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ARBITRAGE

En vertu du Règlement sur le plan de garantie

des bâtiments résidentiels neufs

(Décret 841-98 du 17 juin 1998)

 

 

Organisme d’arbitrage autorisé par la Régie du bâtiment :

Société pour la résolution des conflits inc. (SORECONI)

 

 


 

ENTRE                MADAME LOUISE JOLY ET MONSIEUR RICHARD RANGER

 

(ci-après « le Bénéficiaire »)

 

ET                       CONSTRUCTION CASAVIA INC.

 

(ci-après « l’Entrepreneur »)

 

 

ET :                     LA GARANTIE DES BÂTIMENTS RÉSIDENTIELS NEUFS DE L’APCHQ

 

(ci-après « l’Administrateur »)

 

 

No dossier Garantie:          07-286FL

No dossier SORECONI :   071108001

 

 

SENTENCE ARBITRALE

 

 

Arbitre :                                                Guy Pelletier

 

Pour le Bénéficiaire :                             Me André Aumais

 

Pour l’Entrepreneur :                             Monsieur Hazem Sharara

 

Pour l’Administrateur :                            Me François Laplante

 

Date d’audience :                                   27 août 2008

 

Lieu d’audience :                                   782 rue du Malard, St-Lazare

 

Date de la décision:                               17 septembre 2008

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Mandat :

 

L’arbitre a reçu son mandat de SORECONI le 17 décembre 2007.

 

 

 

 

Historique et pièces :

 

 

26 septembre 2002 :      Déclaration de réception du bâtiment; (A-2)

 

27 septembre 2002 :     Vente de l’immeuble par l’Entrepreneur à un premier acheteur; (A-1)

 

2 novembre 2006 :         Vente de l’immeuble au Bénéficiaire;(A-3)

 

5 février 2007 :               Transfert et certificat d’enregistrement de la garantie au Bénéficiaire; (A-4)

 

28 mars 2007:               Lettre de l’Administrateur suite à l’inspection de préconciliation du 22 mars 2007; (A-5)

 

26 avril 2007:                 Lettre de dénonciation de vices majeurs par le Bénéficiaire; (A-6)

 

28 mai 2007 :                Demande de réclamation du Bénéficiaire; (A-7)

 

15 octobre 2007 :          Décision de l’Administrateur; (A-9)

                                   

8 novembre 2007:         Demande d’arbitrage; (A-10)

 

17 décembre 2007:       Nomination de l’arbitre;

 

18 avril 2008 :                Rapport d’expertise de Les Expertises Latulippe & Associés Inc.; (P-1) :                 

9 juin 2008 :                  Avis de convocation transmis aux parties;

 

27 août 2008 :               Audition du dossier.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Introduction :

 

 

[1]            Le Bénéficiaire a acquis la résidence de madame Anik Poirier et de monsieur Yannick Croteau le 2 novembre 2006. Ces derniers avaient acheté l’immeuble de l’Entrepreneur le 27 septembre 2002.

[2]            Le 26 avril 2007, le Bénéficiaire dénonce l’existence des vices majeurs suivants affectant la résidence, soit :

[2.1.1]          « Les fondations de la maison sont dans la nappe phréatique »;

[2.1.2]          « Ocre ferreuse dans les drains français et le bassin de captation du sous-sol»;

[2.1.3]          « Les drains français sont entourés d’une membrane » laquelle « accélère le processus de bouchage des drains par l’ocre ferreuse ».

[3]            Dans sa décision du 15 octobre 2007, l’Administrateur rejette la réclamation du Bénéficiaire déposée dans la cinquième année de la garantie, invoquant que la situation décrite ne rencontre pas les critères de vices majeurs;

[3.1]            « Conséquemment la garantie applicable dans le présent cas porte sur les vices majeurs. Afin qu’elle s’applique, l’Administrateur doit s’assurer que le critère suivant soit rencontré, à savoir :

- Y a-t-il perte de l’ouvrage résultant de conception, de construction ou de      réalisation ou encore, d’un vice de sol?

[3.2]            Selon les constatations effectuées sur place lors de l’inspection, l’administrateur est d’avis que la situation décrite (…) ne rencontre pas ce critère.

[3.3]            Par conséquent, La Garantie des maisons neuves de l’APCHQ ne peut intervenir pour ce point. »

[4]                 Insatisfait de la décision de l’Administrateur, le Bénéficiaire demande l’arbitrage le 8 novembre 2007.

 

 

 

 

L’audition:

 

[5]            L’audition s’est tenue à la résidence du Bénéficiaire et était précédée d’une visite des lieux. Lors de cette visite l’arbitre a pu constater l’installation de divers équipements dont notamment la présence d’une cheminée de nettoyage des drains de fondations, des pompes dans le bassin de captation et d’un système d’alimentation d’urgence par batteries.

Les personnes suivantes étaient présentes :

               Monsieur Richard Ranger, madame Louise Joly et leur procureur Me André Aumais;

               Monsieur Claude Latulippe, expert du Bénéficiaire;

               Monsieur Hazem Sharara, entrepreneur;

                           Monsieur Alain Deschênes et Me François Laplante, représentants de l’Administrateur.

 

[6]            Les pièces du cahier de l’Administrateur sont identifiées A-1 à A-10.

 

[7]            Un seul point est en litige soit « l’efficacité du système de drainage pluvial du bâtiment » tel que décrit dans la décision de l’Administrateur (A-9).

 

[8]            À l’appui de sa demande d’arbitrage concernant l’existence de vices majeurs, le Bénéficiaire a déposé un rapport d’expertise technique préparé par Les Expertises Latulippe & Associés Inc. (P-1). Afin de corriger le problème lié à la présence d’ocre ferreuse et de prévenir les infiltrations d’eau dans le sous-sol, l’expert du Bénéficiaire recommande le cuvelage de la fondation dont le coût minimum des travaux est estimé à 60 000$.

 

[9]            Le Bénéficiaire, monsieur Richard Ranger, interrogé par son procureur, témoigne à l’effet qu’il n’a rien remarqué d’anormal en août 2006 lorsqu’il a inspecté la résidence en vue d’en faire l’acquisition  de madame Anik Poirier et de monsieur Yannick Croteau. Le fossé à l’avant de l’immeuble était sec et il n’a pas observé de dépôt orangé dans le bassin de captation. Il n’a pas non plus noté à ce moment la présence de cheminées de nettoyage.

 

[10]        Par contre on lui a recommandé, par mesure de prévention, d’ajouter une deuxième pompe dans le bassin de captation, en cas d’urgence.

 

[11]        Après la prise de possession, monsieur Ranger s’aperçoit que les pompes fonctionnent presque sans arrêt et observe une eau orangée dans le bassin. En décembre 2006, après avoir fait des recherches sur internet et en avoir parlé à son frère, il suspecte la présence d’ocre ferreuse.

 

[12]        En février 2007, une première inspection est effectuée par monsieur Claude Latulippe, l’expert dont il a retenu les services.

 

[13]        Le 22 mars 2007, monsieur Alain Deschênes, conciliateur-conseil pour l’Administrateur effectue une inspection préconciliation « afin de contribuer à la résolution de la situation constatée ».

 

[14]        Dans son rapport du 28 mars suivant, monsieur Deschênes note que les pompes fonctionnent et constate la présence d’eau ferrugineuse dans le bassin (A-5).

 

[15]        Le 26 avril 2007 le Bénéficiaire produit une dénonciation de vices majeurs auprès de l’Entrepreneur et de l’Administrateur(A-6).

 

[16]        Le 28 mai 2007, le Bénéficiaire dépose une réclamation auprès de l’Administrateur (A-7).

 

[17]        Monsieur Ranger témoigne à l’effet qu’il est sensible aux moisissures et que le problème actuel constitue pour lui un cauchemar. Une inondation dans le sous-sol serait dramatique pour sa santé. S’il avait connu le risque qui le menace, il n’aurait pas acheté cet immeuble. Cependant monsieur Ranger confirme qu’il n’y a pas de signes d’humidité dans le sous-sol et qu’à ce jour, il n’y a pas eu d’infiltrations d’eau.

 

[18]        Le 15 octobre 2007, après avoir donné un avis à l’Entrepreneur d’intervenir dans ce dossier (A-8 et A-9) l’Administrateur rend sa décision qui fait l’objet de la présente demande d’arbitrage, refusant d’intervenir pour les motifs invoqués précédemment.

 

[19]        Le 20 novembre 2007, monsieur Claude Latulippe fait une deuxième visite des lieux au moment où l’entrepreneur général Fondations D’Aujourd’Hui, mandaté par le Bénéficiaire, installe un puits de nettoyage du système de drainage.

 

[20]        Monsieur Latulippe a procédé alors à un échantillonnage d’eau afin d’en faire l’analyse; il a aussi procédé à un relevé topographique des lieux et mis en place un tube piézométrique pour relever le niveau de la nappe d’eau souterraine. Ce tube a été installé à l’écart du bâtiment du côté droit où aucune excavation ou remblai n’avait été effectué.

 

[21]        D’après les relevés de la nappe d’eau souterraine, monsieur Latulippe témoigne à l’effet que le niveau de l’eau se trouve plus haut que le dessus du drain de sorte que la dalle du béton du sous-sol se trouve continuellement mouillée.

 

[22]        Par ailleurs, d’après le croquis illustrant ces relevés (P-1, annexe III), monsieur Latulippe reconnaît que les niveaux observés de l’eau souterraine sont plus bas que le dessous de la dalle qui se situe à l’élévation 98.305.

 

[23]        Monsieur Latulippe note également dans son rapport  qu’une « vérification par un tiers antérieure à notre deuxième visite  … par caméra,  de l’installation du drain français … concluait, en partie, que le système de drainage périphérique au coin avant gauche de l’immeuble pouvait être obstrué ».

 

[24]        Monsieur Latulippe témoigne aussi à l’effet que, selon les observations faites et les analyses de l’eau qu’il a reçues du laboratoire du Groupe D’essais Bodycote, « la présence d’ocre ferreuse a été constatée ». Tel que rapporté dans son rapport, on est en présence d’une situation où « l’eau, l’oxygène et le fer contenus dans les sols s’oxydent et forment ainsi une boue d’hydroxyde de fer qui obstrue le système de drainage progressivement ».

 

[25]        Monsieur Latulippe a aussi constaté que le drain français était recouvert d’une membrane filtrante, solution qui était propice au colmatage et pouvait constituer une barrière à l’eau. En contre-interrogatoire, il a été admis que cette conception utilisée généralement en terrain sablonneux pour éviter que le sable ne s’infiltre dans le drain, n’est ni exigée ni interdite par le Code national du bâtiment. De plus, il ressort qu’il n’y avait pas de pression hydrostatique sous la dalle du sous-sol au moment où les mesures furent effectuées et qu’il n’y avait pas de colmatage du drain.

 

[26]        De son côté, le représentant de l’Entrepreneur, monsieur Hazem Sharara, témoigne à l’effet que c’est la sixième maison qu’il a construite dans ce secteur sans aucun problème et que celle-ci notamment  a été construite au-dessus de la nappe phréatique. Selon les vérifications de la municipalité et les relevés topographiques qu’elle lui a fournis, il affirme avoir positionné les fondations plus haut que le fond du fossé « pour éviter l’eau ». Il dit ne pas être en mesure de faire la référence avec les niveaux établis par monsieur Latulippe.

 

[27]        Monsieur Alain Deschênes, conciliateur-conseil, témoigne pour  l’Administrateur à l’effet qu’il fait partie d’un groupe de recherche qui fait des recommandations aux entrepreneurs. Il dit que le phénomène de l’ocre ferreuse est maintenant mieux connu. Dans ce cas-ci, il a rendu sa décision en fonction du règlement et il n’a pas fait exécuter d’autres tests ou expertises. Il a cependant observé qu’il y avait environ 2 pouces d’eau dans le drain lors des excavations. Il affirme que le système de drainage est efficace et qu’il fonctionne bien. Selon lui, il n’y a pas de problème de colmatage dans un système bien drainé.

 

[28]        Monsieur Deschênes réfute les conclusions de monsieur Latulippe tirées du rapport sur l’analyse de l’eau effectuée par le Groupe D’essais Bodycote (P-1, Annexe # I). Selon lui, le niveau de fer dans l’eau n’est qu’un paramètre qui ne permet pas de faire une appréciation globale de la situation.

 

[29]        À partir de son expertise personnelle, monsieur Deschênes s’interroge sur la qualité des résultats obtenus d’un seul tube piézométrique d’autant plus que celui-ci est installé à bonne distance du bâtiment. Il mentionne que dans le cas d’un sol sablonneux, il y a un rabattement de la nappe phréatique près des fondations du bâtiment et qu’il est impossible de mesurer la variation du niveau de la nappe avec la méthodologie utilisée par monsieur Latulippe.

 

 

 

 

 

 

 

Analyse :

 

[30]        Dans cette cause, la question en litige est la suivante :

Est-ce que les problèmes dénoncés par le Bénéficiaire dans la cinquième année de la garantie constituent un vice couvert par l’article 10 du Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs?

[31]        Il convient de rappeler le droit en vigueur. Le règlement stipule que :

10. La garantie d'un plan dans le cas de manquement de l'entrepreneur à ses obligations légales ou contractuelles après la réception du bâtiment doit couvrir:

            (…) 

            5°    la réparation des vices de conception, de construction ou de réalisation et des vices du sol, au sens de l'article 2118 du Code civil, qui apparaissent dans les 5 ans suivant la fin des travaux et dénoncés, par écrit, à l'entrepreneur et à l'administrateur dans un délai raisonnable, lequel ne peut excéder 6 mois de la découverte ou survenance du vice ou, en cas de vices ou de pertes graduelles, de leur première manifestation.

L’article 2118 du Code civil précise que :

2118. À moins qu'ils ne puissent se dégager de leur responsabilité, l'entrepreneur, l'architecte et l'ingénieur qui ont, selon le cas, dirigé ou surveillé les travaux, et le sous-entrepreneur pour les travaux qu'il a exécutés, sont solidairement tenus de la perte de l'ouvrage qui survient dans les cinq ans qui suivent la fin des travaux, que la perte résulte d'un vice de conception, de construction ou de réalisation de l'ouvrage, ou, encore, d'un vice du sol.

 

[32]        Monsieur Ranger affirme être sensible aux moisissures et avoir des problèmes respiratoires. Il vit dans la crainte de voir l’eau s’infiltrer dans le sous-sol aggravant ainsi ses problèmes de santé. Par contre, il confirme qu’il n’a pas encore observé d’infiltrations au sous-sol.

 

[33]        Le Bénéficiaire, monsieur Ranger, considère que la présence de l’ocre ferreuse diminue considérablement la valeur marchande de sa propriété et s’il avait connu cette situation avant d’en faire l’acquisition, il n’aura pas acheté cette maison. Dans les conditions actuelles il doit constamment surveiller le fonctionnement des pompes, ce qui l’empêche même de s’absenter. Cela constitue selon lui un dommage qu’il n’a pas à subir.

 

[34]        Selon le témoignage de son expert, monsieur Claude Latulippe, les vérifications par caméra concluaient que le système de drainage pouvait être obstrué. Mais cette situation n’a pas été prouvée.

          (Les soulignements sont de l’arbitre)

 

[35]        Dans son rapport, monsieur Latulippe précise qu’un tube piézométrique a été installé le 20 novembre 2007 pour effectuer des relevés de la nappe phréatique sur une période de deux mois. Il illustre à l’annexe # III, les niveaux de la nappe phréatique mesurés à l’élévation 98,260 et 98,250. Par contre, ces relevés effectués par G & S Consultants ont été réalisés sur une période de deux semaines soit les 22 et 29 janvier 2008 (annexe # IV). Les résultats obtenus ne démontrent pas qu’il y a une pression hydrostatique sous la dalle de béton du sous-sol, ceux-ci  étant plus bas que le dessus des semelles de la fondation, établi à l’élévation 98,350; par contre monsieur Latulippe, note « qu’il est fort probable que ce niveau soit beaucoup plus élevé au printemps ».

 

 

[36]        D’autre part, la méthodologie utilisée pour obtenir les résultats est questionnée par monsieur Deschênes, le conciliateur-conseil de l’Administrateur. S’appuyant sur le bulletin du Conseil national de recherches du Canada « CBD-82-F. Les eaux de fond », celui-ci met en doute le fait qu’un seul tube piézométrique installé à une certaine distance du bâtiment puisse permettre d’obtenir une mesure fiable de la variation du niveau de la nappe phréatique.

 

[37]        Le témoignage de l’Entrepreneur, à l’effet qu’il a obtenu l’autorisation de la municipalité pour installer la fosse septique à partir des niveaux topographiques qu’elle lui a fournis et qu’il a construit le bâtiment à un niveau suffisamment haut pour éviter les problèmes d’eau, n’a pas été contredit. Il n’a pas non plus été possible d’établir la référence précise entre les niveaux fournis par monsieur Latulippe et ceux qui ont servi pour la construction.

 

[38]        Le Code national du bâtiment 1995, cité en référence, comporte à la section 9.13 des exigences particulières d’imperméabilisation des fondations lorsqu’il y a pression hydrostatique, soit lorsque « le niveau de la nappe d’eau souterraine est plus élevé que la sous-face du plancher du sous-sol », ce qui, en l’espèce, n’a pas été démontré par les relevés fournis.

 

[39]        Dans son argumentation, Me Aumais plaide qu’on est en présence ici d’un vice majeur de construction, puisque le niveau de l’eau est au-dessus du drain, qu’il faut faire un entretien constant, que le drain va finir par se colmater et qu’il y aura inévitablement une infiltration d’eau. Le tribunal trouve cette conclusion quelque peu alarmiste considérant le fait qu’aucun désordre ne s’était encore manifesté à la date de l’audition, soit presque six ans après la réception des travaux.

 

[40]        Me Aumais argue que la présence d’ocre ferreuse ne fait pas partie des exclusions de la garantie, ce que n’a d’ailleurs pas contesté l’Administrateur. Il plaide que cela constitue un vice de construction couvert par le règlement et qu’en conséquence l’arbitre doit donner raison au Bénéficiaire comme l’ont fait d’autres arbitres dans des cas semblables[1].

 

[41]        Avec respect, les décisions auxquelles réfère le procureur du Bénéficiaire, ont été rendues dans un contexte où la preuve a été faite que la dalle du sous-sol a été construite dans la nappe phréatique et qu’il s’en est suivi des infiltrations d’eau, ce qui n’est pas le cas ici.

 

[42]        Lors de sa plaidoirie, le procureur de l’Administrateur, Me François Laplante  a déposé des décisions[2] à l’appui de son argumentation à l’effet qu’on ne peut qualifier ici la situation décrite comme étant un vice de construction puisqu’il n’y a pas désordres et qu’il n’a pas été prouvé que le sous-sol baignait dans la nappe phréatique. En conséquence, l’arbitre ne peut fonder sa décision sur une hypothèse ou une appréhension.

 

 

DÉCISION :

 

[43]        Le règlement couvre « la réparation des vices de conception, de construction ou de réalisation et des vices du sol, au sens de l'article 2118 du Code civil, qui apparaissent dans les 5 ans suivant la fin des travaux ».

 

[44]        L’article 2118 du Code civil réfère à la notion de « perte de l’ouvrage » pour définir ce qui constitue « un vice de conception, de construction ou de réalisation de l'ouvrage, ou, encore, d'un vice du sol ».

 

[45]        Bien que la jurisprudence ait interprété de façon plus large cette notion de perte de l’ouvrage comme en fait état l’arbitre Jeanniot[3], le tribunal considère que la preuve présentée n’a pas établi de façon convaincante qu’il y a eu ou qu’il y aurait colmatage éventuel du drain. Il n’a pas été établi, par ailleurs, que la dalle du sous-sol baignait dans la nappe phréatique. Il n’a pas été démontré non plus que l’entrepreneur aurait commis une erreur ou aurait enfreint la réglementation en vigueur dans la municipalité.

 

[46]        En l’espèce, il n’a pas été établi que le Bénéficiaire, malgré les craintes appréhendées, se trouvait dans la situation inévitable qu’il serait victime éventuellement d’un problème d’infiltration d’eau d’autant plus qu’il n’y a eu aucune manifestation de désordres dans les six  années suivant la fin des travaux.

 

[47]        L’arbitre doit statuer « conformément aux règles de droit;  il fait aussi appel à l’équité lorsque les circonstances le justifient.»

 

[48]        À titre d’arbitre désigné, le soussigné est autorisé par la Régie à trancher tout différend découlant des plans de garantie.  La décision doit prendre appui sur le texte du Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs.

[49]        Suivant mon appréciation des faits, de la preuve versée au dossier et présentée à  l’audition et du droit applicable, je suis d’avis que la situation décrite par le Bénéficiaire peut être inquiétante et nécessiter un entretien régulier mais ne constitue pas un vice d’une gravité telle qu’il puisse être considéré comme étant un vice de construction ou un vice de sol couvert par l’article 10 du règlement.  

 

[50]        L’arbitre soussigné estime que le Bénéficiaire qui avait le fardeau de la preuve n’a pas convaincu le tribunal de l’issue inévitable d’un dommage grave au sens de l’article 10 du règlement.

 

[51]        En vertu de l’article 123 du Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs et comme le Bénéficiaire n’a pas obtenu gain de cause sur aucun point de sa réclamation, l’arbitre doit partager les coûts. Conséquemment, considérant que le présent règlement peut être assimilé aux autres règlements visant la protection des consommateurs, l’arbitre fixe à 155.00$ le montant des frais judiciaires à être payé par le Bénéficiaire, suivant la grille des frais de la Division des petites créances  de la chambre civile de la Cour du Québec

 

 

 

 

POUR  CES MOTIFS LE TRIBUNAL D’ARBITRAGE :

 

[52]        REJETTE la demande d’arbitrage du Bénéficiaire;

[53]        MAINTIENT la décision de l’Administrateur en date du 15 octobre 2007;

[54]        CONDAMNE le Bénéficiaire à payer 155.00$ à titre de frais d’arbitrage;

[55]        CONDAMNE l’Administrateur à payer la balance des frais d’arbitrage.

 

 

 

 

 

 

Guy Pelletier

Architecte et arbitre

Laval, ce 17 septembre 2008

 

 

 



[1] Denis Douillard vs Les Entreprises Robert Bourgouin Ltée,

  Julie Hubert vs Construction Réjean D’Astous

[2] Sandra Hermann et Daniel Paquette vs Habitations F. Faudreault inc,

  Solange Larouche et Daniel Cléroux vs Habitation CLO-BEL Inc.

[3] Helena Kuzma et Peter Gotrvki vs Groupe Immobilier Grilli Inc.,