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ARBITRAGE

En vertu du Règlement sur le plan de garantie
des bâtiments résidentiels neufs

(Décret 841-98 du 17 juin 1998)

 

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

 

Groupe d’arbitrage et de médiation sur mesure (GAMM)

Dossier no :

2011-11-002

 

 

 

Date :

11 mai 2011

______________________________________________________________________

 

DEVANT L’ARBITRE :

JEAN MORISSETTE

______________________________________________________________________

 

PATRICK POITRAS

 

Bénéficiaire

Et

 

9139-3454 QUÉBEC INC.

 

Entrepreneur

Et

 

LA GARANTIE ABRITAT INC. (Anciennement la Garantie des Maîtres Bâtisseurs)

Administrateur

 

______________________________________________________________________

 

AUDITION PRÉLIMINAIRE SUR LA REQUÊTE EN IRRECEVABILITÉ POUR PRÉSENTATION TARDIVE DE LA DEMANDE D’ARBITRAGE

______________________________________________________________________

 

 

[1]          La décision de l’Administrateur portée en arbitrage par le Bénéficiaire a été rendue le 4 juin 2009. Le Bénéficiaire a reçu cette décision par courrier recommandé de Postes Canada le 11 juin 2009, pièce A-12;

[2]          Le Groupe d’arbitrage et de médiation sur mesure (GAMM) a reçu la demande d’arbitrage du Bénéficiaire le 8 janvier 2011, pièce A-13;

[3]          Cette demande a été transmise par courriel. Dans le texte de la demande d’arbitrage, on peut y lire que le désordre soulevé consiste en des infiltrations d’eau qui seraient causées par une pente négative du sol périphérique de la maison;

[4]          L’Administrateur décline la réclamation du Bénéficiaire sur la base que la plainte du consommateur relève du terrassement, aspect spécifiquement exclu au plan de garantie en vertu de l’article 1.3.9 du contrat, pièce A-2;

[5]          Le texte de la décision de monsieur Marcel Carron, sous étude se lit ainsi, inter alia :

« Terrassement

Commentaires des parties

Le Bénéficiaire mentionne que L’Entrepreneur doit corriger le nivellement du terrain, de l’entrée et du pourtour de la maison.

L’Entrepreneur mentionne qu’il effectuera les corrections afin de se conformer au contrat de vente.

Décision de GMB

En vertu du texte de garantie concernant les exclusions, l’article 1.3.9 stipule que : « Les espaces de stationnement et les locaux d’entreposage situés à l’extérieur du Bâtiment où se trouvent les unités résidentielles et tout ouvrage situé à l’extérieur du Bâtiment tels les piscines extérieures, le terrassement, les trottoirs, les allées et le système de drainage des eaux de surface du terrain ».

Par conséquent, GMB ne peut reconnaître ce point en vertu du texte de garantie. »

 

Le délai de la demande d’arbitrage

[6]          En résumé, la décision a été reçue le 11 juin 2009, la demande d’arbitrage est du 8 janvier 2011, soit 19 mois d’intervalle alors que l’article du contrat de garantie, pièce A-2, et le Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs stipulent un délai de 30 jours.

 

[7]          L’article 19 du Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs édicte :

« 19    Le bénéficiaire ou l’entrepreneur, insatisfait d’une décision de l’administrateur, doit, pour que la garantie s’applique, soumettre le différend à l’arbitrage dans les 30 jours de la réception par poste recommandée de la décision de l’administrateur à moins que le bénéficiaire et l’entrepreneur ne s’entendent pour soumettre, dans ce même délai, le différend à un médiateur choisi sur une liste dressée par le ministre du Travail afin de tenter d’en arriver à une entente. Dans ce cas, le délai pour soumettre le différend à l’arbitrage est de 30 jours à compter de la réception par poste recommandée de l’avis du médiateur constatant l’échec total ou partiel de la médiation »

[8]          Au même effet que le règlement d’application, le contrat de garantie, pièce A-2, stipule :

« 1.6.1 :  Le Bénéficiaire ou l’Entrepreneur, insatisfait d’une décision de GMB doit, pour que la garantie s’applique, soumettre le différend à l’arbitrage dans les 30 jours de la réception par la poste recommandée de la décision de GMB à moins que le Bénéficiaire et l’Entrepreneur ne s’entendent pour soumettre, dans ce même délai, le différend à un médiateur choisi sur une liste dressée par le ministère du Travail afin de tenter d’en arriver à une entente. Dans ce cas, le délai pour soumettre le différend à l’arbitrage est de 30 jours à compter de la réception par poste recommandée de l’avis du médiateur constatant l’échec total ou partiel de la médiation.

Le non-respect d’un délai de recours ou de mise en œuvre de la garantie par le bénéficiaire ne peut lui être opposé lorsque l’entrepreneur ou GMB manque à ses obligations (spécifiées aux clauses 3 et 4 du présent contrat) prévues au contrat aux sections 1.4, 4.5, 2.0, 3.0, 4.0 et 5.0, à moins que ces derniers ne démontrent que ce manquement n’a eu aucune incidence sur le non-respect du délai ou que le délai de recours ou de mise en œuvre de la garantie ne soit échu depuis plus d’un an. Cette clause s’applique à l’ensemble du contrat sans restriction.

Le Bénéficiaire, l’Entrepreneur et GMB sont liés par la décision arbitrale dès qu’elle est rendue par l’arbitre. La décision arbitrale est finale et sans appel.

 

 

Les coûts de l’arbitrage sont partagés à part égales entre GMB et l’Entrepreneur lorsque ce dernier est le demandeur. Lorsque le demandeur est le Bénéficiaire, ces coûts sont à la charge de GMB à moins que le Bénéficiaire n’obtienne gain de cause sur aucun des aspects de sa réclamation, auquel cas l’arbitre départage les coûts. »

[9]          Les avocats de l’Entrepreneur et de l’Administrateur soulèvent l’irrecevabilité de la demande d’arbitrage du 8 janvier 2011, soit plus de 19 mois après la réception de la décision;

[10]       Le Bénéficiaire soutient qu’il lui était impossible d’obtenir l’opinion d’un expert à cette époque et qu’il n’a pas cru nécessaire de demander l’arbitrage avant d’avoir eu en main le rapport d’expertise;

 

Le témoignage du bénéficiaire

[11]       Après avoir été assermenté, le Bénéficiaire dépose, du consentement des parties, un document intitulé historique des faits, pièce B-1;

[12]       Le formulaire d’inspection pré réception, étape 5, pièce A-5, mentionne :

« Terrain, niveau du sol aux bords du bâtiment (espace entre le parement et le sol) pentes descendantes qui éloignent l’eau du bâtiment*

*À revoir au printemps 2009 pour rajuster (sic) le nivellement du terrain : Rajout de remplissage si besoin, il y a pour respecter (sic) l’écoulement des eaux (sic). »

[13]       De plus, dans la portion du formulaire « Notes personnelles », on peut y lire : « Vérifier nivelage arpette (sic) fonte (sic) des neiges (sic) »; le formulaire est alors signé le 12 décembre 2008;

[14]       Fait important, seules les mentions apparaissant au formulaire « Notes personnelles » étaient inscrites lors de la signature du document. Les autres inscriptions sont des notes personnelles ajoutées par le Bénéficiaire par la suite, une semaine ou deux après la date mentionnée sur l’étape 5. Ainsi, seul la stipulation de vérifier le nivelage du terrain était écrite lorsque les parties ont apposé leur signature à ce document;

[15]       De la prise de possession des lieux le 12 décembre 2008 jusqu’au 4 mars 2009, plusieurs désordres sont constatés;

 

 

[16]       Par la suite, le Bénéficiaire, à la suggestion de l’Administrateur, envoie des avis à l’Entrepreneur;

[17]       Puisque l’Entrepreneur ne fait pas les réparations demandées, monsieur Marco Carron, conciliateur pour l’administrateur se déplace sur les lieux, comme cela est prévue au contrat de garantie;

[18]       Le 11 juin 2009, le Bénéficiaire apprend que le désordre qu’il soulève concernant des infiltrations d’eau qui seraient causées par des pentes de terrain qui amènent l’eau vers sa maison, n’est pas couvert par le plan de garantie;

[19]       Parce qu’il s’agit de travaux urgents, il engage un entrepreneur en excavation qui procédera aux travaux. Ce sont ces coûts qui sont réclamés par le Bénéficiaire;

[20]       À la page 10 de la décision, pièce A-12, on y lit : «  Dans l’éventualité où vous ne seriez pas d’accord avec la décision rendue, nous vous rappelons que vous avez le droit d’aller en arbitrage selon la procédure prévue en annexe. »;

[21]       Le Bénéficiaire a fait appel à un expert, le rapport d’expertise du 30 septembre 2009 mentionne qu’il y a effectivement un problème de pente de terrain;

[22]       Ce rapport en main, le Bénéficiaire mandatera une avocate pour aviser l’Entrepreneur d’une demande de remboursement des frais qui sont identiques à ceux sujets de la présente demande d’arbitrage;

[23]       Un dossier à la cour du Québec a été introduit contre l’Entrepreneur en ce sens;

[24]       Dernièrement, le Bénéficiaire a révoqué le mandat de son procureur, ne s’est pas présenté devant le tribunal ou comparu au dossier judiciaire, malgré les avis et requête en rejet signifiés par les procureurs de l’Entrepreneur;

[25]       En contre-interrogatoire, j’apprendrai que le Bénéficiaire sait qu’il a dépassé le fameux 30 jours. En effet, il connaissait le délai de présentation d’une demande d’arbitrage depuis la réception de la maison. Puisque, lors de la signature de l’étape 5, pièce A-4, le 12 décembre 2008 un livret explicatif de la garantie lui a été remis qui mentionne ce délai;

 

 

 

 

 

Analyse

[26]       Je ne trouve ici aucun fait ou preuve qui permettrait au Bénéficiaire de bénéficier d’une audition sur la validité de la décision de l’administrateur sans avoir respecté les délais de présentation d’une demande d’arbitrage;

[27]       L’arbitre peut relever des conséquences de son retard la partie qui démontre qu’elle a été, en fait, dans l’impossibilité d’agir;

[28]       Rien dans la preuve ne suggère une impossibilité d’agir dans le délai prescrit. Au contraire, le Bénéficiaire prend la peine de préciser que la demande d’arbitrage en était une de « last resort » ayant épuisé ses demandes et sa patience;

[29]       La preuve ne révèle pas qu’il s’agit ici de l’erreur ou de la négligence d’un tiers mandataire et/ou d’un conseiller du Bénéficiaire, situation dans laquelle j’aurais alors pu avoir une certaine discrétion pour accorder une permission spéciale si la partie avait démontré qu’en fait il était impossible pour elle d’agir[1];

[30]       Or, manifestement, le Bénéficiaire n’est plus dans le délai prévu à l’article 19 du règlement et rien dans la preuve ne permet de croire à une situation de fait qui démontre une impossibilité d’agir avant le 8 janvier 2011;

[31]       La raison invoquée par le Bénéficiaire à l’effet qu’on ne pouvait procéder à une expertise […] ne peut être retenue. Le Bénéficiaire devait faire une demande d’arbitrage dans le délai prévu au règlement et demander à l’arbitre nommé de lui accorder un délai pour obtenir un rapport d’expert lui permettant d’étayer sa preuve à l’encontre de la décision de l’Administrateur. Ce genre de situation survient constamment. L’arbitre accorde habituellement le délai demandé[2];

 

POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

ACCEUILLE la requête en irrecevabilité pour présentation tardive de la demande d’arbitrage;

REJETTE la demande d’arbitrage

 

 

Les frais de l’arbitrage étant à la charge de l’Administrateur.

 

À Sainte-Agathe-des-Monts le 30 mai 2011.

 

 

 

JEAN MORISSETTE, arbitre

 

M. PATRICK POITRAS

Bénéficiaire

 

ME DAVID COUTURIER

Procureur de l’Entrepreneur

 

ME MANON CLOUTIER

Procureur de l’administrateur

 

Date(s) d’audience :

6 mai 2011

 

 

 

 


 

 

MONSIEUR PATRICK POITRAS

129, de la Capricieuse

Saint-Colomban (Québec)  J5K 2N4

             Bénéficiaire

Et

ME DAVID COUTURIER pour

9139-3454 QUÉBEC INC. 

271, Roland-Godard

Saint-Jérôme (Québec) J7Y 5C7

             Représentant de l’entrepreneur

 

Et

ME MANON CLOUTIER pour

LA GARANTIE ABRITAT INC.

Savoie Fournier Avocats

5930, rue Louis-H. Lafontaine,

Anjou (Québec)  H1M 1S7

             Pour L’Administrateur

 

Date(s) d’audience :

6 mai 2011

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 



[1] Zito c. Le Rocca, soreconi, 20 octobre 2005, Me Michel Jeanniot, arbitre.

[2] Menuiserie Valiquette c. Poudrier/ Brunet, dossier 035964-1, 12 septembre 2007, Claude Mérineau, arbitre