ARBITRAGE EN VERTU DU RÈGLEMENT SUR LE PLAN DE GARANTIE DES BÂTIMENTS RÉSIDENTIELS NEUFS
(Décret 841-98 du 17 juin 1998)
Organisme d’arbitrage autorisé par la Régie du bâtiment : CCAC
ENTRE : SDC HABITATIONS SAINT-MAURICE PHASE III;
(ci-après le « Bénéficiaire »)
ET : HABITATIONS SAINT-MAURICE INC.;
(ci-après l’ « Entrepreneur »)
ET : RAYMOND CHABOT, ADMINISTRATEUR PROVISOIRE INC. ÈS QUALITÉ D’ADMINISTRATEUR PROVISOIRE DU PLAN DE GARANTIE DE LA GARANTIE ABRITAT INC.;
(ci-après l’« Administrateur »)
Dossier CCAC : S16-042601-NP
Décision
Arbitre : Me Michel A. Jeanniot
Pour le Bénéficiaire : Monsieur Jean Laflamme
Pour l’Entrepreneur : Aucun représentant
Pour l’Administrateur : Me Martin Thibeault
Date de la Décision : 22 mars 2017
Identification complète des parties
Bénéficiaire : SDC Habitations Saint-Maurice phase III
[...]
Trois-Rivières (Québec) [...]
Et son représentant :
Monsieur Jean Laflamme
Entrepreneur: Habitations Saint-Maurice Inc.
2180, rue Saint-Philippe
Trois-Rivières (Québec) G8Y 0B6
Administrateur : Raymond Chabot, administrateur provisoire Inc. ès qualité d’administrateur provisoire du plan de garantie de la Garantie Abritat Inc.
7333, Place des Roseraies, bur. 300
Montréal (Québec) H1M 2X6
Et son procureur :
Me Martin Thibeault
Contentieux des garanties
7333, Place des Roseraies, bur. 300
Montréal (Québec) H1M 2X6
L’arbitre a reçu son mandat de CCAC le 26 avril 2016.
Valeur en litige
Classe VI, valeur de 508 000,00 $
Plumitif
26.04.2016 Réception de la demande d’arbitrage par le greffe du CCAC
26.04.2016 Nomination de l’arbitre
06.06.2016 Réception du cahier de pièces de l’Administrateur
07.06.2016 LT aux parties : disponibilités pour fixer appel conférence / conférence de gestion
13.06.2016 LT aux parties : confirmation date et heure de l’appel conférence / conférence de gestion
04.07.2016 LT aux parties : rappel de l’appel conférence / conférence de gestion
05.07.2016 Appel conférence / conférence de gestion et transmission subséquente du procès-verbal aux parties
14.10.2016 LT aux parties : confirmation endroit, salle et heure de l’enquête et audition
17.10.2016 Enquête et audition (salle 1.18, Palais de justice de Drummondville)
18.10.2016 Enquête et audition (salle 1.18, Palais de justice de Drummondville)
08.11.2016 Réception des notes et autorités du Bénéficiaire
12.12.2016 Réception des notes et autorités de l’Administrateur
29.12.2016 Réception de la réplique du Bénéficiaire
22.03.2017 Décision
Décision
[1] Bien que la présente demande d’arbitrage a source dans la décision de l’Administrateur du 29 mars 2016 et une demande d’arbitrage «multipoints» du 26 26 avril 2016, suite à des discussions et, entre autre, la conférence de gestion du 5 juillet 2016, il fut convenu que la présente demande (d’arbitrage) ne porterait que sur deux (2) seuls points précis à savoir :
[1.1] conduits de sécheuse et hottes de cuisinière non-conformes ou déficientes;
[1.2] fenêtres défectueuses (sic);
[2] Tel qu’il m’en est coutume, je ne reprendrai pas ici en long ou avec force de détails tous et chacun des éléments de preuve (témoignages factuels, rapports et témoignages d’expert) n’ayant pas à répondre à tous les arguments avancés pour valablement décider du mérite (non plus qu’à attacher la même importance à tous les éléments de preuve que ceux revendiqués par les parties, je me permettrai de me limiter aux éléments ginglymes de mon processus décisionnel[1];
[3] Je rappelle que, dans cette instance, il s’agit du Bénéficiaire qui est en demande et qu’à cet effet, c’est à lui qu’appartient le fardeau de la preuve. Sans que ce fardeau ne lui soit indu, il a néanmoins l’obligation de convaincre;
L’ENQUÊTE ET AUDITION
[4] Le Bénéficiaire fait entendre trois (3) témoins;
Sur les conduits de sécheuse et les hottes de cuisinière non conformes
Premier témoin du Bénéficiaire, Monsieur Jean Laflamme
[5] Monsieur Jean Laflamme vient attester (et met en preuve), entre autre, que le bâtiment est aussi connu et identifié comme étant la phase III de III, construit en enfilade avec les phases I et II par le même Entrepreneur et selon les mêmes plans et devis;
[6] Se référant à la pièce B-A-7.1, il nous suggère qu’il (l’Administrateur) a reconnu la même problématique comme vice caché pour la phase II de III;
[7] Il complète (en se référant à la pièce B-A-3) en représentant que la situation des conduits présente constitue un risque de propagation en cas d’incendie;
[8] En contre-interrogatoire, le procureur de l’Administrateur obtient la confirmation du Bénéficiaire qu’il ne s’agit pas, selon le témoin, d’un risque d’incendie mais plus probablement (possiblement) d’un risque de propagation en cas d’incendie;
[9] Au cours de ce même contre-interrogatoire, alors qu’un retour est fait sur le sommaire chronologique parcouru par le témoin, il est reconnu que les propriétaires des unités privatives «se plaignent» dès 2013 de la mauvaise performance des hottes de cuisine, des ventilateurs de salle de bain et du «Venmar» (marque de commerce des échangeurs d’air, récupérateur de chaleur ou d’énergie);
[10] À ce même contre-interrogatoire ressort que, dès novembre 2014, le syndicat a réception d’informations des âmes dirigeantes des syndicats de copropriétaires des phases II de III de la non-conformité des conduits de sécheuse et hottes de cuisine et que de façon plus précise, ces tuyaux étaient de quatre (4) pouces de diamètre au lieu de six (6) pouces et côtelés plutôt que lisses;
Deuxième témoin du Bénéficiaire, Monsieur Rémi Martel
[11] Monsieur Martel est inspecteur en bâtiment et après un bref voir dire, est reconnu comme expert et donc habiliter à s’exprimer sur (opiner et expliquer) son rapport d’expert (pièce B-A-8);
[12] Ce dernier confirme que «les conduits» en question sont :
[12.1] en matière plastique et non métallique (ce qu’il suggère est contraire au guide d’installation du manufacturier);
[12.2] d’un diamètre inférieur à ce qui est recommandé (4 pouces au lieu de 6 pouces);
[13] Le témoin Martel suggère que ces deux (2) anomalies seraient contraire au Code national du Bâtiment;
Sur la question des fenêtres défectueuses
Troisième témoin du Bénéficiaire, Monsieur Ghislain Gendron
[14] Monsieur Gendron témoigne à l’effet que dès 2012, deux (2) fenêtres sont à changer (ce qui fut fait en décembre 2013). Neuf (9) autres fenêtres (fixes) sont subséquemment changées;
[15] Il s’agissait alors, selon la décision de l’Administrateur de l’époque [qui avait alors reconnue la problématique dans le cadre du plan de garantie] de malfaçon apparente lors de la prise de possession et/ou lors de la réception du bâtiment;
[16] Plus tard (et ceci est l’objet du présent dossier), une demande pour «changer» plus ou moins vingt-et-une (21) autres fenêtres est formulée. Celles-ci sont des fenêtres à battant;
[17] Le 11 mai 2015, une décision de l’Administrateur sous la plume de Madame Delage, refuse cette demande. Aucune demande d’arbitrage n’est formulée suivant le refus de l’Administrateur de reconnaître la demande du syndicat;
[18] Le 24 juillet 2015, une nouvelle dénonciation pour les mêmes (+/-) 21 fenêtres est formulée par le syndicat. À nouveau, Madame Delage refuse de reconnaître la problématique dans le cadre du plan de garantie;
[19] Le Bénéficiaire nous représente qu’il considère que cette problématique pour ces (+/-) 21 fenêtres constitue un vice d’une telle gravité qu’il est qualifié de vice caché;
[20] De plus, il réfère à ses pièces B-2, B-3 et B-4 et suggère (tel que repris sous la plume électronique de Monsieur François Lahaie de la compagnie «Nouvel Horizon»), «…les thermos sont dessellés et les fenêtres fixes arrières ne sont pas conformes»;
Argumentaire du Bénéficiaire
[21] Le Bénéficiaire soumet au Tribunal que le Code de construction du Québec chapitre 1 - Bâtiment et Code national du bâtiment Canada 2005 (modifié) est en vigueur au moment de la construction de l’immeuble 170-180 Thibeau, en avril 2012;
tuyau de sécheuse
[22] Le Bénéficiaire allègue que les normes indiquées au Code national du Bâtiment sont des exigences minimales et qu’un des objectifs de celui-ci est la protection du bâtiment contre l’incendie;
[23] Le Bénéficiaire est d’opinion que c’est pour empêcher l’accumulation de la charpie dans les conduits de sécheuse et pouvant provoquer un incendie que le Code national du bâtiment exige que les tuyaux soient lisses (non annelés);
[24] Selon le Bénéficiaire, le fait que les tuyaux ne soient ni lisses ni composés de matériaux incombustibles constitue une dérogation au Code et exige une réparation de facto;
[25] Il est rappelé au Tribunal que le Bénéficiaire a dénoncé à l’Entrepreneur et à l’Administrateur la situation le 19 avril 2015, soit trois (3) semaines après en avoir découvert la non-conformité en utilisant une caméra sonde et moins de quatre (4) mois après avoir été informé par le Syndicat voisin (phase II) d’un jugement favorable de la part de l’Administrateur concernant un défaut identique relevé dans leur immeuble;
[26] Le Bénéficiaire allègue que le vice est réel, grave et lourd de conséquence vis-à-vis la valeur de l’immeuble et l’assurabilité de celui-ci;
[27] Concernant le caractère caché du vice, le Bénéficiaire soumet qu’il était impossible à détecter compte tenu de la situation des tuyaux dans les murs et plafonds de l’immeuble. Il appert qu’une sortie du mur extérieur a dû être retirée pour constater le défaut. Selon le Bénéficiaire, ce défaut rencontre tous les critères de vice caché et réaffirme qu’il a été dénoncé dans un délai raisonnable conformément aux dispositions indiquées tant au Plan de garantie qu’au Règlement et à la jurisprudence sous l’article 1739 du Code civil du Québec;
[28] De plus, le Bénéficiaire soumet au Tribunal que l’inspection pré-réception doit être effectuée selon une liste préétablie d’éléments à vérifier fournie par l’Administrateur et qu’aucune référence ni exigence quant à la vérification des conduits de ventilation dans les murs et plafonds n’y est requise;
hottes de cuisine
[29] Le Bénéficiaire fait référence au rapport d’expertise et allègue que les tuyaux de hottes de cuisine sont non-conformes, composés de matériaux combustibles et que les joints des rubans combustibles constituent une dérogation au code de construction entraînant de facto une correction;
[30] Le Bénéficiaire soumet que des liens très étroits lient les deux (2) syndicats (phase II et phase III) et que les décisions prises par l’Administrateur pour l’un devraient valoir pour l’autre;
fenêtres
[31] Le Bénéficiaire met l’emphase sur l’objet de la décision de l’Administrateur datée du 11 mai 2015 à l’effet que l’inspecteur conciliateur a constaté que les thermos des fenêtres étaient descellés et qu’il convenait que les bris thermiques aux fenêtre devaient être qualifié de vice caché et par conséquence remplacés;
[32] Le Bénéficiaire soutient qu’un problème de malfaçon n’ayant pas été dénoncé dans les délais prescrits et refusé par l’Administrateur, n’élimine pas la possibilité de dénoncer un vice caché sur les mêmes articles lorsque celui-ci est découvert par le Bénéficiaire (sic);
Sommaire de la preuve et de l’argumentaire de l’Administrateur
[33] Tel qu’annoncé, l’Administrateur ne présente qu’un seul témoin, l’auteure de la décision du 11 mai 2015, Madame Anne Delage;
[34] L’Administrateur, pour sa part, soumet que le Code national du bâtiment du Canada (ci-après «CNB») 2010 est applicable à l’immeuble du Bénéficiaire;
tuyau de sécheuse
[35] Bien que la dimension des conduits puisse être une malfaçon au sens du Règlement, l’Administrateur soutient que cet élément était visible et aurait dû être dénoncé dès la réception de l’immeuble par le Bénéficiaire via la procédure d’inspection pré-réception;
[36] Concernant le matériau composant les tuyaux de sécheuse utilisés par l’Entrepreneur, l’Administrateur allègue que le matériau ne rend pas le bien impropre à l’usage auquel on le destine;
[37] L’Administrateur soumet au Tribunal que le Bénéficiaire ne s’est pas déchargé de son fardeau en apportant la preuve que (i) les tuyaux de sécheuse s’étaient obstrués (ii) que l’élément était impropre à l’usage auquel il est destiné (iii) que les règles relatives à la sécurité n’étaient pas respectées ou encore (iv) que le matériau utilisé était prohibé par le CNB;
hottes de cuisine
[38] L’Administrateur allègue que le Bénéficiaire n’a fait aucune preuve pouvant démontrer que les hottes de cuisine ne satisfaisaient pas les critères permettant de qualifier la possible problématique de «vice caché» (selon le paragraphe 4 de l’article 27 du Règlement contrairement à la décision de la conciliatrice Madame Delage qui en a fait l’exercice dans sa décision);
fenêtres
[39] Quant aux fenêtres, l’Administrateur est d’avis que le problème (thermos descellés) relève de la composition et de l’assemblage desdites fenêtres déjà décrit dans la plainte 4 (décision datée du 11 mai 2015), refusées pour cause de vice apparent et non dénoncé lors de la réception de l’immeuble par le Bénéficiaire;
[40] Selon les allégations de l’Administrateur, le Bénéficiaire n’aurait pas fait la preuve que la décision de Madame Delage, inspectrice conciliatrice de l’Administrateur, ne respectait pas le Règlement; donc que la preuve offerte concernant les fenêtres fixes ne permet pas de rencontrer les critères de vice cachés au sens du paragraphe 4 de l’article 27 du Règlement;
Décision
[41] Considérant le débat et les divergences qui existent quant à la version applicable du Code national du bâtiment au cas d’espèce, le Tribunal se doit dans un premier temps d’indiquer aux parties que, selon l’information obtenue auprès des fonctionnaires municipaux, la version en vigueur au moment de la construction de l’immeuble est celle de 1995;
[42] Ceci étant dit, puisque le Bénéficiaire conteste le bien-fondé des décisions de l’Administrateur, le fardeau de preuve repose sur ses épaules. Quel est le niveau de preuve à offrir pour le Bénéficiaire ? À l’article 2803 du Code civil du Québec, le législateur indique :
« 2803 - Celui qui veut faire valoir un droit doit prouver les faits qui soutiennent sa prétention. »
[43] L’article 2804 C.c.Q. définit ainsi la preuve prépondérante :
« 2804- La preuve qui rend l’existence d’un fait plus probable que son inexistence est suffisante, à moins que la loi n’exige une preuve plus convaincante.»
[44] Relativement aux critères permettant de qualifier un vice de «vice caché», l’article 1926 du Code civil du Québec stipule que :
1726. Le vendeur est tenu de garantir à l’acheteur que le bien et ses accessoires sont, lors de la vente, exempts de vices cachés qui le rendent impropre à l’usage auquel on le destine ou qui diminuent tellement son utilité que l’acheteur ne l’aurait pas acheté, ou n’aurait pas donné si haut prix, s’il les avait connus.
Il n’est, cependant, pas tenu de garantir le vice caché connu de l’acheteur ni le vice apparent; est apparent le vice qui peut être constaté par un acheteur prudent et diligent sans avoir besoin de recourir à un expert.
1991, c. 64, a. 1726.
[45] La Cour d’appel[2] nous indique que quatre (4) éléments sont nécessaires à l’existence d’un vice caché :
« [21] De cet article ressortent les quatre éléments nécessaires à l'existence d'un vice caché: (1) le vice est nuisible à l'usage de la chose vendue; (2) le vice présentait une certaine gravité; (3) le vice existait au moment de la vente; (4) le vice était caché, donc inconnu de l'acheteur.»
[46] L’auteur Jacques Deslauriers, dans son ouvrage intitulé «Vente, louage, contrat d’entreprise ou de service»[3], précise en page 140 :
«A. Les caractéristiques du vice donnant ouverture au recours pour vices cachés.
Pour réussir un recours fondé sur des défauts cachés, l'acheteur doit prouver toutes les caractéristiques permettant de conclure au caractère caché du défaut, telles qu'énoncées ci-après: son caractère caché, sa gravité, l'ignorance qu'avait l'acheteur de son existence et l'existence de ce défaut au moment de la vente. (...) »
[47] La Cour du Québec[4] nous indique qu’un vice doit être considéré grave lorsque l’Acheteur démontre que s’il avait connu le défaut qui l’affecte, il ne l’aurait pas acheté et/ou qu’il n’en aurait pas donné si haut prix :
« [195] Le vice sera considéré comme grave lorsque l’acheteur démontrera que s’il avait connu le défaut qui l’affecte, il ne l’aurait pas acheté et/ou qu’il n’en aurait pas donné si haut prix.»
[48] Le Bénéficiaire soulève à plusieurs reprises que le non-respect à une norme établie par le Code national du bâtiment constitue un vice caché;
[49] La Cour Supérieure[5] nous indique que l’immeuble qui ne respecte pas les normes du Code national du bâtiment n’est pas pour autant porteur de vice caché. Il faut que ces manquements rendent l’immeuble impropre à l’usage auquel il est destiné :
[64] D’abord, la non-conformité au Code national du bâtiment n’est pas en soi porteuse de vices cachés. Encore faut-il que ces manquements au Code rendent l’immeuble impropre à l’usage auquel il est destiné ou en diminue l’utilité.
[50] La simple présence d’un déficit d’usage ne permet pas de justifier la qualification de vice caché. Cependant la Cour d’appel[6] nous rappelle qu’il n’est pas nécessaire que le vice empêche toute utilisation du bien, mais simplement qu’il en réduise l’utilité de façon importante par rapport aux attentes légitimes d’un acheteur prudent et diligent :
[19] La norme ainsi actualisée est conforme à l’enseignement de la Cour suprême, rappelé par les Appelants, dans l’affaire ABB Inc. et Alstom Canada Inc. c. Domtar Inc. :
[52] La simple présence d’un déficit d’usage ne suffit pas en elle-même pour justifier la qualification de vice caché. Encore faut-il que ce déficit d’usage soit grave, c’est-à-dire qu’il rende le bien impropre à l’usage auquel il est destiné ou en diminue tellement l’utilité que son acheteur ne l’aurait pas acheté à ce prix. Ce deuxième critère, celui de la gravité du vice, découle du texte de l’art. 1522 C.c.B.C. Cela dit, il n’est pas nécessaire que le vice empêche toute utilisation du bien, mais simplement qu’il en réduise l’utilité de façon importante, en regard des attentes légitimes d’un acheteur prudent et diligent.
conduits de sécheuse
[51] Le Tribunal ne partage pas la position de l’Administrateur à l’effet que les conduits sont des éléments qui étaient visibles au moment de l’inspection pré-réception; le Tribunal considère que le Bénéficiaire a fait la preuve du caractère caché desdits conduits situés dans les murs et plafonds de l’immeuble;
[52] Le tribunal est également d’avis que les défauts soulevés par le Bénéficiaire relativement aux conduits de sécheuse et de hotte de cuisine étaient bel est bien présents lors de l’inspection pré-réception validant ainsi le critère d’antériorité requis pour qualifier le vice;
[53] Toutefois, le Tribunal est d’avis que le Bénéficiaire n’a pas fait la preuve que la dimension et la composition des tuyaux de sécheuse représentent une malfaçon telle qu’il rend le bien impropre à l’usage auquel il est destiné ou qu’il diminue tellement son utilité que l’acheteur ne l’aurait pas acheté, ou n’aurait pas donné si haut prix, s’il les avait connus;
[54] Vu les circonstances, le Tribunal ne peut faire droit à la demande du Bénéficiaire sur ce point;
Conduits de hottes de cuisine
[55] Le Tribunal est d’avis que le Bénéficiaire s’est déchargé de son fardeau de preuve en démontrant que le défaut des conduits de hotte de cuisine réduisait de façon importante l’utilité du bien par rapport aux attentes légitimes d’un acheteur prudent et diligent;
[56] Par contre, lors de l’enquête, il a été reconnu que les propriétaires des unités privatives se plaignaient dès 2013 de la mauvais performance des hôtes de cuisines;
[57] La version précédente du présent Règlement, la version sous l’égide duquel le présent arbitrage est régi, prévoit expressément la garantie et la réparation des vices cachés au sens de l’article 1726 ou de l’article 2103 du Code civil du Québec que si :
[57.1] découvert dans les trois (3) années suivant la réception;
[57.2] dénoncé par écrit à l’Entrepreneur et à l’Administrateur dans un délai raisonnable qui ne peut dépasser six (6) mois de leur découverte;
[58] Ce délai d’alors de six (6) mois n’était pas seulement de rigueur mais de déchéance et la déchéance d’un droit a la conséquence de ne plus pouvoir obtenir quelque reconnaissance en justice;
[59] Conséquemment, le soussigné perd juridiction lorsque ce dépassement est constaté. Vu ce qui précède, il est impossible pour le Tribunal d’accueillir la demande du Bénéficiaire;
les fenêtres fixes
[60] Le Tribunal n’est pas en accord avec la position de l’Administrateur à l’effet que la problématique relative au verre trempé et à l’intercalaire trop mince est un vice apparent pour un acheteur prudent et diligent et considère qu’il s’agit bien d’un vice caché;
[61] Toutefois, force est de constater qu’à la suite de la décision de l’Administrateur datée du 11 mai 2015 à l’effet que le vice était de nature apparente, le Bénéficiaire n’a pas porté cette décision en arbitrage;
[62] Le Tribunal est d’opinion de ne pas renverser la décision de l’inspecteur conciliateur datée du 29 mars 2016 laquelle refuse au motif de la chose jugée de se prononcer sur la problématique ayant préalablement fait l’objet d’une décision en date du 11 mai 2015;
[63] Toutefois, le Tribunal est d’avis que la conclusion des points 1 et 2 de la décision émise par l’Administrateur en date du 11 mai 2015 doit être réitérée et réaffirmée à la problématique qui nous occupe dans le présent dossier pour ce qui est du bris des thermos qui doit en effet recevoir la qualification de vices cachés;
POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL D’ARBITRAGE :
REJETTE la réclamation du Bénéficiaire pour ce qui concerne les conduits des hottes de cuisines et des sécheuses;
ACCUEILLE PARTIELLEMENT la réclamation du Bénéficiaire pour ce qui concerne les (+/-) vingt-et-une (21) fenêtres fixes;
ORDONNE à l’Administrateur d’effectuer les vérifications puis, au besoin, les travaux de correction, le tout en conformité avec les points 1 et 2 de la décision émise par l’Administrateur datée du 11 mai 2015 et en conformité avec le Code National du Bâtiment;
RÉSERVE à Raymond Chabot Administrateur Provisoire Inc. ès qualités d’administrateur provisoire du plan de garantie de la Garantie Abritat Inc. ou La Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ Inc. (l’Administrateur) ses droits à être indemniser par l’Entrepreneur, pour tous travaux, toute(s) action(s) et toute somme versée incluant les coûts exigibles pour l’arbitrage (par.19 de l’annexe II du Règlement) en ses lieux et place, et ce, conformément à la Convention d’adhésion prévue à l’article 78 du Règlement;
Le tout, vu l’article 123 du Règlement, avec coût du présent arbitrage à la charge de l’Administrateur.
Montréal, le 22 mars 2017
_______________________
Michel A. Jeanniot, ClArb.
Arbitre / CCAC
Décision consultées mais non retenues pour fin de citations
SDC 52, 54, 54A 1re avenue et 4472985 Canada Inc., Me Jean Philippe Ewart, arbitre, Centre canadien d'arbitrage commercial (CCAC), S14-030401-NP, 2016-12-16
Wong et Construction David Roy Inc., Alcide Fournier, arbitre, Centre canadien d'arbitrage commercial (CCAC), 320483-1 et S15-120401-NP, 2016-08-25
Syndicat du 18 Impasse Huet et 9153-5914 Québec Inc. (Condos Place d'Amérique), Yves Fournier, arbitre, Centre canadien d'arbitrage commercial (CCAC), S13-122101-NP, S14-051602-NP, S14-102701-NP et S15-090201-NP, 2016-07-15
Allaire et B & A Construction Ltée, Me Albert Zoltowski, arbitre, Centre canadien d'arbitrage commercial (CCAC), S14-121602-NP, 2016-07-07
Nazco et 9181-5712 Québec Inc., Me Roland-Yves Gagné, arbitre, Centre canadien d'arbitrage commercial (CCAC), S16-011902-NP, 2016-04-0821
Syndicat des copropriétaires Place Marien 4 et Développement Allogio Inc. (Développement Lupa Inc./Corporation Lupa), Me Jean Philippe Ewart, arbitre, Société pour la résolution des conflits Inc. (SORECONI), 132604001, 2015-05-22
Montréal (Office municipal d'habitation de) et Consortium MR Canada Ltée, Me Jean Philippe Ewart, arbitre, Centre canadien d'arbitrage commercial (CCAC), S12-020901-NP et S13-031503-NP, 2015-05-15
Machado et Saint-Luc RDP Inc., Me Albert Zoltowski, arbitre, Société pour la résolution des conflits Inc. (SORECONI), 142904001 et 142909001, 2014-12-22
Brien et Constructions Nomade Faubourg Boisbriand, s.e.n.c., Me Jean Robert LeBlanc, arbitre, Centre canadien d'arbitrage commercial (CCAC), S13-112201-NP, 2014-11-18
Borrelli et Groupe Platinum Construction 2001 Inc., Me Michel A. Jeanniot, arbitre, Centre canadien d'arbitrage commercial (CCAC), S11-051701-NP, 2013-09-05
Syndicat de copropriété 8380 à 8390 de Buffalo et Construction G. Carrier Inc. (en faillite), Me Tibor Holländer, arbitre, Société pour la résolution des conflits Inc. (SORECONI), PG-50890-4716 et 1217120001, 2013-07-25
Syndicat de copropriété Le Jouvence et 9187-2903 Québec Inc., Me Jeffrey Edwards, arbitre, Groupe d'arbitrage et de médiation sur mesure (GAMM), 11-136SP, 2010-12-016 et 13 185-70, 2013-06-14
Gélinas et Habitations Consultants HL Inc., Me Tibor Holländer, arbitre, Centre canadien d'arbitrage commercial (CCAC), PG 187334-1 et S12-022801-NP, 2013-04-02
Larivière et 9190-7485 Québec Inc. (Constructions Melbou), Me France Desjardins, arbitre, Centre canadien d'arbitrage commercial (CCAC), S12-030601-NP et 147977-1, 2012-09-25
Jalbert et Construction Trilikon Inc., Me Lydia Milazzo, arbitre, Centre canadien d'arbitrage commercial (CCAC), S12-041101-NP, 2012-08-14
Phaneuf et DAG Construction Inc., Me Johanne Despatis, arbitre, Groupe d'arbitrage et de médiation sur mesure (GAMM), 2012-11-005 et 169431-1 (12-140FL), 2012-08-02
Frédéric et Habitations André Taillon Inc., Me France Desjardins, arbitre, Centre canadien d'arbitrage commercial (CCAC), S11-120906-NP et 148855-1, 2012-07-18
Castiglione et Groupe Platinum Construction 2001 Inc., Me France Desjardins, arbitre, Centre canadien d'arbitrage commercial (CCAC), S12-030802-NP et 149576-1, 2012-07-13
Kebir et Groupe Construction Rossi B2 Inc., Me Jeffrey Edwards, arbitre, Groupe d'arbitrage et de médiation sur mesure (GAMM), 61854-3777, 2011-12-018 et 13 185-85, 2012-07-04
Syndicat de la copropriété L'Orée du Parc et 9166-6735 Québec Inc., Me Jeffrey Edwards, arbitre, Société pour la résolution des conflits Inc. (SORECONI), A-20566, U-506084, 100705001 et 13 249-14, 2012-06-13
2433-2553 Québec Inc. et Cabral, Me France Desjardins, arbitre, Société pour la résolution des conflits Inc. (SORECONI), 11092001 et 137778-1, 2012-02-21
Williams et Samcon RB Inc., Me Jeffrey Edwards, arbitre, Groupe d'arbitrage et de médiation sur mesure (GAMM), 144465-1, 2011-12-008 et 13 185-76, 2011-11-08
Castonguay et Construction Serge Rheault Inc., Me Johanne Despatis, arbitre, Groupe d'arbitrage et de médiation sur mesure (GAMM), 2011-12-009 et 152907-1 (11-243ES), 2011-10-06
Tiksrail et Bâti-Concept Plus Inc., Me Roland-Yves Gagné, arbitre, Centre canadien d'arbitrage commercial (CCAC), S11-042101-NP, 2011-09-13
Syndicat de copropriété Le Vendôme et 9137-7937 Québec Inc., Me Jean Philippe Ewart, arbitre, Centre canadien d'arbitrage commercial (CCAC), S09-240701-NP, 2011-05-12
Bergeron c. Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l'APCHQ Inc., Juge Marc St-Pierre, 400-17-002044-093, 2011-05-06
Syndicat de la copropriété des Berges du Fleuve Phase I et Propriétés Belcourt Inc., Me Johanne Despatis, arbitre, Groupe d'arbitrage et de médiation sur mesure (GAMM), 2010-12-011 et 23799-3080, 2011-01-07
Syndicat de copropriété 4767 à 4827 8e Avenue et 3189 rue Claude-Jodoin et
St-Luc Habitation Inc., Me Albert Zoltowski, arbitre, Société pour la
résolution des conflits Inc. (SORECONI), 09 1221002, 2010-12-21
Arsenault et Gestion du capital Max Inc., Me Reynald Poulin, arbitre, Société pour la résolution des conflits Inc. (SORECONI), 100210003, 2010-12-14
Radulescu et Groupe Axxco Inc., Me Jeffrey Edwards, arbitre, Groupe d'arbitrage et de médiation sur mesure (GAMM), 58153-2914, 2010-12-001 et 13 185-60, 2010-09-20
Syndicat de copropriété 4767 à 4827 8e Avenue et 3189 rue Claude-Jodoin et St-Luc Habitation Inc., Me Albert Zoltowski, arbitre, Société pour la résolution des conflits Inc. (SORECONI), 09 1221002, 2010-04-27
Carrier et Construction Paul Dargis Inc., Me Reynald Poulin, arbitre, Centre canadien d'arbitrage commercial (CCAC), S09-061001-NP, 2010-04-09
Temimi et Brunelle Entrepreneur Inc., Me Pierre Boulanger, arbitre, Centre canadien d'arbitrage commercial (CCAC), S09-101101-NP, 2010-03-01
Côté et Constructions EDY Inc., Me Pierre Boulanger, arbitre, Centre canadien d'arbitrage commercial (CCAC), S09-030301-NP, 2010-01-12
Hecht Gaertner et Réseau Viva international Inc., Me Johanne Despatis, arbitre, Groupe d'arbitrage et de médiation sur mesure (GAMM), 2009-13-002 et 132155-1 (09-362SP), 2009-12-23
Iulianella et Rénovations Larocque & Fils Inc., Me Pierre Boulanger, arbitre, Centre canadien d'arbitrage commercial (CCAC), S07-121101-NP, 2009-10-30
9114-9880 Québec Inc. et Kim, Me Jeffrey Edwards, arbitre, Société pour la résolution des conflits Inc. (SORECONI), 051004-1, 080806001 et 13 249-12, 2009-08-10
[1] 2016 QCCA 1941
[2] Faucher c. Développements Lemarco inc., (C.A., 2010-10-07), 2010 QCCA 1807, SOQUIJ AZ-50677614, 2010EXP-3370, J.E. 2010-1860, [2010] R.D.I. 702 (rés.), EYB 2010-180270
[3] Jacques DESLAURIERS, Vente, louage, contrat d’entreprise ou de service, Montréal, Wilson & Lafleur ltée., 2005.
[4] Larochelle c. Dandurand, (C.Q., 2011-03-17), 2011 QCCQ 3127, SOQUIJ AZ-50741068, 2011EXP-1669, EYB 2011-189110
[5] Adjenad c. Coriolan, (C.S., 2012-05-28), 2012 QCCS 2409, SOQUIJ AZ-50860782, 2012EXP-2312 J.E.2012-1214