ARBITRAGE
EN VERTU DU RÈGLEMENT SUR LE
PLAN DE GARANTIE DES BÂTIMENTS RÉSIDENTIELS NEUFS
(Chapitre B-1.1, r. 8)
Organisme d’arbitrage autorisé par la Régie du bâtiment du Québec :
SOCIÉTÉ POUR LA RÉSOLUTION DES CONFLITS (SORECONI)
CANADA
PROVINCE DE QUÉBEC
DISTRICT DE MONTREAL
No. 212108001
DÉVELOPPEMENT DOMONT INC.
Entrepreneur
c.
LUC BARECELO
et
KARINE BRUNELLE
Bénéficiaires
et
LA GARANTIE CONSTRUCTION RÉSIDENTIELLE (GCR)
Administrateur
DÉCISION ARBITRALE
Arbitre : Me Karine Poulin
Pour les Bénéficiaires : Monsieur Luc Barcelo
Madame Karine Brunelle
Pour l’Entrepreneur : Me Joseph Piazza
Pour l’Administrateur : Me Pierre-Marc Boyer
Date de l’audience : 30 novembre 2021
Décision (séance tenante) : 30 novembre 2021
Motifs écrits de la décision : 1er décembre 2021
Description des parties
Bénéficiaires :
Madame Karine Brunelle
Monsieur Luc Barcelo
[...]
Montréal (Québec) [...]
Entrepreneur :
Développement Domont inc.
Me Joseph Piazza
MSBA avocats s.e.n.c.r.l.
202-5450, rue Jarry Est
Montréal (Québec) H1P 1T9
Administrateur :
La Garantie de Construction Résidentielle (GCR)
Me Pierre-Marc Boyer
4101, rue Molson
3e étage
Montréal (Québec) H1Y 3L1
APERÇU
[1] Le 16 juillet 2021, l’Administrateur a rendu une décision dans le dossier 169072‑4570, laquelle faisait suite à une contestation de la qualité des travaux effectués par l’Entrepreneur à la suite d’une décision préalable de l’Administrateur en faveur des Bénéficiaires.
[2] Le 10 septembre 2021, l’Entrepreneur a porté ladite décision en appel auprès de SORECONI, soit au-delà du délai de 30 jours prévu à l’article 19 du Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs (ci-après le « Règlement »).
[3] Le Tribunal doit décider si l’Entrepreneur doit être relevé du défaut d’avoir contesté la décision dans le délai prescrit.
[4] Les parties ont eu l’opportunité de faire valoir leurs arguments à cet égard dans le cadre d’une conférence de gestion tenue le 30 novembre 2021.
[5] Séance tenante, le Tribunal a relevé l’Entrepreneur de son défaut, précisant que les motifs écrits suivraient.
II
ANALYSE ET DÉCISION
[6] Les Bénéficiaires ont reçu leur bâtiment le 12 mars 2020. Le 28 juillet 2020, ils dénoncent à l’Administrateur un certain nombre de désordres affectant leur propriété et, le 13 août suivant, ils déposent auprès de l’Administrateur une réclamation (dossier 169072-4570). Une décision favorable aux Bénéficiaires est rendue par l’Administrateur qui ordonne à l’Entrepreneur de procéder à des travaux correctifs.
[7] Au terme du délai accordé à l’Entrepreneur pour corriger la situation, les Bénéficiaires, insatisfaits des travaux effectués, demandent à l’Administrateur d’intervenir et de se prononcer sur la qualité des travaux. C’est ainsi que, le 9 juillet 2021, l’Administrateur procède à une inspection des travaux correctifs et rend une décision supplémentaire le 16 juillet 2021. La décision est de nouveau favorable aux Bénéficiaires. L’Entrepreneur estime, pour sa part, que les travaux exécutés sont satisfaisants, d’où sa contestation de la décision rendue.
[8] Or, en parallèle du dossier 4570, l’Administrateur est saisi d’un autre différend entre les Bénéficiaires et l’Entrepreneur, relativement à la même propriété, et il s’agit du dossier 169072-5820. Dans ce dossier, l’Administrateur a également rendu une décision en juillet de la même année (ci-après la décision ou le dossier « 5820 »).
[9] Selon la preuve administrée, les deux (2) décisions ont été reçues par l’Entrepreneur à peu près au même moment, soit l’une le 19 juillet 2021 et l’autre, le 23. Dans un cas comme dans l’autre, les décisions ont été reçues pendant les vacances estivales de la construction qui avaient lieu, en 2021, du 18 au 31 juillet.
[10] Une fois informé par son adjointe de la réception des décisions, le représentant de l’Entrepreneur lui donne instruction de transmettre la décision 4570 à ses procureurs pour contestation. Or, par mégarde, c’est la décision 5820 qui a été transmise aux procureurs de l’Entrepreneur et c’est elle qui a été contestée le 21 août 2021 auprès de SORECONI.
[11] Le 8 septembre suivant, la soussignée fût désignée pour arbitrer le différend opposant les parties. Le 10 septembre, un accusé réception du dossier fût transmis aux parties dans lequel l’on demandait à l’Entrepreneur de préciser les points contestés de la décision 5820.
[12] Sur réception de cette demande du bureau de l’arbitre, le procureur de l’Entrepreneur contacte sa cliente qui lui indique alors que c’est la décision 4570 qui devait être contestée et non la 5820.
[13] La même journée, le procureur de l’Entrepreneur demande d’être relevé du défaut et en explique ses motifs.
[14] En réponse, il est informé, le 14 septembre, que la demande pour être relevé du défaut sera entendue par l’arbitre lors d’une conférence de gestion et de faire, dans l’intervalle, les démarches nécessaires auprès de SORECONI pour contester la décision 4570, ce qui fût fait le 15 septembre.
[15] Lors des représentations, le procureur de l’Entrepreneur allègue la bonne foi de sa cliente, son intention de contester la décision 4570 depuis le début et l’erreur de l’adjointe. Il soutient qu’il s’agit d’un malheureux imbroglio, d’une erreur humaine, et demande qu’il n’en soit pas tenu rigueur à sa cliente.
[16] Il soumet, au soutien de sa position, trois (3) décisions[1].
[17] L’Administrateur, pour sa part, ne conteste pas la demande de l’Entrepreneur d’être relevé du défaut et s’en remet à la décision du Tribunal, ayant calculé que le retard à contester la décision 4570 n’est que de dix (10) jours, en soustrayant les vacances de la construction.
[18] Les Bénéficiaires contestent la demande, l’imbroglio ne constituant pas un motif valable, selon eux.
[19] Après avoir entendu les parties, et à la lumière des autorités plaidées, force est de constater que le délai prévu à l’article 19 du Règlement n’en est pas un de rigueur ni de déchéance. C’est la conclusion à laquelle la Cour en arrive, après une analyse de la jurisprudence pertinente, dans l’affaire Takhmizdjian[2], suivie de façon constante[3] depuis 2003.
[20] Tout comme dans l’affaire Pitre[4], le Tribunal constate, en l’instance, la diligence de l’Entrepreneur et de son procureur à contester la décision 4570, une fois informés de l’erreur de l’adjointe, et, de ce fait, de la contestation de la mauvaise décision. De plus, le retard n’est que de dix (10) jours. Dans ces circonstances, refuser de relever l’Entrepreneur de son défaut serait faire preuve d’un formalisme indu en présence d’un délai qui peut être prorogé, lorsque les circonstances le justifient, comme en l’espèce.
Frais de l’arbitrage
[21] Conformément à l’article 123 du Règlement, les frais du présent arbitrage sont partageables en parts égales entre l’Entrepreneur et l’Administrateur.
POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL D’ARBITRAGE :
ACCUEILLE la demande de l’Entrepreneur d’être relevé de son défaut d’avoir contesté la décision du 16 juillet 2021 dans le dossier 169072-4570 dans le délai prescrit ;
PROROGE le délai de production de la demande d’arbitrage dans le dossier 169072-4570 et DÉCLARE bonne et valable la demande d’arbitrage déposée par l’Entrepreneur dans ledit dossier auprès de SORECONI;
CONDAMNE l’Entrepreneur et l’Administrateur aux frais du présent arbitrage, en parts égales.
Kirkland, ce 1er décembre 2021
ORIGINAL SIGNÉ PAR KARINE POULIN
__________________________
Me Karine Poulin, arbitre
Procureurs :
Bénéficiaires :
(se représentent seuls)
Madame Karine Brunelle
Monsieur Luc Barcelo
Entrepreneur :
Me Joseph Piazza
MSBA avocats s.e.n.c.r.l.
Administrateur :
Me Pierre-Marc Boyer
La Garantie de Construction Résidentielle (GCR)
[1] Takhmizdjian c. SORECONI, 2003 CanLII 18819 (QC CS); 9285-4777 Québec inc. c. Garantie de construction résidentielle (GCR), 2020 CanLII (QC OAGBRN); Pitre c. Les développements Groupe Montclair Bois Franc inc. et La garantie des immeubles résidentiels de l’A.P.C.H.Q., 2005 CanLII 59072 (QC OAGBRN).
[2] Takhmizdjian c. SORECONI, précitée note 1.
[3] Pitre c. Les développements Groupe Montclair Bois Franc inc. et La garantie des immeubles résidentiels de l’A.P.C.H.Q., précitée note 1.
[4] Id.