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ARBITRAGE

En vertu du Règlement sur le plan de garantie
des bâtiments résidentiels neufs

(Décret 841-98 du 17 juin 1998)

 

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

 

Groupe d’arbitrage et de médiation sur mesure (GAMM)

Dossier GAMM :

2008-19-003

 

APCHQ :

 

053010-1

 

Date :

4 juin 2009

 

 

 

DEVANT L’ARBITRE :

JEAN MORISSETTE

 

 

SYNDICAT DE COPROPRIÉTÉ 6597 BOUL. DES LAURENTIDES

Bénéficiaire

Et

LES HABITATIONS BERNARD & LAPOINTE (9107-9301 QUÉBEC INC.)

L’Entrepreneur

Et

LA GARANTIE DES BÂTIMENTS RÉSIDENTIELS NEUFS DE l’APCHQ INC.

L’Administrateur de la Garantie

______________________________________________________________________

 

SENTENCE ARBITRALE

______________________________________________________________________

 

[1]    La décision du 2 septembre 2008 rendue par madame Joanne Tremblay t.p. pour l’Administrateur est portée en arbitrage par l’Entrepreneur ;

[2]    L’Entrepreneur soutient que les désordres affectant l’immeuble ne sont pas un vice majeur, couverts par la garantie ;

[3]    Il a été reconnu que ma nomination était faite légalement et que j’avais juridiction pour entendre et décider de l’arbitrage formé en vertu du Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs (L.R.Q., c. B-1,1-a. 185, paragraphes 19.3 à 19.6, 38 et 192), ci-après le règlement ;

[4]    Tous les témoins ont été assermentés avant d’être entendus ;

[5]    Le cahier de pièces préparé par l’Administrateur est admis de consentement, en preuve (pièces A-1 à A-7) ;

[6]    Dix-sept (17) photographies prisent par madame Tremblay le 12 août 2008 sont aussi déposées de consentement, (pièce A-8) ;

La décision de l’administrateur

[7]    Madame Joanne Tremblay t.p. est la signataire de la décision du 2 septembre 2008. Elle est architecte, possède 30 ans d’expérience et travaille au département du traitement des plaintes chez l’Administrateur ;

[8]    L’avis de dénonciation des bénéficiaires du 13 mai 2008 fait état de fissures à la cage d’escalier arrière (pièce A-3);

[9]    Cette cage d’escalier est formée de murs de béton dans le sol (photo A-8 (2)) sur lesquels reposent les assises des balcons des 2ième et 3ième étages ;

[10]            Les photos A-8 (3) à A-8 (13) montrent le désordre qu’elle a constaté à l’été 2008 ;

[11]             À l’examen des photographies A-8 (10), (11) et (14), on peut constater que les pentes du terrain dirigent l’écoulement de surface des sols environnant vers la cage d’escalier ;

[12]            Madame Tremblay nous produira vingt-quatre (24) autres photos prises les 24 et 27 février 2009 (pièce A-9 (1 à 24)) ;

[13]            Le dessin à main levée (pièce A-10) de madame Marie Tremblay explique l’emplacement des photos.  Ainsi, sur le croquis A-10 seront reproduits les chiffres 1 à 24 des photographies pour marquer leur localisation ;

[14]            Selon madame Tremblay, les désordres qu’elle a constatés et leur évolution sont des vices majeurs puisqu’il y a risque partiel de perte de l’immeuble soit l’effondrement des assises qui soutiennent les balcons des 2ième et 3ième étages ;

[15]            Madame Tremblay soumet que monsieur Alain Corbeil, expert retenu par l’Entrepreneur n’a pas effectué ses constatations à la même époque ;

[16]            Il est aussi souligné qu’elle préconise des travaux spécifiques pour effectuer les réparations et que je serai invité à me prononcer sur ceux-ci ;

 

TYPE DE CONTRAT

[17]            L’Entrepreneur admet qu’il lui appartenait dans son contrat de type clé en main de faire l’aménagement du sol au pourtour et près des unités d’habitation qu’il construisait et plus particulièrement de l’endroit, objet du présent arbitrage ;

 

LES BÉNÉFICIAIRES

[18]            Madame Sylvie Daigle est propriétaire d’une unité d’habitation et secrétaire pour le syndicat, bénéficiaire en instance ;

[19]            Elle a constaté, la veille de l’audition, la présence de sable et de terre sur le plancher de la cage de l’entrée, endroit des désordres ;

[20]            Elle a vu les fissures que l’on constate à la photo (A-9 (9)) et témoigne que la fissure à côté de la porte patio est maintenant très large, qu’il y a une évolution du désordre ;

[21]            Madame Lise Courcelles est propriétaire d’une unité d’habitation et vice-présidente du syndicat ;

[22]            Elle a fait le tour des lieux avec madame Tremblay lors de sa visite de février 2009 ;

[23]            La porte patio ne pouvait pas être fermée et il était alors très difficile d’en faire usage. Un espace (un jour) dans le coin de la porte était visible autant à l’extérieur qu’à l’intérieur. Le froid entrait et on devait calfeutrer le trou à l’aide de guenilles ;

 

L’EXPERT DE L’ENTREPRENEUR

[24]            Monsieur Alain Corbeil détient un DEC en architecture du Cégep de Montmorency, a étudié en architecture, se spécialise en désordre de type infiltration d’eau et d’air, enseigne la pathologie du bâtiment (consiste en une science des déductions pour conclure à un diagnostic sur un désordre), est membre de l’Ordre des technologues professionnels et a témoigné plus ou moins 100 fois devant les tribunaux à titre d’expert ;

[25]            Les bénéficiaires prennent connaissance pour la première fois du rapport d’expertise de monsieur Corbeil ;

[26]            Malgré la possibilité de remettre l’audition pour faire préparer une contre-expertise ou se préparer à contre-intérroger l’expert, les membres de l’exécutif du syndicat des copropriétaires choisissent de poursuivre l’audience. 

[27]            Le mandat de l’expert consiste à donner son avis sur l’état des fissures et leur cause ;

[28]            À l’examen des photographies A-8 et A-9, il admet qu’il y a eu aggravation entre l’été 2008 et février 2009 ;

[29]            Le témoignage de monsieur Alain Corbeil reprendra les conclusions de son rapport du 8 janvier 2009 (pièce E-1) ;

[30]            À la demande des représentants du bénéficiaire et en compagnie de l’expert de l’Entrepreneur et des parties, nous nous sommes alors déplacés pour examiner les lieux ;

 

CONSTATATIONS

[31]            J’ai alors constaté :

a)            Il y a une fissure importante entre la porte patio et le mur de la cour anglaise ;

b)            Le mur gauche accuse maintenant un bombage vers l’intérieur ;

c)            Il y a plusieurs fissures importantes qui ne peuvent qu’être occasionnées que par  les mouvements de sol qui s’appuient sur les murs de la cage de l’entrée arrière ;

d)            Autour des lieux, on voit que la topographie des sols et leur aménagement (emplacements des cabanons et du stationnement) sont plus haut que les murets de la cage de la cour anglaise ;

[32]            Pendant la visite des lieux, l’expert de l’Entrepreneur dira que la fissure aux abords de la porte patio n’est pas causée par l’eau de pluie, comme précédemment proposé. Il ajoutera que le déplacement de la porte patio est dû à la poussée exercée par le sol sur le mur gauche de la cage d’entrée ;

[33]            De même, monsieur Marquis Lapointe représentant de l’Entrepreneur admet qu’il faut réparer sinon tout cela va empirer ;

[34]            Madame Joanne Tremblay, pour sa part, m’informe que sans une réparation des murets sur lesquels reposent les galeries des 2ième et 3ième planchers, tout risque de s’effondrer  ;

[35]            L’expert de l’Entrepreneur me répétera que l’accumulation d’eau aux abords de la cage d’entrée est la cause des désordres constatés. Selon lui, il s’agit d’un défaut d’entretien puisque la topographie aurait été modifiée depuis la prise de possession des lieux ;

 

ANALYSE

[36]            L’examen des photos et des lieux me convainc que les fissures dans les murs formant la cour anglaise s’aggravent avec le temps ;

[37]            Le mouvement du sol entourant les murs de béton applique des poussées latérales qui accusent des fissures ;

[38]            L’écoulement de surface est dirigé vers la cage d’escalier et la présence d’eau cause une accumulation qui, en période de gel, cause des poussées sur les assises des balcons ;

[39]            La situation doit être absolument réparée et il y a danger d’effondrement ;

[40]            Il n’y a eu aucun commentaire ou preuve contraire sur les travaux à être faits pour corriger ces désordres qui sont des vices majeurs au sens du règlement ;

[41]            L’Administrateur, vu le danger, le refus de l’Entrepreneur de procéder à corriger des travaux déficients (pente de terrain) et l’évaluation des désordres constatés requiert que j’entérine la description des travaux faite à la décision du 2 septembre 2008 (Pièce P-5) ;

[42]            Attendu que la situation m’apparaît suffisamment  grave et urgente et qu’aucune preuve contraire ne m’a été faite sur la description des travaux correctifs à être exécutés;

[43]            Attendu que l’entrepreneur était avisé que l’Administrateur demanderait que je me prononce sur ces travaux correctifs ;

[44]            Attendu qu’il y a risque de danger d’effondrement ;

[45]            Attendu qu’il y a évolution des fissures depuis les premières constatations des désordres ;

[46]            Attendu que les travaux correctifs détaillés par Joanne Tremblay m’apparaissent tout à fait adéquats et pertinents ;

 

POUR ET PAR CES MOTIFS

REJETTE l’avis d’arbitrage de l’Entrepreneur du 21 octobre 2008 ;

ORDONNE à L’Entrepreneur d’apporter les correctifs qui s’imposent, à savoir :

Reconstruire dans son entier  la cour anglaise en question ou ajouter des membrures d’acier par l’extérieur et réparer les fissures.

Advenant que l’Entrepreneur préconise la deuxième solution, un rapport d’ingénieur devra être soumis à l’Administrateur avant le début des travaux, lequel rapport devra décrire la technique qui sera utilisée.

Une attention particulière devra être portée au drainage de l’eau de surface qui doit obligatoirement diriger l’eau vers l’extérieur du bâtiment.

L’Entrepreneur devra également s’assurer que le drain français soit fonctionnel. L’ajout d’une membrane drainante de fondation et un remblai de sable tout autour de cette cour seraient deux éléments à considérer dans les correctifs à apporter afin d’obtenir les résultats d’apports d’eau importants lors d’un redoux (eau mal drainée), eau qui se transforme en glace, laquelle, en prenant de l’expansion, devient une puissance destructrice.

Le tout avec les entiers dépens payables par l’Entrepreneur.

 

           

 

JEAN MORISSETTE, arbitre

 

 

MADAME LISE COURCELLE,

Vice-présidente du syndicat du copropriété du 6599 boul. des Laurentides 

 

Et

 

MADAME SYLVIANE DAIGLE,

Secrétaire du syndicat de copropriété du 6599 boul. des Laurentides

              Bénéficiaires

 

 

 

 

 

Et

MONSIEUR MARQUIS LAPOINTE  pour

Les Habitations Bernard et Lapointe

(9107-9301 Québec inc.)

6170, rue Parny

Laval (Québec)  H7H  3A6

             Représentant de l’entrepreneur

 

Et

MONSIEUR ALAIN CORBEIL tp

Pro Inspection

348, Hector

Laval (Québec) 

 

Et

ME JOANNE TREMBLAY

LA GARANTIE DES BÂTIMENTS RÉSIDENTIELS NEUFS DE L’APCHQ INC.

Savoie Fournier Avocats

5930, rue Louis-H. Lafontaine,

Anjou (Québec)  H1M 1S7

                 Pour L’Administrateur

 

Date(s) d’audience :

21 avril 2009