TRIBUNAL D’ARBITRAGE

TRIBUNAL D’ARBITRAGE

Sous l’égide du

CENTRE CANADIEN D’ARBITRAGE COMMERCIAL

(CCAC)

Organisme d’arbitrage autorisé par la Régie du bâtiment

 

ARBITRAGE EN VERTU DU RÈGLEMENT SUR LE PLAN DE GARANTIE

DES BÂTIMENTS RÉSIDENTIELS NEUFS

(Décret 841-98 du 17 juin 1998)

______________________________________________________________________

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

Dossier no: CCAC: S14-021202-NP

 

KARINE DUPLANTIER et CÉDRIC MEUNIER

Demandeurs

c.

GROUPE CONSTRUCTION DESIGN 450 INC.

Défenderesse

et

LA GARANTIE ABRITAT INC.

Administrateur

                        _______________________________________________

 

DÉCISION ARBITRALE

                        _______________________________________________

 

Arbitre:

Me Jean Philippe Ewart

 

Pour les Bénéficiaires:

Madame Karine Duplantier

Monsieur Cédric Meunier

 

Pour l’Entrepreneur :

Me Vincenzo Carrozza

Me Jean-Philippe Maurice

deveau, bourgeois, gagné, hébert & associés

 

Pour l’Administrateur :

Me Jacinthe Savoie

savoie cloutier avocats s.e.n.c.r.l.

Mme Anne Delage

 

Date de la Décision: 7 avril 2015

Identification des Parties

 

BÉNÉFICIAIRES :                                                            Madame karine duplantier

m. cédric meunier

[…] Blainville (Québec) […]

 (les « Bénéficiaires »)

 

 

entrepreneur:                                    GROUPE CONSTRUCTION DESIGN 450 INC.

Attention: Me Jean-Philippe Maurice

deveau, bourgeois, gagné, hébert & associés

123, boul. Labelle, bur. 101

Rosemère (Québec)

J7A 2G9

 (« l’Entrepreneur »)

 

 

ADMINISTRATEUR:                                                         LA GARANTIE ABRITAT INC.

Attention: Me Jacinthe Savoie

5930, boul. Louis-H.-Lafontaine

Anjou (Québec)

H1m 1s7

(« l’Administrateur »)

 

Introduction

 

[1]        Les Parties sont intervenues à un contrat préliminaire et contrat de garantie obligatoire de maison neuve daté du 29 avril 2012 sous formulaire de l’Administrateur, auquel est joint un formulaire ‘Annexe «D»’ de même date (Pièce A-1 en liasse), pour les fins de la construction d’une résidence unifamiliale située à Blainville, Québec (le « Bâtiment »).

 

[2]        Les Parties sont également intervenues à un contrat de garantie - bâtiment non détenu en copropriété divise daté du 29 avril 2012 sous formulaire de l’Administrateur (Pièce A-2).

 

Mandat et Juridiction

 

[3]        Le Tribunal est saisi du dossier par nomination du soussigné en date du 24 février 2014.  Aucune objection quant à la compétence du Tribunal n’a été soulevée par les Parties et juridiction du Tribunal a été confirmée.

Demande d’Arbitrage

 

[4]        Le litige découle d’une demande d’arbitrage des Bénéficiaires reçue en date du 12 février 2014 (la «Demande») suite à une réclamation des Bénéficiiares reçue le 8 août 2013 et une décision de l’Administrateur (dossier no 324924-1) émise en date du 13 janvier 2014 en application du Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs (L.R.Q. c. B-1.1, r.02) (le « Règlement »).

 

Déroulement de l’instance

 

Pièces

[5]       Les Pièces contenues au Cahier de l’Administrateur et dont référence sera faite aux présentes sont identifiées comme A-, avec sous-numérotation équivalente à l’onglet applicable au Cahier visé ou en continu suite à dépôt subséquent, et les Pièces présentées par les Bénéficiaires comme B- et par l’Entrepreneur comme E-. Aucune objection quant à véracité ou exactitude de la preuve documentaire n’a été soulevée.

 

Le Règlement

 

[6]        Le Tribunal s’appuie que le Règlement est d’ordre public et prévoit que toute disposition d’un plan de garantie (« Garantie » ou « Plan ») qui est inconciliable avec le Règlement est nulle[1].  Conséquemment, le Tribunal se réfère aux articles du Règlement lorsque requis sans rechercher la clause correspondante au contrat de garantie, s’il en est.

 

[7]        La décision arbitrale est finale et sans appel et lie les parties dès qu’elle est rendue[2].

 

[8]       La couverture du Plan dans le cas sous étude et les délais de dénonciation applicables, s’il en est, sont prévus au Règlement, que ce soit pour malfaçons, vices cachés et se lisent, plus particulièrement pour les bâtiments non détenus en copropriété divise:

 

«  10.   La garantie d'un plan dans le cas de manquement de l'entrepreneur à ses obligations légales ou contractuelles après la réception du bâtiment doit couvrir:

 

[…]

  2°    la réparation des vices et malfaçons apparents visés à l'article 2111 du Code civil et dénoncés, par écrit, au moment de la réception ou, tant que le bénéficiaire n'a pas emménagé, dans les 3 jours qui suivent la réception;

 

3°     la réparation des malfaçons existantes et non apparentes au moment de la réception et découvertes dans l'année qui suit la réception, visées aux articles 2113 et 2120 du Code civil et dénoncées, par écrit, à l'entrepreneur et à l'administrateur dans un délai raisonnable, lequel ne peut excéder 6 mois de la découverte des malfaçons; »

 

Chronologie

 

[9]        Quelques-unes des dates d’importance dans ce dossier:

 

2013.01.24               Formulaire d’inspection pré-réception (Pièce A-3).

2013.01.24               Acte de vente (Pièce A-4).

2013.08.08               Lettre de réclamation des Bénéficiaires (Pièce A-5).

2013.09.16               Demande de réclamation des Bénéficiaires (Pièce A-7).

2013.09.18               Avis de 15 jours de l’Administrateur à l’Entrepreneur (Pièce A-8).

2014.01.13               Décision de l’Administrateur - Anne Delage, insp. (Pièce A-11).

2014.02.12               Demande d’arbitrage des Bénéficiaires (Pièce A-12).

2014.02.24               Notification de la demande d’arbitrage (Pièce A-13).

 

Litige

 

[10]     La Demande vise les Points nos 2 à 7 de la Décision :

           

Point 2 :          Revêtement extérieur de bois;

Point 3 :          Dégradation du béton - escalier et dalle de béton du garage;

Point 4 :          Dégradation de joints de mortier, et Efflorescence;

Point 5 :          Mauvaise installation, base de douche;

Point 6 :          Crépi inadéquat;

Point 7 :          Fenêtre extérieure courbée.

 

[11]     Pour ce qui est du Point 2, l’Administrateur accueille la réclamation mais uniquement quant à la fixation du matériau alors que les Bénéficiaires dénoncent l’intégrité du revêtement de bois torrifié.

 

[12]     L’Administrateur considère que pour les Points 3 à 6 il n’y a pas malfaçon, et que le Point 7 était apparent lors de la réception du bâtiment et qu’il n’a pas été alors dénoncé, donc dans chaque cas hors la couverture du Plan.

 

 

 

 

 

Faits Pertinents et Analyse

 

Point 2 - Revêtement de bois torréfié

 

[13]      L’Administrateur a accueilli ce Point mais uniquement quant à la fixation du matériau mais les Bénéficiaires dénoncent l’intégrité du revêtement alors qu’ils indiquent à leur dénonciation que le bois semble de mauvaise qualité (Pièce A-5) et avancent d’autre part à l’enquête que des travaux correctifs effectués par l’Entrepreneur, préalablement à l’inspection de l’Administrateur pour les fins de la Décision, n’ont d’ailleurs pas réglé la problématique.

 

[14]     Les Bénéficiaires déposent un rapport de Alain Corbeil Pro Inspection Inc. d’une visite du 28 mai 2014 (« Rapport Corbeil ») (Pièce B-4) qui conclut quant au revêtement :

 

« Il est évident que le revêtement de bois est mal fixé et que le fond de clouage ou préparation ne respecte pas les spécifications des fabricants pour ce type de finition. »

 

[15]      Toutefois, la preuve à l’enquête a démontré que, nonobstant ce qui était avancé au Rapport Corbeil et témoignages comme écarts inappropriés des fourrures sous-jacentes au revêtement, soit des intervalles plus larges entre les fourrures (24’’) alors que les recommandations fournisseur sont de 16’’ centre à centre, ce qui emporterait une mauvaise fixation du revêtement, ceci n’est pas le cas; le rapport Corbeil et le témoignage subséquent de l’expert soulignent qu’il n’y a pas eu de test destructif pour les fins de cette conclusion (ces constats ont été effectués alors que le revêtement était déjà posé).

 

[16]      Une analyse de photographies prises lors de la construction avant l’application du revêtement, soumises pour d’autres fins (enveloppe en maçonnerie et escalier de béton) en support du rapport d’expertise d’Inspec-Sol (Pièce B-2) (« Rapport Raymond ») démontre que les espacements sont appropriés (16’’ c/c) et selon les règles de l’art. On peut inférer à tout le moins que ce n’est pas une mauvaise méthode d’exécution qui soulève une malfaçon, s’il en est.

 

[17]      L’Entrepreneur témoigne que le choix initial de bois torréfié installé sur le Bâtiment a été effectué par les Bénéficiaires lors de la signature du contrat préliminaire en avril 2012 (Pièce A-1); par la suite (soit alors que l’échéancier de construction de la résidence prévoit l’installation prochaine du revêtement), l’Entrepreneur témoigne que, constatant des problèmes avec ce matériau sur d’autres bâtiments qu’il a complétés, il recommande aux Bénéficiaires :

 

« … de ne pas maintenir ce choix initial et qu’il ne l’utilise plus sur aucune des constructions en cours ou à venir et de plutôt sélectionner un autre revêtement (bois de pin) ».

 

[18]     Les Bénéficiaires allèguent, en plus de leur réclamation intiale, un bris de revêtement; toutefois, lors de l’inspection visuelle par le Tribunal, un seul élément lui est souligné par les Bénéficiaires et celui-ci est une fissure capillaire de moins de 7 cm (env. 2 po) qui n’emporte pas malfaçon ou bris et est un mouvement normal des matériaux dans ces circonstances.

 

[19]     Il faut toutefois s’addresser à la dénonciation d’intégrité du revêtement et plus particulièrement de gondolement des lattes de bois torrifié et déplacement de certaines lattes, dont constat au Rapport Corbeil, à la Décision sous d’autres causes, et lors de l’inspection par le Tribunal.

 

Renonciation - dégagement de responsabilité - à titre gratuit

[20]      L’Entrepreneur, puisque les Bénéficiaires ne veulent pas suivre sa recommandation, indique qu’il a alors demandé et obtenu de chacun des Bénéficiaires un document daté du 30 novembre 2012 (Pièce A-10 en liasse) l’exonérant de responsabilité sous le libellé de ‘dégagement de responsabilité’  (« Doc301112 ») qui se lit :

 

« Blainville, le 30 novembre 2012

 

Groupe Construction Design 450

905, boul. Michèle-Bohec, Suite #110

Blainville (Qc)

J7C 5J6

 

Objet :  Bois torréfié

Par le présent document, nous confirmons que nous désirons gardés [sic] notre choix de revêtement en façade soit : bois torréfié et dégageons Groupe Construction Design 450 de toutes responsabilités concernant ce choix.

 

M. Maxime Vaillancourt nous a avisés des problèmes que nous pourrions rencontrés, soit :

-Décoloration

-perte de vernis

 

et en aucun moment nous porterons responsable Groupe Construction Design 450, si de tels problèmes survenaient. »

 

[21]     Les Bénéficiaires allèguent que ce Doc301112 ne soulève que la décoloration et la perte de vernis et non des problématiques de gondolement ou bris de revêtement; le Tribunal note toutefois, sujet à connaissance, le texte « …dégageons … de toutes responsabilités… ».

[22]     Les Bénéficiaires avisent à l’audience qu’il ne recherchent pas un remplacement du revêtement.

 

[23]     La question qui se pose entre autre dans le cadre de ce ‘dégagement de responsabilité’ du Doc301112 : est-il opposable aux Bénéficiaires à l’encontre de leur réclamation dans le cadre et pour les fins du Règlement?

 

[24]      Le Tribunal est d’avis que ce n’est pas le cas.

 

[25]     Il faut tout d’abord noter tel qu’indiqué plus haut et confirmé entre autre par notre Cour d’appel que le Règlement est d’ordre public [3] et plus particulièrement noter l’article 140 du Règlement qui se lit:

 

« 140.  Un bénéficiaire ne peut, par convention particulière, renoncer aux droits que lui confère le présent règlement. »

 

[26]      Cette renonciation visée par l’article 140 est sujette à certains paramètres comme l’illustre entre autre de nouveau notre Cour d’appel en 2012 dans l’affaire Marcotte [4]:

 

« [128] Une renonciation par une personne à la protection que lui accorde une loi, sauf s'il s'agit d'une loi d'ordre public de direction, est possible une fois le droit acquis, mais non en anticipation de celui-ci (Garcia Transport Ltée c. Cie Trust Royal, [1992] 2 R.C.S. 499 ). Cette renonciation peut alors être expresse, écrite, implicite ou tacite; dans tous les cas, elle doit néanmoins être claire, non ambiguë ou équivoque. En d'autres mots, on ne peut validement renoncer qu'en pleine connaissance de cause et en démontrant l'intention suffisante. »

[nos soulignés]

 

[27]      Rappelons qu’au Règlement nous sommes aux fins de l’article 140 dans un cadre d’ordre public de protection qui peut être défini « …comme mission primordiale de protéger l’individu» alors que l’ordre public de direction dont il est aussi mention à la citation de l’affaire Marcotte est principalement des «… règles posées dans l’intérêt de la société toute entière et de son bon gouvernement[5].

 

[28]      Cette règle applicable a d’ailleurs été énoncée dans la cause phare de Garcia Transport où la Cour Suprême du Canada sous la plume de l’Hon. L’Heureux-Dubé nous indique :

 

« La règle générale veut que la renonciation ne soit valide que si elle intervient après que la partie, en faveur de laquelle la loi a été édictée, a acquis le droit qui découle de cette loi. C’est alors, et alors seulement, que la partie la plus faible, tel le débiteur en l’espèce, peut faire un choix éclairé entre la protection que la loi lui accorde et les avantages qu’elle compte obtenir de son cocontractant en échange de la renonciation de cette proposition,

[…]

Pour conclure sur ce point, disons qu'il est possible de renoncer à une disposition d'ordre public économique de protection puisque sa violation n'est sanctionnée que par une nullité relative.  En raison de la nature même de la protection accordée, toutefois, cette renonciation n'est valide que si elle est consentie après l'acquisition du droit et non avant. »[6]

[nos soulignés]

 

[29]      La doctrine, tels les auteurs Baudouin et Jobin dans Les Obligations, au titre de ‘Sanctions de l’ordre public’, identifie une telle renonciation à une ‘transaction’ au sens de notre Code Civil :

 

« Par ailleurs, contrairement à ce qui est le cas pour l’ordre public de direction, la partie protégée peut renoncer à ses droits, mais à certaines conditions : cette renonciation ne sera valide que lorsque la partie sera en position de se rendre compte de ses droits concrètement (par exemple, elle a découvert le vice qui était caché et sait qu’elle dispose d’un recours) et de faire un choix éclairé entre la protection que lui accorde la loi et les avantages de la renonciation (par exemple, une indemnité). Le droit est donc né et actuel à ce moment. Une telle renonciation constitue essentiellement une transaction (article 2631). »[7]

[nos soulignés]

 

[30]     L’article 2631 du Code Civil définit ainsi la transaction :

 

« 2631. La transaction est le contrat par lequel les parties préviennent une contestation à naître, terminent un procès ou règlent les difficultés qui surviennent lors de l'exécution d'un jugement, au moyen de concessions ou de réserves réciproques.

Elle est indivisible quant à son objet. »

[nos soulignés]

 

[31]     Le Tribunal note que les parties Entrepreneur et Bénéficiaires ont identifié une valeur à ce choix de bois torréfié dès la signature initiale , soit à l’Annexe «D» du 29 avril 2012 (Pièce A-1 en liasse) (« Annexe D ») pour un montant de 1750$. La preuve ne démontre toutefois aucunement que les Bénéficiaires ont reçu une quelconque concession au sens de 2631 CcQ pour consentir au Doc301112 que l’Entrepreneur a requis, non pas par des concessions réciproques, mais par une renonciation unilatérale à titre gratuit par les Bénéficiaires; on ne retrouve pas un ‘avantage’ quelconque au sens donné par la Cour Suprême que les Bénéficiaires ‘comptent obtenir’, ou de ‘concession réciproque’ au sens de l’article 2631 C.c.Q. Conséquemment, le Tribunal est d’avis que ce dégagement de responsabilité par les Bénéficiaires est en contravention de l’article 140 du Règlement.

 

[32]      La jurisprudence arbitrale découlant du Règlement est au même effet. Des décisions récentes sont d’intérêt.

 

[33]     Notre collègue Me Roland-Yves Gagné adjuge en 2013 sur une clause de quittance sous un contrat de vente notarié dans l’affaire Koné c. Fairmont [8] où il conclut après une étude particulièrement exhaustive de la jurisprudence et doctrine:

 

« [87.3] le Tribunal d’arbitrage doit conclure des faits particuliers du présent dossier que la renonciation sans indemnisation ou concession de la Bénéficiaire trouvée dans la clause Possession du contrat de vente pour les frais encourus dans le passé à cause du retard de livraison était contraire au Règlement et donc de nul effet. »                                                                                    [nos soulignés]

 

 

[34]     De même, récemment, le 22 janvier 2015 dernier, notre collègue Me Michel A. Jeanniot s’adresse dans l’affaire Seddick c. 9253-5400 Québec Inc.[9] à une clause de quittance prévue à un acte notarié et conclut quant à la non validité d’une clause de renonciation ou quittance sans ‘concessions réciproques’ qu’elle est contraire au Règlement et donc de nul effet, alors qu’il résume les faits particuliers du dossier devant lui :

 

« Puisque rien ne semble établir quelque contrepartie que ce soit en échange, par le Bénéficiaire, de sa renonciation à ses droits, à ses bénéfices et aux possibles postes de réclamation résultant du retard …»                   [nos soulignés]

 

L’Entrepreneur est-il responsable nonobstant les avis et recommandations de procéder autrement ?

 

[35]     De par les délais et circonstances, le Tribunal considère que la réclamation des Bénéficiaires s’inscrit à titre de malfaçon au sens du Règlement (qui réfère au sens des articles 2111, 2113 et 2120 C.c.Q., et, s’il en est, à leur caractère apparent ou non lors de la réception du Bâtiment) :

 

« 2120. L'entrepreneur, l'architecte et l'ingénieur pour les travaux qu'ils ont dirigés ou surveillés et, le cas échéant, le sous-entrepreneur pour les travaux qu'il a exécutés, sont tenus conjointement pendant un an de garantir l'ouvrage contre les malfaçons existantes au moment de la réception, ou découvertes dans l'année qui suit la réception. »

 

[36]     Cette garantie prévue par 2120 C.c.Q. et l’ensemble des obligations de l’entrepreneur est applicable au contrat d’entreprise, et au contrat de vente [10] par l’effet de l’art. 1794 C.c.Q.

 

« 1794.   La vente par un entrepreneur d'un fonds qui lui appartient, avec un immeuble à usage d'habitation bâti ou à bâtir, est assujettie aux règles du contrat d'entreprise ou de service relatives aux garanties, compte tenu des adaptations nécessaires. Les mêmes règles s'appliquent à la vente faite par un promoteur immobilier. »

 

et de 2124 C.c.Q. quant au promoteur immobilier:

 

« 2124.   Pour l'application des dispositions du présent chapitre [ndlr : ch. 8, contrat d’entreprise, art. 2098 à 2129] , le promoteur immobilier qui vend, même après son achèvement, un ouvrage qu'il a construit ou a fait construire est assimilé à l'entrepreneur. »,

 

alors d’autre part que la garantie de qualité prévue par l’article 1726 C.c.Q. au chapitre de la vente trouve application au contrat d’entreprise par l’effet de l’article 2103 C.c.Q.

 

Obligation de bonne exécution

[37]     La base législative des obligations de l’entrepreneur se retrouve à l’article 2100 C.c.Q.[11] qui, nous notons, est d’ordre public de protection[12] et requiert que l’entrepreneur, sous son obligation de bonne exécution technique des travaux, agisse avec prudence et diligence[13] et se conforme aux usages et règles de son art.

 

Obligations d’information et de conseil de l’Entrepreneur

[38]     Cette obligation de bonne exécution, et l’absence de subordination entre l’entrepreneur et son client et le libre choix des méthodes d’exécution des travaux (art. 2099 C.c.Q.[14]) qui en découle, est encadrée par diverses obligations, dont une obligation d’information (art. 2102 C.c.Q.) qui engage l’entrepreneur à bien renseigner son client sur les questions relatives au contrat :

 

« 2102. L'entrepreneur ou le prestataire de services est tenu, avant la conclusion du contrat, de fournir au client, dans la mesure où les circonstances le permettent, toute information utile relativement à la nature de la tâche qu'il s'engage à effectuer ainsi qu'aux biens et au temps nécessaires à cette fin.»

 

[39]     Cette obligation d’information qui incombe à l’Entrepreneur est une obligation continue tel qu’indiqué par la Cour Suprême (en 1992) à la décision charnière sur cette obligation d’information, Banque de Montréal c. Bail Ltée[15] :

 

« En résumé, l’obligation de renseignement […] est qualifiée par l’allocation des risques entre les parties, l’expertise relative des parties, ainsi que la formation continue du contrat, même en cours d’exécution

 

(affirmation reprise par la Cour Suprême dans l’affaire ABB c. Domtar en 2007[16]) et la doctrine, prévoyant tout au long de ses relations contractuelles avec le client[17],

donc pendant toute la période d’exécution des travaux que:

 

« Le respect de l’obligation de renseignement qui découle de l’article 2102 C.c.Q. et de la bonne foi (art. 1375 C.c.Q.), s’illustre, […] non seulement lors de la négociation et de la conclusion du contrat[18], mais aussi, durant son exécution[19][20]

 

[40]     Quoique la doctrine souligne que le libellé de 2102 C.c.Q. constitue une obligation d’information unilatérale de l’Entrepreneur, une telle obligation d’information découle de la bonne foi en matière contractuelle et s’applique à toutes les parties, et on peut donc saisir une obligation réciproque[21] d’un client/maître de l’ouvrage :

 

« L’obligation prévue à l’article 2102 C.c.Q. est unilatérale[22]. L’article ne vise que l’entrepreneur […] et ne mentionne aucune obligation corrélative du client. Celui-ci a, toutefois, une obligation de se renseigner qui découle de l’article 1375 C.c.Q. et du devoir général qu’a tout créancier de se renseigner en regard de la théorie de l’acceptation des risques[23] » [24]

 

Toutefois, la Cour Suprême considère que généralement, pour des particuliers acheteurs qui ne sont pas experts en construction, cette obligation est pratiquement retirée:

 

« Le contrat d’entreprise de petite envergure, pour la construction d’une maison unifamiliale par exemple, sera confié par un particulier novice en la matière à un entrepreneur expérimenté.  Il est alors justifié que le maître de l’ouvrage [ndlr : les Bénéficiaires] soit pratiquement relevé de toute obligation de renseignement[25]

(nos soulignés)

 

Obligations de l’Entrepreneur - obligation de résultat;   fardeau de preuve.

[41]     Quoiqu’il n’y ait pas d’automatisme à une caractérisation d’obligation de moyen ou de résultat[26], pour un entrepreneur construisant sous contrat d’entreprise[27], celle-ci est généralement[28] une obligation de résultat.

 

[42]     Dans un cadre d’activité de construction, on peut identifier, entre autre sous la plume de l’Hon. J.L. Baudouin (de notre Cour d’appel) l’obligation de résultat, et le fardeau de preuve qui en découle, comme :

 

« Obligation de résultat - […] celui qui accepte de faire un travail précis, comme construire[29] […] selon certaines spécifications, est responsable s’il n’atteint pas le résultat promis. Sur le plan de la preuve, l’absence de résultat fait présumer la faute du débiteur […] Elle place sur ses épaules le fardeau de démontrer que l’inexécution provient d’une cause qui ne lui est pas imputable[30]

 

[43]     Cette obligation de résultat est concrétisée, s’appuyant sur notre Cour d’appel[31] et les écrits de l’Hon. T. Rousseau-Houle (par la suite de notre Cour d’appel) :

 

« De fait, l’entrepreneur étant normalement considéré comme un expert en construction, il est généralement tenu à une obligation de résultat. » [32]

[44]     Dans le cadre d’une obligation de résultat, comme aux présentes, entre autre de cette obligation de bonne exécution technique des travaux, agissant avec prudence et diligence, l’absence du résultat fait présumer de la faute et les Bénéficiaires n’ont pas à faire la preuve d’une faute, uniquement de l’absence du résultat prévu; ceci peut être établi de diverses façons telle entre autre la présence d’une non-conformité de certains travaux aux stipulations contractuelles ou aux règles de l’art.  Rappelons finalement les dispositions de l’art. 2100 al. 2 C.c.Q. qui stipule que l’Entrepreneur sous obligation de résultat ne peut alors se dégager de sa responsabilité qu’en prouvant force majeure.

 

[45]     Notre jurisprudence le souligne, tel cet extrait de notre Cour d’appel dans l’affaire Voie Maritime du St-Laurent et Procureur Général du Canada c. United Dominion et Canron sous la plume du juge Beauregard :

 

« Étant donné qu'en principe l'obligation d'un constructeur est une obligation de garantie, l'absence de faute de celui-ci n'a pas de pertinence à l'égard de la réclamation de son co-contractant pour la réparation ou le remplacement de la chose construite.»[33]

 

et la doctrine est d’ailleurs au même effet :

 

« Le débiteur d’une obligation de résultat est tenu non seulement d’accomplir un fait, mais aussi de fournir un résultat précis. L’absence de ce résultat fait présumer la faute de l’entrepreneur ou du prestataire de services.  Pour engager la responsabilité de ces derniers, le client n’a pas à faire la preuve d’une faute. Il lui suffit de démontrer le défaut au résultat convenu[34]                  [nos soulignés]

 

Bonne Foi

[46]     Le Tribunal désire souligner la bonne foi évidente de l’Entrepreneur dans ses relations avec les Bénéficiaires quant à ce Point 2 de la Décision. La preuve démontre que celui-ci a tenté à diverses reprises de convaincre les Bénéficiaires de changer de choix de matériau.

 

[47]     D’autre part, dans ses commentaires à l’audience et de par ses admissions de connaissance du problème de comportement du matériau, et une revue des échanges de correspondance entre les Parties (tel Pièce A-10 en liasse), l’Entrepreneur a une excellente crédibilité de témoignage.

 

[48]     Les Bénéficiaires ont fait cas (Pièce B-1 en liasse déposée 24 octobre 2014) et le Tribunal a noté que l’Entrepreneur n’a pas effectué les correctifs identifiés à la Décision dans les délais initialement prévus (31 mai 2014) mais note aussi la chronologie de discussions pour inspection supplémentaire de l’Administrateur (entre autre les correspondances des 22 août et 1 septembre 2014).  Le Tribunal note aussi l’attitude des Bénéficiaires quant à empêcher l’Entrepreneur d’être présent à l’Inspection de l’Administrateur ou de difficulté de permission d’accès pour effectuer des travaux (Pièce A-9 en liasse).

 

Point 2 - Conclusions

[49]     En sommaire, le Tribunal considère que l’Entrepreneur, dans le cadre des présentes:

 

[49.1]              est tenu à une obligation de résultat et ne peut se dégager de sa responsabilité qu’en prouvant force majeure;

 

[49.2]              est sous obligation de bonne exécution des travaux non seulement conformes aux obligations découlant de toute entente ou contrat mais aussi entre autres des règles de l’art et usages de l’industrie, chacune une obligation de résultat;

 

[49.3]              a (i) une obligation d’information, de renseignement ((a) de renseigner son client et (b) de se renseigner afin de pouvoir adéquatement informer et conseiller les Bénéficiaires) et (ii) une obligation de conseil envers les Bénéficiaires, obligations continues tout au long de ses relations contractuelles avec les Bénéficiaires, donc incluant pendant toute la période d’exécution des travaux, obligations qui dans les circonstances présentes demeurent entières quelle que soit une obligation de renseignement quelconque des Bénéficiaires.

 

[50]     L’Entrepreneur a rempli ces obligations de renseignement et de conseil, et celle d’aviser les Bénéficiaires de la piètre qualité (ou caractère impropre à l’utilisation proposée) des matériaux et biens devant être utilisés pour ou intégrés au Bâtiment, quel que soit celui qui en a fait le choix, mais force est d’admettre qu’il a failli à son obligation de ne pas exécuter des travaux s’il soupçonne que ceux-ci ne seront pas conformes aux règles de l’art en raison entre autre de cette piètre qualité ou caractère impropre de ces matériaux ou biens, ce qui est ici clairement le cas.

 

[51]     Conséquemment, l’Entrepreneur devra pourvoir aux travaux correctifs requis afin de corriger les lattes de bois torrifié gondolées ou déplacées du revêtement extérieur. Le Tribunal note la correspondance de Jacques Labelle du 25 septembre 2013 (Pièce A-10 en liasse) et le témoignage de ce dernier, et les témoignages contradictoires quant à l’existence ou non de bois en surplus dans le garage, et l’offre alors faite d’utiliser ce bois afin de remplacer les ‘planches’ endommagées, refusée par les Bénéficiaires.

 

[52]     Généralement, il n’est pas du Tribunal de prescrire une méthode de travaux correctifs, ce qui n’empêche pas le Tribunal d’identifier la nature des travaux correctifs pouvant être requis.

 

[53]     Tenant compte que :

 

[53.1]              le Tribunal peut faire appel à l’équité lorsque les circonstances le justifient en conformité de l’article 116 du Règlement;

[53.2]              le Tribunal a compétence pour suppléer au silence du Règlement tel que confirmé à diverses reprises par notre Cour Supérieure dans des dossiers de révision de décisions arbitrales, tel dans l’affaire Dupuis [35] sous la plume du Juge M.Monast qui affirme :

« [75] … Il [arbitre] peut cependant faire appel aux règles de l'équité lorsque les circonstances le justifient. Cela signifie qu'il peut suppléer au silence du règlement ou l'interpréter de manière plus favorable à une partie. »;

 

[53.3]              les Bénéficiaires ont indiqués au Tribunal ne pas requérir un remplacement du revêtement;

 

[53.4]              la preuve non contredite démontre que ce matériau n’est plus disponible, la société manufacturière ayant fait faillite; et

[53.5]              l’Annexe D attribue, de consentement, une valeur de matériaux de bois torrifié de 1750$ pour le revêtement extérieur,

 

le Tribunal ordonne que si la solution est un remplacement du revêtement, nonobstant la position exprimée par les Bénéficiaires au Tribunal de ne pas requérir remplacement, alors celui-ci sera pour un montant maximal de 1750$, taxes en sus, et travaux d’installation de l’Entrepreneur en sus, avec tout coût supérieur à la charge des Bénéficiaires.

 

Point 3 - Dégradation du béton - escalier et dalle de béton du garage

 

[54]     L’escalier dont il est question est en entrée de la porte avant du Bâtiment.

 

[55]     D’une part, les Bénéficiaires indiquent qu’ils n’ont utilisé aucuns sels de déglacage, ayant eu une expérience négative au préalable à une résidence antérieure.

 

[56]     L’Administrateur et l’Entrepreneur allèguent que même le transport de sel en provenance de la rue sur les marches, par le passage piétonnier, est source de sel; il n’y a toutefois selon le Tribunal aucun élément tangible pour supporter cette allégation dans les circonstances; de plus, il est allégué que l’écaillage le plus prononcé serait le long de la main-courante donc causé par le passage des personnes accédant au Bâtiment et donc par inférence de nouveau ayant pour cause un transport de sel sur les marches.  En tout respect, le Tribunal ne peut se joindre à cette analyse car on note un écaillage à différents endroits sur la structure de l’escalier. On note d’autre part un écaillage, moins prononcé mais de même nature, à la dalle de béton du garage.

 

[57]     La preuve documentaire et les témoignages indiquent (i) que l’Entrepreneur a offert de couvrir le coût des matériaux de pavés unis pouvant être installés sur cet escalier ce que les Bénéficiaires ont refusé ou négligé d’accepter, donc refus, et (ii) toutefois, que ceci n’est aucunement une admission de responsabilité par l’Entrepreneur.

 

[58]     La preuve non contredite de l’Entrepreneur indique que celui-ci a personnellement commandé et reçu un béton 32 MPA. Toutefois, ceci n’adresse pas selon le Tribunal les méthodes de coulée et murissement.

 

[59]     Nonobstant certains éléments de preuve contradictoires qui ne sont pas déterminants, et tenant compte du rapport d’expertise Rapport Raymond et de l’expérience de son auteur, le Tribunal considère qu’il y a malfaçon tant à l’escalier qu’à la partie extérieure (hors porte) de la dalle de béton du garage et souligne le correctif avancé au Rapport Raymond (page 6), soit une scarification légère et par la suite l’application d’un coulis cimentaire acrylique et ordonne de pourvoir aux travaux appropriés selon les règles de l’art.

 

Point 4 - Dégradation de joints de mortier, et Efflorescence

 

[60]     La dénonciation des Bénéficiaires vise la dégradation des joints de mortier et réfère à une ‘effervescence’ anormale de la pierre que le Tribunal comprend et accepte être l’efflorescence traitée au Rapport Raymond.

 

[61]     L’efflorescence est selon le Tribunal une transformation de sels hydratés qui perdent une partie de l’eau de cristallisation au contact de l’air créant des pulvérulents en état de poudre et n’est pas une malfaçon en soi; dans certaines circonstances, elle peut être le témoin ou l’indication de problèmes autres. Quant à un correctif à l’efflorescence dans les circonstances présentes, le Tribunal est du même avis que le Rapport Raymond qui confirme que l’efflorescence ne vient pas affecter la qualité de la maçonnerie (page 5) et conséquemment ne requiert pas correctifs dans les circonstances du présent dossier.

 

[62]     Quant à l’absence de chantepleures aux deux murets, le formulaire d’inspection (Pièce A-3) ne fait aucune mention au poste « Parement extérieur, Maçonnerie : joints, chantepleures » d’une quelconque constatation; le Tribunal peut accepter que pour les joints il y a dégradation progressive, et non apparente au sens du Règlement, mais ce n’est pas le cas quant aux chantepleures que le Tribunal considére être un élément apparent, absence de chantepleures qui n’est non plus à la réclamation des Bénéficiaires mais uniquement soulevée par le Rapport Raymond subséquent, et donc selon le Tribunal hors de la couverture du Plan; le Tribunal est d’autre part satisfait de l’explication de l’Entrepreneur quant à cette absence voulue de chantepleures à ces endroits.

 

[63]     Quant à la dégradation générale du mortier décrite en grand détail au Rapport Raymond, non seulement quant aux tests effectués mais aux causes probables, incluant étude climatique de la période de mise en place, le Tribunal note que les essais confirment selon ce rapport une résistance inappropriée à tout le moins sur les 3 à 5 premiers millimètres, a bien saisi la prétention de l’Entrepreneur que la largeur de la brique est supérieure à ce constat, mais tenant compte entre autre de la preuve non contredite que l’Entrepreneur a certes reconnu une problématique puisqu’il a déjà fait intervenir des correctifs à une certaine partie/surfaces de la maçonnerie, il est approprié que ces correctifs soient sur l’ensemble de celle-ci, le Tribunal ayant constaté une détérioration marquée du mortier à plusieurs endroits, tant en front du Bâtiment qu’en façade.

 

[64]     Finalement, et tenant compte du degré de dégradation des joints et des constats du Rapport Raymond relativement à la fissure à la jonction des deux murs des façades Est et Nord, le Tribunal se rallie à la conclusion du Rapport Raymond (page 5) de pourvoir à ouverture et mise en place d’un joint de dilatation, notant la recommandation de l’expert d’utiliser un boudin en étafoam, recouvert d’un calfeutrant de bonne qualité, afin de satisfaire selon le Tribunal aux obligations de l’Entrepreneur à ce titre.

 

Point 5 - Base de douche

 

[65]     La preuve non contredite au Rapport Corbeil et le témoignage de l’expert quant à la méthodologie par niveau laser indiquent des dénivellés favorisant l’accumulation d’eau et réduisant l’écoulement de celle-ci, ce qui fut d’ailleurs vérifié lors de la visite des lieux par le Tribunal par test d’écoulement d’eau. Il faut aussi noter que l’Administrateur a confirmé ne pas avoir fait de test d’écoulement. Le Tribunal considère que ces dénivellés ne sont pas apparents au sens du Règlement.  L’Entrepreneur a d’autre part pourvu à admission de malfaçon par courriel aux Bénéficiiares en date du 15 août 2013 (10 :40) (Pièce B-5 en liasse).

 

[66]     Conséquemment, il y a malfaçon et l’Entrepreneur doit assurer travaux correctifs selon les règles de l’art qui emporteraient selon le Raport Corbeil, non contredit, la reprise de la base de douche de céramique en totalité, afin de créer une base de douche qui s’égoutte vers le drain central et évite donc que l’eau stagne.

 

Point 6 - Crépi inadéquat

 

[67]     En suivi de mesures de fin de revêtement extérieur de crépi par les Bénéficiaires qui ne supportent pas selon le Tribunal les allégués que soumettent les Bénéficiaires et d’une inspection visuelle par le Tribunal des dévers et niveaux de terrain du Bâtiment (incluant depuis la rue en facade de côté), les Bénéficiaires ont confirmé lors de l’audience qu’ils retirent ce Point de l’arbitrage aux présentes et conséquemment la Décision quant à ce Point demeure d’application, soit qu’il n’y a pas de malfaçon.

 

 

 

 

Point 7 - Fenêtre extérieure courbée

 

[68]     L’Administrateur considère à la Décision que le Point 7 était apparent à la date de réception du Bâtiment et que cette réclamation n’a pas été dénoncée en conformité du Règlement pour couverture du Plan, plus particulièrement tel que requis à l’article 10 (2) du Règlement (précité) qui prévoit couverture :

 

« …pour vices ou malfaçons apparents visés à l'article 2111 du Code civil et dénoncés, par écrit, au moment de la réception ou, tant que le bénéficiaire n'a pas emménagé, dans les 3 jours qui suivent la réception ».

 

[69]     Le Tribunal est aussi d’avis que la problématique était apparente lors de la réception, ce que confirment et admettent les Bénéficiaires (Pièce A-5 et Pièce A-10 en liasse) qui caractérisent le ballonnement de la fenêtre comme : « Elle est aussi très apparente » et tenant compte qu’elle n’a pas été dénoncée tel que requis par le Règlement, le Tribunal maintient la Décision à ce Point.

 

Conclusions

 

[70]     Pour l’ensemble des motifs ci-dessus, le Tribunal accueille en partie la demande d’arbitrage des Bénéficiaires quant à ce que des correctifs sont requis aux Points 2, 3, 4 et 5 de la Décision en conformité et selon les modalités aux présentes.

 

[71]      Le Tribunal considère, en conformité de l’article 123 du Règlement et des conclusions et ordonnances aux présentes, que les frais de l'arbitrage se doivent d'être à la charge de l'Administrateur

 

 

 

POUR CES MOTIFS LE TRIBUNAL D’ARBITRAGE :

 

[72]     ACCUEILLE la demande des Bénéficiaires quant aux Points 2, 3, 4 et 5 de la décision de l’Administrateur datée du 13 janvier 2014;

 

[73]     ORDONNE que l’Entrepreneur effectue dans les quarante-cinq (45) jours des présentes les travaux correctifs en conformité et selon les modalités et limites aux présentes quant aux Points 2, 3, 4 et 5 de la décision de l’Administrateur datée du 13 janvier 2014;

 

 

 

[74]     REJETTE la demande d’arbitrage des Bénéficiaires quant aux Points 6 et 7 de la décision de l’Administrateur datée du 13 janvier 2014 et MAINTIENT le contenu de ces décisions de l’Administrateur pour ces fins;

 

[75]     ORDONNE que l'Administrateur assume les frais du présent arbitrage.

 

 

DATE: 7 avril 2015

 

 

 

 

                                                                                                             _____________________

Me Jean Philippe Ewart

Arbitre

 



[1] Idem, D.841-98, a.5, article 5 du Règlement.

 

[2] Idem, articles 20 et 120 du Règlement.

 

[3] Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l'APCHQ c. Desindes, 2004 CanLII 47872 (QC CA)

[4] Banque de Montréal c. Marcotte 2012 QCCA 1396.

[5] Baudouin et Jobin, Les obligations, 6e édition, Éditions Yvon Blais, 2005, para 146 et 147.

[6] Garcia Transport Ltée c. Cie Royal Trust, [1992] 2 RCS 499, pp.529 et 530.

 

[7] Baudouin et Jobin, Les obligations, 6e édition, Éd. Y. Blais, 2005, para. 168.

 

[8] Fatou Binetou Koné c. Le Fairmont St-Laurent inc. et La Garantie Abritat inc., Me Roland-Yves Gagné,Arbitre,  CCAC, dossier S13-021501-NP, 6 mai 2013.

 

[9] Seddick c 9253-5400 Québec Inc.et Garantie Qualité Habitation, Me Michel A. Jeanniot, Arbitre, CCAC : dossier  S14-041401-NP, 22 janvier 2015.

 

[10] Voir aussi Immeubles de l’Estuaire phase III inc c. Syndicat des copropriétaires de l’Estuaire Condo phase III, 2006  QCCA 781 sous la plume de la juge Bich, M.-F, JCA.

 

[11]             « 2100.  L'entrepreneur et le prestataire de services sont tenus d'agir au mieux des intérêts de leur client, avec prudence et diligence. Ils sont aussi tenus, suivant la nature de l'ouvrage à réaliser ou du service à fournir, d'agir conformément aux usages et règles de leur art, et de s'assurer, le cas échéant, que l'ouvrage réalisé ou le service fourni est conforme au contrat.

Lorsqu'ils sont tenus du résultat, ils ne peuvent se dégager de leur responsabilité qu'en prouvant la force majeure ».

 

[12] Développement Tanaka inc. c. Corporation d’hébergement du Québec, 2009 QCCS 3659 (appel rejeté).

 

[13]  D'Aoust c. Lanthier,  2005 CanLII 14422 (QC CQ), para. 47 à 49

 

[14]             « 2099. L'entrepreneur ou le prestataire de services a le libre choix des moyens d'exécution du contrat et il n'existe entre lui et le client aucun lien de subordination quant à son exécution. »

 

[15] [1992] 2 R.C.S. 554, p. 594.

 

[16] ABB inc. c. Domtar inc. 2005 QCCA 733, para 72, (confirmé par Cour Suprême 2007 CSC 50), citant J. Pineault, D. Burman, S. Gaudet, Théorie des obligations, Thémis, 2001, p. 573.  Voir également 9034-1215 Québec inc. c. Corporation solutions Moneris inc., 2005 CanLII 50680 (QC CQ), para 29 :

« [29] Le respect de l'obligation de renseignement qui découle cet article [ndlr : 2102 CcQ] , corollaire à l'obligation de bonne foi (art. 6 et 1375 C.c.), s'illustre notamment … tant lors de la formation du contrat mais aussi durant son exécution.  Cette obligation de renseignement est une obligation continue, susceptible de s'appliquer à tout moment en cours d'exécution du contrat et selon les circonstances; en cas de manquement, d’être sanctionnée par les règles de la « responsabilité contractuelle».

 

[17]  9034-1215 Québec inc. c. Corporation Solutions Moneris inc.,  J.E. 2006-553, (C.Q.), para. 29. citant Banque de Montréal c. Bail Ltée.  VOIR aussi BAUDOUIN et JOBIN, Les obligations, 6e édition, Éd. Y. Blais, 2005, paragr. 328.

 

[18] Demeule c. Bell Canada 2007 QCCQ 13370; Lussier Électrique inc. c. Centre commercial d’Asbestos inc. 2009 QCCQ 6653.

 

[19] A.C. Line Info Inc. c. 2911663 Canada Inc., AZ-50103715, J.E. 2002-232 (C.S.); Planchers Exclusifs P.L. Inc. c. Gagné, C.Q. Terrebonne, no 700-32-009806-017, 20 janvier 2003, j. Audet; et, sur les obligations de l’article 1375 C.c.Q. voir aussi  Sperandio c. 3095-9571 Québec inc. (Construction Melcon), AZ-50319394 (C.S.).

 

[20] KARIM, Vincent, Contrats d’entreprise (ouvrages mobiliers et immobiliers : construction et rénovation) Contrats de prestation de services et l’hypothèque légale, Éd. Wilson & Lafleur, 2e édition, 2011, para 339.

 

[21] Le Tribunal est sensible à cette obligation des demandeurs; on retrouve une expression de celle-ci dans la cause de 9034-1215 Québec inc. c. Corporation solutions Moneris inc précitée :

« [30] Certes, l'obligation prévue à l'article 2102 C.c. est unilatérale.  Cet article ne vise que le prestataire de services. Il ne mentionne aucune obligation corrélative de la part du client.

[31] Toutefois, il est manifeste que le client a, de son côté, une obligation « de se renseigner » laquelle découle de l'article 1375 C.c. et du devoir général qu'a tout contractant de se renseigner. »

 

[22] L’auteur cite : Demeule c. Bell Canada, AZ-50463149, 2007 QCCQ 13370; Lussier Électrique inc. c. Centre commercial d’Asbestos inc., AZ-50566143, 2009 QCCQ 6653.

 

[23]  L’auteur cite entre autre : Banque de Montréal c. Bail Ltée, AZ-92111080, J.E. 92-964, (1992) 48 Q.A.C. 241, [1992] R.R.A. 673, [1992] 2 R.C.S. 554, j. Gonthier, plus particulièrement la section sur l’obligation de renseignement du client.

 

[24] Op. cit., KARIM, Contrats d’entreprise (ouvrages mobiliers et immobiliers : construction et rénovation), para. 340.

 

[25] Op. cit. Banque de Montréal c. Bail Ltée, Gonthier, J., [1992] 2 R.C.S., p. 592.

 

[26] Le Tribunal se fonde, entre autres, sur les critères énoncés par P.-A. CRÉPEAU dans son ouvrage L’intensité de l’obligation juridique, Cowansville, Éd. Y. Blais, 1989, pour déterminer l’intensité de l’obligation dont doit répondre l’Entrepreneur.

 

[27] BAUDOUIN et DESLAURIERS, La responsabilité civile, Éd. Yvon Blais,  2007, 7e éd., p. 45 :

« 39 […] au chapitre du contrat d’entreprise […] le législateur a renoncé à fixer l’intensité de l’obligation de l’entrepreneur […] (sauf pour les pertes ou vices de construction des ouvrages immobiliers) ndlr : les auteurs référant aux art. 2118, 2119 et 2121 C.c.Q.

 

[28] Dans certaines circonstances particulières (tel alors que le client sait que l’ouvrage n’est pas réalisable) il y a possibilité d’une obligation de moyens, par exemple :  87313 Canada inc. c SIMPA J.E. 97-1132 (C.S.)

 

[29] Art. 2098 C.c.Q; Voir aussi: 2911663 Canada inc. c. A.C. Line Info inc., J.E. 2004-811 (C.A.), REJB 2004-60090; Gagnon c. Bisson inc., J.E. 2004-671 (C.S.), REJB 2004-54512.

 

[30] Op. cit. BAUDOUIN et DESLAURIERS, La responsabilité civile, p. 1027, Para. 1-1251.

VOIR aussi: IGNACZ, Marianne et EDWARDS, Jeffrey La responsabilité de l’entrepreneur et du sous-entrepreneur dans le cadre de La construction au Québec : perspectives juridiques - sous la direction de KOTT, Olivier F. et ROY, Claudine, Wilson & Lafleur Ltée, Montréal, 1998, p. 542.

 

[31] Montréal (Communauté urbaine de) c. Ciment Indépendant Inc., J.E. 88-1127 (C.A.); Construction Cogerex ltée c. Banque Royale de Canada, J.E. 96-497 (C.A.)

 

[32] ROUSSEAU-HOULE, T., Les contrats de construction en droit public & privé, Montréal, Wilson & Lafleur/Sorej, 1982, p. 194 et 195;

VOIR aussi : Op. cit., KARIM, Contrats d’entreprise (ouvrages mobiliers et immobiliers : construction et rénovation), para. 248 :

«En d’autres termes, pour remplir son engagement, l’entrepreneur doit donc, conformément à l’article 2100 C.c.Q., rendre un ouvrage conforme à l’ensemble des documents contractuels et aux obligations pouvant découler explicitement ou implicitement de la loi, des usages et des règles de l’art.  En effet, il n’est pas inutile de rappeler que l’obligation de délivrer un ouvrage conforme aux règles de l’art est une obligation de résultat»[32]

 

[33] Administration de la Voie Maritime du St-Laurent et Procureur Général du Canada c. United Dominion Industries Limited et Canron Incorporated (Cour d’appel - No: 500-09-001851-930 (500-05-003450-853) AZ-97011046, p. 14.

 

[34] Op. cit. KARIM , Contrats d’entreprise (ouvrages mobiliers et immobiliers : construction et rénovation), para 295.

 

[35] Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l'APCHQ inc. c. Dupuis, 2007 QCCS 4701; 26 octobre 2007.