ARBITRAGE EN VERTU DU RÈGLEMENT SUR LE PLAN DE GARANTIE DES BÂTIMENTS RÉSIDENTIELS NEUFS
(Décret 841-98 du 17 juin 1998)
CENTRE CANADIEN D’ARBITRAGE COMMERCIAL
Organisme d’arbitrage autorisé par la Régie du bâtiment
ENTRE : VICKY BEAUDOIN
(ci-après la « Bénéficiaire »)
ET : CONSTRUCTION STEVE BARON INC.
(ci-après l’ « Entrepreneur »)
ET : RAYMOND CHABOT ADMINISTRATEUR PROVISOIRE INC. ÈS QUALITÉS D'ADMINISTRATEUR PROVISOIRE DU PLAN DE GARANTIE DE LA GARANTIE ABRITAT INC.
(ci-après l’« Administrateur »)
Dossier : CCAC (S18-052901-NP)
Adresse du bâtiment : [...] L’ASSOMPTION
DÉCISION
Arbitre : Me Carole St-Jean
Pour la Bénéficiaire : Madame Vicky Beaudoin
Pour l’Entrepreneur : Monsieur Steve Baron
Pour l’Administrateur : Me Marc Baillargeon
Date de l’audition : 15 novembre 2018
Date de la décision : 14 janvier 2019
Identification complète des parties
Bénéficiaire : VICKY BEAUDOIN
[...]
L'Assomption (Québec) [...]
Représentation personnelle
Entrepreneur: CONSTRUCTION STEVE BARON INC.
2740, rue Luc
Terrebonne (Québec) J6V 1A9
Représenté par son président :
Monsieur Steve Baron
Administrateur : Raymond Chabot administrateur provisoire inc. ès qualités d'administrateur provisoire du plan de garantie de la Garantie Abritat inc.
7333, place des Roseraies
Montréal (Québec) H1M 2X6
Représenté par son avocat :
Me Marc Baillargeon
7333, place des Roseraies
Montréal (Québec) H1 M 2X6
1. Le présent arbitrage est tenu en vertu du Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs B-1.1, r.8 (ci-après le « Règlement »).
2. Le Tribunal arbitral a été saisi du présent dossier suite à une demande d’arbitrage soumise par la Bénéficiaire auprès du Centre Canadien d’arbitrage commercial (CCAC), organisme d’arbitrage autorisé par la Régie du bâtiment du Québec, et à sa nomination par ledit organisme.
3. Les parties n’ont soulevé aucune objection préliminaire relative à la compétence du Tribunal.
La décision de l’administrateur soumise à l’arbitrage
4. Par décision rendue en date du 5 mai 2018, l’Administrateur a rejeté tous les points de la réclamation de la Bénéficiaire, à savoir les points 1, 2 et 3 de cette réclamation (Pièce A-9).
5. En date du 28 mai 2018, la Bénéficiaire transmettait sa demande d’arbitrage au Centre canadien d’arbitrage commercial (CCAC) laquelle fut reçue en date du 29 mai 2018 (Pièce A-10).
6. En date du 6 juin 2018, l’organisme d’arbitrage notifiait aux parties la demande d’arbitrage ainsi que la nomination de la soussignée comme arbitre.
7. Une audience préliminaire par conférence téléphonique a été tenue en date du 6 septembre 2018.
8. Les points en litige identifiés par la Bénéficiaire sont les suivants :
Point 1 : Carreaux de céramique fissurés sur le plancher de la cuisine
Point 2 : Déformation des lames de bois du plancher
Point 3 : Trace noire au-dessus des thermostats électroniques
9. La Bénéficiaire a transmis le rapport de son expert Alain Michaud de A.M. Construction et Rénovation inc. en date du 28 septembre 2018.
10. Vu les problèmes de santé éprouvés par le signataire de ce rapport, la Bénéficiaire n’a eu d’autre alternative que de remettre aux parties le matin même de l’audience le rapport de son expert nouvellement mandaté, René Lemyre de Installation Tap Roc enr. (Pièce B-3) rédigé quelques jours avant l’audience, soit en date du 12 novembre 2018.
11. Une visite des lieux en présence des parties et des experts a été effectuée dans la matinée du 18 novembre 2018 et les parties se sont ensuite déplacées pour les fins de l’audience vers la salle réservée à cette fin.
L’audience
La preuve de la Bénéficiaire
VICKY BEAUDOIN
12. La Bénéficiaire mentionne que lors de la réception du bâtiment en date du 19 août 2014 (Pièce A-5), l’Entrepreneur lui a remis une feuille vierge sur laquelle on lui a demandé de noter au fur et à mesure les défauts constatés (Pièce B-1).
13. Quant aux carreaux de céramique du plancher de la cuisine, on peut lire sur ce document :
« Tuiles cuisine inégales !!! chippés quand il avait choix d’autres tuiles car reste bcp, manque de coulis à certains endroits » (sic)
« W clear a/n céramique, celle-ci sablé par UF car trop croche au départ. L’histoire se termine en octobre et c’est moi qui met clear a/n cuisine et entrée malgré 500 $ extra déjà payé à cet effet » (sic)
14. La Bénéficiaire explique que certaines tuiles de céramique du plancher de la cuisine dont les coins étaient légèrement surélevés ont été sablées. Ce sablage a rendu les tuiles de céramique plus mates et a nécessité l’application de plusieurs couches d’un produit scellant.
15. Quant à la déformation des lames de bois du plancher, elle a été découverte et signalée par la Bénéficiaire à l’Entrepreneur lors de l’inspection préréception du bâtiment et ce dernier a fourni un déshumidificateur qui a été installé au sous-sol.
16. Le déshumidificateur est demeuré en fonction depuis la prise de possession.
17. Une mesure du taux d’humidité a révélé un taux normal.
18. Quant aux thermostats électroniques, la Bénéficiaire mentionne avoir remarqué et signalé à l’Entrepreneur une trace noire au-dessus de la plupart des thermostats dès la première année de la prise de possession.
19. L’Entrepreneur a alors remis à la Bénéficiaire le mémo du service technique du fabricant Ouellet Canada en date du 22 janvier 2013 relatif à la décoloration des murs (Pièce A-1).
20. La Bénéficiaire reconnait qu’elle utilise régulièrement des bougies parfumées et qu’elle est fumeuse.
21. La visite des lieux le matin de l’audience a d’ailleurs permis de constater la présence de quelques bougies allumées dans la section salon et dans la section cuisine.
22. La Bénéficiaire utilise également des bougies parfumées dans la pièce arrière utilisée comme bureau et dans la salle de bain.
23. En contre-interrogatoire, la Bénéficiaire :
- Confirme l’absence de fissures sur les carreaux de céramique de la cuisine au moment de la prise de possession et l’apparition de la première fissure à l’été 2017;
- Confirme que la déformation des lames de bois du plancher a été découverte lors de la prise de possession.
RENÉ LEMYRE
24. Les services de monsieur René Lemyre ont été retenus par la Bénéficiaire afin de poser un diagnostic concernant les points 1 et 2 de la demande d’arbitrage.
25. Monsieur Lemyre œuvre dans le domaine du couvre-plancher depuis 1982.
26. Vu l’absence d’objection, le Tribunal reconnait l’expertise de monsieur Lemyre dans le domaine du couvre-plancher et son rapport est produit comme pièce B-3.
27. En ce qui concerne les carreaux de céramique du plancher de la cuisine, monsieur Lemyre attribue la présence de fissures au fait que les panneaux de contreplaqués du plancher ont uniquement été brochés et non pas collés et vissés, tel que recommandé.
28. Un échantillon du panneau de contreplaqué prélevé au plafond du sous-sol lui a permis de faire ce constat.
29. En ce qui concerne les lames de bois du plancher, monsieur Lemyre attribue la déformation à un espacement insuffisant le long des murs.
La preuve de l’Administrateur
RICHARD BERTHIAUME
30. Monsieur Berthiaume est inspecteur-conciliateur membre de l’ordre des technologues depuis 1992.
31. Il a rendu la décision en date du 5 mai 2016 faisant l’objet de la présente demande d’arbitrage (Pièce A-9).
32. Il a réalisé plus de 3 500 inspections de bâtiments et il a rédigé plus de 400 rapports d’expertise.
33. Il a construit plus de 500 bâtiments résidentiels et plus de 300 unités de multilogement.
34. Le Tribunal reconnait sa qualification comme expert.
35. En ce qui concerne les fissures des carreaux de céramique du plancher de cuisine, monsieur Lemyre rappelle que selon le témoignage de la Bénéficiaire, la situation a été constatée à l’été 2017 soit dans la troisième année de garantie couvrant les vices cachés.
36. Il réitère que cette situation n’est pas un vice caché puisque les fissures ne gênent pas la circulation dans la cuisine et qu’il n’y a pas de déficit d’usage.
37. Il est d’avis que cette situation est une malfaçon.
38. En ce qui concerne la déformation des lames de bois du plancher, selon le témoignage de la Bénéficiaire, cette situation a été constatée lors de la réception du bâtiment soit en date du 19 août 2014.
39. La situation a donc été dénoncée hors délai.
40. En ce qui concerne les traces noires au-dessus des thermostats électroniques, d’une part selon la déclaration de la bénéficiaire, la situation a été découverte au cours de l’année 2016 et a donc été dénoncée hors délai.
41. D’autre part, il réfère au mémo du service technique de Ouellet Canada inc. en date du 22 janvier 2013 produit comme pièce A-1 et il affirme que le problème provient de l’utilisation de bougies parfumées par la Bénéficiaire.
La preuve de l’Entrepreneur
STEVE BARON
42. En ce qui concerne les carreaux de céramique, il mentionne que les carreaux ont été choisis et achetés par la bénéficiaire et qu’il n’en connait pas la qualité.
43. En ce qui concerne les lames de bois du plancher, il indique avoir complété la construction de 146 maisons dans ce projet domiciliaire et qu’aucune réclamation n’a été formulée par quiconque à ce sujet.
44. Il installe systématiquement un déshumidificateur durant la construction.
45. Il nie que les planchers aient été dans un tel mauvais état lors de la réception du bâtiment et il nie avoir représenté à la bénéficiaire que la situation se règlerait d’elle-même.
46. En ce qui concerne les thermostats, il s’en est remis au mémo du service technique de Ouellet Canada inc..
47. Il a installé les mêmes thermostats dans les autres maisons construites dans ce projet et aucun problème ne lui a été signalé par quiconque.
Analyse et décision
48. Les dispositions pertinentes du Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs sont les suivantes :
10. La garantie d’un plan dans le cas de manquement de l’entrepreneur à ses obligations légales ou contractuelles après la réception du bâtiment doit couvrir:
1° …
2° …
3° la réparation des malfaçons existantes et non apparentes au moment de la réception et découvertes dans l’année qui suit la réception, visées aux articles 2113 et 2120 du Code civil et dénoncées, par écrit, à l’entrepreneur et à l’administrateur dans un délai raisonnable, lequel ne peut excéder 6 mois de la découverte des malfaçons;
4° la réparation des vices cachés au sens de l’article 1726 ou de l’article 2103 du Code civil qui sont découverts dans les 3 ans suivant la réception du bâtiment et dénoncés, par écrit, à l’entrepreneur et à l’administrateur dans un délai raisonnable, lequel ne peut excéder 6 mois de la découverte des vices cachés au sens de l’article 1739 du Code civil;
5° la réparation des vices de conception, de construction ou de réalisation et des vices du sol, au sens de l’article 2118 du Code civil, qui apparaissent dans les 5 ans suivant la fin des travaux et dénoncés, par écrit, à l’entrepreneur et à l’administrateur dans un délai raisonnable, lequel ne peut excéder 6 mois de la découverte ou survenance du vice ou, en cas de vices ou de pertes graduelles, de leur première manifestation;
49. En résumé, la mise en œuvre de la garantie est assujettie :
· En ce qui a trait aux malfaçons existantes et non apparentes au moment de la réception du bâtiment : à leur découverte dans l’année suivant la réception du bâtiment ET à la dénonciation par écrit tant à l’entrepreneur qu’à l’administrateur dans un délai n’excédant pas six (6) mois de la découverte.
· En ce qui a trait aux vices cachés : à leur découverte dans les trois (3) ans suivant la réception du bâtiment ET à la dénonciation par écrit tant à l’entrepreneur qu’à l’administrateur dans un délai n’excédant pas six (6) mois de la découverte.
· En ce qui a trait aux vices majeurs de construction : à leur apparition dans les cinq (5) ans suivant la fin des travaux ET à la dénonciation par écrit tant à l’entrepreneur qu’à l’administrateur dans un délai n’excédant pas six (6) mois de la découverte.
50. En d’autres termes, l’existence d’une malfaçon, d’un vice caché ou d’un vice majeur de construction n’est pas suffisante en soi pour enclencher la garantie : le défaut de construction doit nécessairement être découvert à l’intérieur du délai prescrit, à savoir un (1) an, trois (3) ans ou cinq (5) ans, selon la nature du défaut de construction, ET également être dénoncé à l’entrepreneur ainsi qu’à l’administrateur dans le délai prescrit de six (6) mois de la découverte.
51. Le rôle du Tribunal consiste à analyser la preuve présentée de part et d’autre dans le cadre de la demande d’arbitrage soumise par la Bénéficiaire et, à la lumière de cette preuve, à déterminer si l’Administrateur a appliqué correctement les critères de mise en œuvre de la garantie édictée au Règlement.
52. Il importe de mentionner que l’arbitre doit trancher le litige suivant les règles de droit (Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ inc. c. Dupuis, 2007 QCCS 4701, Michèle Monast, J.C.S.).
53. Également, dans l’affaire de Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ inc. c. Maryse Desindes et Yvan Larochelle (J.E. 2005-132), la Cour d’appel a déterminé, d’une part que le Règlement est d’ordre public et, d’autre part que la réclamation d’un bénéficiaire est soumise à une procédure impérative.
Point 1 : Carreaux de céramique fissurés du plancher de la cuisine
54. Selon le témoignage de la Bénéficiaire rendu à l’audience, les fissures dans les carreaux de céramique du plancher de la cuisine ont été découvertes au cours de l’été 2017.
55. Rappelons que la réception du bâtiment est fixée en date du 19 août 2014 (Pièce A-5).
56. Bien qu’aucune date plus précise de la découverte n’ait été fournie par la Bénéficiaire, l’Administrateur ne semble pas avoir considéré la possibilité que le défaut de construction ait été constaté en quatrième année de garantie et a reconnu dans sa décision de même qu’à l’audience que le défaut de construction a été découvert dans la troisième année de la garantie.
57. Le Tribunal doit donc déterminer si la problématique des carreaux de céramique fissurés du plancher de la cuisine constitue un vice caché au sens du paragraphe 4 de l’article 10 du Règlement et, le cas échéant, si ce vice caché a été dénoncé par écrit tant à l’Entrepreneur qu’à l’Administrateur dans un délai de six (6) mois de sa découverte.
58. D’entrée de jeu, la preuve révèle que le vice a été dénoncé par la Bénéficiaire à l’Entrepreneur ainsi qu’à l’Administrateur dans un courriel en date du 14 septembre 2017 (pièce A-7), soit à l’intérieur du délai de six (6) mois de la découverte et ce critère est donc rencontré. Cette question n’est d’ailleurs pas contestée.
59. L’Administrateur a toutefois rejeté la réclamation de la Bénéficiaire sur ce point pour le motif que la situation dénoncée ne rencontre pas les critères d’un vice caché. Cette position a été maintenue à l’audience.
60. L’article 1726 du Code civil du Québec auquel réfère le paragraphe 4e de l’article 10 du Règlement se lit comme suit :
1726. Le vendeur est tenu de garantir à l’acheteur que le bien et ses accessoires sont, lors de la vente, exempts de vices cachés qui le rendent impropres à l’usage auquel on le destine ou qui diminuent tellement son utilité que l’acheteur ne l’aurait pas acheté, ou n’aurait pas donné si haut prix, s’il les avait connus.
61. Dans l’affaire de ABB inc. c. Domtar, (2007) 3 R.C.S. 461, la Cour Suprême du Canada a circonscrit la notion de vices cachés comme suit :
50. (…) Cependant, quelle que soit la qualification du vice, il doit présenter quatre caractères, tous essentiels à la garantie : il doit être caché, suffisamment grave, existant au moment de la vente et inconnu de l’acheteur. (…)
62. Quant au caractère de la gravité du vice, la Cour Suprême ajoutera ce qui suit :
52. La simple présence d’un déficit d’usage ne suffit pas en elle-même pour justifier la qualification du vice caché. Encore faut-il que ce déficit d’usage soit grave, c’est-à-dire qu’il rende le bien impropre à l’usage auquel il est destiné ou en diminue tellement l’utilité que son acheteur ne l’aurait pas acheté à ce prix.
63. Plus récemment, la Cour d’appel dans l’affaire de Leroux c. Gravano, 2016 QCCA 79, rappelait ce qui suit :
40. Pour se prévaloir de la garantie légale contre les vices cachés, quatre conditions doivent donc être respectées : (i) que le bien soit affecté d’un vice grave, l’intensité de cette gravité ayant été définie par la jurisprudence à partir des expressions « impropre à l’usage » et « diminuent tellement son utilité »; (ii) que le vice existait au moment de la vente; (iii) que le vice soit caché, qualité qui s’évalue objectivement et qui est accompagnée d’une obligation de s’informer; et (iv) que le vice soit inconnu de l’acheteur, qualité qui s’évalue subjectivement et dont le fardeau de preuve appartient au vendeur.
64. Finalement, la Cour Supérieure dans l’affaire de Pleau c. Figueira-Andorinha, 2016 QCCS 1698, s’est exprimée comme suit en regard du critère de la gravité :
185. Le « vice » dont il est question dans le régime légal de garantie n’est pas défini dans les dispositions relatives à la garantie, mais il ne peut s’agir d’une imperfection ou d’une anomalie sans conséquence.
186. L’imperfection ou l’anomalie en question doit être telle qu’elle entraîne un déficit d’usage. C’est le déficit d’usage prouvé qui qualifie juridiquement l’imperfection ou l’anomalie dont doit répondre le vendeur.
65. En l’espèce, la preuve à l’audience a révélé que trois (3) des quatre (4) conditions sont rencontrées, à savoir :
Le vice est caché : l’absence de collage et de vissage des panneaux de contre-plaqué ne pouvait être découverte sans la prise d’un échantillon prélevé au plafond du sous-sol;
Le vice existait au moment de la vente : ce manquement a été commis lors de la pose du plancher, soit à une date antérieure à la vente;
Le vice était inconnu de la Bénéficiaire : cette déficience n’a pas été divulguée par l’Entrepreneur.
66. Par contre, la quatrième condition, soit celle relative à la gravité du vice, n’est pas rencontrée vu l’absence de preuve d’un déficit d’usage.
67. Le Tribunal a été à même de constater lors de la visite des lieux la présence de microfissures dans les carreaux de céramique nécessitant que l’on s’approche pour les visualiser.
68. Ces microfissures ne gênent d’aucune manière la circulation sur le plancher de la cuisine.
69. Ainsi donc, malgré toute la sympathie du Tribunal pour la Bénéficiaire, la décision de l’Administrateur doit être maintenue et la demande de la Bénéficiaire doit être rejetée sur ce point pour le motif que le problème des fissures des carreaux de céramique ne rencontre pas le critère de gravité et ne constitue pas un vice caché.
Point 2 : Déformation des lames de bois du plancher
70. Selon le témoignage de la Bénéficiaire, la déformation des lames de bois du plancher a été découverte et signalée à l’Entrepreneur lors de l’inspection préréception du bâtiment, soit en date du 19 août 2014 (Pièce A-5).
71. Le formulaire d’inspection préréception ne fait toutefois état d’aucune réserve à la date de la réception.
72. L’Administrateur a rejeté la réclamation de la Bénéficiaire sur ce point pour le motif que le vice n’a pas été dénoncé à l’Administrateur dans le délai prescrit de six (6) mois de sa découverte.
73. Il appert de la preuve que le vice a été découvert par la Bénéficiaire en août 2014 et que le vice n’a été dénoncé qu’en septembre 2017, soit bien au-delà du délai de six (6) mois prescrit par le Règlement;
74. La décision de l’Administrateur doit donc être maintenue sur ce point.
Point 3 : Trace noire au-dessus des thermostats électroniques
75. Selon le témoignage de la Bénéficiaire, les traces noires au-dessus des thermostats électroniques ont été découvertes au cours de la première année de la prise de possession, soit entre le 19 août 2014 (Pièce A-6) et le 19 août 2015.
76. Ce vice a alors été signalé à l’Entrepreneur et ce dernier a remis à la Bénéficiaire un mémo du service technique du fabricant Ouellet Canada (pièce A-1).
77. L’Administrateur a rejeté la réclamation de la Bénéficiaire sur ce point pour le motif que le vice n’a pas été dénoncé à l’Administrateur dans le délai prescrit de six (6) mois de sa découverte.
78. La preuve révèle que le vice a été découvert par la Bénéficiaire au cours de la première année de la prise de possession et qu’il n’a été dénoncé à l’Administrateur qu’en date du 14 septembre 2017, soit bien au-delà du délai de six (6) mois prescrit par le Règlement.
79. La décision de l’Administrateur doit donc être maintenue sur ce point.
80. Le Tribunal ajouterait sur ce point que le mémo du Service technique du fabricant Ouellet Canada (Pièce A-1) mentionne ce qui suit :
L’utilisation fréquente des brûleurs avec huiles parfumées, chandelles, distributeurs de parfum, fumée de cigarette ou l’utilisation de ce genre d’items peuvent aussi causer cette décoloration.
81. Or, la preuve a révélé que la Bénéficiaire utilise assidûment des bougies parfumées et elle est également fumeuse.
82. La problématique résulterait donc des habitudes de vie de la Bénéficiaire.
Réserve des droits
83. Les dispositions de l’article 11 du Règlement édictent ce qui suit :
11. La présente loi n’a pas pour effet de limiter les obligations autrement imposées à une personne visée par la présente loi.
84. En conséquence, le tribunal réserve à la Bénéficiaire tous ses recours contre toute personne autre que l’Administrateur devant les tribunaux de droit commun le tout sujet aux règles de la prescription applicable en matière civile.
Coûts de l’arbitrage
85. Les dispositions de l’article 21 du Règlement stipulent ce qui suit :
21. Les coûts de l’arbitrage sont partagés à part égales entre l’administrateur et l’entrepreneur lorsque ce dernier est le demandeur.
Lorsque le demandeur est le bénéficiaire, ces coûts sont à la charge de l’administrateur à moins que le bénéficiaire n’obtienne gain de cause sur aucun des aspects de sa réclamation, auquel cas l’arbitre départage ces coûts.
86. Par ailleurs, les dispositions de l’article 116 du Règlement édictent que l’arbitre peut faire appel à l’équité. Ledit article se lit comme suit :
116. Un arbitre statue conformément aux règles de droit; il fait aussi appel à l’équité lorsque les circonstances le justifient.
87. Vu les circonstances du présent dossier, les frais de l’arbitrage seront partagés entre la Bénéficiaire pour la somme de 50 $ et l’Administrateur pour le reliquat.
POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL D’ARBITRAGE :
REJETTE la demande d’arbitrage de la Bénéficiaire;
MAINTIENT la décision de l’Administrateur rendue en date du 5 mai 2018;
RÉSERVE à la Bénéficiaire tous ses recours contre toute personne autre que l’Administrateur devant les tribunaux de droit commun sujet à la prescription applicable en matière civile;
DÉPARTAGE les coûts de l’arbitrage comme suit :
CONDAMNE la Bénéficiaire à payer à l’organisme d’arbitrage la somme de 50 $ pour sa part des frais d’arbitrage;
CONDAMNE l’Administrateur à payer à l’organisme d’arbitrage le reliquat des frais d’arbitrage.
Sainte-Agathe-des-Monts,
le 14 janvier 2019
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Me Carole St-Jean
Arbitre