CANADA Société pour la résolution des conflits Inc. (SORECONI)
Province dE Québec
district de montréal Tribunal d’arbitrage
no. de référence de SORECONI : 050120001 montréal, le 11 janvier 2006
no. de référence de l’arbitre: 13 249-2
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Les Maisons Zibeline Inc.
« Entrepreneur » / Appelante
c.
François Gagnon
« Bénéficiaire » / Intimé
-ET-
La Garantie des BÂTIMENTS RÉSIDENTIELS NEUFS de l’A.P.C.H.Q. INC.
« Administrateur » / Mise en cause
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APRÈS AVOIR PRIS CONNAISSANCE DES PROCÉDURES, ENTENDU LA PREUVE ET Les
ARGUMENTS DES parties, le tribunal d’arbitrage rend la dÉcision suivante:
1. FAITS ET PROCÉDURES
Le Bénéficiaire a pris possession de son unité de condominium et a procédé à la réception de sa partie privative le 18 décembre 2003. Le 9 juillet 2004, le Bénéficiaire fit parvenir une lettre à l’Entrepreneur lui demandant d’effectuer certains travaux, à défaut de quoi il serait dans l’obligation d’entreprendre des procédures. À la même date, le Bénéficiaire remplissait une demande de réclamation auprès de l’Administrateur. En raison de la réclamation, un avis de 15 jours fut émis par l’Administrateur le 20 août 2004, et l’inspection du bâtiment, par l’inspecteur-conciliateur de l’Administrateur, Monsieur Pierre Bonneville, Technologue professionnel, eut lieu le 18 novembre 2004. La décision fut rendue le 3 décembre 2004 (Pièce A-10), et reçue par l’Entrepreneur le 8 décembre 2004.
Le 20 janvier 2005, l’Entrepreneur fit parvenir à l’organisme SORECONI une demande d’arbitrage (Pièce A-13) de la décision de l’inspecteur-conciliateur. Bien que la demande d’arbitrage ait été faite hors délai, le présent Tribunal d’arbitrage, dans une sentence antérieure rendue le 18 juillet 2005, prorogea le délai et déclara recevable la demande d’arbitrage faite par l’Entrepreneur pour les motifs exprimés dans ladite sentence.
La demande d’arbitrage porte sur les points 1 à 9 ainsi que sur le point 14 de la décision de l’Administrateur du 3 décembre 2004 (Pièce A-10). Il est également plaidé par l’Entrepreneur que le point 13 de cette décision fait l’objet du présent appel en raison de l’économie et de la rédaction de la décision de l’Administrateur.
2. Question en litige
a) Est-ce que la décision de l’Administrateur rendue le 3 décembre 2004 est bien fondée quant aux points 1 à 9 et quant au point 14 ?
b) Est-ce que la rédaction du point 14 de la décision emporte également implicitement des éléments retrouvés au point 13 de la décision, et de ce fait, ce point est sujet à cet appel ?
3. ANALYSE ET DÉCISION
Point 1: Nivellement du plancher de la salle de bain
(Coût approximatif des travaux correctifs : 4 000,00 $)
Le Bénéficiaire se plaint d’une contre-pente au plancher de céramique de la salle de bain. Selon le rapport de l’inspecteur-conciliateur ainsi que selon les observations du Tribunal d’arbitrage et de toutes les parties lors de la visite des lieux et de l’audition, une dénivellation d’environ 2 centimètres sur une surface d’environ un (1) mètre existe au plancher de la salle de bain. Selon les normes de tolérance suivies par le programme de garantie des maisons neuves de l’Ontario, remises au Tribunal d’arbitrage à titre de référence seulement, cette dénivellation serait anormale. Le témoignage de l’inspecteur-conciliateur, lequel a été reconnu expert par le Tribunal d’arbitrage, est également à cet effet. Au surplus, il considère ces normes indicatives des normes et règles de l’art suivies au Québec. Le Tribunal d’arbitrage ne voit aucune raison de s’éloigner de cet avis. L’Entrepreneur n’a, pour sa part, fait témoigner aucun expert à ce sujet et aucune preuve convaincante d’une autre norme n’a été administrée devant le Tribunal.
La contestation de l’Entrepreneur porte plutôt sur le bien fondée de la méthode de correction exigée dans la décision de l’inspecteur-conciliateur. Différentes possibilités ont été soulevées lors de l’audition, soit le remplacement total ou encore partiel du plancher de céramique. L’Entrepreneur plaide que le choix de la méthode de correction lui appartient, mais qu’il a cependant, admet-il, une obligation de résultat quant au travail réalisé. Le Tribunal d’arbitrage est d’accord avec cette position. En conséquence, l’Entrepreneur devra corriger la dénivellation au plancher de la salle de bain selon la méthode de son choix mais de manière à ce qu’il n’y ait aucune dénivellation inacceptable selon les règles de l’art. Le Tribunal d’arbitrage souligne toutefois que la méthode corrective proposée par l’Entrepreneur lors de l’audition lui semble appropriée, à condition bien sûr qu’il n’en résulte aucune dénivellation inacceptable.
Point 2: Revêtement de céramique trop court près du bain;
Point 3 : Joint de coulis mal appliqué au plancher;
Point 4 : Absence d’un morceau de céramique entre la douche et le mur;
Point 5 : Joint de coulis mal appliqué entre la baignoire et l’armoire;
Point 6 : Joint de coulis mal appliqué entre la baignoire et la douche;
Point 7 : Stabilité de la baignoire;
Point 8 : Mauvaise installation et finition du coup de pied de la vanité;
Point 9 : Mauvaise installation du comptoir de la vanité
(Coût approximatif des travaux correctifs : 3 000,00 $)
Dans son rapport, l’inspecteur-conciliateur considère que certains de ces points constituent des malfaçons non-apparentes alors que d’autres constituent des malfaçons apparentes, lesquelles devaient être dénoncées lors de la réception en vertu de l’article 27 (2) du Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs (ci-après le « Règlement »). À tout événement, compte tenu de la décision prononcée relativement au point 1, l’inspecteur-conciliateur considère qu’en effectuant la réparation exigée à ce point, selon la méthode indiquée au rapport, les problèmes énumérés aux points 2 à 9 seront réglés du même coup. Il ne statue donc pas sur chacun de ces points individuellement.
Le Tribunal d’arbitrage considère que le point 2 était effectivement apparent lors de la réception. En effet, un simple examen visuel et non poussé aurait permis au Bénéficiaire de constater cette malfaçon et de la dénoncer lors de la réception. En conséquence, ce point n’est pas retenu et l’Entrepreneur n’a pas l’obligation de corriger la situation à cet égard.
Cependant, quant aux points 3 à 9, le Tribunal d’arbitrage est d’avis que ces points n’étaient pas apparents lors de la prise de possession. En effet, le Bénéficiaire n’a pas l’obligation d’inspecter de manière approfondie chaque petit espace ainsi que chaque joint de coulis dans les coins reculés de chacune des pièces de la maison lors de la réception de son unité. Le Bénéficiaire n’a pas non plus l’obligation de se mettre à genoux pour toucher, essayer, ouvrir et soulever chacun des appareils et comptoirs qui se trouvent dans son unité neuve lors de la réception.
Sa seule obligation est de faire une inspection prudente et diligente, c’est-à-dire que le Bénéficiaire se doit d’être vigilant et de faire une inspection et une appréciation prudente du travail de l’Entrepreneur. Le Tribunal d’arbitrage tient à mentionner que le Règlement vise l’application d’une garantie pour des bâtiments résidentiels neufs. Il est clairement reconnu par la jurisprudence qu’on ne saurait exiger d’un bénéficiaire, acheteur d’un bâtiment résidentiel neuf, qu’il fasse une inspection aussi approfondie que ce qui est exigé en matière de bâtiment d’un certain âge.
Le Tribunal d’arbitrage a laissé à l’Entrepreneur le choix de la méthode à utiliser pour corriger le problème mentionné au point 1. Le Tribunal d’arbitrage en vient également à la conclusion que les points 3 à 9 constituent des malfaçons non-apparentes au sens de l’article 27 (3) du Règlement et qu’elles ont été dénoncées en conformité avec cette disposition. En conséquence, l’Entrepreneur devra corriger les situations dénoncées aux points 3 à 9 selon la méthode de son choix, mais en conformité avec les règles de l’art.
Point 13 : Ondulation marquée au plancher en lattes de bois franc au centre du salon
Point 14 : Mauvaise fixation du plancher en lattes de bois franc à la surface de l’unité
(Coût approximatif des travaux correctifs : 20 000,00 $)
Lors de l’audition, à l’étape des plaidoiries, le procureur de l’Administrateur a fait des représentations à l’effet que le point 14 n’inclut pas le plancher de bois franc du salon, cette malfaçon étant traitée au point 13 de la décision du 3 décembre 2004. Or, selon la demande d’arbitrage, le point 13 de ladite décision n’est pas soumis à l’arbitrage. La procureure de l’Entrepreneur, pour sa part, plaide que les points 13 et 14 ont été présentés dans la décision comme un tout et que l’appel portant sur l’un de ces points emporte appel de l’autre.
La décision de l’Administrateur (Pièce A-10) concernant les points 13 et 14, se lit ainsi :
« 13. Ondulation marquée au plancher en lattes de bois franc au centre du salon
14. Mauvaise fixation du plancher en lattes de bois franc à la surface de l’unité
Lors de notre inspection, nous avons observé que le plancher en lattes de bois franc ondulait anormalement au centre du salon.
De plus, nous avons constaté un manque flagrant de fixation des lattes au sous-plancher, à la grandeur de l’unité.
Décision :
Compte tenu de ce qui précède, l’entrepreneur devra reprendre en totalité, les surfaces des planchers de bois franc afin d’obtenir un ouvrage complet.
Il devra s’assurer que la fixation des lattes et l’espacement requis le long des murs soient conformes aux exigences du manufacturier. »
Étant donné que sous le point 14, l’inspecteur-conciliateur traite et dispose même de la problématique du point 13, le Tribunal d’arbitrage considère qu’il a été saisi de cette problématique en arbitrage et ce, en raison de la rédaction de la décision de l’Administrateur et qu’en conséquence le Tribunal d’arbitrage doit statuer au sujet de cette problématique. Si nécessaire, le Tribunal d’arbitrage fait appel à l’article 116 du Règlement qui se lit comme suit :
« Un arbitre statue conformément aux règles de droit; il fait aussi appel
à l’équité lorsque les circonstances le justifient. »
En effet, toutes les parties et l’inspecteur-conciliateur, expert, ont agi pendant la visite des lieux et lors de l’audition comme si le point 13 était en appel. De plus, il faut se rappeler qu’au début de la demande d’arbitrage, l’Entrepreneur n’était pas représenté par procureur. Étant donné que les droits des parties ont été protégés, que toute la preuve a été entendue sur la question, qu’il n’y a pas lieu, selon l’esprit du Règlement, de rendre ce processus d’un caractère procédurier outrancier et qu’aucune partie ne peut prétendre que ses droits sont préjudiciés, le Tribunal d’arbitrage considère qu’il peut se prononcer en appel sur le travail énoncé et ordonné sous le point 14, qui relève du point 13 de la décision.
Lors de l’audition, l’Entrepreneur a fait témoigner Monsieur Genest sur la question de la méthode et sur le caractère satisfaisant de la pose du plancher de bois franc. Le Tribunal d’arbitrage avait, à ce moment, pris sous réserve la question du statut d’expert de Monsieur Genest. Or, les explications fournies et la cohérence du témoignage de ce dernier ont été pour le moins ambiguës et parfois contradictoires. Sans mettre en doute sa bonne foi et malgré sa longue expérience dans le domaine, le Tribunal d’arbitrage ne peut malheureusement pas lui octroyer le statut d’expert.
Selon l’inspecteur-conciliateur, dont la qualité d’expert a été reconnue par le Tribunal d’arbitrage, les ondulations au plancher du salon sont anormales et sont le résultat d’une humidité excessive en-dessous du sous-plancher.
Lors de la visite des lieux et de l’audition, le Tribunal a constaté un problème clairement anormal et excessif de craquement du plancher à des endroits différents mais plus spécifiquement dans le corridor de l’unité.
Le Tribunal a également noté l’ondulation anormale au salon.
L’Entrepreneur conteste la méthode de correction requise par l’Administrateur dans sa décision.
En effet, ce dernier exige que l’Entrepreneur reprenne les planchers de bois franc à la grandeur de la surface de l’unité. L’Entrepreneur comprend de cette décision que l’Administrateur exige qu’il arrache et refasse le plancher de bois franc à la grandeur de l’unité alors que, selon les explications données par l’Administrateur lors de l’audition, le terme reprendre, quant à lui, signifie tout simplement corriger la situation à la grandeur de la surface de l’unité sans que cela n’implique nécessairement l’arrachage de tout le bois franc déjà en place. Plusieurs options pour corriger les travaux ont été soulevées par les parties et par l’inspecteur-conciliateur, expert, lors de l’audition.
À cet égard, le Tribunal d’arbitrage réitère que le choix des moyens appartient à l’Entrepreneur mais que ce dernier a une obligation de résultat quant au travail réalisé. En conséquence, le Tribunal constate les problèmes anormaux au plancher de bois franc à la grandeur de la surface de l’unité. L’Entrepreneur devra donc corriger le problème selon la méthode de son choix mais tout en respectant les règles de l’art et le résultat requis. Dans la mesure où le Bénéficiaire demeure insatisfait des réparations effectuées par l’Entrepreneur, une inspection supplémentaire sera faite par l’Administrateur et une décision supplémentaire portant sur le caractère satisfaisant des travaux réalisés sera rendue.
4. Conclusion, montant en litige et responsabilité pour les frais encourus
L’Entrepreneur devra effectuer les travaux requis par la présente décision arbitrale selon les méthodes de son choix et ce, dans les trente (30) jours ouvrables de la réception de la présente sentence arbitrale.
Le montant en litige dans la présente instance est d’environ vingt-sept mille dollars (27 000,00 $).
Selon la règle énoncée à l’article 123 du Règlement, l’appel ayant été fait par l’Entrepreneur, les frais doivent être partagés en parts égales entre l’Entrepreneur et l’Administrateur.
POUR TOUS CES MOTIFS, LE TRIBUNAL D’ARBITRAGE :
ACCUEILLE en partie la demande d’arbitrage de
l’Entrepreneur;
DÉCLARE que les correctifs aux points 1, 3 à 9 ainsi qu’aux points 13 et 14 devront être effectués par l’Entrepreneur dans les trente (30) jours ouvrables de la réception de la présente sentence arbitrale et ce, selon la méthode de son choix;
ORDONNE à l’Entrepreneur de réaliser les travaux nécessaires et mentionnés dans la présente sentence dans les trente (30) jours ouvrables de la réception de la présente sentence afin de rectifier la situation, conformément aux règles de l’art, quant aux points 1, 3 à 9, 13 et 14;
À DÉFAUT par l’Entrepreneur de se conformer à l’ordonnance précédente, ORDONNE à La garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’A.P.C.H.Q. Inc. de procéder, dans les trente (30) jours ouvrables suivants, aux travaux correctifs requis, et ce, selon les règles de l’art.
Conformément aux dispositions de l’article 123 du Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs, les coûts de la présente décision sont à la charge de l’Administrateur et de l’Entrepreneur, chacun pour moitié.
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Me Jeffrey Edwards, arbitre
Pour le Bénéficiaire:
Monsieur François Gagnon
900, boulevard Laval
Appartement 140
Laval, (Québec) H7S 2K2
Pour l’Entrepreneur :
Me Carla Isabel Filipe
Bélanger Sauvé
1, Place Ville-Marie, bureau 1700
Succursale Montréal Nord
Montréal, (Québec) H3B 2C1
Pour l’Administrateur :
Me Luc Séguin
Savoie Fournier
5930, boulevard Louis-H.-Lafontaine
Montréal, (Québec) H1M 1S7
Visite des lieux et audition: 17 novembre 2005
Remise des documents par les parties : 12 décembre 2005
Décision arbitrale: 11 janvier 2006