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ARBITRAGE En vertu du Règlement
sur le plan de garantie |
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Organisme d’arbitrage autorisé par la Régie du bâtiment : |
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Groupe d’arbitrage et de médiation sur mesure (GAMM) |
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Entre |
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ÉRIC MARCOUX |
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Bénéficiaire |
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Et |
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BRUNELLE ENTREPRENEUR INC. |
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Entrepreneur |
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Et |
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LA GARANTIE DES BÂTIMENTS RÉSIDENTIELS NEUFS DE L’APCHQ INC. |
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Administrateur |
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No dossier Garantie : |
095736-1 |
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No dossier GAMM : |
2007-19-001 |
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Nos dossiers Arbitre : |
13 185-27 13 185-27-1 |
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SENTENCE ARBITRALE |
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Arbitre : |
Me Jeffrey Edwards |
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Pour le bénéficiaire : |
Me Claude Coursol |
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Pour l’entrepreneur : |
M. François Brunelle, président (Brunelle Entrepreneur Inc.) |
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Pour l’administrateur : |
Me François Laplante (Savoie Fournier) |
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Date(s) d’audience : |
22 août 2007 |
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Lieux d’audiences : |
1080, Côte du Beaver Hall, bureau 600, Montréal -et- 48, Je me souviens, Laval |
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Date de la décision : |
28 août 2007 |
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APRÈS AVOIR PRIS CONNAISSANCE DES PROCÉDURES, VISITÉ LES LIEUX, ENTENDU LA PREUVE ET Les ARGUMENTS DES parties, le Tribunal d’arbitrage rend la dÉcision suivante:
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1. LES FAITS
[1] Le 20 mai 2005, l’Entrepreneur et le Bénéficiaire ont signé un Contrat préliminaire et contrat de garantie (« Contrat ») pour la construction d’une propriété située au 48, Je me souviens à Laval. Ce contrat est régi par le Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs[1].
[2] Le Bénéficiaire a pris possession de la propriété en mi-novembre 2005.
[3] Le 8 juin 2006, le Bénéficiaire a avisé l’Entrepreneur et l’Administrateur que les lattes de ses planchers de bois francs sont trop espacées et que certaines d’entres elles ne sont pas clouées et ce, de façon généralisée. Il dénonce également d’autres malfaçons accessoires (Pièce A-3).
[4] Le 31 juillet 2006, l’Administrateur a transmis un avis de 15 jours à l’Entrepreneur afin que ce dernier intervienne et corrige la situation.
[5] L’Administrateur a visité la propriété pour la première fois le 19 octobre 2006. Lors de cette inspection, l’inspecteur-conciliateur Madame Johanne Tremblay n’a pas été en mesure de constater la situation en raison de la variation de température en fonction des saisons. Elle a donc recommandé qu’une inspection supplémentaire ait lieu au cours du mois de janvier 2007 (Pièce A-5).
[6] Une seconde visite des lieux par l’inspecteur-conciliateur a donc eu lieu le 31 janvier 2007. À la suite de cette visite, l’Administrateur a rendu une décision le 26 février 2007 (Pièce A-7). L’Administrateur a ordonné à l’Entrepreneur de remplacer le plancher de bois franc du rez-de-chaussée et d’effectuer des correctifs localisés pour les gros interstices et les lattes qui ne sont pas clouées à l’étage.
[7] Le 27 mars 2007, le Bénéficiaire a demandé l’arbitrage de cette décision (Pièce A-8) au motif principal que le plancher du deuxième étage doit être également remplacé.
[8] Le 19 avril 2007, l’Administrateur a émis un addenda en raison de la demande verbale du Bénéficiaire d’être indemnisé pour les frais de relogement, de déménagement et d’entreposage des meubles qui seront encourus à cause des travaux aux planchers de bois et de fixer le sous-plancher du plancher du rez-de-chaussée (Pièce A-9). L’Administrateur a refusé cette demande. Le Bénéficiaire a également porté cette décision en arbitrage.
[9] Ces deux demandes d’arbitrage ont été soumises au soussigné qui les a réunies pour fins d’audition commune. Pour les fins de la présente, le Tribunal d’arbitrage rend une seule sentence pour les deux demandes d’arbitrage.
2. DÉCISION
[10] Après avoir entendu les parties et leurs experts, le Tribunal d’arbitrage a eu l’opportunité de visiter les lieux et de constater les problèmes allégués. Cependant, les conditions de visite, suite à une demande de visite formulée par l’Administrateur pour la première fois à l’audition, en plein milieu d’été (le 22 août 2007) n’étaient pas idéales car le bois était à son expansion maximale en raison des conditions climatiques de la saison estivale.
a) Planchers de l’étage
[11] Selon la preuve d’expert soumise, le bois aurait été installé alors que son taux d’humidité était trop élevé. Le Bénéficiaire a affirmé que le bois a été entreposé dans un garage non chauffé environ deux semaines avant la pose.
[12] L’expert du Bénéficiaire, Monsieur Raymond Dubé, a expliqué l’état actuel du plancher par une installation d’un plancher de bois trop humide mais aussi par l’absence, à certains endroits, de clous nécessaire au maintien des lattes du plancher. À son avis, les planchers doivent être refaits complètement car il est anormal d’avoir des interstices aussi importants sur des planchers neufs.
[13] Le Tribunal d’arbitrage a constaté que l’état du plancher du rez-de-chaussée est similaire à celui du plancher de la mezzanine. En effet, les lattes des planchers de bois francs étaient, à plusieurs endroits, très écartées les une par rapport aux autres. Il y avait même des lattes qui pouvaient facilement être glissées, déplacées et enlevées en raison de l’absence de fixation adéquate et ce, tant à l’étage qu’au rez-de-chaussée.
[14] Le Tribunal d’arbitrage est d’avis que des correctifs localisés ne sont pas suffisants en l’espèce et que le problème est généralisé sur toute la surface. La condition du plancher de l’étage n’était pas meilleure que celle du plancher du rez-de-chaussée. Si la décision de l’Administrateur de remplacer le plancher au rez-de-chaussée est la bonne, ce qui n’est pas contesté, le Tribunal d’arbitrage ne voit pas de raison d’adopter une solution différente à l’étage. L’Entrepreneur devra donc remplacer le plancher de bois franc de l’étage.
b) Plancher du rez-de-chaussée
[15] Quant au plancher du rez-de-chaussée, la question à résoudre est le remplacement du sous-plancher. Monsieur Dubé affirme qu’il a constaté que le sous-plancher du rez-de-chaussée n’était pas installé selon les règles de l’art. En effet, ce dernier aurait dû être apposé en diagonale de façon à ce que la fin des lattes de bois du plancher n’arrive jamais avec la fin d’une planche de contre-plaqué. Cela emporte à son avis un manque de solidité du plancher.
[16] Le Tribunal d’arbitrage a pu constater qu’à certains endroits le plancher manque de solidité et s’enfonce lorsque nous marchons dessus. Aucune preuve convaincante ou détaillée d’expert contraire n’a été soumise tendant à démontrer que la pose actuelle serait conforme aux règles de l’art. Le Tribunal d’arbitrage conclut que le sous-plancher doit être refait en diagonale au rez-de-chaussée. Selon la preuve, il semble que le même problème n’existe pas au plancher de l’étage.
[17] De plus, le Bénéficiaire désir que le sous-plancher soit cloué ou vissé de façon à le maintenir en place. Pour sa part, l’Entrepreneur a expliqué que le Bénéficiaire a fait le choix au moment de la construction d’obtenir un plancher muni d’une membrane antibruit. Des coûts supplémentaires sont associés à la fixation du sous-plancher au sol. Au surplus, il semble que la réalisation d’un tel travail aurait comme effet de diminuer grandement l’efficacité de la membrane anti-bruit.
[18] Le Tribunal d’arbitrage est d’avis que le sous-plancher ne doit pas être fixé au sol, notamment car il ne reflète pas les désirs antérieurs du Bénéficiaire, mais aussi car cela engendrerait des coûts supplémentaires pour lesquels l’Entrepreneur ne peut être tenu.
[19] Il n’en tient qu’au Bénéficiaire, s’il préfère que son plancher soit fixé, d’en assumer les coûts.
c) Frais de relogement, de déménagement et d’entreposage
[20] Le Bénéficiaire demande de plus à ce que ses frais de relogement, de déménagement et d’entreposage soient remboursés par l’Administrateur.
[21] À cet égard, il soumet la décision Bérubé c. Les Maisons Zibeline Inc.[2] rendue par l’arbitre Claude Mérineau et les règles d’interprétation des lois. Le Bénéficiaire s’appuie également sur l’article 12 du Règlement afin de conclure que ces frais sont inclus dans la garantie de l’Administrateur :
« 12. Sont exclus de la garantie : […]
(5) l’obligation de
relogement, de déménagement et d’entreposage des biens du bénéficiaire et les
réparations rendues nécessaires à la suite d’évènements de force majeure
tels les tremblements de terre, les inondations, les conditions climatiques
exceptionnelles, la grève et le lock-out; »
(notre emphase)
Le procureur du Bénéficiaire plaide que, dans l’absence des circonstances décrites à la fin de ce paragraphe, son client doit avoir droit à l’indemnisation.
[22] Pour sa part, l’Administrateur soumet plusieurs décisions qui affirment que les frais réclamés ne sont pas inclus dans le plan de garantie[3]. Il s’appuie également sur les articles 9 et 10 du Règlement :
« 9. La garantie d’un plan dans le cas de manquement de l’entrepreneur à ses obligations légales ou contractuelles avant la réception du bâtiment doit couvrir : […]
(3) le relogement, le déménagement et l’entreposage des biens du bénéficiaire dans les cas suivants :
a) le bénéficiaire ne peut prendre réception du bâtiment à la date convenue avec l’entrepreneur à moins que les acomptes ne soient remboursés;
b) il ne peut prendre réception du bâtiment à la date convenue avec l’entrepreneur afin de permettre à l’administrateur de parachever le bâtiment.
10. La garantie d’un plan dans le cas de manquement de l’entrepreneur à ses obligations légales ou contractuelles après la réception du bâtiment doit couvrir :
(1) le parachèvement des travaux relatifs au bâtiment et dénoncés, par écrit, au moment de la réception ou, tant que le bénéficiaire n'a pas emménagé, dans les 3 jours qui suivent la réception;
(2) la réparation des vices et malfaçons apparents visés à l'article 2111 du Code civil et dénoncés, par écrit, au moment de la réception ou, tant que le bénéficiaire n'a pas emménagé, dans les 3 jours qui suivent la réception;
(3) la réparation des malfaçons existantes et non apparentes au moment de la réception et découvertes dans l'année qui suit la réception, visées aux articles 2113 et 2120 du Code civil et dénoncées, par écrit, à l'entrepreneur et à l'administrateur dans un délai raisonnable, lequel ne peut excéder 6 mois de la découverte des malfaçons;
(4) la réparation des vices cachés au sens de l'article 1726 ou de l'article 2103 du Code civil qui sont découverts dans les 3 ans suivant la réception du bâtiment et dénoncés, par écrit, à l'entrepreneur et à l'administrateur dans un délai raisonnable, lequel ne peut excéder 6 mois de la découverte des vices cachés au sens de l'article 1739 du Code civil;
(5) la réparation des vices de conception, de construction ou de réalisation et des vices du sol, au sens de l'article 2118 du Code civil, qui apparaissent dans les 5 ans suivant la fin des travaux et dénoncés, par écrit, à l'entrepreneur et à l'administrateur dans un délai raisonnable, lequel ne peut excéder 6 mois de la découverte ou survenance du vice ou, en cas de vices ou de pertes graduelles, de leur première manifestation. » (nos emphases)
[23] Il soutient que le législateur a prévu spécifiquement que les frais de relogement, de déménagement et d’entreposage sont inclus seulement s’ils sont encourus avant la réception du bâtiment. Il n’est pas selon lui opportun ni légitime de passer outre le texte clair du Règlement.
[24] Il faut souligner que rien n’empêche le Bénéficiaire de réclamer une indemnité pour ces frais et inconvénients devant les tribunaux de droit commun. Le procureur du Bénéficiaire a souligné avec justesse que le Bénéficiaire et sa famille, comprenant un enfant en bas âge seraient obligés de quitter les lieux, de se relocaliser et d’entreposer leurs meubles temporairement en raison de l’ampleur des travaux. Cependant selon la preuve, les travaux devraient être réalisés dans un délai maximal de trois jours.
[25] Malgré une présentation rigoureuse et sérieuse de la part du procureur du Bénéficiaire, le Tribunal d’arbitrage se considère obligé de refuser la demande d’indemnisation du Bénéficiaire pour ces frais. Le Règlement est clair à l’effet que seuls les frais encourus avant la réception du bâtiment sont inclus dans la garantie de l’Administrateur. Malgré toute la sympathie que le Tribunal d’arbitrage peut avoir pour le Bénéficiaire et sa famille, il ne revient pas au Tribunal d’arbitrage d’élargir la portée du Règlement pour y ajouter des frais que le législateur a choisi d’exclure. Il y a peut-être là une lacune que le législateur aurait intérêt à corriger lors d’une révision ultérieure du Règlement.
[26] Cependant, le soussigné réitère le passage suivant de sa décision dans l’affaire Les Constructions G. Mélatti Inc.[4] :
« Nous n’écartons pas la possibilité que dans les cas d’extrême injustice, il peut être nécessaire ou approprié pour un Tribunal d’arbitrage d’accorder des frais de déménagement et/ou d’entreposage au Bénéficiaire en se fondant sur l’article 116. »
[27] Le Tribunal d’arbitrage considère que les faits en l’espèce ne permettent pas de s’écarter de la règle habituelle à l’effet que les frais de relogement, de déménagement et d’entreposage ne sont pas inclus dans le régime d’indemnisation du plan de garantie.
d) Frais d’expertise
[28] Le Bénéficiaire demande le remboursement des frais d’expert encourus dans le cadre du présent arbitrage. L’Administrateur ne conteste pas le quantum de la réclamation et laisse le soin au Tribunal d’arbitrage d’évaluer l’utilité et la pertinence du témoignage de Monsieur Dubé.
[29] Le Tribunal d’arbitrage considère que le témoignage de Monsieur Dubé a été essentiel à la compréhension du litige, et ce pour toutes les parties et le Tribunal d’arbitrage. De plus, les frais relatifs à son expertise n’apparaissent pas excessifs. Par conséquent, ces frais du Bénéficiaire seront remboursés. Le coût du rapport de Monsieur Dubé est de 683,70 $. Pour son témoignage à l’audition (y compris lors de la visite des lieux), ses frais sont de 600 $.
PAR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL D’ARBITRAGE :
ACCUEILLE partiellement la demande du Bénéficiaire;
ORDONNE à l’Entrepreneur d’effectuer les travaux correctifs énoncés dans la présente sentence selon les règles de l’art et ce dans les trente jours;
À DÉFAUT, ORDONNE à l’Administrateur d’effectuer les travaux correctifs énoncés dans la présente sentence selon les règles de l’art et ce dans les trente jours;
CONDAMNE l’Administrateur à payer au Bénéficiaire la somme de 1 283,70 $ pour les frais d’expertise dans les trente jours de la présente sentence;
CONDAMNE l’Administrateur aux frais d’arbitrage.
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Me Jeffrey Edwards, Arbitre |
[1] c. B. 1.1, r. 0.2. Ci-après le Règlement.
[2] Bérubé c. Les Maisons Zibeline Inc. et La Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ Inc., 31 juillet 2006, SORECONI, Claude Mérineau.
[3] Bureau c. Le Groupe Platinum Construction 2001 Inc. et La Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ Inc., 12 juillet 2006, GAMM, Jean Morissette; Pelletier c. C=BO2 Inc. et La Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ Inc., 9 mars 2006, SORECONI, Alcide Fournier; Syndicat de copropriété « SDC Les Habitations Mélatti, 7014 Marie-Rollet et 7011 Louis-Hébert à Lasalle » c. Les Constructions G. Mélatti Inc. et La Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ Inc., 11 août 2006, SORECONI, Jeffrey Edwards; Gagnon c. Les Maisons Zibeline Inc. et La Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ Inc., 27 novembre 2006, GAMM, Claude Dupuis; Perron c. La Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ Inc. et al., C.Q. Montréal, no. 500-32-085072-041, j. Brossard,12 mai 2006.
[4] Syndicat de copropriété « SDC Les Habitations Mélatti, 7014 Marie-Rollet et 7011 Louis-Hébert à Lasalle » c. Les Constructions G. Mélatti Inc. et La Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ Inc., 11 août 2006, SORECONI, Jeffrey Edwards.