbitre prend acte de cet engagement, mais il fixera un délai à l’intérieur duquel la défenderesse devra agir.

 

Au sujet de ce grief, l’arbitre réitère la remarque faite plus haut.  Il s’agit encore d’un suivi de l’arbitrage précédent.  Ce n’est pas un nouveau sujet de plainte, mais l’exécution d’une décision antérieure.

 

Frais de larbitrage

 

L’article 63 du règlement d’arbitrage sur le plan de garantie prévoit que les coûts de l’arbitrage « sont à la charge de l’administrateur, à moins que le bénéficiaire (ici la demanderesse) n’obtienne gain de cause sur aucun des aspects de sa réclamation, auquel cas l’arbitre départage ces coûts».

 

Dans le présent cas, il faut rappeler que la demande d’arbitrage portait sur environ 20 griefs, que 16 d’entre eux ont été éliminés lors de l’audition préliminaire et que sur les quatre plaintes examinées, la première plainte est rejetée, la deuxième n’est accueillie qu’à seule fin de vérification du palier et du balcon et correction s’il y a lieu, les troisième et quatrième font suite à l’arbitrage précédent et auraient à la rigueur pu être traitée comme un suivi de la décision rendue, mais comme il était utile de faire inspecter de nouveau les lieux et de fixer des modalités d’exécution, le soussigné a décidé de les retenir et d’en disposer.

 

On doit donc se demander si la demanderesse a eu gain de cause sur un seul des sujets soulevés en arbitrage.  Dans le contexte d’une demande portant sur 20 sujets, le succès mitigé et très relatif sur deux  ou trois d’entre eux autorise l’arbitre à départager les coûts.  Ceux-ci seront supportés pour moitié par chacune des parties.

 

Remarque finale

 

À la fin de l’audition, les autres parties ont demandé au représentant de la demanderesse si la décision à rendre ici mettrait fin aux plaintes et aux demandes répétées d’arbitrage.  La réponse du représentant a été qu’il avait encore en réserve une foule d’autres griefs ou plaintes et qu’il les ferait valoir dans un avenir prochain. 

 

Cette affirmation du représentant de la demanderesse surprend.  Au rapport  de l’inspection du 28 novembre 2000 à laquelle nous faisions allusion plus haut, on lit :

 

«Lors de cette visite, monsieur Dufour n’a pas signalé d’autres points non réglés à part les aménagements extérieurs non couverts par la garantie et les travaux supervisés par l’expert monsieur Vézina».

 

 L’arbitre ne peut évidemment pas empêcher la demanderesse de formuler d’autres plaintes. Il fait cependant remarquer qu’on ne peut ramener en arbitrage des questions qui on déjà fait l’objet d’une décision arbitrale, ni des ordonnances rendues qui n’auraient pas fait l’objet d’une exécution complète.  Il fait également remarquer que le règlement sur le plan de garantie des maisons neuves, de même que le contrat des parties, contiennent des clauses précises concernant les délais à l’intérieur desquels un propriétaire doit agir, et que ces délais doivent être vérifiés avec soin et observés rigoureusement.  On doit aussi se demander s’il s’agit de questions qui relèvent de la garantie ou de sujets qui n’ont pas à voir avec elle.  Les péripéties de ce dossier et du précédent suggèrent chez la demanderesse une tendance à l’exagération, voire au harcèlement, qui est susceptible d’affecter grandement sa crédibilité future.

 

Conclusions

 

Par ces motifs, l’arbitre :

 

Ordonne à la défenderesse de vérifier, et de corriger s’il y a lieu, la fixation du palier de l’entrée principale et celle du balcon du condo # 1046, d’ici le 15 juin 2001;

 

Ordonne à la défenderesse de changer la contremarche du bas de l’escalier avant de l’immeuble pour une contremarche de même type et couleur, mais d’une hauteur égale à celle des autres contremarches, d’ici le 15 juin 2001;

 

Ordonne à la défenderesse de poser l’isolant et le crépi sur les murs de fondation à la gauche, et à la droite s’Il y a lieu, de l’entrée du garage de l’immeuble, d’ici le 15 juin 2001;

 

Rejette les autres demandes de la demanderesse.

 

Déclare que les coûts de l’arbitrage seront supportés pour moitié par chacune des parties.

 

Québec, le 5 avril 2001

 

Me Jean Moisan, arbitre