CENTRE CANADIEN D'ARBITRAGE COMMERCIAL

Dossier CCAC S07-052401-NP

L... L... & A... P...

c.

Danyel Rodrigue & Fils Constructions inc. et

La garantie habitation du Québec inc.

COMPARAISSENT :

Pour L... L... & A... P...

le «Bénéficiaire » :                                                               L... L... & A... P...

 

Pour Danyel Rodrigue & Fils Constructions inc.

«l'Entrepreneur » :                                                               M. Danyel Rodrigue

 

Pour La garantie habitation du Québec inc.

« l'Administrateur »                                                              Me Stéphane AUDY

 

ARBITRE :                                                                              Me Jean MORIN

 

LIEU DE L'AUDIENCE :                                                        Québec

 

DATE DE L'AUDIENCE :                                                      8 novembre 2007

                                                                                                18 février 2008

DATE DE LA SENTENCE ARBITRALE :                             27 juin 2008


SENTENCE

Faits

[1] Le 5 avril 2005, le Bénéficiaire et l'Entrepreneur ont signé un contrat pour la construction d'une résidence au […], Ville A, (Québec), […], ci-après « l'Immeuble ».

[2] Le 8 décembre 2005, le Bénéficiaire a signé le formulaire Inspection-préréception Fin des travaux - Réception du bâtiment, ci-après le « Formulaire », que l'Entrepreneur avait préalablement signé le 30 juillet 2005. La date de fin des travaux mentionnée à ce formulaire est le 6 août 2005 et aucune mention n'y est faite de travaux à corriger ou à parachever.

[3]        Le 15 février 2007, le Bénéficiaire adresse une plainte à l'Administrateur, identifiant les déficiences suivantes, telles que libellées au rapport d'inspection :

1-a Armoires de cuisine dont certaines moulures ne sont pas de niveau et quelques vis sont apparentes : coup-de-pied avec espace anormal.

1-b Planche de boucher qui présente une légère dénivellation.

2-  Plancher de cuisine qui craque et qui n'est pas au niveau.

3-  Portes extérieures qui semble non étanches dans les coins supérieurs.

4-  Hotte de cuisine dont la sortie ne semble pas étanche.

5-  Deux barrures de fenêtres sont cassées et la moustiquaire semble trop courte.

6-  Possible infiltration d'air au sous-sol, en particulier derrière deux plinthes électriques.

7-  Robinetterie de cuisine à solidifier.

8-  Porte de lingerie à l'étage qui manque d'ajustement.

9-  Couvercle de la chute à linge qui n'est pas au goût des clients.

10-         Partie de mur, au niveau de la plinthe derrière le lavabo sur pied à l'étage, qui n'est pas complétée dû à un tuyau.

11-         Moisissure qui se formerait au bas de certaines fenêtres à l'étage ou glace lors de grand froid.

12-         Il semblerait que des insectes et vers auraient été trouvés au sous-sol près du mur adjacent à la porte extérieur du sous-sol. Deux espaces à ce niveau ont été colmatés avec de l'uréthane.

13-         Les fanes des pignons sont mal jointés avec le soffite, d'où il entrerait possiblement des mouches.

14-         Tablettes extérieures des fenêtres qui ne sont pas au niveau : il y a quelques trous dans le calfeutrage de ces tablettes.

15-         a Autour des fenêtres et portes extérieures, il manque de calfeutrage à certains endroits.

15- b Deux coins à gyproc sont décollés à deux endroits spécifiques.

[4] Les 23 mars 2007 et 12 avril 2007, monsieur Robert Linteau, conciliateur de l'Administrateur, effectue la visite de l'Immeuble et dépose son rapport le 25 avril 2007. Il nie couverture quant aux points 5, 8, 9, 10, 13 et 14 puisque, selon lui, ils auraient dus être mentionnés au Formulaire. II nie couverture quant aux points 1a, 1b, 2, 3, 7 et 11 qui n'ont pas été dénoncés dans la première année suivant la livraison de l'Immeuble. Il requiert l'Entrepreneur de faire les vérifications d'usage de la hotte et de réparer au besoin (point 4). Il nie couverture quant au point 6 considérant que les mesures de température effectuées ne permettent pas de conclure à une déficience. II nie couverture quant au point 12 puisque la présence d'insectes n'est pas couverte par le Plan de garantie. Relativement aux points 15-a et 15-b, l'Entrepreneur s'étant engagé à faire les corrections appropriées, le conciliateur l'enjoint d'y procéder dans les meilleurs délais. Enfin, quant au point 5, les correctifs appropriés ont déjà été apportés par le sous-traitant concerné.

[5]             Le 23 mai 2007, le Bénéficiaire se porte en appel des décisions contenues au rapport d'inspection du 25 avril 2007.

[6]             Le 8 novembre 2007, se tient, en l'absence de l'Entrepreneur et chez le Bénéficiaire, une première audition de la cause avec visite de l'Immeuble. Le 18 février 2008, se tient une seconde audition, en présence de l'Entrepreneur et toujours chez le Bénéficiaire.

Prétentions

Le Bénéficiaire

[7]             Le Bénéficiaire conteste la date de fin des travaux fixée au 6 août 2005 puisqu'il n'a signé le Formulaire que le 8 décembre 2005. II soutient au surplus qu'il a signé ce formulaire, dans le bureau de l'Entrepreneur, essentiellement dans un contexte de règlement d'un différend qui l'opposait à l'Entrepreneur, lequel menaçait d'exercer contre l'Immeuble les recours offerts par l'hypothèque légale au bénéfice des personnes ayant participé à la construction d'un bâtiment.

[8]             Le Bénéficiaire précise sa demande d'arbitrage en reconnaissant que les points 3, 5, 6 et 10 sont réglés ou devenus impertinents suite â l'exécution de certains travaux, Il précise également que les travaux faits pour corriger le point 15-b n'ont pas été effectués selon les régies de l'art.

L'Administrateur

[9]             L'Administrateur prétend que les éléments notés aux points 1-a, 1-b, 2, 3, 7, 8,9, 13 et 14 étaient visibles lors de la réception de l'Immeuble et que faute d'avoir été inscrits au Formulaire, ces éléments ne sont plus couverts par le Plan de garantie. Au surplus, quant au point 2, aucun craquement n'a été perçu lors de l'audition, pendant la visite de l'Immeuble.

[10]          Relativement au point 4, concernant un problème d'étanchéité, l'Administrateur prétend que le Bénéficiaire n'a pas fat la preuve que les travaux effectués ne respectaient pas les règles de l'art.

[11]          Quant au point 11, l'Administrateur souligne le fait qu'aucune preuve documentaire, ni expertise, n'a été faite de la présence de moisissure.

[12]          Enfin, relativement au point 12, l'Administrateur rappelle que les espaces ont été colmatés.

Preuve

[13]          L'essentiel de la preuve du Bénéficiaire repose sur la visite de l'Immeuble, lors de laquelle il montre les déficiences reprochées.

[14]          L'Administrateur s'efforce pour sa part de rappeler soit la non dénonciation des points 5, 8, 9, 10, 13 et 14 au Formulaire, soit la dénonciation tardive des points 1-a, 1-b, 2, 3, 7 et 11. Il souligne également l'absence de preuve des éléments énoncés aux points 2 et 11. Quant au point 4, il affirme que cette hotte donne directement sur un mur extérieur et qu'en de telles circonstances, il est normal de constater une infiltration d'air par le tuyau d'évacuation. Enfin, relativement aux points 15-a et 15-b, l'Administrateur s'en remet à la discrétion de l'arbitre pour apprécier la qualité des travaux effectués et il ne nie pas le fait que le calfeutrage des fenêtres n'a pas encore été effectué.

 

 

Conclusion et ordonnance

[15]           Il appartient au Bénéficiaire de faire la preuve de ses prétentions, d'expliquer les motifs qui l'ont empêché de noter au Formulaire les déficiences visibles ou les travaux à corriger et enfin les raisons qui pourraient autrement justifier la dénonciation tardive des malfaçons existantes mais non apparentes lors de la réception.

[16]           Le Bénéficiaire n'a pas établit quelconque motif justifiant ces omission et retard. Le fait qu'il ait signé le Formulaire dans le bureau de l'Entrepreneur ne l'excuse pas de ne pas avoir complété adéquatement ce document. Par ailleurs, sans égard à la date de fin des travaux, le 6 août 2005 ou le 8 décembre 2005, aucune preuve n'a été faite qu'il ait été empêché de visiter l'Immeuble avant de signer ce Formulaire ou qu'il ait été dans l'impossibilité de transmettre sa réclamation dans l'année suivant la réception de l'Immeuble.

 

 

POUR CES MOTIFS, la demande du Bénéficiaire est rejetée sur les points 1-a, 1-b, 2, 4, 7, 8, 9, 10, 11, 13 et 14. Sa demande est toutefois accueillie sur les points 15-a et 15-b, l'Administrateur étant requis de faire procéder, dans les règles de l'art et sans délai au calfeutrage extérieur des portes et des fenêtres et de faire refaire les joints de plâtres aux deux endroits concernés.

Enfin, l'Administrateur supportera seul les frais de l'arbitrage.

Québec, le 27 juin 2008.

 

JEAN MORIN, arbitre