ARBITRAGE EN VERTU DU RÈGLEMENT SUR LE PLAN DE GARANTIE DES BÂTIMENTS RÉSIDENTIELS NEUFS (Décret 841-98) |
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CANADA |
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PROVINCE DE QUÉBEC |
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Groupe d’arbitrage et de médiation sur mesure (GAMM) |
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Dossier no : |
GAMM : 2007-09-013 |
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APCHQ : 095186 (06-216-PM) |
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ENTRE : LISA RAE ET MICHAEL NUTTER (ci-après les « bénéficiaires ») ET : LA GARANTIE DES BÂTIMENTS RÉSIDENTIELS NEUFS DE L’APCHQ (ci-après l’« administrateur ») ET : CONSTRUCTION RÉAL LANDRY INC. (ci-après l’« entrepreneur ») |
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DEVANT L’ARBITRE : |
Me Johanne Despatis |
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Pour les bénéficiaires |
Me Catia Larose |
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Pour l’administrateur |
Me Patrick Marcoux |
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Pour l’entrepreneur |
Me Jean-Guy Lacasse |
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Date de l’audience |
29 avril 2008 |
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Lieu de l’audience |
Longueuil |
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Réception dernière correspondance |
6 mai 2008 |
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Date de la sentence |
10 juin 2008 |
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SENTENCE ARBITRALE |
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Adjudex inc.
0709-8278-GAMM
SA 8041
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INTRODUCTION
[1] Monsieur Michael Nutter et madame Lisa Rae, les bénéficiaires, contestent en vertu de l’article 19 du Règlement sur le Plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs, ci-après le Plan, plusieurs éléments de deux rapports respectivement datés des 26 avril et 4 décembre 2006 à la suite d’inspections réalisées par la Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ inc., l’administrateur.
[2] Les bénéficiaires sont les propriétaires d’une résidence située à Carignan construite par Constructions Réal Landry inc., l’entrepreneur, sur un terrain leur appartenant.
[3] Les éléments contestés du rapport daté du 26 avril 2006, rapport no 1, sont les suivants :
Concernant les points 11 à 14 qui suivent, nous sommes en présence de situations apparentes qui, contrairement aux exigences du Règlement sur le Plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs, n’ont pas été dénoncées par écrit au moment de la réception.
[...]
11. Embossures - côté extérieur de la porte de service du garage.
Dénonciation :
De l’avis du bénéficiaire, les embossures apparentes, du côté extérieur de la porte, pourraient avoir été causées lors d’une tentative de vol, en cours de chantier.
Quoi qu’il en soit, cette situation était apparente au moment de la réception du bâtiment.
[...]
Concernant les points 15 à 27 qui suivent, le bénéficiaire n’a pas été en mesure, lors de l’inspection, de nous démontrer la présence de malfaçns dans les matériaux et la main d’oeuvre fournis par l’entrepreneur.
Par conséquent, la Garantie des maisons neuves de l’APCHQ ne peut intervenir pour ces points.
[...]
20. Largeur de la porte reliant le garage au sous-sol.
Dénonciation :
Le bénéficiaire dénonce le fait que la porte installée par lui-même, fournie par l’entrepreneur, est d’une largeur de 32 pouces alors que les exigences
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contractuelles commanderaient une porte d’une largeur de 34 pouces et un cadre correspondant.
[...]
24. Foyer du salon - fixation du filage et de la boite de jonction et mise à niveau de l’appareil.
Dénonciation : Le bénéficiaire a lui-même procédé au correctif nécessaire, relativement à la fixation du filage et de la boite de jonction au bas du foyer.
Toutefois, il maintient sa réclamation quant à la mise à niveau de l’appareil, considérant l’instabilité et l’absence d’ancrage de l’âtre du foyer, aux murs adjacents.
Inspection :
Le foyer nous est apparu à niveau, bien qu’un léger mouvement, lors d’une poussée manuelle, puisse laisser croire à un problème de stabilité de ce dernier.
Règle générale, l’installation semble correspondre aux exigences des manufacturiers pour ce type d’appareil.
[4] Les éléments contestés du rapport daté du 4 décembre 2006 (rapport no 2) sont les suivants :
2. Infiltrations d’eau provenant du dessous de la dalle du sous-sol (salle mécanique)
Depuis l’émission du rapport de décision du 26 avril 2006, l’entrepreneur a effectué des travaux relativement à la situation dénoncée. Le bénéficiaire mentionne toutefois craindre que le problème n’ait été que partiellement réglé, référant aux items a), b), c) et d) relatés au rapport et les commentaires inscrits à sa lettre du 4 juin 2006.
En ce qui concerne l’item a), l’entrepreneur a procédé à une vérification partielle du drain français par caméra. Aucun correctif ne fut exécuté à l’endroit du drain comme tel.
Pour le point b), l’entrepreneur a revu le niveau de l’évacuation du système gravitaire à l’endroit du bassin de captation, et exécuté des perforations audit bassin pour drainer l’eau qui s’accumulerait sous la dalle à cet endroit.
Relativement au point c), l’entrepreneur, référant à ses obligations contractuelles, n’a apporté aucune modification aux pentes de drainage au périmètre des fondations. Le bénéficiaire a cependant revu le système de drainage enfoui des gouttières et régularisé le remblai autour du bâtiment.
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Finalement, en ce qui concerne l’item d), l’entrepreneur a installé un second bassin de captation perforé, dans la salle mécanique, pourvu d’une seconde pompe d’assèchement, laquelle s’évacue vers le premier bassin à l’avant du sous-sol.
Forte de ces observations du 16 juin 2006, la GMN a mandaté un hydrogéologue pour s’assurer de la méthode préconisée par l’entrepreneur et des résultats qui en découleraient.
Ainsi donc, le 4 juillet 2006, une tranchée exploratoire vers le drain français fut effectuée, au coin arrière gauche du bâtiment, tout comme un visionnement par caméra du drain français.
Des relevés piézométriques furent effectués, sur une période d’observation de plusieurs semaines. À cet égard, un rapport d’expertise soumis en annexe fait état de correctifs supplémentaires requis pour éliminer tout risque d’infiltration d’eau.
L’expert conclut que les systèmes de drainage en place possèdent donc une efficacité marginale considérant que les observations n’ont pas été effectuées en période de crue.
Il associe de plus cette situation à un taux d’humidité excessif occasionnant la condensation autour des équipements mécaniques de la résidence. Des photos démontrant le soulèvement du plancher flottant installé par le bénéficiaire ont également été soumises au dossier.
Afin de palier à ces situations, l’hydrogéologue suggère au moins deux méthodes correctives, à la page 7 de son rapport.
Le bénéficiaire a pour sa part démontré que la conduite placée près du plafond évacuant l’eau du second bassin de captation vers le premier, condensait et s’égouttait, malgré la présence d’un isolant, lequel n’est pas étanche.
Travaux :
Dans les quarante-cinq (45) jours suivant réception de la présente, l’entrepreneur devra apporter les correctifs requis pour éliminer les infiltrations d’eau, la condensation occasionnée par le taux d’humidité excessif affectant la dalle et le fini la recouvrant, en appliquant les méthodes correctives décrites au rapport de l’hydrogéologue, à la page 7.
Il va de soi qu’une fois les travaux complétés, les lieux devront être remis à leur état d’origine, incluant le plancher flottant.
Exclusion :
Les demandes d’intervention du bénéficiaire aux endroits suivants, sont exclues des travaux :
- Humidité à la base des murs porteurs visible malgré la présence d’un encapsulant agissant comme coupure capillaire entre le bois et le dessous de la dalle.
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A cet égard, le bénéficiaire devra appliquer un fongicide, portion couverte par l’assureur du bénéficiaire, tel qu’expliqué au précédent rapport.
- Fissures à la dalle. Voir le point 16 du précédent rapport.
[...]
4. Niveau d’installation du drain de plancher de la salle mécanique au sous-sol.
Constat :
L’entrepreneur a réalisé les correctifs requis relativement à ce point. Toutefois, le bénéficiaire allègue qu’aucun correctif ne fut fait relativement aux pentes de la dalle se dirigeant vers le drain.
Nous avons vérifié le niveau au drain relocalisé et constaté qu’il se trouvait au point bas, tel que requis.
Les légères dépressions observées à la dalle sont à l’intérieur des tolérances admissibles, de sorte que la garantie n’a plus à intervenir relativement à ce point.
[...]
10. Mise en place dénivelée et non étanche de la bouche d’évacuation du foyer à la façade latérale droite.
Constat : L’entrepreneur a corrigé l’étanchéité au périmètre de la bouche d’évacuation. Il subsistait toutefois un doute quant à la mise à niveau par rapport au parement de maçonnerie.
Après vérification supplémentaire, l’installation de la bouche d’évacuation nous est apparue adéquate de sorte que la GMN n’a plus à intervenir relativement à ce point.
[5] Initialement, j’étais également saisie de la contestation par les bénéficiaires des points 1 et 3 du rapport no 2. Toutefois, monsieur Nutter a indiqué en cours d’audience qu’il retirait la demande d’arbitrage à leur égard.
[6] Il est utile de rappeler que parallèlement au recours des bénéficiaires, l’entrepreneur a également entrepris de contester en vertu de l’article 19 du Plan les points 1 et 2 du rapport no 2. Toutefois, dans une sentence rendue le 20 septembre 2007, j’accueillais le moyen d’irrecevabilité qu’y opposaient les bénéficiaires au motif de tardiveté. Cette décision a été maintenue en Cour supérieure, le 16 janvier 2008.
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[7] À la demande de l’entrepreneur, les débats ont été enregistrés en sténographie sans toutefois que les parties ne jugent nécessaires d’en obtenir la traduction. En sorte que la présente sentence est rédigée à partir de mes notes personnelles, donc sans le bénéfice d’une transcription.
PREUVE
[8] Les bénéficiaires signent l’acte de réception de leur résidence située à Carignan le 28 janvier 2006. Le 23 du mois suivant, ils dénoncent à l’entrepreneur et à l’administrateur certains problèmes qu’ils estiment couverts par le Plan à un titre ou à un autre.
[9] L’administrateur désigne alors l’inspecteur Rénald Cyr, à l’époque inspecteur-conciliateur à son emploi, qui procède à une inspection le 16 mars 2006 et fait rapport le 26 avril. Il s’agit du rapport no 1 dont les extraits pertinents sont reproduits ci-haut. L’entrepreneur procède alors à un certain nombre de correctifs.
[10] Insatisfaits de ceux apportés à l’égard des points 2, 4 et 10 ainsi que des conclusions de l’inspecteur Cyr à l’égard des points 11, 20 et 24, les bénéficiaires présentent une demande d’arbitrage le 4 juin 2006.
[11] Un premier arbitre est alors désigné. À la demande des parties, l’arbitrage initialement engagé devant cet arbitre est suspendu afin de permettre notamment à l’administrateur de procéder à une seconde inspection. Celle-ci a lieu les 16 juin et 4 juillet 2006. Puis, l’administrateur rend une nouvelle décision le 4 décembre 2006. Il s’agit du rapport no 2 dont les extraits pertinents sont rapportés plus haut.
[12] Partiellement insatisfaits du rapport no 2, les bénéficiaires présentent une seconde demande d’arbitrage, également confiée à cet autre arbitre. Éventuellement, de l’accord des parties, ces deux arbitrages consolidés me sont confiés.
[13] Je résume dans les paragraphes qui suivent la preuve présentée à l’égard des points demeurés en litige de l’un et l’autre rapport.
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RAPPORT No 1
Point 11 : Embossures - côté extérieur de la porte de service du garage.
[14] La visite des lieux m’a effectivement permis de constater la présence d’embossures sur cette porte. L’administrateur a jugé cette réclamation exclue du Plan parce que non dénoncée au moment de la réception du bâtiment.
[15] Ni monsieur Nutter, ni monsieur Landry, représentant de l’entrepreneur, n’ont témoigné à ce sujet.
Point 20 : Largeur de la porte reliant le garage au sous-sol.
[16] Monsieur Nutter affirme que cette porte ne correspond pas à celle convenue dans son contrat avec l’entrepreneur. Il voulait une porte d’une largeur de 34 pouces alors que l’entrepreneur en a installé une de 32 pouces.
Point 24 : Foyer du salon - fixation du filage et de la boite de jonction et mise à niveau de l’appareil.
[17] Les bénéficiaires contestent la décision de l’administrateur suivant laquelle le foyer du salon malgré une légère instabilité serait néanmoins conforme.
[18] Hormis notre visite des lieux, aucune preuve n’a été présentée à cet égard par les bénéficiaires. De son côté, monsieur Landry qualifie l’installation du foyer de conforme, ajoutant que le foyer ne pouvait pas être appuyé contre du bois.
RAPPORT No 2
Point 2 : Infiltrations d’eau provenant du dessous de la dalle du sous-sol (salle mécanique).
[19] Les bénéficiaires ont dénoncé pour la première fois ces infiltrations d’eau en février 2006.
[20] Cette dénonciation donne lieu à une première décision de l’administrateur dans le rapport no 1, daté du 26 avril 2006. Ce point est alors traité comme suit :
Dénonciation :
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Le bénéficiaire dénonce des infiltrations d’eau récurrentes, au plancher de la salle mécanique du sous-sol, par les microfissures et à la base des murs porteurs, de même qu’au conduit de la soupape.
Une démarche auprès de l’assureur du bénéficiaire a fait en sorte qu’une compensation monétaire d’environ 800 $ lui aurait été accordée, pour ragréer le gypse et voir à l’application d’un fongicide au périmètre de la pièce, incluant un dédommagement pour le mobilier endommagé dans la même pièce.
À ce jour, le bénéficiaire n’a pas réalisé les correctifs de ragréage des finis, alléguant que la cause de ces infiltrations d’eau n’avait [pas] été déterminée et relevait de la responsabilité de l’entrepreneur.
Reliées à ce point, le bénéficiaire dénonce les situations suivantes, pour lesquelles il demande réparation à l’entrepreneur, afin de régler de façon définitive le problème :
a) Vérifier par caméra, la condition du drain français et apporter les correctifs, si requis.
b) Abaisser le niveau de la flotte de la pompe submersible (système secondaire), placée dans le bassin de captation, un système d’évacuation par gravité agissant comme moyen primaire de drainage dudit bassin.
c) Modifier les pentes de drainage, au périmètre des fondations, lesquelles occasionnent l’accumulation d’eau aux abords de celles-ci.
d) Trouver une façon de réduire l’accumulation d’eau sous la dalle de la salle mécanique, en raison de la présence d’une semelle de fondation continue, laquelle fait obstruction à la répartition de la pression d’eau sous l’ensemble de la dalle du sous-sol.
Travaux :
Nos observations, au jour de l’inspection, et les informations soumises au dossier, permettent de conclure que la situation dénoncée comporte plusieurs items nécessitant améliorations, afin de régler le problème d’infiltration d’eau par les fissures de la dalle et au bas des murs porteurs de la salle mécanique.
Conséquemment, l’entrepreneur devra mettre en oeuvre tous les moyens requis pour y parvenir, incluant le ragréage des finis endommagés, mis à part la portion couverte par l’assureur du bénéficiaire.
[21] Suite au rapport no 1, l’entrepreneur procède à certains correctifs. Ceux-ci sont jugés inadéquats par les bénéficiaires qui présentent leur première demande d’arbitrage suivie éventuellement d’une nouvelle inspection de l’administrateur au début de l’été 2006.
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[22] L’administrateur décide alors de mandater un expert monsieur Donat Bilodeau, ingénieur hydrogéologue, afin qu’il se penche sur cette question des infiltrations d’eau.
[23] Monsieur Bilodeau présente son rapport le 13 novembre 2006. Il se lit ainsi :
La présente constitue notre expertise concernant le niveau de la nappe phréatique et le drainage en fondation de la résidence [...].
Historique
[...]
Les inspections à la caméra au niveau du drain français indiquent un niveau d’eau pouvant occuper 100% de la section du drain, une eau contenant des particules en suspension, un floc (agglomération de particules fines et colloïdales) qui tapisse le pourtour du drain et une sédimentation d’un limon argileux à la base du drain.
Constat
Une visite des lieux a permis de définir la problématique ainsi que les travaux requis afin d’établir la piézométrie (surface de la nappe d’eau souterraine) du secteur. [...] la présence d’un mince limon de couleur rouille à l’intérieur des deux fosses de captage situées au sous-sol de la résidence indique une certaine concentration de fer dans l’eau souterraine. Toutefois, lors de l’excavation du 04 juillet 2006, on note un dépôt silteux gris brunâtre à la base du drain ainsi que l’absence d’un limon de couleur rouille. [...]
[...]
La nappe d’eau souterraine recoupée sur la propriété s’écoule en direction du ruisseau suite à environ 65 mètres au sud-est de la résidence. Le niveau de la nappe d’eau souterraine a varié à la hausse, entre les trois séries de lecture, de 0,265 m dans le piézomètre AF-01 comparativement à 0,315 m dans le piézomètre AF-02 situé à proximité du système de drainage de la fondation. Pendant cette période, le niveau du ruisseau a monté d’environ 0,45 m. La surface de la nappe d’eau sur la propriété réagit à la hausse suite à des précipitations. En date du 19 octobre 2006, la nappe phréatique près de la résidence se situait à 0,23 m au-dessus du plancher du sous-sol, suite à une accumulation de 41,5 mm de pluie en trois jours à la station Saint-Hubert. Le suivi des niveaux d’eau en date du 11 septembre, du 05 et du 19 octobre 2006 ne représente pas les extrêmes mais indique une fourchette de piézométrie sous des conditions de précipitations normales.
[...]
Opinion
Les travaux réalisés dans le mandat démontrent la présence d’une nappe d’eau sous faible pression au niveau de l’unité stratigraphique composée de sable
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silteux et graveleux en profondeur, sous la fondation. En effet, lors du fonçage du piézomètre éloigné, une zone saturée a été interceptée à la base de cet horizon semi-perméable. L’excavation de la fondation a résulté en une cuvette entourée de sols compacts où la nappe d’eau souterraine est apparue assez rapidement au fond de l’excavation. Sur les photos 1 et 2, on observe la présence de la nappe d’eau, en premier le 27 juin 2005, au droit de la salle mécanique. Compte tenu de ces observations, l’aménagement par l’entrepreneur de la fosse de captage perforée dans la salle mécanique (…) était une mesure corrective rapide et efficace pour abaisser le niveau d’eau dans le secteur problématique.
Le suivi piézométrique réalisé à l’automne 2006 démontre que la nappe d’eau souterraine près de la résidence est fortement influencée par les conditions climatiques. Lors du relevé effectué le 19 octobre 206, la nappe d’eau près de la résidence (…) était située à une élévation supérieure au plancher du sous-sol (0.23m). Toutefois, lors de la visite du 04 juillet 2006, l’eau au droit du drain français à l’arrière de la résidence était à un niveau normal (59% de la section du drain). Les systèmes de drainage en place possèdent donc une efficacité marginale considérant que les observations n’ont pas été effectuées en période de crue.
La présente étude démontre un risque réel d’infiltration au niveau du plancher du sous-sol de la résidence. En effet, en période des plus hautes eaux, nous croyons que le système de drainage de la résidence doit permettre un rabattement de plus de 0,33 mètre afin de maintenir, en tout temps, le niveau d’eau souterraine sous la base de la dalle. En effet, la présence de la surface piézométrique près de la base de la dalle cause un taux d’humidité excessif qui favorise la condensation autour des équipements mécaniques de la résidence.
A cette fin, il est recommandé d’implanter une mesure corrective efficace à long terme en tenant compte des dépôts ferriques observés dans les fosses de captage qui peuvent réduire l’efficacité de tout système de drainage et imposent un entretien périodique en fonction du taux de colmatage.
Recommandations
Dans un premier temps, une mesure corrective envisageable serait d’améliorer le système de drainage en place en installant des conduites de drainage radiales vers les fosses de captage en place dans la salle mécanique et dans la grande salle adjacente. Le radier de ces conduites atteindrait au moins 35 à 40 cm sous la base de la dalle du plancher et les conduites seraient raccordées à un niveau le plus bas possible dans les fosses en place.
Une seconde solution consisterait à effectuer un cuvelage du mur de fondation et de la dalle de béton du sous-sol à l’aide de membranes d’étanchéité afin de prévenir toute infiltration d’eau au sous-sol. Une nouvelle dalle de béton serait coulée sur la dalle existante (dont la résistance à la poussée hydrostatique devrait être évaluée par un ingénieur en structure) et renforcée d’acier d’armature au besoin. De plus, un système de drainage supplémentaire serait installé sous la
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dalle en place. La valeur de la poussée hydrostatique maximale serait prescrite après un suivi du niveau des plus hautes eaux mesuré à la crue printanière. [Caractères gras ajoutés]
[24] L’administrateur souscrit pour l’essentiel à l’opinion de l’ingénieur Bilodeau dans son rapport no 2 et ordonne à l’entrepreneur d’apporter les correctifs requis pour éliminer les infiltrations d’eau, la condensation occasionnée par le taux d’humidité excessif affectant la dalle et le fini la recouvrant, en appliquant les méthodes correctives décrites au rapport de l’hydrogéologue, à la page 7.
[25] Ne partageant pas le même point de vue sur les correctifs possibles, les bénéficiaires contestent cette décision en arbitrage.
[26] L’ingénieur Donat Bilodeau a été cité à l’audience. Il a été reconnu comme expert spécialisé en hydrogéologie, une science qui sommairement étudie les mouvements de l’eau dans le sol, i.e. la présence de l’eau et son mode de propagation.
[27] Après avoir décrit ses constatations, monsieur Bilodeau a élaboré sur les deux solutions qu’il suggère à son rapport.
[28] La première consiste à améliorer le système de drainage en place.
[29] Selon lui, en général, un système de drainage de ce genre se fait à plus grande échelle que pour une seule résidence. L’idée consiste en substance en l’installation sous la résidence d’un drain équipé de perforations circulaires plus nombreuses que les drains généralement utilisés. Installé à un niveau inférieur au radier de fondation, il capterait ainsi la nappe phréatique avant qu’elle n’atteigne la dalle. En somme, dit l’expert, l’idée est de capter l’eau avant qu’elle n’atteigne la fondation et ne fasse pression sur celle-ci pour ensuite remonter à l’intérieur par capillarité. Il reconnait qu’un tel système exige nécessairement l’utilisation d’une pompe. En période de crue, cette solution serait suffisante à la condition que l’eau n’atteigne pas le dessous de la dalle.
[30] Étant donné, la présence de dépôts ferriques sur le site susceptibles de diminuer l’efficacité du drainage, il faudra, ajoute l’expert, en assurer un entretien régulier, une démarche
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nécessaire au bon fonctionnement de tout système de drainage devant composer avec des dépôts ferriques.
[31] Décrivant la deuxième solution qu’il a envisagée, monsieur Bilodeau dit que le cuvelage qu’il suggère ne relève pas à proprement parler de l’hydrogéologie. Cela dit, il s’agirait dans ce cas de construire une espèce de baignoire pour contrer la poussée d’eau et ainsi éviter qu’elle ne s’infiltre par capillarité.
[32] Pour leur part, les bénéficiaires ont mandaté pour investiguer la même question des infiltrations, l’ingénieur Pierre Rodrigue, spécialisé en fondations et structures de bâtiment.
[33] Ce dernier produit un rapport dans lequel il décrit la situation ainsi :
[...] notre mandat consiste à analyser les différentes solutions possibles et à proposer une solution permanente afin de corriger cette situation de façon définitive.
Les critères de conception et de construction
Selon les documents que nous avons consultés, des critères précis ont été établis par la Ville de Carignan concernant les élévations minimum et maximum que doivent respecter certains éléments d’un bâtiment construit dans cette zone. En effet, les notes et commentaires accompagnant le permis de construction émis par la Ville de Carignan mentionnent que les radiers des fondations doivent être situés à une élévation supérieure à 18.3 m pour diminuer les risques de refoulement d’égout. Si l’on considère que l’épaisseur d’un empattement standard est de 0.25 m et que l’épaisseur d’une dalle sur sol standard est de 0.10 m, le niveau minimum de la dalle sur sol du bâtiment doit être de 18,65 m. De plus, ces notes et commentaires mentionnent également que l’élévation de la partie supérieure du mur de fondation doit être située entre 0.3 et 1,5 m plus haut que le centre de la rue et que l’élévation de l’entrée du garage doit être située à un niveau plus élevé que le centre de la rue pour permettre d’avoir une pente suffisante afin d’évacuer l’eau de surface vers la rue. On y mentionne également l’altitude de référence de 20,417 m de la borne fontaine vis-à-vis la façade du bâtiment.
Selon les informations qui nous ont été transmises, l’évacuation des eaux pluviales de cette zone est effectuée avec l’aide d’un bassin de rétention. Le radier de la conduite d’évacuation de ce bassin de rétention est situé à l’élévation 18.0 m, ce qui explique l’élévation de 18,3 m demandé par la Ville de Carignan pour le niveau minimum des radiers des fondations. Toute fondation située à une élévation inférieure à 18,3 m, a la possibilité d’être inondée par refoulement d’égout pluvial lorsque le niveau du bassin de rétention est à son maximum.
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La situation actuelle
Selon le relevé des niveaux effectué par l’arpenteur géomètre, la dalle sur sol est située à l’élévation 18,26 m, soit 0.39 m plus basse que celle prescrite par la Ville de Carignan. Si l’on considère les mêmes épaisseurs que précédemment pour la dalle sur sol et l’empattement, le niveau du radier des fondations bâtiment est situé à l’élévation 17,91 m.
Selon le rapport d’expertise de Donat Bilodeau Experts-Conseils inc., le niveau de la nappe phréatique près du bâtiment varie entre 18,125 m et 18,490m. Bien que le radier de la conduite d’évacuation du bassin de rétention soit situé à l’élévation 18,0 m, il est normal que le niveau de la nappe phréatique soit légèrement supérieur à cet endroit. De façon générale, le niveau d’une nappe phréatique varie en fonction de la distance d’un point d’évacuation, selon la porosité ou la capacité de rétention du sol. Toutefois, on observe que les niveaux indiqués au rapport d’expertise de Donat Bilodeau Experts-Conseils inc. ne dépassent jamais l’élévation 18,65 m, soit celle prescrite par la Ville de Carignan pour l’élévation minimum de la dalle sur sol du bâtiment.
[34] Monsieur Rodrigue a été cité à témoigner. Il reprend à cette occasion l’essentiel de son rapport. S’agissant de ses constatations sur l’état des lieux, il explique alors les calculs qu’il a faits pour déterminer le niveau du radier de fondation qu’il situe à 17,91 m et celui de la dalle sur sol à 18,26 m. Se basant sur les calculs de l’expert Bilodeau, monsieur Rodrigue situe enfin le niveau de la nappe phréatique entre 18,125 et 18,49 m, ajoutant qu’en période de crue, il peut atteindre 18,79 m.
[35] Dans son rapport, l’expert Rodrigue poursuit au sujet des solutions :
Le niveau de la nappe phréatique étant parfois supérieur au niveau actuel de la dalle sur sol du bâtiment, il est donc primordial d’avoir un système de drain français efficace pouvant capter les eaux et les évacuer vers le système pluvial de la Ville. Malheureusement, le niveau étant inférieur à celui du radier de la conduite d’évacuation du bassin de rétention, le drain français baigne alors dans la nappe d’eau faisant aussi partie intégrante du système de rétention de la Ville. Aucune évacuation n’est alors possible. Le sous-sol du bâtiment est alors inondé jusqu’au niveau correspondant à celui de la nappe phréatique à cet endroit.
La fissuration excessive de la dalle sur sol est aussi une conséquence de la présence importante d’eau sous celle-ci [...]. En effet, lorsque l’eau est évacuée, elle entraine avec elle des particules de sol, créant ainsi des vides sous la dalle sur sol. Cette dalle n’étant pas de nature structurale, le manque de support entraine une fissuration et un affaissement à ces endroits. Le nouveau bassin de
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captation installé dans la salle mécanique ne modifie en rien la situation existante.
[...]
Conclusion et recommandation
Afin de corriger cette situation, nous analyserons tout d’abord les différentes alternatives possibles, dont celles proposées par M. Donat Bilodeau, ing.
La première alternative, telle que proposée par M. Bilodeau, consiste à conserver le drain français existant au pourtour du bâtiment et à ajouter un nouveau système de drain français sous la dalle sur sol du bâtiment. Toutefois, afin de pouvoir évacuer l’eau captée par le système de drain français, elle doit être pompée à un niveau supérieur à 18,3 m avant d’être évacuée dans le système d’égout pluvial de la Ville. Un nouveau drain français peut aussi être ajouté au niveau 18,3 m au pourtour du bâtiment de façon à évacuer une portion de l’eau de façon gravitaire et ainsi diminuer la charge de travail du système de drains français inférieur. La portion de l’eau évacuée par gravité sera toutefois très faible par rapport à la quantité d’eau à évacuer. Cette alternative nécessite un entretien régulier de la pompe ainsi qu’un système d’urgence advenant le cas où la pompe ne fonctionnerait pas. Le niveau du radier des fondations (et ainsi que celui du radier du drain français) étant situé sous le niveau de la conduite d’évacuation du bassin de rétention de la Ville, et en fonction des niveaux de la nappe d’eau indiqués au Tableau 1 du rapport de M. Bilodeau, il apparait que le système de pompage devra être dimensionné de façon spécifique afin d’avoir une capacité suffisante et qu’il fonctionnera de façon quasi-permanente. On ne peut donc avancer avec certitude qu’aucune infiltration d’eau n’aura lieu.
La deuxième alternative, aussi proposée par M. Bilodeau, est la construction d’un radier étanche en béton armé. Des drains français peuvent ou non être installés sous cette dalle, mais leur bon fonctionnement nécessite toutefois l’utilisation d’une pompe, tel que discuté pour l’alternative précédente. La construction d’une telle dalle est possible, mais son épaisseur importante réduira la hauteur libre du sous-sol si elle est construite au niveau de la dalle sur sol existante. Afin de conserver la hauteur libre du bâtiment, le radier pourrait être construit sous le niveau des fondations existantes. Dans les deux cas, des travaux devront aussi être exécutés en sous-oeuvre au niveau de la base des murs de fondation au pourtour du bâtiment de façon à s’assurer de l’étanchéité complète du joint mur/dalle. Bien que cette solution soit techniquement faisable, les coûts reliés aux travaux de construction d’une telle dalle avec membrane d’étanchéité ainsi que ceux reliés aux travaux en sous-oeuvre au pourtour du bâtiment sont importants, et cette solution nécessite tout de même un entretien au niveau des membranes d’étanchéité.
La troisième alternative est le soulèvement du bâtiment afin de situer le radier des fondations à l’élévation prescrite par la Ville de Carignan, permettant ainsi d’évacuer les eaux de façon gravitaire. Bien que le coût de ces travaux soit aussi
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important, cette solution est de type permanente et ne nécessite aucun entretien à long terme. Le soulèvement du bâtiment permet aussi de le situer à une élévation supérieure à la moyenne des niveaux de la nappe phréatique, ce qui diminue de façon importante l’humidité environnante et la quantité d’eau à évacuer. Nous estimons qu’un montant budgétaire entre 50 000 $ et 75 000 $ doit être prévu pour la réalisation de ces travaux. Comme ces travaux sont de nature très spécialisée, nous vous recommandons de faire appel à un entrepreneur spécialisé dans ce type de travaux afin d’établir un montant plus précis.
Bien que plusieurs alternatives puissent être envisagées afin de corriger cette situation, cette dernière alternative, nous semble être la seule solution permanente permettant de réduire la quantité d’eau à évacuer, d’évacuer les eaux de façon gravitaire et ne nécessitant pas d’entretien à long terme. Ces travaux permettront d’assurer le bon fonctionnement à long terme du système de drainage au pourtour du bâtiment, la conformité du bâtiment aux prescriptions de la Ville de Carignan et ainsi d’assurer le confort et la sécurité des occupants.
[36] Commentant les trois hypothèses avancées par lui ou son collègue, l’expert Rodrigue utilise l’image d’une maison qui serait construite dans un lac. Pour empêcher que l’eau ne s’y infiltre, la première solution consiste à s’assurer que le lac se vide constamment; la seconde à construire un bateau autour de celle-ci; et la dernière, à la sortir du lac.
[37] Au sujet de la première solution envisagée par monsieur Bilodeau, l’expert Rodrigue la qualifie de techniquement faisable mais peu recommandable dans le domaine résidentiel. Pour lui c’est jouer avec le feu : pareil système demande de l’entretien, en outre de devoir fonctionner en tout temps : c’est une question de pompe, ajoute-t-il, devant fonctionner en permanence en raison de l’élévation de la maison qui demeurerait située à un niveau plus bas que celui du bassin de rétention. Autrement dit, selon lui, si la pompe flanche, l’eau cesse d’être évacuée et elle peut s’infiltrer.
[38] La seconde solution est celle qui se réfère à l’image d’un bateau. Monsieur Rodrigue reprend essentiellement ce qu’il écrit à ce sujet dans son rapport. Cette solution est techniquement faisable. Il s’agit en substance de construire une dalle structurale d’au moins 8 pouces qui reprend les pressions hydrostatiques. Elle est couteuse et nécessite un entretien dans la mesure où la membrane d’étanchéité a nécessairement une durée de vie limitée et devra éventuellement être changée, sans toutefois qu’il puisse préciser quand.
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[39] Cette solution représente des défis techniques puisqu’elle nécessite des travaux en sous-oeuvre et le recours à des spécialistes. Au surplus, elle réduit la hauteur libre du sous-sol.
[40] Selon monsieur Rodrigue, la seule solution vraiment durable dans les circonstances est de sortir la maison de l’eau. Bien que son rapport indique que la résidence devrait être soulevée de manière à situer le radier des fondations à l’élévation prescrite par la Ville de Carignan, il reconnait en pratique qu’il faudra effectivement la soulever presqu’à l’élévation maximale prescrite par la Ville de Carignan soit à 18,45 m. Selon lui, à ce niveau en période de crue, ce sont les drains français autours de la maison qui vont drainer l’eau avant qu’elle ne se rende sous la fondation de sorte que le système de pompage ne sera plus nécessaire. Quoi qu’il en soit, il reconnait que cette solution présenterait des défis techniques énormes.
[41] Concernant la norme municipale relative à l’élévation du radier des fondations à laquelle réfère monsieur Rodrigue dans son rapport, monsieur Patrick Bergeron, inspecteur en bâtiment à l’emploi de la Ville de Carignan, est venu expliquer qu’effectivement la ville exige que les radiers des fondations se situent à une élévation supérieure à 18,3 m et ce, pour diminuer les risques de refoulement d’égout au cas où le réseau pluvial serait saturé. Le propriétaire d’une résidence qui ne respecte pas cette norme risque de ne pas être dédommagé par la ville en cas de refoulement d’égout.
[42] Monsieur Nutter est venu décrire sommairement ses démarches et ses raisons d’avoir retenu les services de l’entrepreneur pour construire sa résidence sur un terrain qui lui appartenait déjà. Il reconnait ne pas avoir personnellement mené ou commandé d’études de sol avant la construction de sa maison.
[43] Décrivant sa résidence, il précise que son sous-sol a été conçu en vue d’y aménager une chambre pour son fils, un studio pour sa fille ainsi qu’une salle familiale. Or, à ce jour, ce sous-sol n’est toujours pas entièrement aménagé et ce, en raison des problèmes d’infiltrations d’eau et d’humidité qui l’affligent depuis les tout débuts.
[44] Monsieur Nutter ajoute We did not contract for a house to be built below the water [line]. We are not interested in living in a house boot. Ni, dit-il, d’une maison qui exige à temps plein le fonctionnement d’un équipement de pompage. Déjà, ajoute monsieur Nutter, la pompe située
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dans la salle mécanique fonctionne toutes les deux minutes et il doit toujours y avoir quelqu’un présent pour s’assurer de son fonctionnement s’il y a une panne d’électricité.
[45] Interrogé au sujet de la présence d’infiltrations d’eau depuis les correctifs apportés suite au rapport no 1, il reconnait ne pas en avoir vue mais ajoute devoir toujours composer avec la moisissure, les odeurs et l’humidité, au point où un déshumidificateur y fonctionne sans arrêt depuis deux ans.
[46] Monsieur Landry, représentant de l’entrepreneur, est venu expliquer jusqu’où celui-ci a creusé lors de la construction de la résidence. Il affirme n’avoir pas vu beaucoup d’eau lorsqu’il a coulé les fondations la même journée ou le lendemain. L’entrepreneur n’a pas effectué de tests de sol, cette responsabilité étant selon lui celle des bénéficiaires tout comme celle d’obtenir les permis nécessaires auprès de la Ville de Carignan.
[47] Interrogé au sujet des correctifs suggérés, monsieur Landry privilégie la première avancée par monsieur Bilodeau et il se dit disposé à la mettre en place selon la méthode qu’il décrit sommairement.
[48] Il rejette la seconde solution parce que, selon lui, monsieur Nutter n’accepterait pas de perdre de l’espace en hauteur dans son sous-sol dont celle-ci le priverait.
[49] Quant à la troisième suggérée par monsieur Rodrigue, monsieur Landry dit que même si la maison est haussée, qu’elle est déjà dans la nappe phréatique et elle le demeurera quand même après. Au surplus, dit-il, élever la maison comporte des risques majeurs et peut occasionner d’autres problèmes comme des fissures.
Point 4 : Niveau d’installation du drain de plancher de la salle mécanique au sous-sol.
[50] Hormis une inspection visuelle à l’occasion de notre visite des lieux, aucune preuve n’a été présentée à l’égard de ce point. Selon monsieur Nutter, le sort de cette réclamation sera emporté par la décision rendue à l’égard du point 2.
Point 10 : Mise en place dénivelée et non étanche de la bouche d’évacuation du foyer à la façade latérale droite.
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[51] Cette réclamation concerne en fait la non-conformité alléguée de travaux correctifs faits par l’entrepreneur suite au premier rapport. L’administrateur y ordonnait alors à l’entrepreneur de s’assurer que la bouche d’évacuation du foyer ait une mise à niveau adéquate par rapport au parement de maçonnerie et à son étanchéité par rapport audit parement.
[52] Selon la preuve, l’entrepreneur a subséquemment à ce rapport apporté des correctifs. Jugés inadéquats par les bénéficiaires, ils sont suivis de la seconde inspection de monsieur Cyr où ce dernier juge alors que la situation a été corrigée.
[53] Outre la visite des lieux, aucune preuve n’a été présentée à ce sujet.
LES PLAIDOIRIES
Bénéficiaires
[54] La plaidoirie de la procureure des bénéficiaires s’est limitée au point 2 relatif aux infiltrations. Selon la procureure, les experts reconnaissent que la résidence des bénéficiaires est assise dans l’eau et que cette situation contrevient aux règles de l’art ainsi qu’au Code national du bâtiment. En outre, ajoute la procureure, l’élévation de la maison contrevient à une norme municipale, le radier des fondations se situant à un niveau inférieur à celui de 18,3 m exigé par la Ville de Carignan.
[55] Selon la procureure, contrairement à ce que l’administrateur plaide, ce dernier peut en vertu du Plan ordonner à un entrepreneur de procéder à des travaux correctifs précis et que c’est précisément ce qui s’est fait en l’espèce.
[56] En effet, soutient la procureure, non seulement l’administrateur ne s’est-il pas contenté d’ordonner à l’entrepreneur de rendre la bâtisse conforme, il est allé, comme il en avait l’autorité, jusqu’à préciser quels travaux correctifs effectuer, laissant toutefois l’entrepreneur libre de choisir entre deux options.
[57] Pour la procureure, les bénéficiaires n’avaient pas à rester passifs et à attendre que l’entrepreneur effectue les travaux. En effet, dit-elle, ceux-ci estiment que ces derniers ne corrigeront pas le problème, un problème majeur nécessitant des travaux importants et dont le
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choix aura des conséquences importantes sur l’usage de leur résidence. En outre, de poursuivre Me Larose, le correctif retenu doit être permanent et complet. Il ne saurait donc s’agir d’un simple essai routier puisque l’entrepreneur a l’obligation en vertu du Plan d’agir selon les règles de l’art.
[58] Se tournant vers la solution préconisée par l’entrepreneur, la première solution suggérée par l’expert Bilodeau, la procureure en dit que celle-ci nécessitera la présence d’un système de drainage doté d’une pompe fonctionnant de manière permanente. Or, dit-elle, cette contrainte exigera des bénéficiaires de veiller sans cesse à son bon fonctionnement, notamment en cas de panne électrique. En somme, il s’agirait de ce fait d’une solution fastidieuse et qui ne répond pas aux attentes des bénéficiaires.
[59] Pourtant, de continuer la procureure, l’entrepreneur a une obligation de résultat et la méthode corrective choisie doit résoudre le problème de façon définitive. Or, ajoute la procureure, cette première suggestion avancée par l’expert Bilodeau n’en est pas une à long terme; n’est pas idéale, en outre, selon le témoignage de monsieur Rodrigue, de ne pas assurer une solution permanente du problème.
[60] Commentant la deuxième solution avancée par monsieur Bilodeau, la procureure souligne que celle-ci nécessite des travaux en sous-oeuvre, en outre d’avoir pour conséquence de réduire l’espace habitable. De plus, elle ne rendrait pas la résidence conforme à la norme municipale relative à la hauteur du radier des fondations.
[61] En revanche, poursuit la procureure, la solution préconisée par monsieur Rodrigue serait permanente en plus de présenter l’avantage de rendre la résidence conforme à la règlementation municipale.
[62] En terminant, la procureure conclut que le choix final ne doit pas porter sur la méthode la moins couteuse mais plutôt sur le correctif le plus adéquat dans les circonstances.
[63] La procureure a invoqué et commenté les autorités suivantes : Gauthier et Duperon et La Garantie des Maitres Bâtisseurs inc., SA, 20 février 2007, arbitre Marcel Chartier; Bélanger c. Turcotte, REJB 1999-14169 (CS); Beauchamp c. Lepage, REJB 2001-25566 (CS); Grondin c. Cloutier, REJB 1999-13282 (CS); Ménard et Les Entreprises Christian Dionne et Fils inc. et La
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Garantie des maisons neuves de l’APCHQ inc., SA, 3 juillet 2006, arbitre Jean Morissette; Somico Constructions inc. et La Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ inc. et Prégent, SA, 20 janvier 2005, arbitre Johanne Despatis.
Entrepreneur
[64] Se tournant d’abord vers la première solution avancée par monsieur Bilodeau, le procureur de l’entrepreneur soutient qu’en la préconisant son client n’envisage pas un simple essai routier mais bien une authentique solution. Celle-ci, dit-il, aura pour effet d’éviter que l’eau ne touche la fondation. Déjà, ajoute le procureur, les travaux effectués par l’entrepreneur suite au rapport no 1, ont mis fin aux infiltrations d’eau et celle-ci empêchera les autres problèmes de se reproduire.
[65] Selon l’expert Bilodeau, soutient en effet Me Lacasse, cette solution fera en sorte qu’il n’y aura plus d’eau sous la dalle. De la sorte, en s’assurant qu’il n’y ait plus de pression hydrostatique, la résidence sera rendue conforme.
[66] Selon le procureur, l’expert Rodrigue n’aurait pas nié que cette solution soit conforme, se limitant à dire qu’elle comportait un risque au cas de panne d’électricité. Or, selon le procureur, ce risque peut être éliminé avec l’utilisation d’une génératrice.
[67] Au surplus, ajoute Me Lacasse, même la solution avancée par monsieur Rodrigue, ne dispenserait pas les bénéficiaires de la nécessité d’avoir un système de drainage et de pompage puisque la nappe phréatique peut atteindre à certaines périodes de l’année un niveau de 18,79 m.
[68] Selon le procureur, l’expert Rodrigue a reconnu que les deuxième et troisième solutions posaient des défis techniques importants et que d’y recourir n’était pas exempt d’entrainer de nouveaux problèmes.
[69] Quant à la question de l’élévation de la résidence par rapport à la règlementation municipale, le procureur l’écarte comme non pertinente en disant que même si l’entrepreneur avait respecté le niveau prescrit, la résidence des bénéficiaires serait dans la même situation qu’aujourd’hui par rapport au niveau de la nappe phréatique.
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[70] Pour conclure, le procureur souligne que ce sont les bénéficiaires qui ont eux-mêmes choisi le terrain en question et décidé de ne pas procéder à des études de sol.
[71] Le procureur n’a invoqué aucune autorité.
Administrateur
[72] Pour le procureur de l’administrateur, tout le débat relatif au point 2 se résume à la question de la méthode corrective retenue.
[73] Me Marcoux souligne que les infiltrations d’eau survenues chez les bénéficiaires l’étaient toutes avant le rapport no 1. En outre, selon lui, rien dans la preuve ne permet de conclure que le problème affectant la résidence des bénéficiaires n’aurait pas été complètement résolu à la suite des travaux correctifs effectués par l’entrepreneur à la suite de cette décision d’avril 2006. Selon le procureur, les propos de l’expert Bilodeau selon lesquels les systèmes de drainage en place possèdent donc une efficacité marginale signifient que ceux-ci seraient à la limite du tolérable.
[74] S’agissant de l’élévation du bâtiment, Me Marcoux en dit qu’il s’agit là d’un problème lié au risque de refoulement d’égout, une question, selon lui, distincte de celle en litige qui en est plutôt une d’étanchéité.
[75] Cela dit, le procureur fait valoir que ce que proposait l’expert Bilodeau règle le problème et que la décision de l’administrateur doit être maintenue. En fait, selon lui, le désaccord des bénéficiaires avec ces solutions les amène à proposer ce qui constitue en fait une méthode de correction basée sur leurs exigences, qu’il qualifie de très élevées et qui ne justifient pas le rejet des correctifs retenus par l’administrateur.
[76] Invoquant l’article 2099 du Code civil du Québec, le procureur soutient que le choix des méthodes correctives susceptibles d’être suivies relève de la discrétion de l’entrepreneur. Ici, l’administrateur a certes suggéré des travaux particuliers mais en bout de ligne, c’est à l’entrepreneur que revient le choix ultime de la méthode retenue pour corriger un problème couvert par le Plan.
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[77] Selon le procureur, la solution préconisée par l’entrepreneur aura pour effet de rabattre la nappe phréatique et de régler le problème. Le fait qu’une pompe soit en conséquence fréquemment sollicitée n’est pas un critère déterminant quant à l’à-propos d’une solution. Le procureur invoque à ce sujet la clause 12 (10) du Plan.
[78] Se référant à l’article 116 du Plan, le procureur soutient qu’il serait inéquitable pour l’administrateur que l’arbitre impose à l’entrepreneur ce qui reviendrait à des préférences des bénéficiaires dans les circonstances.
[79] Se tournant vers le point 11 du rapport no 1, le procureur soutient qu’il s’agit là d’une malfaçon apparente à la prise de possession et qui n’a pas été dénoncée lors de la réception du bâtiment, un fait selon lui, non contredit qui justifie le rejet de la demande.
[80] Enfin, le procureur écarte comme sans fondement la demande relative au point 20 du rapport no 1. Il soutient qu’il n’y a là ni vice ni malfaçon, s’agissant tout au plus d’une mésentente contractuelle non couverte par le Plan.
[81] Le procureur a invoqué les autorités suivantes : Thouin et Les Habitations Iso-Confort inc. et La Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ inc., SA, 16 juin 2006, arbitre Michel A. Jeanniot; Clément Moisan Ltée et La Portneuvienne générale mutuelle d’assurance générale, AZ- 90011388; Les Maisons Zibeline inc. et Gagnon et La Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ inc., SA, 11 janvier 2006, arbitre Jeffrey Edwards; Dumont et Etmar Construction inc. et La Garantie Qualité Habitation, SA, 6 mai 2002, arbitre Claude Mérineau; Demers et Construction JPH inc. et La Garantie Qualité Habitation, SA, 31 janvier 2007, arbitre Claude Dupuis; Forage Marathon Cie c. Doncar Construction inc., AZ-50084798 ; Saint-Laurent c. Jacques Fortin Construction inc., REJB-2002-34378 (CS).
Réplique des bénéficiaires
[82] Me Larose réplique que même s’il n’y a pas eu d’infiltration d’eau depuis les correctifs apportés par l’entrepreneur suite au rapport no 1, il reste que l’administrateur lui-même les a jugés inadéquats. D’ailleurs, ajoute la procureure, ce n’est pas parce qu’il n’y a pas eu d’infiltration que le vice a été corrigé. Au surplus, il y a toujours le problème d’humidité et de
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moisissures, le problème étant que l’immeuble est assis dans la nappe phréatique et qu’il n’est pas étanche.
[83] Se tournant vers le point 11, la procureure soutient qu’il a été dénoncé au moment de la réception tel qu’en fait foi un document qui, selon elle, aurait été annexé à la liste des travaux à terminer lors de la réception du bâtiment.
ANALYSE ET DÉCISION
[84] Je traiterai d’abord des points 11, 20 et 24 du rapport no 1 pour aborder ensuite les points 2, 4 et 10 du rapport no 2.
RAPPORT No 1
Point 11 : Embossures - côté extérieur de la porte de service du garage.
[85] Ma visite des lieux m’a permis de constater la présence d’embossures sur cette porte. L’administrateur juge cette réclamation exclue du Plan parce que non dénoncée au moment de la réception du bâtiment.
[86] La documentation transmise par l’administrateur en conformité de l’article 67 du Plan, comporte une liste de déficiences où selon la procureure apparaitrait précisément la mention de la porte. Toujours selon la procureure, cette liste aurait été annexée à la liste des éléments à corriger lors de la réception du bâtiment. Cependant aucun témoignage n’a été entendu à ce sujet.
[87] Cette réclamation est donc rejetée.
Point 20 : Largeur de la porte reliant le garage au sous-sol.
[88] Monsieur Nutter affirme que cette porte ne correspond pas à celle convenue dans son contrat avec l’entrepreneur.
[89] Cette question concerne la non-conformité de la dimension d’une porte par rapport à la taille commandée. Avec égards, même en prenant pour acquis que l’entrepreneur ne se serait pas conformé à un engagement contractuel envers les bénéficiaires au sujet de la dimension de cette
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porte, ce qu’il n’est pas nécessaire pour moi de décider en l’espèce, ce manquement allégué serait-il exact qu’il ne constituerait pas dans les circonstances une malfaçon. En effet, outre sa dimension qui ne serait pas conforme à leurs attentes, les bénéficiaires n’ont pas prétendu que cette porte ou son installation présentaient quelque contravention aux règles de l’art ou aux normes de la construction qui serait couverte par le Plan.
[90] Pour ces raisons, cette réclamation est rejetée.
Point 24 : Foyer du salon - fixation du filage et de la boite de jonction et mise à niveau de l’appareil.
[91] Les bénéficiaires contestent la décision de l’administrateur suivant laquelle le foyer du salon, malgré un léger mouvement, serait conforme.
[92] Selon la preuve prépondérante, l’installation du foyer est conforme en ce que celui-ci ne devait pas être posé contre une paroi en bois.
[93] Cette réclamation est donc rejetée.
RAPPORT No 2 Point 2 : Infiltrations d’eau provenant du dessous de la dalle du sous-sol (salle mécanique).
[94] Le litige précis concernant ce point a trait au correctif susceptible de remédier au problème d’infiltration d’eau qui affecte la résidence des bénéficiaires, problème dont la matérialité n’est pas en litige.
[95] En effet, selon la preuve, le niveau de la nappe phréatique du terrain où est érigée la résidence varie entre 18,125 et 18,49 m pouvant même atteindre près de 18,79 m en période de grande crue. Quant au radier des fondations, il se situe lui à 17,91 m et sa semelle à 18,23 m.
[96] La preuve révèle que la hauteur du radier des fondations est inférieure à la norme d’élévation de 18,3 m prescrite par la Ville de Carignan. Fait à souligner, la non-conformité à cette norme municipale de construction, révélée apparemment par l’expertise de monsieur Rodrigue, n’a fait l’objet d’aucune réclamation auprès de l’administrateur, ni donc d’une décision de sa part. Selon ma compréhension des choses, cette absence de conformité n’est
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causale ni dans les infiltrations ni dans l’humidité dont sont victimes les bénéficiaires. Selon la preuve, même si elle y avait été conforme, la construction telle qu’elle se trouve n’aurait quand même pas été à l’abri des problèmes dont il s’agit ici.
[97] Quoi qu’il en soit, il ressort de tout cela que la résidence des bénéficiaires repose dans l’eau qui, faute d’étanchéité de celle-ci, par capillarité remonte à travers la fondation, d’où les problèmes d’infiltrations et d’humidité que l’on sait.
[98] La nécessité de remédier à ce qu’on a reconnu être un défaut de construction au sens du Plan n’est pas en litige ici, non plus que sa persistance malgré certains correctifs apportés par l’entrepreneur suite au rapport no 1. En somme, le litige porte sur le correctif à y apporter plutôt que sur l’existence ou l’étendue du problème.
[99] Selon la preuve, la seconde décision de l’administrateur relative au point 2 faisait suite à une inspection supplémentaire réalisée après que les bénéficiaires se furent plaints que l’entrepreneur ne s’était pas conformé au rapport no 1 à ce sujet.
[100] Que disait le rapport no 1 au sujet du point 2?
[101] Ce qui suit :
Nos observations, au jour de l’inspection, et les informations soumises au dossier, permettent de conclure que la situation dénoncée comporte plusieurs items nécessitant améliorations, afin de régler le problème d’infiltration d’eau par les fissures de la dalle et au bas des murs porteurs de la salle mécanique. Conséquemment, l’entrepreneur devra mettre en oeuvre tous les moyens requis pour y parvenir, incluant le ragréage des finis endommagés, mis à part la portion couverte par l’assureur du bénéficiaire.
[102] En substance, les correctifs déjà apportés ont réduit le problème sans toutefois l’éliminer. Les problèmes persistants des bénéficiaires les a amenés à en saisir à nouveau l’administrateur qui a alors jugé bon de recourir à un ingénieur hydrogéologue pour avoir l’heure juste sur le niveau de la nappe phréatique et le drainage en fondation de la résidence.
[103] L’ingénieur Bilodeau a reconnu que les premiers correctifs apportés n’avaient pas résolu le problème d’où sa suggestion de deux recommandations de correctifs susceptibles d’y arriver, suggestion entérinée par l’administrateur qui adopte le rapport no 2 en décembre 2006.
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[104] En effet, l’administrateur ordonne alors précisément à l’entrepreneur d’apporter les correctifs requis pour éliminer les infiltrations d’eau, la condensation occasionnée par le taux d’humidité excessif affectant la dalle et le fini la recouvrant [caractères gras ajoutés]; et cela en appliquant les méthodes correctives décrites au rapport de l’hydrogéologue, à la page 7.
[105] C’est précisément contre cela qu’en ont les bénéficiaires qui nient que les correctifs suggérés par monsieur Bilodeau seront suffisants. Selon eux, ces solutions ne sont pas conformes. Ils me demandent donc de les écarter en faveur de celle suggérée par l’expert Rodrigue.
[106] Pour sa part, l’entrepreneur, à l’origine a cherché à se pourvoir en arbitrage contre ces conclusions de l’administrateur. J’ai déjà rappelé qu’il a été débouté pour tardiveté du recours de sorte qu’il est effectivement confronté à l’alternative que présente le rapport no 2, soit de choisir entre l’un ou l’autre des deux correctifs suggérés par l’expert Bilodeau. Depuis, l’entrepreneur a fait valoir que son choix va vers la solution décrite plus haut comme la première solution décrite par l’expert Bilodeau.
[107] S’agissant de la question des correctifs susceptibles de découler de l’application du Plan, l'administrateur a fait valoir la décision arbitrale à venir ne pouvait pas priver l’entrepreneur du libre choix de la solution ultime puisque ce dernier aurait toujours, selon la loi, le choix des méthodes d’exécution des contrats qu’il conclut.
[108] L’article 2099 du Code civil du Québec reconnait comme suit à l’entrepreneur le libre choix des moyens d’exécution de son contrat:
L'entrepreneur [...] a le libre choix des moyens d'exécution du contrat et il n'existe entre lui et le client aucun lien de subordination quant à son exécution.
[109] Ce droit comporte en corollaire un certain nombre d'obligations dont, à l'article 2100 du Code civil du Québec, celle pour l’entrepreneur d’agir, au mieux des intérêts de son client, avec prudence et diligence et aussi, celle familière ici, de se conformer aux usages et règles de leur art.
[110] Cette liberté, cette latitude, tiennent à la reconnaissance par le législateur de l’expertise de certains dans le domaine de la construction. Pratiquement, cette reconnaissance a comme
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contrepartie chez l’entrepreneur une obligation dite de résultat à l’égard de son client, i.e. l’obligation de livrer une chose normalement attendue et qui soit conforme.
[111] Ce dernier point de vue est bien exprimé par la Cour supérieure dans Forage Marathon Cie c. Doncar Construction inc. [précité] : [paragraphes 42 et ss]
Ces dispositions [articles 2098, 2099 et 2100 CcQ] confirment l’autonomie de l’entrepreneur [...] dans le choix des méthodes et des moyens de réalisation de l’ouvrage. Celui-ci doit être considéré comme un expert dans le domaine de la construction et, pour cette raison, il est généralement tenu à une obligation de résultat.
Il doit exécuter les travaux selon les règles de l’art et s’assurer que l’ouvrage est conforme au contrat. En cas de non-conformité de l’ouvrage, il ne peut être exonéré de sa responsabilité en prouvant simplement qu’il a utilisé des moyens d’exécution raisonnables ou des méthodes de travail standards. Il doit faire la preuve que la non-conformité résulte de la force majeure, de la faute du client ou du fait d’un tiers.
[112] Ce principe de l’autonomie relative de l’entrepreneur est repris de manière constante dans la jurisprudence arbitrale en matière de Plan. C’est le cas dans Les Maisons Zibeline inc. et Gagnon où l’arbitre Jeffrey Edwards écrit: [page 7]
[...] Plusieurs options pour corriger les travaux ont été soulevées par les parties et par l’inspecteur-conciliateur, expert, lors de l’audition.
A cet égard, le Tribunal d’arbitrage réitère que le choix des moyens appartient à l’Entrepreneur mais que ce dernier a une obligation de résultat quant au travail réalisé. En conséquence, le Tribunal constate les problèmes anormaux au plancher de bois franc à la grandeur de la surface de l’unité. L’Entrepreneur devra donc corriger le problème selon la méthode de son choix mais tout en respectant les règles de l’art et le résultat requis.
[113] En l’espèce, au moment d’apprécier les positions des uns et des autres, il ne me faut pas perdre de vue, d’une part, que le droit de l’entrepreneur d’en appeler du rapport no 2 a été rejeté et, d’autre part, que l’administrateur n’a pas prétendu qu’il ne pouvait pas ordonner ce qu’il a ordonné dans le rapport no 2.
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[114] Même si la notion, le concept, de méthode peut prêter à débat, aux dires de certains, le rapport no 2 imposerait des méthodes d’exécution de correctifs, ce qui ne serait pas de l’autorité de l’administrateur et devrait donc de ce seul fait être écarté.
[115] Avec égards, prise dans son acception qui voudrait que l’indication des travaux à faire serait synonyme de choix des méthodes d’exécution, la prétention qui voudrait que pareil choix échappe à l’autorité de l’administrateur a été examinée et rejetée dans Ménard et Les entreprises Christian Dionne et Fils inc. [précité] où l’arbitre Jean Morissette écrit :
Le Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs contient le mécanisme de mise en oeuvre de la garantie. À la lecture de ce texte de loi qui encadre ma décision, il appert de ces articles que le défaut de l’Entrepreneur de corriger des travaux dans le délai indiqué à la décision oblige l’Administrateur à les effectuer :
[...]
[28] La première décision de l’Administrateur du 28 mars 2003 prévoit le changement complet du parement de briques du bâtiment sujet.
[29]
Le texte des articles du Règlement que j’ai souligné m’indique que l’Administrateur a le pouvoir de choisir les travaux qui corrigeront la malfaçon. Nous rejetons l’argument de l’Administrateur et de l’Entrepreneur à l’effet que ce dernier est le seul maître de la façon choisie pour la correction de la malfaçon.
[30] Les auteurs Kott et Roy établissent ce principe dans le cadre d’un contrat d’entreprise de construction et non dans le cadre de l’application de la Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ inc.
[31] Pour leur part, les arbitres Claude Mérineau et Gilles Lavoie se sont exprimés sur ce point alors que l’Administrateur n’avait pas déterminé des travaux correctifs, ce qui n’est pas ici le cas.
[32] L’Administrateur reconnaît que la situation dénoncée constitue une malfaçon existante et non apparente visée par l’article 10(2) du Règlement :
«(…)il importe tout d’abord de noter que l’administrateur reconnaît toujours que la situation dénoncée constitue une malfaçon existante et non apparente visée par l’article 10.2° du Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs (c. B-1.1, r.0.2) et que la révision ne porte que sur un seul élément, soit celui relatif à la nature des travaux correctifs. »
[33] La méthode utilisée pour procéder aux travaux correctifs, soit le changement complet du parement de briques, est, nous l’accordons, de l’entière responsabilité de l’Entrepreneur.
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[34] S’il est d’usage pour l’Administrateur de ne pas s’immiscer dans la correction visant la malfaçon, ce n’est pas que le Règlement ne lui donne pas ce pouvoir. Interpréter le règlement autrement laisserait les Bénéficiaires à la merci d’un entrepreneur incompétent, ce qui va à l’encontre de l’existence même du Plan de Garantie des maisons neuves. Le pouvoir de statuer comporte le pouvoir de choisir les travaux pour corriger la malfaçon.
[35] L’Administrateur peut statuer sur les travaux que doit faire l’Entrepreneur et dans ce cas-ci, suivant l’opinion de son expert qu’il avait mandaté spécialement sur le correctif approprié, il l’a fait. L’Administrateur a choisi, conclu et ordonné par la suite à l’Entrepreneur de changer complètement le parement de briques. La décision du 23 juin 2003, pièce A-13, est limpide sur ce choix et sur le processus pour y arriver. La présente situation est différente du jugement dans l’affaire Therrien citée par l’Administrateur en ce qu’aucune décision ayant force de loi n’est révisée par la demande de Therrien de changer le parement extérieur.
[36] De son côté, l’Entrepreneur n’a pas porté la décision du 28 mars 2003 en arbitrage dans les délais requis. [Caractères gras ajoutés]
[116] Je souscris à ces propos. L’administrateur a l’autorité, pour paraphraser Me Morissette, de statuer sur les travaux que doit faire l’entrepreneur assujetti au Plan.
[117] Cet énoncé, avec égards, ne contredit pas celui de l’argument de l’administrateur voulant que l’entrepreneur ait le libre choix des méthodes correctives. En effet, puisque l’administrateur a le pouvoir de statuer sur la malfaçon, il a aussi, selon la jurisprudence, celui de choisir les travaux (à faire) pour corriger la malfaçon. En cela, choix des travaux et méthodes d’exécution, renvoient à des réalités distinctes, la première désignant l’objet à faire et la seconde la façon d’y arriver.
[118] De nier en l’espèce à l’administrateur cette faculté reviendrait à lui permettre de contester sa propre décision en affirmant qu’à part de faire un constat de malfaçon ou de vice, l’administrateur serait inhabile à ordonner tels ou tels travaux correctifs. Ce serait là une interprétation absurde de la législation et contraire à l’esprit du Plan.
[119] Il est de commune renommée qu’une sentence arbitrale à l’instar de tout jugement doit être exécutable. Or, des conclusions arbitrales qui ne porteraient que sur des formulations générales, susceptibles faute de précision de toutes les applications ou les interprétations ne seraient pas conformes à ce principe fondamental qu’un jugement doit être exécutable. Cela
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signifie que si l’administrateur peut suivant le Plan indiquer les travaux à faire, l’arbitre susceptible de réviser la décision de l’administrateur peut donc également le faire lorsque l’administrateur ne l’a pas fait en conformité du Plan.
[120] En l’espèce, les bénéficiaires se sont adjoint un expert pour les conseiller sur les correctifs à apporter pour mettre fort légitimement un terme à leur mésaventure. Celui-ci propose ainsi des travaux à faire. Il écarte comme insuffisants les deux choix de travaux suggérés par l’expert Bilodeau et retenus par l’administrateur. Monsieur Rodrigue propose donc une troisième voie qu’ils nous demandent de retenir de préférence aux deux précédentes.
[121] Comme l’arbitre a le pouvoir de se pencher sur une telle question, une partie se portant en arbitrage peut fatalement lui demander de le faire. En cela, la position des bénéficiaires est admissible devant l’arbitre, tout comme elle aurait pu être considérée par l’administrateur si on la lui avait présentée à l’époque.
[122] Cela dit, il faut garder présent à l’esprit l’objet du recours dont il s’agit ici, soit la correction d’une malfaçon ou à d’un vice. L'article 7 du Plan définit, et donc circonscrit, l’objet du Plan qui est de garantir l'exécution des obligations légales et contractuelles d'un entrepreneur dans la mesure et de la manière prévues par la présente section.
[123] L’article 10 du Plan se lit ainsi :
La garantie d'un Règlement dans le cas de manquement de l'entrepreneur à ses obligations légales ou contractuelles après la réception du bâtiment doit couvrir:
[...]
3- la réparation des malfaçons existantes et non apparentes au moment de la réception [...];
4- la réparation des vices cachés au sens de l'article 1726 ou de l'article 2103 du Code civil [...];
5- la réparation des vices de conception, de construction ou de réalisation et des vices du sol [...];
[124] Le Plan a une portée nécessairement limitée par ses termes et conditions. Ce cadre n’écarte pas par ailleurs que d’autres recours puissent être institués pour des réclamations non couvertes par le Plan. La juridiction de l’arbitre désigné en vertu du Plan est d’assurer que la
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garantie offerte par le Plan soit respectée, et qu’en pratique un problème reconnu comme étant visé par le Plan reçoive la solution prévue au Plan.
[125] L’arbitre, qui n’est pas un tribunal de droit commun, n’a pas pour rôle de se substituer à l’administrateur pour décider des questions en première ligne. Cette attribution revient à l’administrateur. C’est quand la décision de l’administrateur est jugée non conforme au Plan, et à cette condition, qu’intervient l’arbitre. L’article 19 stipule que le bénéficiaire ou l'entrepreneur, insatisfait d'une décision de l'administrateur, doit, pour que la garantie s'applique, soumettre le différend à l'arbitrage [...].
[126] La décision, la sentence que je dois rendre, doit être rendue judiciairement, i.e. entre autre, suivant des règles de preuve généralement admises dans les cours de justice.
[127] L’une de ces règles est que toute partie qui se porte demanderesse en justice, ici les bénéficiaires à l’encontre de la décision de l’administrateur, a le fardeau de démontrer le bien-fondé de ses prétentions. Cela signifie que pour avoir gain de cause la partie demanderesse doit entre autre présenter une preuve du bien fondé factuel de ses prétentions qui soit prépondérante.
[128] L’article 2804 du Code civil du Québec nous dit en quoi consiste une preuve prépondérante. Il s’agit de la preuve qui rend l’existence d’un fait plus probable que son inexistence est suffisante, à moins que la loi n’exige une preuve plus convaincante.
[129] En l’espèce, les bénéficiaires ont donc la responsabilité de (1) présenter à l’arbitre une preuve de la matérialité des faits avancés au soutien de leurs prétentions; (2) une preuve qui soit prépondérante au sens de l’article 2804 du Code civil du Québec.
[130] Concrètement ici, les bénéficiaires pour réussir devaient démontrer par une preuve prépondérante que les solutions préconisées par l’administrateur ne sont pas conforme au Plan et n’auront pas vraisemblablement l’effet correctif recherché d’assurer selon l’article 10 du Plan la réparation des malfaçons ou vices, soit en l’occurrence d’éliminer les infiltrations d’eau, la condensation occasionnée par le taux d’humidité excessif affectant la dalle et le fini la recouvrant de la résidence des bénéficiaires.
[131] En effet, ce que le Plan vise notamment est la réparation d’une malfaçon ou d’un vice. Dans cette optique, une solution qui ne présenterait pas, suivant la preuve, la vraisemblance
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raisonnable d’arriver à corriger cette malfaçon ou vice devra être écartée. C’est, selon les bénéficiaires, le sort que je devrais réserver aux solutions retenues par l’administrateur.
[132] Selon la preuve, les deux experts s’entendent pour dire que la réparation du problème exige une solution qui rende l’immeuble étanche.
[133] L’administrateur maintient et l’entrepreneur reconnait que les deux solutions proposées par l’expert Bilodeau vont produire ce résultat puisqu’elles corrigeront de manière vraisemblablement durable le problème de perméabilité constaté.
[134] De son côté, l’expert des bénéficiaires, de toute évidence de bonne foi, soutient que les travaux qu’il suggère seraient préférables puisqu’ils assureraient non pas seulement l’étanchéité mais plutôt la mise au sec de l’immeuble en le sortant pratiquement de la nappe phréatique. Monsieur Rodrigue décrit sa solution comme permanente, contrairement, à son avis, à celles envisagées en face.
[135] La question, selon le Plan, à l’examen, n’est pas pour l’administrateur de retenir la solution qui serait idéale, qu’on l’appelle permanente ou autrement, mais bien de s’assurer de la conformité au Plan de la solution retenue, i.e. celle qui réparera la malfaçon ou le vice. Concrètement, il ne s’agit donc pas de rechercher et de choisir la solution parfaite ni celle qui paraitrait parfaitement satisfaisante mais plutôt celle qui assurera la réparation de la malfaçon ou du vice décelé. C’est là le sens et la portée de la garantie offerte par le Plan contre les malfaçons et les vices.
[136] Ainsi, ce que les bénéficiaires devaient démontrer est que les solutions retenues par l’administrateur ne rencontrent pas ces attentes du Plan.
[137] J’ai indiqué déjà que le rôle de l’arbitre est d’assurer la conformité des décisions de l’administrateur, non de s’y substituer. Pour intervenir, l’arbitre doit dans un premier temps avoir été convaincue de l’à-propos en vertu du Plan d’écarter comme mal fondée la décision de l’administrateur
[138] Concrètement ici, cela signifie que l’arbitre doit être convaincu au moyen d’une preuve prépondérante que les solutions retenues par l’administrateur, ne sont pas conformes au Plan en ce qu’elles ne débarrasseront pas l’immeuble du vice ou de la malfaçon l’affligeant.
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[139] En l’espèce, le problème précis à résoudre selon le Plan est la réparation du problème d’étanchéité affectant la résidence en raison de son élévation par rapport à la nappe phréatique.
[140] Le problème identifié en est donc un d’étanchéité. Trois solutions se confrontent. Elles sont : soit (1) d’abaisser le niveau de l’eau ceinturant l’immeuble; soit (2) d’en imperméabiliser la fondation; soit (3) de hausser l’immeuble pour l’éloigner de la source des infiltrations et de l’humidité.
[141] Les deux premières solutions sont jugées conformes au Plan et retenues par l’administrateur. La troisième, que n’a jamais considérée l’administrateur, écarte les précédentes en faveur d’une autre.
[142] Commentant la première solution, l’expert Rodrigue opine que même si en théorie l’installation d’un drain muni d’une pompe pourrait empêcher l’eau de pénétrer par capillarité dans la dalle, le risque demeurerait grand en raison de l’élévation de la résidence par rapport à la conduite d’évacuation du bassin de rétention de la ville. Selon lui, pour être efficace, le procédé exigerait pratiquement que la pompe fonctionne de manière quasi permanente. Autrement dit, l’eau continuerait de risquer de s’infiltrer dès lors que le système de pompage ferait défaut, une possibilité que l’on ne peut complètement écarter. Cette affirmation n’est pas vraiment contredite.
[143] Cette solution, me semble-t-il, n’exclut pas la vraisemblance éventuelles d’infiltrations dans la mesure où elle n’assure pas une meilleure étanchéité, nécessite une surveillance accrue et dont le succès relatif dépendrait de la fiabilité de l’approvisionnement en électricité. En somme, selon ma compréhension, la première solution diminuerait les risques sans pour autant assurer une plus grande étanchéité de l’immeuble lui-même.
[144] En outre, les deux experts entendus conviennent que cette solution, même si elle est théoriquement valable, n’est pas généralement utilisée dans le domaine résidentiel. Selon l’expert Rodrigue, en cela non contredit, de la choisir serait dans les circonstances de jouer avec le feu.
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[145] Pour toutes ces raisons, j’en viens à la conclusion que la première solution n’est donc pas conforme, ni donc en cela la décision de l’administrateur qui l’a jugée conforme. Elle doit donc être écartée. Dans cette mesure, le recours des bénéficiaires est bien fondé.
[146] Qu’en est-il de la seconde solution ?
[147] Tout en préconisant l’écarter comme n’étant pas permanente, l’expert Rodrigue reconnait dans son rapport que cette solution est techniquement réalisable et susceptible de produire l’effet escompté. Certes, ce correctif requiert la présence d’une pompe, de l’entretien et aussi une diminution de l’espace habitable du sous-sol mais l’ensemble rendrait vraisemblablement la résidence étanche. La preuve prépondérante à mes yeux est en effet que, certes plus couteuse que la précédente, ce correctif assurerait l’étanchéité effective de l’ouvrage, étanchéité qui est ce qui fait présentement défaut et qui le rend non conforme.
[148] Les bénéficiaires préconisent une autre solution qu’ils jugent meilleures que celles retenues par l’administrateur. Leur solution, selon la preuve, n’est elle-même pas sans présenter de risques. Elle rendrait l’immeuble non seulement étanche mais elle le retirerait pratiquement complètement de la nappe phréatique.
[149] Peut-être s’agit-il là d’une approche que l’administrateur aurait théoriquement pu lui-même choisir en vertu du Plan, mais sauf erreur, elle ne lui a jamais été suggérée.
[150] En l’espèce, j’ai jugé que la première solution de l’administrateur n’est pas conforme. En revanche, la preuve ne permet pas de nier la conformité au Plan de la seconde solution retenue par l’administrateur.
[151] Un recours en vertu du Plan est limité. Il n’est pas une action en annulation de vente ni une action en diminution de prix. En cela les autorités invoquées par la procureure des bénéficiaires (Bélanger c. Turcotte; Beauchamp c. Lepage; Grondin c. Cloutier [précitées]), ne sont pas pertinentes ici puisque le recours en vertu du Plan est d’une autre nature.
[152] Il est bien sûr que la correction ou la réparation d’un vice ou d’une malfaçon, tout comme au départ leur seul présence, peuvent causer aux bénéficiaires des inconvénients et des ennuis que tout acheteur d’une maison neuve voudrait évidemment éviter.
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[153] Toutefois, la réparation d’éventuels dommages liés à la correction des problèmes visés au Plan n’est pas une question qui soit du ressort de l’arbitre du Plan. Il aurait certes pu en être autrement mais tel ne l’a pas voulu le législateur.
[154] Cela m’amène à traiter du fait qu’ici une pompe prévue au départ soit appelée à fonctionner plus fréquemment qu’anticipé ou que l’espace habitable soit diminuée. À mon avis, si des dommages d’origine contractuelle ou quasi-contractuelle et non visés par le Plan naissent de situations par ailleurs conformes au Plan c’est devant un autre forum que l’arbitre qu’il y a lieu d’en décider. L’adhésion au Plan ne prive personne de ces éventuels recours pas plus que leur éventualité n’invalide en soi une solution par ailleurs conforme au Plan.
[155] Dans les circonstances, j’estime donc, vu le rôle de l’arbitre et la preuve entendue, qu’il n’y a pas lieu d’écarter la deuxième solution retenue par l’administrateur en faveur de celle préconisée par les bénéficiaires.
[156] Dans cette mesure, donc, le recours des bénéficiaires est mal fondé. Compte tenu que la première solution est écartée, la décision de l’administrateur est modifiée en ce que l’entrepreneur devra apporter les correctifs requis pour éliminer les infiltrations d’eau, la condensation occasionnée par le taux d’humidité excessif affectant la dalle et le fini la recouvrant, en appliquant la seconde solution décrite au rapport de l’hydrogéologue à la page 7.
Point 4 : Niveau d’installation du drain de plancher de la salle mécanique au sous-sol.
[157] Aucune preuve ni argument n’ont été présenté à l’égard de ce point si ce n’est de l’affirmation des bénéficiaires selon laquelle le sort de ce point serait emporté par la décision rendue à l’égard du point 2.
Point 10 : Mise en place dénivelée et non étanche de la bouche d’évacuation du foyer à la façade latérale droite.
[158] Avec égards, aucune malfaçon n’a été démontrée et ma visite des lieux ne permet pas de tirer de conclusion.
[159] Cette réclamation est rejetée.
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Frais d’expertise
[160] Qu’en est-il de la réclamation des bénéficiaires concernant les frais d’expertise qu’ils ont encourus et qui totalisent la somme de 1 631,24 $ pour les services de monsieur Rodrigue ainsi que sa présence à l’audience?
[161] L’article 124 du Plan stipule que l’arbitre doit statuer, s’il y a lieu, quant au quantum des frais raisonnables d'expertises pertinentes que l'administrateur doit rembourser au demandeur lorsque celui-ci a gain de cause total ou partiel.
[162] L’administrateur n’a pas nié que ces frais soient raisonnables affirmant qu’ils ne lui paraissaient pas suffisamment élevés pour justifier une contestation. Il demande toutefois d’en retrancher la somme de 13,75 $ plus taxes, pour des frais de déplacement qui à son avis sont exclus de la portée de 124 du Plan étant plutôt visés par l’article 125 qui stipule que [l]es dépenses effectuées par les parties intéressées et l'administrateur pour la tenue de l'arbitrage sont supportées par chacun d'eux.
[163] Les bénéficiaires n’ont présenté aucun argument me permettant de mettre de côté cette interprétation de ces dispositions du Plan.
[164] Dans les circonstances, il y a donc lieu de faire droit à la demande des bénéficiaires et d’ordonner le remboursement des frais réclamés au titre de l’expertise en y retranchant le montant réclamé de 13,75 $ plus taxes à titre frais de kilométrage.
DISPOSITIF ET CONCLUSION
[165] Pour toutes les raisons qui précèdent, le Tribunal :
- Rejette les réclamations des bénéficiaires à l’égard des points 11, 20 et 24 du rapport no 1.
- Rejette la réclamation des bénéficiaires à l’égard du point 10 du rapport no 2.
- Accueille en partie la réclamation des bénéficiaires à l’égard du point 2 du rapport no 2 et ordonne en conséquence à l’entrepreneur d’apporter les correctifs requis pour éliminer les infiltrations d’eau, la condensation occasionnée par le taux
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d’humidité excessif affectant la dalle et le fini la recouvrant, en exécutant les travaux correctifs décrits à la seconde solution proposée par l’expert Bilodeau dans son rapport à la page 7 et qu’à défaut par l’entrepreneur de le faire qu’il y soit procédé par l’administrateur.
- Ordonne à l’entrepreneur d’effectuer ces travaux dans un délai à convenir avec les bénéficiaires et qu’à défaut, je déterminerai sur demande de l’une ou l’autre des parties.
- Déclare que la conclusion à l’égard du point 2 du rapport no 2 emporte le sort du point 4 de ce même rapport.
- Prend acte du désistement de la demande d’arbitrage des bénéficiaires à l’égard des points 1 et 3 du rapport no 2.
- Déclare en vertu de l’article 124 du Plan que les frais de 1 615,72 $ encourus pour le rapport et la présence de l’expert Rodrigue seront à la charge de l’administrateur et ordonne à l’administrateur de rembourser sans délai cette somme aux bénéficiaires.
- Ordonne en conformité de l’article 123 du Plan que les coûts du présent arbitrage sont à la charge de l’administrateur et que ceux ayant mené à la sentence rendue le 27 septembre 2007 soient défrayés selon les proportions suivantes : 50 % par l’administrateur et 50 % par l’entrepreneur.
Montréal, le 10 juin 2008
Johanne Despatis, avocate Arbitre |