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ARBITRAGE EN VERTU DU RÈGLEMENT SUR LE PLAN DE GARANTIE

DES BÂTIMENTS RÉSIDENTIELS NEUFS

 

Organisme d'arbitrage autorisé par la Régie du bâtiment du Québec:

LA SOCIÉTÉ POUR LA RÉSOLUTION DE CONFLITS INC. (SORECONI)

 

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   ENTRE:                               MICHEL GIRARD

  

                                                                          (ci-après désigné« le Bénéficiaire »)

 

 

                                                GROUPE PRO-FAB INC. / LES RÉSIDENCES P.F.

 

                                                                          (ci-après désignée « l'Entrepreneur »)

 

 

                                                LA GARANTIE HABITATION DU QUÉBEC INC.

                                                (LA GARANTIE QUALITÉ HABITATION)

 

                                                                        (ci-après désignée « l'Administrateur »)

 

 

 

   No dossier SORECONI: 112109001

 

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DÉCISION SUR OBJECTION PRÉLIMINAIRE

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   Arbitre:                                                       Me Reynald Poulin

 

   Pour le Bénéficiaire:                                  Mme Guylaine Tremblay

 

   Pour l'Entrepreneur:                                  M. Guy Marcoux

                                                                     M. Martin Leclerc

 

   Pour l'Administrateur:                               MeAvelino De Andrade

 

 

 

 

 

Identification complète des parties

 

 

Arbitre:                                                        Me Reynald Poulin

                                                                   79, boul. René-Lévesque Est

                                                                   Bureau 200

                                                                   C.P. 1000, Haute-Ville

                                                                   Québec (Québec)  G1R 4T4

 

 

Bénéficiaire:                                               M. Michel Girard

                                                                   1256, Louis-Amyot

Baie-Comeau (Québec)  G5C0A2

 

 

 

Entrepreneur:                                             Groupe Pro-Fab inc. / Les Résidences P.F.

295, Route 112

Vallée-Jonction(Québec)  G0S 3J0

 

 

 

Administrateur:                                          La Garantie Habitation du Québec inc.

400, boul. des Galeries D'Anjou, bur. 200

Anjou (Québec)  H1M 3M2

Et son procureur:

Me Avelino De Andrade

La Garantie Qualité Habitation

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Décision sur objection préliminaire

 

 

[1]           À la suite d'une demande d'arbitrage formulée par le Bénéficiaire Michel Girard le 21 septembre 2011 auprès de SORECONI (Société pour la résolution des conflits inc.), le soussigné a été nommé à titre d'arbitre le 14 octobre 2011.

[2]           Après vérification des disponibilités des parties en cause, une audience de gestion, par voie de conférence téléphonique, a été tenue le 6 décembre 2011à 14h30.

[3]           Cette même journée, l'Administrateur a soumis, par écrit, une objection préliminaire requérant que la demande d'arbitrage soit rejetée puisque formulée plus de quatre (4) mois après le prononcé de la décision de l'Administrateur.

[4]           Dans le cadre de l'audience de gestion, les parties ont reconnu que le soussigné a été dûment désigné par SORECONI pour procéder à la demande d'arbitrage et aucune des parties n'avait, à leur connaissance, de cause de récusation et/ou de révocation du soussigné à titre d'arbitre. Par conséquent, le soussigné déclare avoir compétence aux termes du Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs.

[5]           Les parties n’ont formulé aucune demande de précision quant à l’objet de l’arbitrage.

[6]           Le procureur de l’Administrateur a fait part de l'objection préliminaire formulée par écrit cette même journée en demandant que ce moyen d'irrecevabilité soit tranché avant l'audition au fond.

[7]           Après les représentations verbales de Mme Guylaine Tremblay (se déclarant mandataire du Bénéficiaire), celles des représentants de l'Entrepreneur, M. Guy Marcoux et M. Martin Leclerc, de même que celles du procureur de l'Administrateur, le soussigné s'est exprimé comme suit dans une décision interlocutoire rendue le 8 décembre 2011concernant, notamment, cette objection préliminaire:

«[6]  Le procureur de l’Administrateur a ainsi demandé à l’arbitre de trancher sur cette question préliminaire avant la demande d’arbitrage au fond. À ce sujet, il est utile de rappeler que la demande d’arbitrage est formulée en termes généraux et vise donc une quarantaine de demandes de réclamations présentées par le Bénéficiaire et rejetées par l’Administrateur. Ainsi, des frais possiblement importants seront engendrés pour les parties pour cette audition au fond. De même et compte tenu de la nature de l’objection préliminaire qui vise le rejet total de la demande d’arbitrage, l’arbitre soussigné croit qu’il est équitable pour toutes les parties que cette objection préliminaire soit débattue avant l’audition au fond.

 

[7]   Ainsi et afin de limiter les frais tout en assurant que les parties puissent faire valoir, pour chacun, leurs prétentions quant à l’objection préliminaire soulevée, le Tribunal d’arbitrage donnera au Bénéficiaire un délai jusqu’au 23 janvier 2012 afin de transmettre à l’arbitre soussigné, de même qu’aux autres parties, les moyens de contestation qu’ils offrent à cette objection préliminaire en prévoyant la description des faits qu’ils veulent mettre en preuve accompagnée également de leurs représentations en droit sur la question. La représentante du Bénéficiaire a informé le Tribunal que ce dernier avait possiblement discuté avec un avocat au sujet de ce dossier. Le Tribunal invite la représentante du Bénéficiaire de même que ce dernier à consulter cet avocat s’ils en ressentent le besoin pour les fins de contester l’objection préliminaire soulevée par le procureur de l’Administrateur.

 

 [8]  Également, si le Bénéficiaire désire produire certains documents dans le cadre du débat sur l’objection préliminaire, il devra les communiquer au même moment que ses prétentions factuelles et ses représentations en droit.

 

 [9]  Après réception des informations et/ou documents du Bénéficiaire, le Tribunal d’arbitrage fixera une audience par voie de conférence téléphonique pendant laquelle les parties seront présentes et pourront faire valoir leur point de vue au Tribunal. Cette façon de procéder a été acceptée par la représentante du Bénéficiaire, de même que par l’Administrateur et l’Entrepreneur.»

[8]           Dans le délai imparti à la décision interlocutoire, la mandataire du Bénéficiaire a transmis au Tribunal d'arbitrage ce qu'elle considérait être les moyens de contestation de celui-ci, la description des faits mis en preuve sur la question d'irrecevabilité et les représentations en droit sur la question. En fait, le Bénéficiaire demande de rejeter la requête ou le moyen d'irrecevabilité. Le document transmis par le Bénéficiaire se lit intégralement comme suit:

«Baie-Comeau, le 20 janvier 2012

Ayant pris connaissance du document 'Arbitrage en vertu du règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs. En date du 8 décembre 2012 et la conférence téléphonique du 6 décembre 2012.

Ma décision est: de rejeté la requête et vous me demander des explications à cette décision, donc voilà comme suit;

Nous avons fait l'acquisition d'une belle maison avec le Constructeur de maisons modulaires de QUALITÉ SUPÉRIEURE Prof ab. Nous avons toute mis notre confiance en eux. Moi Guylaine Tremblay étant conjointe de Michel Girard et mandataire, Michel n'ayants les compétences intellectuel pour prendre des décision et évaluer les plans concernant la maison et moi n'ayant pas les compétences non plus nécessaire pour évaluer les plans, tous sais fait en longue distance. La compagnie savait très bien ce que nous voulions, sinon on ne serait pas aujourd'hui à défendre nos droits en quoi que ce soit.

Sans oublie tous les inconvénients et tracas que sa cause a toute la famille.

Nous sommes très déçu de la tournure des éléments en espérent que tout va rentrer dans l'ordre.

En attente de vos nouvelles.

Guylaine Tremblay

1256 Louis-Amiot

Baie-Comeau G5C 0A2».

[9]           À la suite de ce courriel, l'arbitre soussigné s'est adressé au Bénéficiaire, de même qu'à sa mandataire, Mme Guylaine Tremblay, avec copie à l'Entrepreneur et à l'Administrateur, afin de réitérer le contenu de la décision interlocutoire et accorder un délai additionnel au Bénéficiaire pour qu'il fasse valoir ses prétentions. Plus particulièrement, ce nouvel avis au Bénéficiaire se lisait comme suit:

«Madame Tremblay, Monsieur Girard,

 

Je fais suite à votre transmission du 20 janvier dernier, laquelle faisait suite à la décision interlocutoire rendue par le soussigné en date du 8 décembre 2011.

 

Auriez-vous l'amabilité de bien vouloir décrire, comme requis à cette décision, la trame factuelle expliquant la contestation de la décision préliminaire formulée par l'Administrateur, soit celle à l'effet que les Bénéficiaires, dont vous-mêmes, ont outrepassé le délai de trente (30) jours prévu au Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs pour formuler une demande d'arbitrage après la décision de l'Administrateur. Comme mentionné au paragraphe 5 de la décision interlocutoire, plus de quatre (4) mois se sont passés entre le moment où la demande d'arbitrage a été formulée et la décision de l'Administrateur que vous attaquez en arbitrage. Cette trame factuelle permettra aux parties, lors d'une conférence téléphonique sur la question de l'objection préliminaire, de débattre équitablement de la question étant entendu que si cette objection de l'Administrateur est accueillie, la demande d'arbitrage sera rejetée.

 

Le soussigné vous laisse donc une période additionnelle de dix (10) jours, à compter de la réception de la présente, pour transmettre au Tribunal d'arbitrage, de même qu'aux autres parties, la trame factuelle pour expliquer ce délai accompagnée de tout document que vous jugeriez pertinent à communiquer à l'appui de vos prétentions dans le cadre de cette objection préliminaire.

 

Évidemment, je réitère la possibilité que vous soyez représentés par avocat si vous le désirez, tant au niveau de la trame factuelle que des représentations à venir dans le cadre de la prochaine audience téléphonique pendant laquelle le Tribunal entendra les parties et, par la suite, tranchera la question de l'objection préliminaire soulevée par l'Administrateur.

 

Le soussigné place donc ce dossier en suspens pour quelques jours dans l'attente de votre prochaine communication.

 

Veuillez agréer, Madame, Monsieur, l'expression de mes sentiments distingués.

 

 

Beauvais Truchon, s.e.n.c.

 

 

                        Reynald Poulin, arbitre

RP/cg     

c.c.   Groupe Pro-Fab inc. / Les résidences P.F.

         Me Avelino De Andrade (La Garantie Qualité Habitation)»

[10]        Dès la réception de cette lettre, le Bénéficiaire a demandé, non pas dix (10) jours mais trente (30) jours pour répondre au Tribunal, ce qui lui fut consenti par le soussigné.

[11]        Le 9 février 2012, le Bénéficiaire a communiqué au Tribunal d'arbitrage les faits pertinents à l'objection préliminaire, soit ce qu'il considérait être les explications du délai de quatre (4) mois s'étant écoulé entre la décision de l'Administrateur et la demande d'arbitrage.

[12]        Tel que mentionné au paragraphe 9 de la décision interlocutoire du 8 décembre 2011, le Tribunal d'arbitrage a fixé une audience par voie de conférence téléphonique pendant laquelle les parties devaient être présentes afin de faire valoir leur point de vue au Tribunal avec les explications et/ou représentations additionnelles, le cas échéant. Tel que confirmé à cette décision interlocutoire, cette façon de procéder a été acceptée par la représentante du Bénéficiaire, de même que par l'Administrateur et l'Entrepreneur.

[13]        Ainsi, après que cette audience eût été fixée au 18 avril 2012, celle-ci a dû être annulée à la demande du Bénéficiaire pour être fixée, à nouveau, deux (2) jours plus tôt, soit le 16 avril 2012 à 10h00.

[14]        Malheureusement et pour des raisons expliquées par les parties, cette conférence téléphonique n'a pas pu se tenir.

[15]        Une autre audience a été fixée pour que soient mis en preuve les faits pertinents à l'objection préliminaire par chacune des parties. Cette audience a été tenue le16 mai 2012 et les représentants de chacune des parties ont fait valoir leur point de vue à cette occasion. À cette audience, le Bénéficiaire s'était engagé à transmettre copie de certains courriels au Tribunal d'arbitrage et ce, dans les jours suivants.

[16]        Le 29 mai 2012, le soussigné a demandé au Bénéficiaire, de même qu'à sa mandataire, de communiquer copie desdits courriels suite à quoi, le 30 mai 2012, la mandataire du Bénéficiaire a requis la transmission d'un document de «35 pages» qui «parlait d'une inspection».

[17]        Le 4 juin 2012, le Tribunal a réitéré sa demande de communication de documents, comme il avait été requis du Bénéficiaire de ce faire lors de l'audience le 16 mai 2012, et référé le Bénéficiaire à la pièce A-2 du Cahier de l'Administrateur, lequel inclut le rapport de conciliation du 5 mai 2011, document de «35 pages» que le Bénéficiaire recherchait par l'entremise de son dernier courriel. Le 6 juin 2012, ce rapport de conciliation du 5 mai 2011 lui a été communiqué par le Tribunal.

[18]        Or, les 7, 8 et 9 juin 2012, le Bénéficiaire a communiqué copie des courriels requis, soit ceux du 7 juin 2011 adressé à l'Entrepreneur, du 28 août 2011communiqué à l'Entrepreneur et copie d'une lettre ou d'un courriel daté du 13 septembre 2011, communiqué, une fois de plus, à l'Entrepreneur.

[19]        Compte tenu de ce qui précède, le Tribunal, par une lettre datée du 13 juin 2012, a avisé les parties que l'objection préliminaire de l'Administrateur était prise en délibéré et qu'une décision suivrait à ce sujet sous peu.

I- Le contrat de construction et les réclamations du           Bénéficiaire

[20]        Les pièces A-4 et A-10 se retrouvant à l'inventaire des pièces communiquées par l'Administrateur Qualité Habitation font évidemment partie intégrante du dossier d'arbitrage. De plus et tel que reconnu par les parties lors de l'audience, les documents transmis par le Bénéficiaire à l'organisme d'arbitrage SORECONI font également partie de ce dossier d'arbitrage. Le Tribunal référera à ces documents dans le cadre de la présente décision arbitrale.

[21]        Le Bénéficiaire et l'Entrepreneur sont intervenus à un «Contrat d'entreprise et contrat de garantie obligatoire de maison neuve» (pièce A-9) le 10 juillet 2009 en vue de la construction d'un bâtiment résidentiel au 1256, Louis-Amy      ot, en la ville de Baie-Comeau. Les parties avaient prévu une date de réception par le Bénéficiaire le 30 décembre 2009.

[22]        Or, un «Formulaire d'inspection préréception» (pièce A-10) a été complété par les parties concernant le bâtiment résidentiel. Une fois de plus, la fin des travaux était prévue pour la fin décembre 2009. À ce document, les parties ont fait plusieurs annotations dont il n'est pas utile, à ce stade-ci du dossier, de traiter.

[23]        Par une lettre datée du 10 mars 2010, le Bénéficiaire, par l'entremise de sa mandataire Mme Guylaine Tremblay, a fait parvenir à l'Entrepreneur une lettre requérant l'exécution de plusieurs travaux au bâtiment résidentiel. Par un courriel daté du 23 mars 2010, et produit comme pièce A-6 au dossier d'arbitrage, l'Entrepreneur répondait au Bénéficiaire concernant les nombreuses demandes de celui-ci.

[24]        Selon le dossier (décision A-2 et pièce A-7), la lettre du Bénéficiaire datée du 10 mars 2010aurait été transmise, cette fois, à l'Administrateur, le 2 juin 2010. Le 11 juin 2010, le Bénéficiaire, par l'intermédiaire de son procureur Me Jean-Claude Dufour, a transmisla lettre produite au dossier comme pièce A-4, à l'Entrepreneur seulement. Selon la lettre produite comme pièce A-5, l'Entrepreneur aurait mandaté son procureur pour répondre, en date du 18 novembre 2010, au procureur du Bénéficiaire (qui semble avoir transmis une lettre en date du 3 novembre 2010 à l'Entrepreneur dont copie n'a pas été produite au dossier d'arbitrage). Par cette lettre du procureur de l'Entrepreneur, le Bénéficiaire était invité à produire une réclamation auprès de Qualité Habitation, organisme accrédité en vertu du Règlement sur la garantie des bâtiments résidentiels neufs. Selon le dossier, le procureur du Bénéficiaire semble avoir transmis cette lettre A-5 à l'Administrateur le 29 novembre 2010. De même, il appert de la pièce A-4 que la lettre du procureur du Bénéficiaire datée du 11 juin 2010 aurait été transmise à l'Administrateur le 22 décembre 2010.

[25]        Toujours selon le dossier, et plus particulièrement au document produit comme pièce A-3, l'Administrateur aurait reçu, en date du 22 février 2011, la demande de réclamation du Bénéficiaire datée du 10 mars 2010.

[26]        Toutes ces dates et interventions sont importantes aux fins de la décision que doit rendre le Tribunal puisque l'on peut constater que le Bénéficiaire a formulé plusieurs demandes personnellement (ou par sa mandataire) et même par la voie de son procureur. De même, l'Entrepreneur a également répondu, du moins selon lui, aux demandes du Bénéficiaire et a même mandaté son procureur pour qu'il donne la réplique à celui du Bénéficiaire. Quant à l'Administrateur, celui-ci a reçu les 2 juin 2010 et 22 février 2011 les demandes de réclamation du Bénéficiaire.

[27]        Le 24 février 2011, M. Martin Gignac, conciliateur chez l'Administrateur Qualité Habitation, s'est rendu au bâtiment résidentiel du Bénéficiaire pour procéder à une inspection des lieux.

[28]        Le 30 mars 2011, le Bénéficiaire s'est enquéri auprès de l'Administrateur afin de connaître la date de la décision à être rendue. Le 13 avril 2011, M. Martin Gignac, représentant de l'Administrateur, a répondu au Bénéficiaire que la décision allait suivre dans les jours suivants.

[29]        Par une décision du 5 mai 2011 produite comme pièce A-2 au dossier, l'Administrateur a répondu aux quarante-deux (42) demandes de réclamation soulevées par le Bénéficiaire dans ce dossier. À la révision préliminaire de cette décision, certaines réclamations ont été retenues et d'autres rejetées parce qu'elles ne rencontraient pas, selon l'Administrateur, le critère de «vice caché», étaient non visiblesà l'inspection, présentes à la livraison et non dénoncées, étaient le résultat du comportement normal des matériaux et/ou exclues du Plan de garantie. Certaines réclamations ont aussi été abandonnées par le Bénéficiaire lors de cette inspection.

[30]        Cette décision comportait, à sa page 34, qu'elle pouvait être soumise à l'arbitrage dans les trente (30) jours de sa réception.

 

[31]        Lors de l'audience téléphonique du 16 mai 2012, la mandataire du Bénéficiaire, M. Michel Girard (lequel n'a pas assisté à l'audience), a informé le Tribunal que seuls les événements suivants étaient survenus entre la date de la décision de l'Administrateur et la demande d'arbitrage formulée à SORECONI. La mandataire du Bénéficiaire a témoigné à l'effet qu'elle aurait transmis un courriel en date du 7 juin 2011 à l'Entrepreneur. Ce courriel ayant été transmis au Tribunal, nous pouvons constater qu'il requérait la transmission de la promesse d'achat pertinente à l'immeuble. Le 22 août 2011, le Bénéficiaire a aussi transmis une nouvelle mise en demeure à l'Entrepreneur concernant d'autres «anomalies» affectant sa résidence en accordant dix (10) jours pour y répondre.La mandataire du Bénéficiaire a aussi témoigné à l'effet qu'un autre courriel avait été transmis le 28 août 2011à l'Entrepreneur. Ce courriel a aussi été transmis au Tribunal lequel visait l'ajout d'une sixième «anomalie», non visée par la mise en demeure du 22 août 2011.

[32]        Le 13 septembre 2011, le Bénéficiaire a transmis à M. Gignac, l'auteur de la décision A-2, copie de la mise en demeure datée du 22 août 2011. Cette même journée, le Bénéficiaire semble avoir, une fois de plus, transmis à l'Entrepreneur une mise en demeure concernant les mêmes «anomalies» que celles décrites à la mise en demeure du22 août 2011 en plus d'en ajouter certaines autres.

[33]        Le 21 septembre 2011, le Bénéficiaire a transmis à la représentante de SORECONI une série de documents dont, notamment, une «demande de contestation» qui se lit comme suit:

«Baie-Comeau, le 21 Aout 2011.

Soreconi

1155 ouest, boul. René Lévesque, bureau 2500

Montrel (Québec)  H3B 2K4

            OBJET: Contestation du dossier 64313

A qui de droit,

Je vous envoi ce document pour contester le rapport de conciliation par la Garantie Qualité Habitation au bénéficiaire Michel Girard demeurant au 1256 Louis-Amyot Baie-Comeau (Québec) G5C 0A2 au numéro de dossier 64312 et le numéro de conciliation 3356.

Bien a vous!

Guylaine Tremblay pour Michel Girard (Bénéficiaire)

(418) 589-0573»

[34]        Cet organisme d'arbitrage a répondu la journée même à cette «demande de contestation du bénéficiaire» en demandant copie de la décision de l'Administrateur.

[35]        Par la suite, le soussigné a été désigné comme arbitre dans ce dossier.

[36]        Ceci est l'état de la preuve factuelle concernant particulièrement les événements postérieurs à la décision de l'Administrateur. Dans son témoignage, la mandataire du Bénéficiaire a clairement mentionné n'avoir aucun autre fait à soulever au Tribunal pour expliquer le délai de plus de quatre (4) mois entre la date de la décision de l'Administrateur et la demande d'arbitrage.

II- Objection préliminaire

[37]        Tel que mentionné précédemment, l'Administrateur a formulé une objection préliminaire à la demande d'arbitrage du Bénéficiaire en ce que celui-ci aurait fait défaut de respecter les dispositions de l'article 19 du Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs qui prévoit que le Bénéficiaire insatisfait d'une décision de l'Administrateur doit, pour que la garantie s'applique, soumettre le différend à l'arbitrage dans les trente (30) jours de la réception par poste recommandée de la décision de l'Administrateur.

[38]        Selon la preuve documentaire au dossier, une période de quatre mois et demi (4½) s'est écoulée entre la date de la décision de l'Administrateur A-2 et la demande d'arbitrage du Bénéficiaire. La mandataire du Bénéficiaire a admis avoir reçu la décision de l'Administrateur le 5 mai 2011, soit à la date même où cette décision a été rendue. Ce qui précède est également confirmé à la première page de cette décision puisque celle-ci aurait été transmise par courriel à la destinataire. De plus, jamais il n'a été invoqué par le Bénéficiaire qu'il n'a pas reçu cette décision la même journée qu'elle a été rendue de sorte que le délai de trente (30) jours est clairement dépassé dans la présente affaire.

            III- DÉCISION

[39]        Le Tribunal doit donc décider si le non-respect du délai de trente (30) jours pour formuler une demande d'arbitrage par le Bénéficiaire lui est fatal en l'instance.

[40]        Comme les tribunaux supérieurs et les tribunaux d'arbitrage chargés de l'application du Règlement sur le plan de garantie l'ont décidé à maintes reprises, le délai prévu à l'article 19 du Règlement sur le plan de garantie n'est pas de rigueur ni de déchéance et un arbitre peut le proroger si les circonstances le justifient. Telle est la règle de droit applicable à ce type de délai. Au surplus, l'arbitre, ayant statué sur une demande de prorogation de délai, peut également faire appel à l'équité lorsque les circonstances le justifient et ce, conformément à l'article 116 du Règlement sur le plan de garantie.

[41]        En fait, le Bénéficiaire doit démontrer au Tribunal qu'il a des motifs suffisants pour que lui soit permis de porter la décision de l'Administrateur en arbitrage après le délai de trente (30) jours. Considérant l'outrepassement de ce délai, le Bénéficiaire a donc le fardeau de démontrer qu'il serait justifié de lui permettre de demander l'arbitrage.

[42]        Le procureur de l'Administrateur a cité deux (2) décisions[1]au Tribunal justifiant, selon lui, le rejet de la demande d'arbitrage sur la base du non-respect du délai de trente (30) jours. À la lecture de ces décisions, les principes décrits précédemment ont été mis en application par les arbitres ayant statué sur ce genre d'objection préliminaire.

[43]        Un bénéficiaire a donc le fardeau de la preuve de convaincre le Tribunal de lui permettre de porter en arbitrage une décision malgré que plusieurs mois se soient passés après celle-ci, soit, en l'instance, plus de quatre (4) mois.

[44]        Or, dans le présent cas, la preuve est clairement déficiente à ce sujet.

[45]        En effet, le Tribunal a pu constater que le Bénéficiaire en plus d'agir par sa mandataire, a même mandaté un procureur pour voir au respect des droits qu'il invoque. En effet, tant avant qu'après la décision de l'Administrateur dans le présent dossier, le Bénéficiaire a fait état promptement de ses demandes et même requis, par la voie de son procureur, des interventions de l'Entrepreneur sous peine de recours judiciaires à venir. De même, on peut constater que le Bénéficiaire était en attente de la décision A-2, requérant même, de l'Administrateur, la transmission d'une date de dépôt de cette décision.

[46]        Tel que vu précédemment, le Bénéficiaire et les autres parties ont été requis de communiquer au Tribunal les faits qui pourraient permettre à ce dernier de décider de relever le Bénéficiaire du défaut d'avoir respecté le délai prévu à la Loi pour porter une décision d'un Administrateur en arbitrage.

[47]        Les faits mis en preuve par le Bénéficiaire, notamment par le courriel daté du 7 février 2012 adressé à l'arbitre soussigné, et par les documents transmis après demande du Tribunal en ce sens ne peuvent permettre au Bénéficiaire d'être relevé de son défaut.La mandataire du Bénéficiaire n'a mis en preuve aucun fait ni aucune explication pour justifier ce délai non respecté. Bien plus, à la lumière des écrits à ce dossier, émanant tant de la mandataire du Bénéficiaire que du procureur de ce dernier, force est de constater qu'il y a eu renonciation à demander l'arbitrage de la décision en privilégiant probablement des procédures devant d'autres instances. Le Bénéficiaire a été avisé de l'existence de ce délai tant par la Loi applicable que par le texte même de la décision de l'Administrateur à la page 34 de celle-ci.

[48]        Par conséquent, le Tribunal n'a d'autre alternative que de constater que le Bénéficiaire a manqué de diligence concernant le respect de ce délai et qu'il a plutôt choisi de continuer ses réclamations à l'encontre de l'Entrepreneur en renonçant à demander l'arbitrage pendant quelques mois. Ce choix ne peut malheureusement porter préjudice à l'Administrateur qui est en droit d'invoquer le non-respect d'un délai connu par le Bénéficiaire et dont le dépassement n'a aucunement été expliqué.

[49]        Évidemment, la présente décision est rendue dans le cadre d'une demande d'arbitrage de la décision de l'Administrateur et ne lie aucunement le Bénéficiaire quant à tout autre recours dont il pourrait bénéficier devant les tribunaux de droit commun, le cas échéant.

[50]        À la suggestion du procureur de l'Administrateur, celui-ci assumera les frais de l'arbitrage.

POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL D'ARBITRAGE:

[51]        ACCUEILLE l'objectionpréliminaire du procureur de l'Administrateur et DÉCLARE irrecevable la demande d'arbitrage formulée par le Bénéficiaire dans le présent dossier;

[52]        LE TOUT avec les frais à l'encontre de l'Administrateur.

 

 

 

Québec, le 28 juin 2012

 

 

 

                                                                     ____________________________________

                                                                     Me Reynald Poulin

                                                                     Arbitre / Société pour la Résolution de Conflits inc. (SORECONI)



[1]Patrick Poitras et 9139-3454 Québec inc. et La Garantie Abritat inc., 11 mai 2011, dossier no 2011-11-002, Jean Morissette,                arbitre (7 mois de délai)

   Louison Fortin et Guy Lessard et Construction Gilles Rancourt et fils inc. et La Garantie de des bâtiments résidentiels neufs de           l'APCHQ inc., 1er août 2011, dossier no 2011-04-002, Claude Dupuis, ing., arbitre (19 jours de retard)