Régie du Bâtiment                                       SORECON I

Société pour la résolution des conflits Inc.

No du bâtiment :U-056184                               Dossier : 051219002

M. Sylvain Boissé

Bénéficiaire

-c-

Construction André Taillon Inc.

Entrepreneur

-et-

La Garantie des bâtiments résidentiels
de l’APCHQ Inc.

Administrateur de la Garantie

ARBITRAGE EN VERTU DU RÈGLEMENT SUR LE PLAN DE GARANTIE DES
BÂTIMENTS RÉSIDENTIELS NEUFS
(Décret 841-98 du 17 juin 1998)

Arbitre
Me Michel A. Jeanniot
2, Place Alexis Nihon
Suite 1000
Montréal (Québec)
H3Z 3C1


Identification des parties

Bénéficiaire :                                                   Monsieur Sylvain Boissé

2938, rue Alphonse de Lamartine Laval (Québec)

H7P 6B8

Entrepreneur:

Administrateur :

Construction André Taillon Inc.

26, rue de la Flandre Blainville (Québec) J7C 5G3

Et son procureur    Me Olivier Fraticelli (Fraticelli, Provost)

 

 

La Garantie des bâtiments résidentiels
neufs de l’APCHQ Inc.

5930, boul. Louis-H. Lafontaine

Anjou (Québec)

H1M 1S7

Et son procureur :

Me Stéphane Paquette

(Savoie Fournier)


Décision Mandat :

M. Alcide Fournier a reçu son mandat de SORECONI le 9 février 2006 et le soussigné à substitué à M. Alcide Fournier, le 1er  mai 2006.


Historique du dossier :

25 mai 2003 :                           Contrat préliminaire;

25 mai 2003 :                           Contrat de garantie;

30 octobre 2003 :                    Liste préétablie d’éléments à vérifier et réception du bâtiment par le Bénéficiaire;

31 octobre 2003 :                    Acte de vente;


29 septembre 2005 :

12 octobre 2005 :      1er  novembre 2005 :   17 novembre 2005 :  17 novembre 2005 :  28 novembre 2005 :  1er  décembre 2005 :

19 décembre 2005 : 2 février 2006 :

7 février 2006 :

2 mars 2006 :

6 mars 2006 :

1er  mai 2006 :

1er  mai 2006 :

 


Mise en demeure du procureur du Bénéficiaire à l’Entrepreneur (réclamation écrite);

Avis de 15 jours de l’Administrateur à l’Entrepreneur; Lettre du procureur du Bénéficiaire à l’APCHQ;    Lettre du procureur du Bénéficiaire à l’Entrepreneur; Lettre du procureur du Bénéficiaire à l’APCHQ; Première séance d’arbitrage et inspection du bâtiment;

Décision de l’Administrateur et récépissés postaux et Convention de dépôt en fidéicommis;

Demande d’arbitrage du Bénéficiaire;

SORECONI obtient copie du dossier relatif à la décision de l’Administrateur;

Nomination de l’arbitre (Alcide Fournier); Convocation des parties à l’audience;

Lettre du procureur du Bénéficiaire aux parties;

Substitution de l’arbitre Alcide Fournier par Me Michel A. Jeanniot;

Réception de Me Michel A. Jeanniot de documents
incluant notes et autorités du procureur du Bénéficiaire;

                                                                          


3 mai 2006 :                            Réception de l’Administrateur, d’un cahier supplémentaire d’autorités, incluant ouvrage de doctrine, extrait du Code National du Bâtiment et jurisprudence;

3 mai 2006 :                            Audience

Étaient présents pour le Bénéficiaire :

Me Olivier Fraticelli, procureur du Bénéficiaire Monsieur Sylvain Boissé

Monsieur Jacques Benmussa

                                                Était présent pour l’Entrepreneur : Monsieur André Taillon

                                                Monsieur Michel Guillot

                                                Étaient présents pour l’Administrateur :

                                                Me Stéphane Paquette

                                                Monsieur Michel Hamel (inspecteur - conciliateur)

Objection préliminaire :

[1]           Aucune objection préliminaire n’a été soulevée par quelque partie, l’arbitre constate que juridiction lui est acquise et l’audience est ouverte à 10:00 heures, mercredi le 3 mai 2006.

Admission:

[2]           Le bâtiment est constitué d’une unité résidentielle, non détenue en copropriété divise.

[3]           Réception du bâtiment par le Bénéficiaire est en date du ou vers le 30 octobre 2003.

[4]           La réclamation écrite du Bénéficiaire est en date du 29 septembre 2005.

[5]           La présente demande d’arbitrage se limite à la décision de l’Administrateur, du 1er décembre 2005, sous la plume de Monsieur Michel Hamel (inspecteur - conciliateur).

[6]           La décision consiste que d’un seul point. Il s’agit d’un poste de réclamation par lequel le Bénéficiaire se plaint de l’absence de pare-vapeur à l’intérieur des murs frontispices et arrières du bâtiment, ainsi qu’un pare-vapeur incomplet et/ou inadéquat à l’intérieur des murs latéraux.

[7]           Au soutien de ses représentations, le Bénéficiaire dépose un rapport d’expertise sous la plume de Jacques Benmussa, architecte, O.A.Q. Un rapport dont  l’origine du mandat était tout autre que le constat, objet du présent litige.

[8]           De façon plus précise, le Bénéficiaire avait requis et demandé à Monsieur Benmussa de préparer  une expertise concernant  une infiltration d’eau pénétrant


dans la chambre des maîtres. C’est dans le cadre de ses recherches que des ouvertures dans le mur furent pratiquées et la constatation sur les pare-vapeur alors découverte.

[9]           L’absence de pare-vapeur sur les murs frontispices et arrières ainsi que la présence d’un pare-vapeur mal scellé et non-continu au niveau des murs  latéraux, n’est pas contestée par l’Administrateur.

[10]        L’Administrateur prend position à l’effet que, et considérant qu’il s’est écoulé plus de douze (12) mois de la réception du bâtiment, il se doit d’apprécier la plainte du Bénéficiaire en fonction de l’article 3.3 (vices cachés) du Contrat de Garantie.

[11]        Nous reviendrons plus loin sur la position de l’Administrateur.

[12]        Au soutien de son rapport d’expertise, Jacques Benmussa complète et distingue les utilités du pare-vapeur par opposition au pare-air et complète en établissant que sans pare-vapeur (et/ou en présence d’un pare-vapeur inadéquat et/ou mal installé) il est plus que probable qu’un excès de condensation se produirait à l’intérieur du mur, ce qui donnerait lieu par la suite à la boursouflure et à   l’écaillage de la peinture ou même au pourrissement du revêtement extérieur et des bois de charpente (sans compter la présence de moisissure et/ou champignons). Il complète en précisant qu’un pare-vapeur mal installé facilite le passage dans le mur d’air humide par la suite des différences de pression d’air.

[13]        Monsieur Benmussa renchérit avec l’article 9.25.4.1 (pare-vapeur exigés), extrait du Code National du Bâtiment - Canada 1995 (intégrant les modifications du Québec), lequel précise (l’emphase est du soussigné):

« 9.25.4.1)       Les murs, les plafonds et les planchers isolés doivent comporter   un pare-vapeur de façon à empêcher que la vapeur d’eau contenu dans l’air intérieur ne migre dans les vides des murs et des planchers ou dans les combles ou vides sous toit. ».

[14]        L’expert complète en précisant qu’il n’y a aucune problématique évidente mais qu’elle est à prévoir.

[15]        L’Administrateur représente que l’impossibilité de constater une trace de moisissure sur les surfaces exposées et/ou toute autre absence de préjudice au bâtiment relié à ces situations établit qu’indépendamment qu’il s’agisse ou non  d’un vice (élément qui n’est pas admis, voir même inféré par l’Administrateur) et, que cette situation soit cachée ne constitue pas un niveau de gravité nécessaire    à qualifier cet élément de vice caché, tel que ce terme est défini par la Loi, la doctrine et la jurisprudence.

[16]        La norme juridique générale impose un caractère « sérieux » ou « important » du vice, un critère déterminant énoncé à l’article 1726 et suivants du Code civil du Québec.


[17]        Tous les intervenants sont d’accord; il ne s’agit pas ici d’un déficit d’usage. Sommes-nous face à une condition de gravité qui impose un caractère sérieux   ou important?

[18]        La doctrine, les ouvrages techniques ainsi que les experts présents confirment que le rôle d’un pare-vapeur est de réduire la transmission de la vapeur d’eau (tandis que le pare-vent s’installe du côté extérieur de l’immeuble et a pour but de limiter la circulation d’air en provenance de l’extérieur du bâtiment).

[19]        L’Administrateur plaide et représente que si le pare-air est efficace, le pare-vapeur est inutile.

[20]        L’Administrateur renchérit à l’effet que la migration de la vapeur existe et existera toujours, elle est accentuée par la circulation de l’air d’où l’importance d’un pare-  air et que graduellement, les résidences « nouveau genre » tel Nova Climat délaissent le pare-vapeur au profit du pare-air.

[21]        Un principe qui n’est pas nié par l’expert retenu par le Bénéficiaire avec et/ou  sous réserve de la précision suivante; il doit y avoir un choix conscient du pare-  air. Si, par exemple, le pare-air doit être, entre autre, formé du gypse, ce dernier  (le gypse) ne peut pas être percé n’importe où et/ou n’importe comment. Le    gypse peut être un pare-air suffisant si on prévoit cette utilité dans le cadre de l’installation et/ou que son installation se fait en fonction de son utilité éventuelle  de pare-air.

[22]        Avec respect pour toute opinion à l’effet contraire, il est clair que le Code    National du Bâtiment prévoit la nécessité du pare-vapeur, ses auteurs ayant précisés à l’article 9.25.4.1) précité, que les murs, les plafonds et les planchers isolés doivent comporter un pare-vapeur.

[23]        Je rappelle que le Bénéficiaire est en demande et qu’à cet effet, ce dernier a le fardeau de la preuve. Je suis satisfait (ceci n’est d’ailleurs pas contredit par l’Administrateur) que l’enveloppe n’est pas conforme aux articles 9.25.4 et   suivants du Code National du Bâtiment précité.

[24]        Cette non-conformité et/ou dérogation à une obligation prévue au Code National du Bâtiment (une fois cette dérogation et/ou carence admise), a comme effet   et/ou conséquence de renverser le fardeau de la preuve, lequel retombe sur l’Entrepreneur, à savoir le commerçant - fabriquant.

[25]        Mes propres recherches sur le sujet m’apprennent que lorsqu’on délaisse le   pare-vapeur au profit du pare-air, ce dernier doit être l’objet d’une attention toute particulière, doit être scellé au niveau des joints, des ouvertures et autres, toute    la littérature qui m’est accessible confirme cette attention différente des usuels us et coutumes.

[26]        Je rappelle que la conception de l’enveloppe ne m’a pas été démontrée être du type Nova Climat (et/ou autre), la présence du pare-vapeur, étant, d’ailleurs de l’aveu de l’Entrepreneur, prévue aux plans et devis. Si le concepteur du mur à    ses plans et devis désire la pose d’un pare-vapeur, en toute probabilité, et à


défaut de preuve à l’effet contraire, c’est que sa (la) conception de l’enveloppe le requiert.

[27]        L’Entrepreneur peut déroger au Code National du Bâtiment, mais pour se faire, il doit démontrer que sa démarche et/ou sa conception de l’enveloppe (le pare-air)  lui permet de déroger au Code et de poser tel qu’il l’a fait (et/ou de ne pas poser  tel qu’il l’a fait) le pare-vapeur.. Une fois que le Code National du Bâtiment n’a    pas été suivi, et ceci est clairement établit, le fardeau, je suggère, repose sur l’Entrepreneur.

[28]       De façon plus précise, l’Entrepreneur peut nous satisfaire que certaines dispositions du Code National du Bâtiment ne s’appliquent pas lorsqu’il établit (et c’est l’Entrepreneur qui a ce fardeau) que le comportement d’un ensemble d’éléments de construction est satisfaisant en remplacement d’une ou plusieurs dispositions du Code National du Bâtiment (du moins en ce qui concerne le contrôle de la condensation). L’Entrepreneur ne s’est pas déchargé de ce   fardeau. D’ailleurs, en contre-interrogatoire, l’Entrepreneur nous précise que la conception de l’enveloppe du bâtiment n’est pas de son cru, et bien qu’il n’en est pas absolument certain, il présume que les plans et devis qu’il a acquis et/ou    dont il s’est porté acquéreur, prévoient l’installation d’un pare-vapeur.

[29]       Je dois donc, en l’absence de toute preuve d’une attention toute particulière accordée au pare-air et/ou à l’enveloppe du bâtiment, présumer que l’absence de pare-vapeur provoquera la détérioration du bois de l’ossature à moyen ou long terme, et faisant miens les propos de Laurant Guertin, J.C.S.1 et ce,

« (…) même si aucune détérioration n’a été notée, cela ne signifie pas nécessairement qu’il n’y aura aucune détérioration du bois. Il faut aussi considérer qu’un immeuble est sensé durer de nombreuses années, et rien n’indique qu’il n’y aura aucune détérioration dans le futur. »

[30]       L’absence de pare-vapeur provoque de nombreuses infiltrations d’air et d’humidité et en sus d’être un facteur d’augmentation du coût de chauffage, les exfiltrations d’air chaud vers l’extérieur ont pour effet la détérioration des composantes putricibles de l’enveloppe de ce bâtiment. Nous faisons ici face à  une condition de gravité qui impose un caractère sérieux et important à ce vice qui, de toute évidence, était caché.

[31]       Aucune proposition et/ou suggestion n’a été faite concernant les possibles travaux et/ou correctifs réclamés, aucune soumission ne fut obtenue et aucune recommandation ne fut faire (en dépit d’annonce à cet effet, entre autre, le 17 novembre 2005, sous la plume du procureur du Bénéficiaire, retrouvé à l’onglet A-8 du cahier de pièces émis par l’Administrateur).

[32]        La demande soumise à l’Administrateur ainsi que ma lecture de la demande d’arbitrage, la preuve, les représentations et les plaidoiries se limitaient à demander s’il s’agissait ou non et/ou si nous étions ou non en présence d’un vice caché. Une fois que j’ai répondu à cette question, mon mandat est épuisé.

1 600-05-000226-963, 13 mai 2002, paragraphe 50.


[33]      En vertu de l’article 123 du Règlement sur le Plan de Garantie des Bâtiments Résidentiels Neufs, et vu que le Bénéficiaire a obtenu gain de cause, les coûts de l’arbitrage sont à la charge de l’Administrateur.

PAR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL D’ARBITRAGE :

ACCUEILLE la demande d’arbitrage du Bénéficiaire;

REJÈTE la décision de l’Administrateur;

DÉCLARE et CONSTATE que, et pour le bâtiment concerné, l’absence de pare-vapeur à l’intérieur des murs frontispices et arrières du bâtiment ainsi qu’un pare-vapeur incomplet et/ou inadéquat à l’intérieur des murs latéraux constitue un vice caché.

RENVOIT aux parties (et/ou à leur expert respectif) à proposer des solutions afin que l’Administrateur puisse statuer sur les correctifs utiles et nécessaires et que cette démarche fasse l’objet d’une Décision de l’Administrateur à l’intérieur des soixante (60) jours ouvrables de la mise à la poste de la présente Décision.

CONDAMNE l’Administrateur aux entiers frais et dépens.

Montréal, ce 5 mai 2006

 

ME MICHEL A. JEANNIOT

Arbitre / SORECONI

Décisions et ouvrages de références consultés                                                                                                       :

1.       Code Civil du Québec, L.Q. 1991, c64;

2.       Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs;

3.       Code national du bâtiment, Canada 1995;

4.       Doyon Gilles, Crochetière Serge, Le règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs            commenté, 1999;


5.     SCHL / CMCH - Construction de maison à ossature de bois - 2e édition - pages 121 à 124;

6.     St-Martin et Lagimonière c. Al-mo Construction Inc. et La Garantie des bâtiments résidentiels neufs de      lAPCHQ Inc., sentence arbitrale du 2 septembre 2003, par Guy Dubois, ingénieur;

7.     Edwards Jeffrey, La garantie de qualité du vendeur en droit québécois, Wilson & Lafleur Ltée;

8.      Vézina et Demers c. La garantie qualité habitation et Constructions JPH Inc., sentence arbitrale SORECONI dossier 060126002 du 7 avril 2006, par Me Michel A. Jeanniot;

9.     Jarelle et Bélanger c. La Garantie qualité habitation et Habitation Avant-Garde, sentence arbitrale, SORECONI dossier 051104006 du 1er février 2006, par Me Michel A. Jeanniot;

10.   Pépin et Villiard c. Les constructions Serge Carrière Inc., et La Garantie des bâtiments résidentiels neufs de lAPCHQ Inc., sentence arbitrale du 3 novembre 2005, par Claude Dupuis, ingénieur;

11.   Rochart c. La maison Bond Inc., et La Garantie des bâtiments résidentiels neufs de lAPCHQ Inc., sentence arbitrale SORECONI dossier 050829002 du 28 février 2006, par Me Alcide Fournier;

12.   Daniel Ouellet c. Lucie Gouin, Z-50127564, 600-05-000226-965, 13 mai 2002;

13.   Michel Charlebois et al. c. Sandra Cadieux et al., REJB 2004-60387 , 550-32-011242-038, 23 février 2004;

14.   Yvanne Lavoie et al. c. Construction Denis Noël & Fils, EYB 2004-66114, 100-22-001492-992, 9 juin 2004;

15.   Louise Clermont c. Michel Labelle, EYB 2004-60523, 540-02-011414-001, 6 avril 2004.