ARBITRAGE EN VERTU DU RÈGLEMENT SUR LE PLAN DE GARANTIE DES BÂTIMENTS RÉSIDENTIELS NEUFS
(Décret 841-98 du 17 juin 1998)
Organisme d’arbitrage autorisé par la Régie du bâtiment : SORECONI
ENTRE : SYNDICAT DE COPROPRIÉTÉ 7000 CHEMIN CHAMBLY
(ci-après le « Bénéficiaire »)
ET : LANDRY & PÉPIN CONSTRUCTION INC.
(ci-après l’ « Entrepreneur »)
ET : LA GARANTIE DES BÂTIMENTS RÉSIDENTIELS NEUFS DE L’APCHQ INC.
(ci-après l’« Administrateur »)
No dossier SORECONI: 080424001
No bâtiment: 041628-1
SENTENCE ARBITRALE
Arbitre : Me Michel A. Jeanniot
Pour les Bénéficiaires : Monsieur Sammy Val
Madame Annie Leclerc
Pour l’Entrepreneur : Monsieur André Pépin
Pour l’Administrateur : Me Luc Séguin
Marc-André Savage, T.P.
Date d’audience : 23 octobre 2008
Lieu d’audience : 1010, rue de la Gauchetière Ouest
Bureau 950
Montréal (Québec) H3B 2N2
Date de la sentence : 17 novembre 2008
Identification complètes des parties
Bénéficiaires : Monsieur Sammy Val
Madame Annie Leclerc
Syndicat copropriété 7000 Chemin Chambly
7000, Chemin Chambly
Condo 202
Saint-Hubert (Québec) J3Y 3R5
Entrepreneur: Monsieur André Pépin
Landry & Pépin Construction Inc.
825, rue Bellerive
Bureau 100
Longueuil (Québec) J4J 1A5
Administrateur : La garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ Inc.
5930, boul. Louis-H. Lafontaine
Anjou (Québec) H1M 1S7
Et son procureur :
Me Luc Séguin
Savoie Fournier
Décision
L’arbitre a reçu son mandat de SORECONI le 30 mai 2008.
3 mars 2003 : Déclaration de copropriété;
10 septembre 2003 : Liste préétablie d’éléments à vérifier et réception des parties communes;
5 novembre 2007 : Lettre du Bénéficiaire à l’Entrepreneur, photographies et documents joints;
3 décembre 2007 : Demande de réclamation;
12 décembre 2007 : Avis de 15 jours de l’Administrateur à l’Entrepreneur et récépissé postal;
17 mars 2008 : Décision de l’Administrateur et récépissés postaux;
24 avril 2008 : Demande d’arbitrage;
22 mai 2008 : Nomination de l’arbitre;
26 mai 2008 : Lettre de l’arbitre aux parties les informant du processus de l’arbitrage;
25 août 2008 : Lettre de l’arbitre aux parties fixant la séance d’arbitrage au 23 octobre 2008 au bureau du soussigné.
Après avoir pris connaissance des procédures, entendu la preuve et les arguments des parties, le tribunal d’arbitrage rend la décision suivante :
Objections préliminaires :
[1] Avant le début de l’enquête, le soussigné s’est assuré qu’aucune objection préliminaire n’est formulée par quelque partie que ce soit, constate que juridiction lui est acquise et l’enquête débute à 9h30 a.m. au bureau du soussigné.
Admissions :
[2] Les parties font les admissions suivantes :
[2.1] L’adresse du bâtiment est 7000, Chemin Chambly (Condos 101 à 402), à Longueuil, arrondissement Saint-Hubert, Québec;
[2.2] Il s’agit d’unités résidentielles détenues en copropriété;
[2.3] La réception des parties communes du bâtiment eut lieu le ou vers le 10 septembre 2003;
[2.4] La première réclamation écrite a été reçue par l’Administrateur le 5 décembre 2007;
[2.5] Une inspection a été effectuée le 21 février 2008;
[2.6] Il s’agit d’une décision unique de l’Administrateur datée du 17 mars 2008 laquelle comporte six (6) points. L’Administrateur n’a considéré aucun des points (1 à 6) dans le cadre du contrat de garantie.
Discussion:
[3] Afin de faciliter lecture, repérage et compréhension, le soussigné identifie les différents chapitres de la présente décision en fonction de la chronologie des points en litige tel qu’ils se retrouvent dans la décision précitée de l’Administrateur.
Point numéro 1 - panneau incendie
[4] Le Bénéficiaire suggère que le panneau du réseau avertisseur d’incendie est non-conforme aux normes.
[5] Les accises de ce poste de réclamation reposent sur le fait que le Bénéficiaire a fait procéder à une inspection du système et comme résultante de cette inspection, a reçu une soumission (numéro S27137 datée du 20-09-2007 de l’entreprise Prévention Incendie S.F. Safety First, pièce B-4) qui lui suggérait, entre autres, une modification au panneau d’incendie zone 1.
[6] Le Bénéficiaire ne sait pas en quoi le panneau ne serait pas conforme aux normes, il présume de la bonne foi de l’auteur de la pièce B-4 qui lui suggère de changer le panneau d’incendie et il en déduit que c’est parce que, en toute probabilité, il y a déficience(s). La pièce B-4 ne révèle pas pourquoi le panneau doit être changé, la soumission n’indique pas pourquoi ce panneau doit être remplacé et/ou s’il existe des alternatives au remplacement.
[7] Je rappelle que le Bénéficiaire est en demande et qu’à cet effet, c’est ce dernier qui a le fardeau de convaincre. Sans que ce fardeau lui soit indu, il doit néanmoins démontrer en quoi la décision de l’Administrateur est « incorrecte ».
[8] En absence d’une preuve et/ou d’une démonstration à l’effet contraire, le Bénéficiaire n’a pas réussi à me convaincre que la décision de l’Administrateur doit être réformée.
[9] Je ne pourrai donner droit à la demande du Bénéficiaire quant à ce point.
Point numéro 2 - joints de calfeutrant aux fenêtres
[10] Le Bénéficiaire nous informe, séance tenante, que depuis la décision du 17 mars 2008, ce dernier a contracté et/ou fait refaire le calfeutrant autour des fenêtres.
[11] Le Bénéficiaire (à l’origine) avait dénoncé le fendillement, le craquement et dans certains cas, l’absence de calfeutrant autour des fenêtres.
[12] L’Administrateur représente que bien qu’il ait pu observer que certaines fenêtres présentaient ce problème (joints fendillés et dans certains cas, absence de calfeutrage), il refuse de reconnaître ce point. Il justifie sa décision comme suit :
[12.1] il s’agit soit de réparation de malfaçons existantes et possiblement non apparentes (visée aux articles 2113 et 2120 C.c.Q.) découvertes plus d’une année qui suit la réception du bâtiment ou alternativement;
[12.2] il s’agit d’éléments qui furent dénoncés dans la cinquième année de garantie et cette situation doit rencontrer les éléments prévus à l’article 27.5 du règlement lequel fait référence à l’article 2118 C.c.Q., lequel nous savons, requiert qu’il doit y avoir une situation qui risque d’emporter la perte de l’ouvrage.
[13] Avec respect pour toute opinion à l’effet contraire, aucune démonstration ne m’a été faite à l’effet que les critères de l’article 2118 C.c.Q. ont été rencontrés.
[14] Il est de plus probable que, et à tout le moins, quant aux fendillement et craquement des calfeutrant aux fenêtres, il s’agit de réparations rendues nécessaires par un comportement normal des matériaux ou une dégradation résultant de l’usure normale de la chose, deux éléments qui sont d’ailleurs exclus de la garantie[1].
[15] D’ailleurs et indépendamment de la qualification donnée par le soussigné quant à la nature et/ou du niveau de gravité, quant au fendillement et au craquement (ou absence) de calfeutrant autour des fenêtres, la preuve est à l’effet que la situation était connue du Bénéficiaire le 20 octobre 2004 (pièce B-5).
[16] Je rappelle que la première réclamation écrite reçue de l’Administrateur était en date du 5 décembre 2007 soit bien à l’extérieur d’un délai raisonnable lequel nous le savons, ne peut excéder six (6) mois, ou en cas de vice ou perte graduelle, de leur première manifestation.
[17] La jurisprudence arbitrale (sous l’égide du Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs) et l’état du droit tel que dicté par les tribunaux de droit commun est claire.
[18] À cet effet, je ferai miens les propos de notre collègue et arbitre Me Jean Philippe Ewart :
« En résumé, la dénonciation prévue à l'article 10 du Règlement se doit d'être par écrit, est impérative et essentielle, le délai de six mois prévu au même article emporte et est un délai de déchéance, et si ce délai n'est pas respecté, le droit des Bénéficiaires à la couverture du plan de garantie visé et au droit à l'arbitrage qui peut en découler sont respectivement éteints, forclos et ne peuvent être exercés. »[2]
[19] Une des conséquences de la déchéance de la perte ou forclusion d’exercice d’un droit particulier, tel que dans le cas sous étude est le fait que le droit du Bénéficiaire de requérir la couverture du plan de garantie n’est pas sujet aux dispositions de la suspension ou de l’interruption de la prescription applicable dans le cas des présentes. En situation de déchéance, le droit s’éteint dès que la période est expirée. Le titulaire du droit de ce fait ne peut même plus invoquer celui-ci par voie d’exception.
[20] Tenant compte de ce qui suit, il n’est pas nécessaire de répondre en détails à tout autre volet ou moyen soulevé.
[21] Il s’agit d’un délai de déchéance et pour toute ces raisons, je ne pourrai donner suite à la demande du Bénéficiaire quant à ce point.
Point numéro 3 - infiltration d’eau
[22] Je relève de la preuve que la première survenance et/ou la première manifestation de cette infiltration remonte à septembre 2006. Certains travaux auraient alors été adressés par l’Entrepreneur. Ces travaux appert ne pas avoir été la solution finale puisque l’Entrepreneur a dû à nouveau adresser des travaux un an plus tard.
[23] La preuve révèle de plus que, et bien que l’Entrepreneur ait été avisé de la situation, le Bénéficiaire a fait défaut de dénoncer à l’Administrateur dans un délai raisonnable lequel, nous le savons, ne peut excéder six (6) mois à défaut, de la découverte ou survenance, de la première manifestation pour les motifs ci-haut exprimés au paragraphe [16], je ne pourrai donner suite à la demande du Bénéficiaire quant à ce point.
Point numéro 4 - sortie des échangeurs d’air
Point numéro 5 - bloc de ciment
[24] La preuve révèle qu’un changement apporté quant à l’emplacement d’échangeur d’air a résulté la présence d’ouverture inutile au balcon arrière.
[25] À nouveau, il s’agit d’éléments qui furent dénoncés dans la cinquième année de garantie et conséquemment, il doit s’agir d’une situation qui rencontre les éléments prévus à l’article 27.5 du Règlement lequel, nous le savons, fait référence à l’article 2118 du Code civil du Québec.
[26] Aucune démonstration ne m’a été faite à l’effet que les critères de l’article 2118 du Code civil du Québec ont été rencontrés.
[27] Il s’agit de plus d’une situation connue par le Bénéficiaire depuis le ou au moins le 20 octobre 2004 tel qu’en fait foi une annexe à la liste de déficiences produite par le Bénéficiaire sous la cote B-5 et dénoncée par écrit pour une première fois à l’Administrateur le 5 décembre 2007.
[28] Pour les motifs ci-haut repris au paragraphe [16], je ne pourrai donner suite à la demande du Bénéficiaire quant à ces points.
Point numéro 6 - joints ouverts au plafond
[29] Depuis le dépôt de la demande d’arbitrage, des travaux ont été adressés, la situation a été corrigée, le Bénéficiaire retire (et/ou se désiste) ce point du présent arbitrage.
[30] La loi et le règlement ne contiennent pas de clauses privatives complètes. L’arbitre a compétence exclusive, sa décision lie les parties et elle est finale et sans appel[3]. Enfin, l’arbitre doit statuer « conformément aux règles de droit ». Il fait aussi appel à l’équité lorsque les circonstances le justifient[4].
[31] Je rappelle que le tribunal d’arbitrage a été créé par le Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs pour en assurer l’application. Il ne peut décider de litiges qui relèvent de l’application d’autres lois même s’il peut penser que d’autres lois pourraient s’appliquer au présent litige et je rappelle de plus qu’il ne s’agit pas de déterminer la responsabilité de l’Entrepreneur mais bien de déterminer si l’Administrateur doit considérer un point dans le cadre du contrat de garantie.
[32] À titre d’arbitre désigné, le soussigné est autorisé par la Régie du bâtiment à trancher tout différend découlant du plan de garantie[5]. Bien que ceci inclut toutes questions de faits, de droit et de procédures, les éléments de la présente décision doivent prendre souche dans le plan de garantie.
[33] Je précise que le tout est sans préjudice et sous toutes réserves du droit qui est sien (le Bénéficiaire) de porter devant les tribunaux civils ses prétentions ainsi que de rechercher les correctifs qu’il réclame, sujet bien entendu, aux règles de droit commun et de la prescription civile.
[34] En vertu de l’article 123 du Règlement et vu que le Bénéficiaire n’a pas obtenu gain de cause sur aucun des points, les coûts sont partagés entre le Bénéficiaire et l’Administrateur.
[35] En conséquence, les frais de l’arbitrage aussi bien en droit qu’en équité selon les articles 116 et 123 du Règlement seront partagés entre le Bénéficiaire (pour la somme de 50,00 $ plus les taxes applicables) et l’Administrateur du plan de garantie (pour la balance du coût des frais d’arbitrage).
POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL D’ARBITRAGE :
REJETTE la demande d’arbitrage du Bénéficiaire;
MAINTIENT la décision de l’Administrateur rendue le 17 mars 2008 sous la plume de Monsieur Marc-André Savage.
LE TOUT avec frais à être départagés entre le Bénéficiaire pour la somme de 50,00 $ plus les taxes applicables et l’Administrateur pour la balance du coût du présent arbitrage.
Montréal, le 17 novembre 2008
_______________________
Me Michel A. Jeanniot
Arbitre / SORECONI
[1] Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs, L.R.Q., c. B-1.1, r. 0.2, art. 29.2.
[2] Apollonatos et al. c. Habitations Luxim Inc. et al., CCAC, S08-112801-NP, rendue le 4 juin 2008, par. 54.
[3] Supra, note 1, art. 2, 20, 106 et 120.
[4] Ibid, art. 116.
[5] Supra, note 1, art. 83.1.