TRIBUNAL D’ARBITRAGE

ARBITRAGE

SELON LE RÈGLEMENT SUR LE

PLAN DE GARANTIE DES BÂTIMENTS RÉSIDENTIELS NEUFS

(Décret 841-98 du 17 juin 1998, c. B-1.1, r. 0.2)

 

SOCIÉTÉ POUR LA RÉSOLUTION DES CONFLITS INC. (SORECONI)

(Organisme d’arbitrage accrédité par la Régie du bâtiment du Québec)

____________________________________________________________________________________

 

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

DISTRICT DE MONTRÉAL

DOSSIER NO: 163006001

 

SYNDICAT DE LA COPROPRIÉTÉ

PLACE GORDON - PHASE II

(LE « BÉNÉFICIAIRE »)

et

SAMCON GORDON INC.

 (L’« ENTREPRENEUR»)

et

RAYMOND CHABOT ADMINISTRATEUR PROVISOIRE es qualité

LA GARANTIE DES BÂTIMENTS RÉSIDENTIELS

NEUFS DE L’APCHQ INC.

(L’« ADMINISTRATEUR »)

______________________________________________________________________

 

DÉCISION ARBITRALE

______________________________________________________________________

 

 

Arbitre :                                                         Me Roland-Yves Gagné

 

Pour le Bénéficiaire:                                   Monsieur Pierre-François Lyonnais                                

Pour l’Entrepreneur:                                    Monsieur Daniel Gamache

 

Pour l’Administrateur:                                 Me Julie Parenteau

                                                                      Madame Anne Delage

 

Date de l’audience :                                   9 janvier 2017

                                                                     

Date de la décision:                                    30 janvier 2017


DESCRIPTION DES PARTIES

 

BÉNÉFICIAIRE

 

SDC Place Gordon-Phase II

a/s Monsieur Pierre-François Lyonnais

[...] Montréal, Qc.[...]

 

 

ENTREPRENEUR

 

Samcon Gordon Inc.

a/s Monsieur Daniel Gamache

815 est, René Lévesque

Montréal, Qc.

H2L 4V5

 

 

ADMINISTRATEUR

 

Me Julie Parenteau

Contentieux des garanties Abritat/GMN

7333 Place des Roseraies bur. 300

Anjou, Qc.

H1M 2X6

 

 

 


PIÈCES

 

A l’audience, l’Administrateur a soumis les pièces suivantes :

 

A-1 : Déclaration de copropriété en date du 10 février 2011;

A-2 : Avis de fin des travaux des parties communes en date du 22 décembre 2011;

A-3 : Liste d’inspection préréception du bâtiment en date du 4 octobre 2012;

A-4 : Lettre de mise en demeure du bénéficiaire en date du 13 décembre 2014, jointe d’un rapport de mai 2012;

A-5 : (en liasse) Photographies en date de mai 2015;

A-6 : Demande de réclamation en date du 17 juillet 2015;

A-7 : Courriel du bénéficiaire en date du 26 août 2015 et factures jointes;

A-8 : (en liasse) Avis de 15 jours de l’administrateur en date du 24 novembre 2015;

A-9 : (en liasse) Lettre et décision de l’administrateur en date du 6 juin 2016;

A-10 : Demande d’arbitrage du bénéficiaire en date du 8 juillet 2016;

A-11 : (en liasse) Lettre du centre d’arbitrage SORECONI en date du 8 juillet 2016 et demande d’arbitrage.

 

Le Bénéficiaire a soumis les pièces suivantes (les titres sont selon les allégations du Bénéficiaire) :

 

B-1 : Rapport de décision d’arbitrage sur le dossier 193528-1;

B-2 : Extraits relatifs à la pente du terrain arrière et aux pompes de puisards, tirés du document de dénonciation officiel;

B-3 : Extraits relatifs à la pente du terrain arrière et aux pompes de puisards, tirés du rapport de réception des parties communes fait par la firme AMEC. Ces extraits sont aussi commentés par écrit par M. Daniel Gamache, représentant de Samcon;

B-4 : Extrait, tiré du rapport de fonds de prévoyance présenté par la firme AMEC, au Syndicat de Place Gordon 2, qui mentionne la mauvaise conception de la pente du terrain arrière;

B-5 : Factures reliées aux réparations et à la mise-à-niveau des pompes de puisards de Gordon 2;

B-6 : Courriels en liasse.

MANDAT ET JURIDICTION

 

[1]       Le Tribunal d’arbitrage est initialement saisi suite à une demande d’arbitrage par le Bénéficiaire, reçue par SORECONI le 30 juin 2016, et par la nomination de l’arbitre soussigné en date du 8 juillet 2016.

[2]       Aucune objection quant à la compétence du Tribunal n’a été soulevée par les parties et la juridiction du Tribunal est alors confirmée.

[3]       Les différends que le Bénéficiaire demande au Tribunal d’arbitrage de trancher sont :

[3.1]       point 7 et 8 Pompe de puisards brûlées - Remboursement demandé pour travaux relatifs aux pompes des puisards (4 053,88$);

[3.2]       point 17 Pente négative - façade arrière.

LE DROIT

 

[4]       Le Bénéficiaire a produit une demande d’arbitrage en vertu de l’Article 35 du Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs (ci-après nommé le Règlement) :

Le bénéficiaire ou l'entrepreneur, insatisfait d'une décision de l'administrateur, doit, pour que la garantie s'applique, soumettre le différend à l'arbitrage dans les 30 jours de la réception par poste recommandée de la décision de l'administrateur à moins que le bénéficiaire et l'entrepreneur ne s'entendent pour soumettre, dans ce même délai, le différend à un médiateur choisi sur une liste dressée par le ministre du Travail afin de tenter d'en arriver à une entente. Dans ce cas, le délai pour soumettre le différend à l'arbitrage est de 30 jours à compter de la réception par poste recommandée de l'avis du médiateur constatant l'échec total ou partiel de la médiation.

 

[5]       La Cour d’appel du Québec, dans l’affaire La Garantie des Bâtiments Résidentiels Neufs de l’APCHQ Inc. c. Maryse Desindes et Yvan Larochelle, et René Blanchet mise en cause[1] a jugé que ce Règlement était d’ordre public :

[11] Le Règlement est d’ordre public. Il pose les conditions applicables aux

personnes morales qui aspirent à administrer un plan de garantie. Il fixe les modalités et les limites du plan de garantie ainsi que, pour ses dispositions essentielles, le contenu du contrat de garantie souscrit par les bénéficiaires de la garantie, en l’occurrence, les intimés.

[12] L’appelante est autorisée par la Régie du bâtiment du Québec (la Régie) à agir comme administrateur d’un plan de garantie approuvé. Elle s’oblige, dès lors, à cautionner les obligations légales et contractuelles des entrepreneurs généraux qui adhèrent à son plan de garantie.

[13] Toutefois, cette obligation de caution n’est ni illimitée ni inconditionnelle. Elle

variera selon les circonstances factuelles […]

 

[6]       La Cour supérieure affirme dans Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l'APCHQ inc. c. Dupuis[2] :

[75] Il est acquis au débat que l'arbitre doit trancher le litige suivant les règles de droit et qu'il doit tenir compte de la preuve déposée devant lui. Il doit interpréter les dispositions du Règlement et les appliquer au cas qui lui est soumis. Il peut cependant faire appel aux règles de l'équité lorsque les circonstances le justifient. Cela signifie qu'il peut suppléer au silence du règlement ou l'interpréter de manière plus favorable à une partie.

 

 

DÉCISION

 

Point 7 et 8 Pompe de puisards brûlées - Remboursement demandé pour travaux relatifs aux pompes des puisards (4 053,88$)

[7]       Le Tribunal d’arbitrage ne peut pas accueillir la réclamation du Bénéficiaire sur ce point pour les motifs qui suivent et se doit de maintenir la décision de l’Administrateur, qui se lisait ainsi :

[…] Selon les informations disponibles, le dysfonctionnement […] connu du syndicat depuis le mois de juillet 2012 […] On constate que la situation fut dénoncée par écrit à l’administrateur pour la première fois le 27 mai 2015 […] il appert que le délai de dénonciation excède le délai raisonnable (6 mois) […]

[8]       La présente réclamation à l’encontre de l’Administrateur pour obtenir une ordonnance de remboursement pour les travaux urgents découle d’une réclamation fondée sur l’article 27 du Règlement puisqu’il est impossible dans le présent cas d’invoquer une réclamation sous l’article 26, l’Administrateur n’ayant pas été au courant de quoique ce soit avant la réception des parties communes.

[9]       Le mot « urgent » apparaît aux articles du Règlement suivants :

34.  La procédure suivante s'applique à toute réclamation fondée sur la garantie prévue à l'article 27:

 

  1°    dans le délai de garantie d'un, 3 ou 5 ans, selon le cas, le bénéficiaire dénonce par écrit à l'entrepreneur le défaut de construction constaté et transmet une copie de cette dénonciation à l'administrateur en vue d'interrompre la prescription; […]

 

  5°    dans les 20 jours qui suivent l'inspection

[…] En l'absence de règlement, l'administrateur statue sur la demande de réclamation et ordonne, le cas échéant, à l'entrepreneur de rembourser au bénéficiaire le coût des réparations conservatoires nécessaires et urgentes et de parachever ou corriger les travaux dans le délai qu'il indique, convenu avec le bénéficiaire ;

 

78.  Pour adhérer à un plan de garantie et obtenir un certificat d'accréditation, une personne doit:

[…]   3°    signer la convention d'adhésion fournie par l'administrateur et comportant les engagements énumérés à l'annexe II;

ANNEXE  II

(a. 78)

LISTE DES ENGAGEMENTS DE L'ENTREPRENEUR

 

L'entrepreneur s'engage:

  18°    à mettre en place s'il y a lieu, toutes les mesures nécessaires pour assurer la conservation du bâtiment ou à rembourser le bénéficiaire lorsque de telles mesures ont dû être mises en place de façon urgente par ce dernier;

 

[10]    Il n’y a aucune mention de ce problème dans le rapport du professionnel du bâtiment (pièce A-4) lors de la réception.

[11]    La preuve (témoignage du représentant de l’Entrepreneur et les courriels produits en B-6) démontre qu’en juillet 2012, la pompe a été changée et la tuyauterie a été solidifiée, sans que le Bénéficiaire ait dénoncé quoique ce soit à l’Administrateur.

[12]    L’Administrateur plaide que dès novembre 2011, avant la réception des travaux des parties communes, le Bénéficiaire était courant de l’existence d’un problème.

[13]    Même si le Tribunal d’arbitrage concluait qu’il faille plutôt se situer à juillet 2012, moment où l’Entrepreneur a effectué des travaux correctifs pour (tenter de?) régler la problématique, l’article 27 du Règlement stipule clairement que le vice doit être dénoncé par écrit à l’Entrepreneur ET à l’Administrateur dans les six mois de leur découverte.

[14]    En juin 2014, la pompe a eu un autre problème mais le Bénéficiaire n’a dénoncé ce problème ni à l’Entrepreneur ni à l’Administrateur.

[15]    Le Bénéficiaire produit lui-même comme preuve, qu’il était au courant de ce problème en 2014 :

Observations du Conseil d’administration (CA), août 2014

Historique du problème

 Une des pompes de puisard (loin de porte) a été brisée par les débris présents dans l’eau, laissant qu’une seule pompe de puisard active; cette situation a occasionné une surchauffe de son moteur. Il en a résulté son usure prématurée (1er  bris de pompe).

 

 Le mécanisme de permutation entre les 2 pompes, installé aux fins d’éviter la surchauffe du moteur de chacune des pompes de puisard, est inversé et ne fonctionne pas correctement. Durant l'été, le dysfonctionnement du système a occasionné le bris d’une 2e pompe et a causé des alarmes constants à quelques reprises.

 

[16]    Pour des travaux qualifiés d’ « urgent » dans le sens juridique du Règlement, la preuve montre plutôt des travaux échelonnés dans le temps d’après les factures de juin 2014 à octobre 2015 :

[16.1]    Facture (le soussigné en conclut que la date est le 2 octobre 2015 malgré le 10/02/2015) Arseneau & Maheu « Vérifier problème pompe fonctionne »;

[16.2]    Facture du 5 décembre 2014 d’Arseneau & Maheu « Relocaliser 2 pompes »;

[16.3]    Soumission du 26 novembre 2014 d’Arseneau & Maheu « pour relocaliser 2 pompes submersibles »;

[16.4]    Facture 5 août 2014 de Pompes Roy « Passer tester ajuster float #3 et #4 »;

[16.5]    La facture du 18 juillet 2014 de Pompes Roy qui mentionne : « Passer vérifier trouble pompe puisard […] »;

[16.6]    facture du 15 juillet 2014 de Plomberie Georges Deplats « appel de service voir pompe »;

[16.7]    factures du 4 juillet 2014 d’Entreprise Électrique L. Dallaire (« Branchement du pompe ») etc.;

[16.8]    facture du 4 juin 2014 de Plomberie Georges Deplats (« Fournir et installer pompe submersible ascenseur et pluviales ».

[17]    L’Administrateur a reçu la dénonciation le 27 mai 2015, ce qui est clairement après les six mois stipulés dans le Règlement, et le délai de dénonciation est clairement déraisonnable.

[18]    Qui plus est, sans se prononcer sur le fond, le Règlement ne prévoit pas le remboursement des travaux nécessaires sans dénonciation, mais seulement des réparations conservatoires nécessaires et urgentes.

[19]    Ici les travaux se sont échelonnés sur plusieurs mois sans avis ou préavis, ni à l’Entrepreneur ni à l’Administrateur, et puisque le présent recours est contre l’Administrateur, sans permettre à l’Administrateur de rendre une décision, de se prononcer sur les travaux et les coûts qu’ils pouvaient engendrer.

[20]    Dans l’affaire Francine Bélanger et Daniel Pelletier et La Garantie des Bâtiments Résidentiels Neufs de l’APCHQ Inc. et Réseau Viva International[3], notre collègue Me Johanne Despatis écrit :

[28] En effet, la seule disposition au Règlement traitant du remboursement de dépenses effectuées par un bénéficiaire pour des travaux réalisés par lui après la réception de son bâtiment se retrouve à l’alinéa 34(5) du Règlement. Ce dernier stipule que l’administrateur, et par conséquent l’arbitre, peut ordonner le remboursement à un bénéficiaire du coût des réparations conservatoires nécessaires et urgentes faites par lui. 

[29] On peut certes concevoir que les travaux faits par monsieur Pelletier n’étaient pas superflus. Cela dit, la preuve n’a toutefois pas démontré qu’il s’agissait de réparations conservatoires nécessaires et urgentes au sens du Règlement

[30] Monsieur Pelletier n’a d’ailleurs pas vraiment soutenu le contraire mais il invoque l’article 116 du Règlement me demandant d’agir en équité et d’ordonner en conséquence les remboursements demandés. Cette disposition stipule : 

Un arbitre statue conformément aux règles de droit; il fait aussi appel à l'équité lorsque les circonstances le justifient.

[…] [32] L’article 116 demande à l’arbitre de statuer conformément aux règles de droit tout en lui conférant l’autorité relative d’agir en équité. Le recours à l’équité ne peut pas permettre à l’arbitre d’ajouter au Règlement une indemnité qui n’y est pas prévue et cela d’autant que ce dernier statue expressément à l’alinéa 34 (5) sur cette question du remboursement des dépenses. 

[21]    Le représentant du Bénéficiaire a plaidé qu’il a des entreprises et que quand des demandes sont faites, c’est qu’on a besoin d’aide et qu’invoquer des délais de dénonciation n’est pas correct.

[22]    D’une part, le Règlement est d’ordre public et prévoit un délai de dénonciation de six mois.

[23]    D’autre part, l’obligation de donner un préavis dans de telles circonstances a aussi fait l’objet de décisions de la Cour d’appel du Québec dans des situations où seul le Code civil (hors le cadre du Règlement) était invoqué, et cette obligation fait partie du droit au Québec.

[24]    Dans l’arrêt Quincaillerie Côté & Castonguay inc. c. Castonguay[4], la Cour d’appel se prononçait ainsi :

[6]         La requête en rejet de l'intimé fait valoir que l'appelante ne s'est pas conformée aux exigences de l'article 1739 du Code civil du Québec, qui énonce que :

 L'acheteur qui constate que le bien est atteint d'un vice doit, par écrit, le dénoncer au vendeur dans un délai raisonnable depuis sa découverte. Ce délai commence à courir, lorsque le vice apparaît graduellement, du jour où l'acheteur a pu en soupçonner la gravité et l'étendue.

 Le vendeur ne peut se prévaloir d'une dénonciation tardive de l'acheteur s'il connaissait ou ne pouvait ignorer le vice.

[7]         La jurisprudence a atténué la rigueur de cette disposition. Il est reconnu qu'en cas d'urgence, ou lorsque le vendeur a répudié sa responsabilité à l'égard du vice ou a renoncé à se prévaloir du défaut d'avis, l'absence d'un préavis n'est pas fatale. La requête introductive de l'appelante ne contient aucune allégation de cette nature. Il est également reconnu, en ce qui concerne le deuxième alinéa de l'article, que la connaissance du vice supprime l'obligation d'envoyer un préavis écrit dans un délai raisonnable, mais elle ne fait pas disparaître l'obligation d'envoyer un tel avis avant le début des travaux (nos soulignés). 

 

[25]    Dans l’arrêt Immeubles de l'Estuaire phase III inc. c. Syndicat des copropriétaires de l'Estuaire Condo phase III[5], la Cour d’appel affirmait :

[159] L'auteur [nos ajouts : Pierre-Gabriel Jobin] indique dans ce passage que l'acheteur doit donner ce préavis avant d'intenter les procédures mais, vu le but du préavis, tel qu'expliqué plus haut (voir supra, paragr. [152]), il faut comprendre que l'acheteur doit donner ce préavis avant même de procéder aux réparations : on ne peut pas, autrement, parler de dénonciation. (Nos soulignés)

[164] L'absence de la dénonciation requise par l'article 1738 C.c.Q. est donc opposable au Syndicat et fatale à sa réclamation.

[26]    Vu la preuve, vu le Règlement, vu la jurisprudence, le Tribunal d’arbitrage n’a d’autres choix que de maintenir la décision de l’Administrateur et de rejeter la réclamation du Bénéficiaire sur les deux points, 7 et 8.

 

Point 17 Pente négative - façade arrière

[27]    Le Tribunal d’arbitrage accueille la demande du Bénéficiaire sur ce point, pour les motifs qui suivent.

Version du Règlement applicable

[28]    Tout d’abord, le Tribunal d’arbitrage réitère qu’à défaut de dispositions transitoires décrétées ou exprimées par le Législateur, le nouveau Règlement tel qu’amendé et en vigueur le 1er janvier 2015 n’est pas applicable pour le contrat de construction objet du présent arbitrage, conclu entre des particuliers avant son entrée en vigueur.

[29]    Puisque le contrat préliminaire et de garantie a été signé avant le 1er janvier 2015, et que le bâtiment a été construit avant cette date, c’est la version du Règlement d’avant le 1er janvier 2015 qui s’applique au présent arbitrage.

[30]    Cette question a déjà été tranchée par plusieurs décisions arbitrales, le tout, pour les motifs déjà exprimés par le soussigné et par d’autres arbitres dans les décisions citées au support de ses motifs dans Nazco et Milian c. 9181-5712 Québec Inc. et Garantie des Bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ[6] et 3093-2313 Québec c. Létourneau et Bouchard et la Garantie des maisons neuves de l’APCHQ[7].

Les faits

[31]    Les faits sont très particuliers.

[32]    Tout d’abord, l’Administrateur a rendu une décision, puis une autre qualifiée par lui-même d’addenda, un mois après que le Bénéficiaire a demandé l’arbitrage.

[33]    Le 6 juin 2016, l’Administrateur rejette la réclamation : « les situations décrites aux points 17 […] portent sur des ouvrages qui ne font pas partie intégrante du bâtiment comme tel » puis cite la version « après 2015 » de l’article 29 (9) du Règlement.

[34]    Le 8 août 2016, un mois après la demande d’arbitrage, il produit ce qu’il qualifie d’ « addenda » :

Le présent addenda fait partie intégrante de la décision émise par l’administrateur le 6 juin 2016 et concerne le point 17. […] L’administrateur a constaté une erreur de référence au Règlement dans sa décision du 6 juin 2016 puisque le sous-alinéa 9 de l’alinéa 29 du Règlement exclut spécifiquement la pente négative du terrain de la liste des éléments exclus.

À cet égard, l’Administrateur doit donner suite à la demande de réclamation du syndicat sur ce point. Il appert que la correction des pentes négatives du terrain à l’arrière du bâtiment faisait partie de la liste des travaux à corriger par l’entrepreneur et que la situation est connue du syndicat depuis la réception survenue en mai 2012. Selon les documents soumis par le syndicat, l’entrepreneur se serait engagé le ou vers le 11 septembre 2012 à effectuer le correctif. Quant à l’administrateur, il ne fut informé par écrit de cette situation pour la première fois que le 27 mai 2015, soit environ trente-deux (32) mois après sa découverte. En ce qui a trait au délai de dénonciation, les paragraphes 3e, 4e ou 5e de l’article 10 ou 27 du Règlement, selon le type de bâtiment, stipule que les malfaçons, les vices cachés ou les vices majeurs, selon le cas, doivent être dénoncés par écrit à l’entrepreneur et à l’administrateur dans un délai raisonnable, lequel ne peut excéder six (6) mois de leur découverte ou survenance ou, en cas de vices ou de pertes graduels, de leur première manifestation. Dans le cas présent, il appert que le délai de dénonciation excède le délai raisonnable (6 mois) et par conséquent, l’administrateur ne peut donner suite à la demande de réclamation du syndicat à l’égard de ces points.

[35]    A l’audience, l’inspecteur-conciliateur qui a rendu la décision n’était pas présent (ayant quitté son emploi).

[36]    La procureure de l’Administrateur plaide que ce dernier a tout simplement ajouté une deuxième base de rejet après la production de la demande d’arbitrage.

[37]    Ignorant le motif de l’ajout d’un deuxième motif, et se gardant de faire toute extrapolation faute de preuve, le Tribunal d’arbitrage s’en tiendra à rendre une décision sur le fond des deux motifs, le délai de dénonciation puis la couverture par le Plan de garantie de la malfaçon apparente dénoncée.

Le délai de dénonciation

[38]    L’article 25 du Règlement donne la définition de la réception des parties communes :

«réception des parties communes»: l'acte dont copie a été transmise à chaque bénéficiaire connu, au syndicat et à l'entrepreneur, par lequel un professionnel du bâtiment choisi par le syndicat de copropriétaires déclare la date de la fin des travaux des parties communes sous réserve, le cas échéant, de menus travaux à parachever qu'il indique. Cette déclaration s'effectue à la suite de la réception d'un avis de fin des travaux expédié par l'entrepreneur à chaque bénéficiaire connu et au syndicat de copropriétaires.

 

[39]    L’article 33 du Règlement explique que la réception fait suite à une inspection :

33   […] Les parties communes visées par la garantie doivent être inspectées avant leur réception. Cette inspection doit être effectuée conjointement par l'entrepreneur, le professionnel du bâtiment choisi par le syndicat de copropriétaires et ce dernier à partir d'une liste préétablie d'éléments à vérifier fournie par l'administrateur.

 

[40]    L’article 27 du Règlement dit que le parachèvement des travaux pour les parties communes est couvert s’il est dénoncé par écrit par le professionnel du bâtiment, et les vices et malfaçons apparents sont garantis si dénoncés par écrit au moment de la réception :

27.  La garantie d'un plan dans le cas de manquement de l'entrepreneur à ses obligations légales ou contractuelles après la réception de la partie privative ou des parties communes doit couvrir:

 

  1°    le parachèvement des travaux dénoncés, par écrit:

 

[…]   

  b)      par le professionnel du bâtiment, au moment de la réception des parties communes ;

 

  2°    la réparation des vices et malfaçons apparents visés à l'article 2111 du Code civil et dénoncés, par écrit, au moment de la réception ou, tant que le bénéficiaire n'a pas emménagé, dans les 3 jours qui suivent la réception;

 

[41]    Le représentant de l’Entrepreneur a témoigné sous serment à l’audience, et le Tribunal d’arbitrage conclut qu’il est crédible et de bonne foi, avoir envoyé par courrier recommandé à l’Administrateur le rapport du professionnel du bâtiment avec la liste d’éléments à vérifier/préréception, qui inclut « Niveau du sol aux abords du bâtiment (espace entre le parement et le sol) pentes descendantes qui éloignent l’eau du bâtiment » et comme dénonciation en vis-à-vis « Corriger le niveau du terrain sur la façade arrière ».

[42]    À la demande du Tribunal d’arbitrage, dont le rôle est de faire apparaître les faits, l’Entrepreneur a produit suite à l’audience une lettre du 4 octobre 2012 contenant un numéro de repérage pour courrier recommandé :

Madame Daraîche, Vous trouverez attaché à cette lettre le rapport d’inspection de la firme Amec effectué le 17 avril dernier, vous retrouverez des notes qui montrent les travaux que Samcon Gordon inc. accepte d’exécuter.

[43]    D’une part, le représentant de l’Administrateur à l’audience et son procureur ont affirmé que ce rapport n’est pas au dossier de l’Administrateur.

[44]    L’Administrateur, par l’entremise de son procureur, a répondu le 13 janvier 2017 au sujet de la lettre du 4 octobre qu’elle était adressée à Julie Daraîche et non, Cindy Daraîche et que « nous avons refait une vérification de nos dossiers et n’avons pas de trace de la réception du Rapport d’AMEC ou du Formulaire d’inspection pré-réception avant la dénonciation du bénéficiaire ».

[45]    Il n’y a aucun commentaire dans cette réponse de l’Administrateur quant aux numéros de repérage de courrier recommandé apparaissant sur la lettre, le seul commentaire étant « nous comprenons que l’entrepreneur n’a pas de preuve d’envoi ».

[46]    Grâce au numéro de repérage sur la lettre du 4 octobre 2012 (Vous trouverez attaché à cette lettre le rapport d’inspection de la firme Amec effectué le 17 avril dernier, vous retrouverez des notes qui montrent les travaux que Samcon Gordon inc. accepte d’exécuter) le Tribunal d’arbitrage a eu confirmation de Postes Canada après l’audience que la lettre du 4 octobre 2012 a été livrée le 11 octobre 2012 à 13 :05.

[47]    Avec respect, le fait que la lettre ait été envoyée « au soin de Julie Daraîche » au lieu de « au soin de Cathy Daraîche », comme l’a souligné la procureure de l’Administrateur, n’est pas pertinent, le Tribunal d’arbitrage ne pouvant pas conclure que sur réception, on ait renvoyé la lettre et son contenu à la chanteuse country bien connue.

[48]    Le Tribunal d’arbitrage conclut de la preuve que le formulaire de préréception qui inclut « Niveau du sol aux abords du bâtiment (espace entre le parement et le sol) pentes descendantes qui éloignent l’eau du bâtiment » et la dénonciation à cet effet a été reçue par l’Administrateur le 11 octobre 2012; que ce formulaire ne soit pas en janvier 2017 (ou à l’été 2016) au dossier de l’Administrateur ne saurait priver les droits du Bénéficiaire en vertu du Règlement puisque le fait qu’une dénonciation ne soit pas au dossier quatre ans après sa réception n’est pas la condition retenue par le Législateur dans le Règlement.

 

Le formulaire de préréception/dénonciation et la couverture

[49]    Dans l’affaire Guy Gauthier et al. c. Goyette Duchesne Lemieux Inc. et La Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ[8], notre ancien collègue MJeffrey Edwards (aujourd’hui juge à la Cour du Québec) écrivait :

[24]    L’objectif et l’utilité de l’Étape 5 [notre ajout : qualifiée dans cette décision comme  étant : Liste préétablie d’éléments à vérifier et réception du bâtiment] sont notamment de dénoncer les problèmes apparents à l’Entrepreneur et à l’Administrateur ainsi que les éléments que les acheteurs jugent incomplets ou insatisfaisants et devront être réparés. Dans l’éventualité où les acheteurs décidaient de demander à l’Entrepreneur de corriger ces problèmes et qu’une plainte à l’Administrateur devait être déposée, il est crucial que des éléments apparents aient été dénoncés dans l’Étape 5 à l’Entrepreneur pour être recevable […]

[50]    Que dit ce formulaire, joint au rapport du professionnel du bâtiment?

[51]    D’abord, le formulaire est à l’effet que la « Liste d’inspection préréception » est « Approuvée par la Régie du bâtiment du Québec » en vertu du Règlement.

[52]    Le formulaire stipule :

[52.1]    (première page) C’est le professionnel du bâtiment choisi par le syndicat qui produit l’acte qui constitue la réception des parties communes, sous réserves, le cas échéant, des menus travaux à parachever qu’il indique. […].

[52.2]    (dernière page »

[52.2.1]         Déclaration de réception du bâtiment

[52.2.2]         Le professionnel du bâtiment déclare : Que les travaux relatifs aux parties communes du bâtiment sont terminés, sous réserve de travaux à corriger ou de menus travaux à parachever indiqués sur la présente liste, et que le bâtiment est en état de servir conformément à l’usage auquel il a été destiné

[52.2.3]         Réception - avec réserve (voir la liste d’éléments à corriger et/ou à parachever)

[53]    Parmi cette liste il est écrit :

1. Terrain. Niveau du sol aux abords du bâtiment (espace entre le parement et le sol) pentes descendantes qui éloignent l’eau du bâtiment (astérisque) (en bas de page) L’aménagement de terrain est exclu de la garantie

(Colonne de droite, ajouté par le professionnel) : Corriger le niveau du terrain sur la façade arrière.

[54]    À l’audience, le représentant de l’Entrepreneur confirme être l’auteur de la mention datée du 11 septembre 2012 12 :43 :07 PM envoyé par dgamache, à l’effet que :

Le niveau du terrain sera corrigé aux abords du bâtiment.

[55]    Avec respect, le Tribunal d’arbitrage note que le formulaire approuvé par la Régie du Bâtiment

[55.1]    ne peut pas avoir été conçu pour ne rien dire,

[55.2]    ne peut pas dire à la page 1 « L’inspection préréception se fait à partir de la présente liste d’éléments à vérifier, fournie par l’administrateur et dont le contenu est approuvé par la Régie du Bâtiment »,

et nous demander de conclure par la suite que cet élément en particulier de pentes descendantes aux abords du bâtiment à vérifier d’après une liste fournie par l’Administrateur approuvée par la Régie est de toute façon, exclu de la garantie.

[56]    Le Tribunal d’arbitrage conclut que la Régie ne peut pas avoir approuvé, et l’Administrateur avoir distribué, une invitation à dénoncer un manquement aux «Niveau du sol aux abords du bâtiment (espace entre le parement et le sol) pentes descendantes qui éloignent l’eau du bâtiment » si cela était un point exclu du contrat de garantie comme étant inclus dans la partie italique, soit strictement de L’aménagement de terrain est exclu de la garantie.

[57]    L’Administrateur plaide que la jurisprudence arbitrale accueille les réclamations pour pente négative seulement quand il y a infiltration.

[58]    Avec respect, la jurisprudence et l’expérience du soussigné comme président d’un Tribunal statutaire spécialisé amènent plutôt le Tribunal d’arbitrage à conclure que les différends à trancher à ce sujet se font sur des bases différentes, que chaque cas est un cas d’espèce et l’arbitre tranche les différends selon ce qui est dénoncé dans le délai de la couverture du Plan de garantie géré par l’Administrateur, soit malfaçon apparente, non apparente, vice caché ou même vice de construction entraînant la ruine, qui sont différents les uns des autres.

[59]    Contrairement à la décision de l’Administrateur, et ce qui est plaidé à l’audience, le Niveau du sol aux abords du bâtiment (espace entre le parement et le sol) pentes descendantes qui éloignent l’eau du bâtiment n’est pas exclu par le Règlement, dans sa version d’avant 2015 applicable au présent arbitrage.

[60]    La protection des murs de fondation du bâtiment est couverte par le Plan de garantie.

[61]    Le Code National du Bâtiment aux articles 9.13 et suivant et 9.14 et suivant règlementent la protection des murs de fondation contre l’humidité, en plus du drainage et de l’évacuation des eaux aux abords du bâtiment.

[62]    Ces articles du Code National du Bâtiment règlementent la construction du bâtiment et non le simple « aménagement du terrain » qui lui, fait l’objet d’une exclusion, comme le rappelle d’ailleurs le formulaire « approuvé par la Régie ».

[63]    Dans l’affaire Kim Novak et Sebastien Wrzesien et Les Immeubles Nordet (9152-6103 Québec Inc.) et La Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l'APCHQ inc[9], notre collègue Me France Desjardins, arbitre, écrit :

[28]      Toutefois, ce n’est pas sans raison que le premier élément à vérifier qui apparaît dans le formulaire d’inspection préréception du bâtiment, sous la rubrique «Terrain» soit le « niveau de sol aux abords du bâtiment », suivi immédiatement de la vérification des «murs de fondation» sous la rubrique «Fondations».  Qui plus est, en ce qui a trait au niveau de sol, on a bien pris soin de spécifier, via une astérisque en bas de page, que «l’aménagement du terrain est exclu de la garantie», indiquant ainsi clairement qu’a contrario, un nivellement brut ayant pour objectif de protéger les fondations et de supporter la finition aux abords du bâtiment n’est pas exclu du contrat de garantie.

 […] ACCUEILLE EN PARTIE la demande d’arbitrage quant au point 9 et DÉCLARE que le nivellement brut visant à protéger les fondations et à supporter la finition aux abords du bâtiment n’est pas exclu du contrat de garantie.

[64]    Le Tribunal d’arbitrage conclut que la malfaçon apparente au point 17 de la décision dûment dénoncée en conformité avec le Règlement est couverte par le Plan de garantie administré par l’Administrateur.

[65]    Le Tribunal d’arbitrage conclut aussi que

[65.1]    vu les frais et le temps déjà consacrés par rapport à la valeur du dossier,

[65.2]    vu le rapport d’expert du professionnel du bâtiment de mai 2012 produit au dossier pour valoir témoignage;

[65.3]    vu l’acceptation de l’Entrepreneur en 2012 d’effectuer les travaux correctifs aux abords du bâtiment, acception qu’il a envoyée à l’Administrateur en octobre 2012 (et ce même si le dossier actuel de l’Administrateur n’en n’a pas la trace),

[65.4]    vu que l’Administrateur a déjà rendu deux décisions ou à tout le moins, une décision en juin 2016 suivie, après la demande d’arbitrage, d’un addenda en août 2016,

que d’une part, il a toute la preuve pour rendre une décision sur le fond et, d’autre part, il y a lieu d’ordonner à l’Entrepreneur d’effectuer les travaux correctifs à ce sujet.

[66]    Vu la preuve, vu le Règlement, vu la jurisprudence, le Tribunal d’arbitrage accueille donc la réclamation du Bénéficiaire quant au Niveau du sol aux abords du bâtiment (espace entre le parement et le sol) pentes descendantes qui éloignent l’eau du bâtiment/corriger le niveau du terrain sur la façade arrière aux abords du bâtiment.

 

Commentaires supplémentaires

[67]    Le Tribunal d’arbitrage est bien au courant des décisions rendues et citées en ligne qui référent à « pente négative » et, avec respect, le présent dossier nous rappelle la prudence nécessaire avant de décider d’importer des solutions trouvées en ligne dans des résumés de décisions arbitrales basées sur des faits présentés à une audition à laquelle le lecteur n’a pas assisté.

[68]    Par exemple, la décision du soussigné dans Syndicat de Copropriété Rue Jean-Pierre Ronfard c. Construction Frank Catania et Associés Inc. et La Garantie des Maisons Neuves de L’APCHQ Inc.[10], qui rejette la réclamation du Bénéficiaire pour « pente négative » et citée comme illustration jurisprudentielle : le Bénéficiaire se plaignait alors d’une problématique qui se passait l’hiver quand les occupants lavaient leur voiture, l’eau puis la glace s’accumulaient devant l’entrée (et non sur les murs de fondations de l’immeuble) - il ne s’agit pas de cela ici.

[69]    Toutefois, dans une autre cause entendue par le soussigné, Syndicat de CentrePointe Ouest Co-Propriétaires et Les Développements Dubelle Centrepointe 1 Ltée et La Garantie Habitation du Québec Inc.[11], la décision rapporte :


La pente négative

[57]    L’expert Arduini témoigne à l’effet […] la pente autour du bâtiment doit faire en sorte de toujours permettre à l’eau de pluie et à la neige de s’évacuer du bâtiment, or ici, principalement en la partie gauche, il y a une pente négative, et aussi à certains endroits du côté droit.

[58]    L’Administrateur reconnaît ne pas avoir rendu de décision sur la pente négative du devant, soit : « There is negative sloping in certain areas of the lot grading at the front […] of the buildings »; sa décision favorable au Bénéficiaire au point 2 de sa decision ne portait que sur « There is negative sloping in certain areas of the lot grading at the […] rear of the buildings ». (nos soulignés)

[70]    De plus, avec déférence, le Tribunal d’arbitrage considère non pertinent dans le présent dossier, vus les faits et le Règlement en vigueur avant 2015 applicable au présent dossier, que le nouveau Règlement en vigueur depuis 2015 ait enlevé « pente négative » de l’exclusion de l’article 29(9)[12] du Règlement.

 

[71]    Les amendements au Règlement en vigueur depuis 2015 peuvent être tout autant des précisions codifiées sur le droit déjà existant et tel qu’appliqué ou bien des élargissement quant à la couverture actuelle du Plan de garantie, ou bien, plus généralement, des nouveaux droits en faveur ou à l’encontre de l’un ou l’autre; en faire une liste exhaustive dépasse bien sûr le cadre de cette décision, d’autant plus que chaque cas dépendra aussi des faits en litige.

 

Travaux correctifs

[72]    Le professionnel du bâtiment écrit lors de la réception (page 7) : « […] De plus, le terrain est creux en dessous de ses balcons et favorise des accumulations d’eau important[e]s près de murs de fondation […] Travaux à corriger : Corriger le niveau du terrain sur la façade arrière, afin de donner une pente positive pour éloigner l’eau de l’immeuble, tel que mentionné sur le plan ».

[73]    L’Entrepreneur a témoigné et plaidé à l’audience qu’il lui était impossible de régler la question des pentes descendantes de la façade arrière sous les balcons vu leur faible hauteur car « on peut pousser de la terre, on ne peut pas compacter sous un balcon ».

[74]    La méthode précise pour effectuer les travaux correctifs sous les balcons n’a pas été soumise à l’arbitrage (ni fait l’objet d’un débat contradictoire) et la façon d’effectuer ces travaux correctifs ne peut être considérée comme ayant fait l’objet d’une décision dans la présente sentence arbitrale.

[75]    Accessoirement, en droit, l’Entrepreneur est celui qui connaît le mieux son immeuble, il a le choix des moyens pour arriver au résultat, il a une obligation de résultat et il doit agir en conformité avec la règle de l’art, le tout, sujet aux droits et obligations de toutes les parties concernées par le Règlement.

[76]    Dans l’affaire Demers-Brisson et 9141-1074 Québec inc. (Construction Norjo)[1], notre collègue, Me Michel A. Jeanniot, écrit :

[15]      Sans qu’il soit nécessaire de rentrer avec précision et détails sur tous et chacun des éléments de la pose de cette main courante, force m’est de rappeler que l’Entrepreneur n’est pas sujet à une obligation de moyens mais bien à une obligation de résultats. Ceci dit, il n’est pas nécessaire à l’Administrateur d’identifier avec force de détails toutes les étapes successives utiles et nécessaires à obtenir le résultat escompté. L’artisan qui verra à adresser ces travaux, il ne va sans dire, est obligé à une prudence raisonnable et à un résultat.  […]

[16]      Considérant de plus qu’un entrepreneur (ou le prestataire de services) a le libre choix des moyens d’exécution et qu’il n’existe entre ce(s) dernier(s) et l’administrateur et les bénéficiaires aucun lien de subordination;  le choix des correctifs et/ou la méthode de correction appartient à l’entrepreneur (in fine, article 2099 C.c.Q.) sujet bien entendu, et tel que ci-haut repris, à son obligation de résultats.

FRAIS

[77]    L’article 37 du Règlement stipule : 

Les coûts de l'arbitrage […] Lorsque le demandeur est le bénéficiaire, ces coûts sont à la charge de l'administrateur à moins que le bénéficiaire n'obtienne gain de cause sur aucun des aspects de sa réclamation, auquel cas l'arbitre départage ces coûts.

 

[78]    Le Bénéficiaire ayant eu gain de cause sur une partie de sa réclamation, les frais d’arbitrage seront à la charge de l’Administrateur du Plan de Garantie.

 

PAR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL

ACCUEILLE en partie la demande du Bénéficiaire;

MODIFIE en partie la décision de l’Administrateur du 6 juin 2016 et de ce qu’il qualifie d’addenda du 8 août 2016;

ORDONNE à l’Entrepreneur dans un délai de 75 jours de la signature de ce jugement, en conformité avec les règles de l’art, et À défaut par l’Entrepreneur d’effectuer lesdits travaux dans ledit délai, ORDONNE à l’Administrateur, comme caution de l’Entrepreneur en vertu du Règlement, d’effectuer les travaux dans un délai de 45 jours, de :

Niveaux du sol aux abords du bâtiment (espace entre le parement et le sol) pentes descendantes qui éloignent l’eau du bâtiment/Corriger le niveau du terrain sur la façade arrière aux abords du bâtiment.

REJETTE la demande du Bénéficiaire quant à la réclamation pour remboursement des travaux aux points 7 et 8 pour Pompe de puisards brûlées, MAINTIENT la décision de l’Administrateur du 6 juin 2016 Et RÉSERVE le droit du Bénéficiaire, à supposer qu’il ait un recours fondé, de porter devant les tribunaux de droit commun, sa prétention quant à ces points ainsi que de rechercher les correctifs qu’il réclame contre toute personne autre que l’Administrateur, sujet aux règles de droit commun, de la preuve et de la prescription civile;

ORDONNE à l'Administrateur du Plan de Garantie à payer les frais d'arbitrage encourus dans le présent dossier

                                                                       Montréal, le 30 janvier 2017

__________________________

Me ROLAND-YVES GAGNÉ

Arbitre / SORECONI

 

Autorités cités

 

La Garantie des Bâtiments Résidentiels Neufs de l’APCHQ Inc. c. Maryse Desindes et Yvan Larochelle, et René Blanchet mise en cause  2004 CanLII 47872 (QC C.A.).

 

Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l'APCHQ inc. c. Dupuis 2007 QCCS 4701, hon. juge Michèle Monast.

 

Francine Bélanger et Daniel Pelletier et La Garantie des Bâtiments Résidentiels Neufs de l’APCHQ Inc. et Réseau Viva International GAMM 2009-11-011, 23 décembre 2009, Me Johanne Despatis, arbitre.

 

Quincaillerie Côté & Castonguay inc. c. Castonguay 2008 QCCA 2216.

 

Immeubles de l'Estuaire phase III inc. c. Syndicat des copropriétaires de l'Estuaire Condo phase III 2006 QCCA 781.

 

Nazco et Milian c. 9181-5712 Québec Inc. et Garantie des Bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ CCAC S16-011902-NP, 8 avril 2016, MRoland-Yves Gagné, arbitre.

3093-2313 Québec c. Létourneau et Bouchard et la Garantie des maisons neuves de l’APCHQ CCAC S15-022401-NP, Décision rectifiée du 12 novembre 2015, Me Roland-Yves Gagné, arbitre.

Syndicat des Copropriétaires Lot 3 977 437 c. Gestion Mikalin et La Garantie Abritat GAMM 2013-15-011, 24 avril 2015, Jean Morissette, arbitre.

 

Guy Gauthier et al. c. Goyette Duchesne Lemieux Inc. et La Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ SORECONI 050629001 et al, 3 novembre 2006, MJeffrey Edwards, arbitre.

Kim Novak et Sebastien Wrzesien et Les Immeubles Nordet (9152-6103 Québec Inc.) et La Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l'APCHQ inc SORECONI 090325002, 10 août 2009, Me France Desjardins, arbitre.

Syndicat de Copropriété Rue Jean-Pierre Ronfard c. Construction Frank Catania et Associés Inc. et La Garantie des Maisons Neuves de L’APCHQ Inc. SORECONI 122307001, 11 décembre 2012, Me Roland-Yves Gagné, arbitre.

Syndicat de CentrePointe Ouest Co-Propriétaires et Les Développements Dubelle Centrepointe 1 Ltée et La Garantie Habitation du Québec Inc. CCAC S14-121001-NP 21 juin 2015 Me Roland-Yves Gagné, arbitre.

Marie-Christine Doré Giguère et Stéphane Berthiaume et 9229-1319 Québec Inc. (Développement DMG) et La Garantie Abritat Inc CCAC S13-062601-NP, 6 JANVIER 2015, Me Tibor Holländer, arbitre.

Demers-Brisson et 9141-1074 Québec inc. (Construction Norjo) CCAC S8-280301-NP, 18 septembre 2008, Me Michel A. Jeanniot, arbitre.

Syndicat du 2289-2319 Avenue de la Gare» et 9211-4057 Québec Inc. (Habitations Trigone) et La Garantie Habitation du Québec inc. CCAC S14-030402-NP, 23 octobre 2014, Me Lydia Milazzo, arbitre.

 



[1] 2004 CanLII 47872 (QC C.A.).

[2] 2007 QCCS 4701, 26 octobre 2007, hon. juge Michèle Monast.

[3] GAMM 2009-11-011, 23 décembre 2009, Me Johanne Despatis, arbitre.

[4] 2008 QCCA 2216.

[5] 2006 QCCA 781.

[6] CCAC S16-011902-NP, 8 avril 2016, MRoland-Yves Gagné, arbitre.

[7] Paragraphes [446] à [467] CCAC S15-022401-NP, Décision rectifiée du 12 novembre 2015, Me Roland-Yves Gagné, arbitre; voir aussi, au même effet, Syndicat des Copropriétaires Lot 3 977 437 c. Gestion Mikalin et La Garantie Abritat GAMM 2013-15-011, 24 avril 2015, Jean Morissette, arbitre.

[8] SORECONI 050629001 et al, 3 novembre 2006, Me Jeffrey Edwards, arbitre.

[9] SORECONI 090325002, 10 août 2009, Me France Desjardins, arbitre.

[10] SORECONI 122307001, 11 décembre 2012, Me Roland-Yves Gagné, arbitre.

[11] CCAC S14-121001-NP, 21 juin 2015 Me Roland-Yves Gagné, arbitre. Dans ce dossier, l’administrateur avait rendu sa décision favorable sur la base de l’article du 9.13.2.1 du Code National du Bâtiment. Lire aussi la décision de l’administrateur cité au paragraphe [27] de Marie-Christine Doré Giguère et Stéphane Berthiaume et 9229-1319 Québec Inc. (Développement DMG) et La Garantie Abritat Inc CCAC S13-062601-NP, 6 janvier 2015, Me Tibor Holländer, arbitre.

[12] Syndicat du 2289-2319 Avenue de la Gare et 9211-4057 Québec Inc. (Habitations Trigone) et La Garantie Habitation du Québec inc. CCAC S14-030402-NP, 23 octobre 2014, Me Lydia Milazzo, arbitre, paragraphe [55].