Société pour la résolution des conflits Inc.
Plan de Garantie no : 005113 Dossier : 050829001
Bénéficiaires-Demandeurs
-c-
Le Rocca & Rinollini Constructions Inc.
Entrepreneur-Défendeur
-et-
La Garantie des bâtiments résidentiels de l’APCHQ Inc.
Administrateur de la Garantie
ARBITRAGE EN VERTU DU RÈGLEMENT SUR LE PLAN DE GARANTIE DES BÂTIMENTS RÉSIDENTIELS NEUFS
(Décret 841-98 du 17 juin 1998)
Arbitre
Me Michel A. Jeanniot
2, Place Alexis Nihon
Suite 1000
Montréal (Québec)
H3Z 3C1
Identification des parties
Bénéficiaires : Monsieur Giuseppe Zito &
Madame Antonia Diflorio
9017, rue Giovanni Caboto
St-Léonard (Québec)
H1P 3N8
Entrepreneur: La Rocca & Rinollini Constructions Inc.
12 145, 17e avenue
Montréal (Québec)
H1E 1Z6
Administrateur : La Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ Inc.
5930, boul. Louis-H. Lafontaine
Anjou (Québec)
H1M 1S7
Et son procureur :
Me François Laplante
(Savoie Fournier)
Décision
L’arbitre a reçu son mandat de SORECONI le 14 septembre 2005.
20 mai 1999 : Promesse d’achat du bâtiment;
1er novembre 1999 : Acte de vente du bâtiment;
5 septembre 2000 : Liste préétablie d’éléments à vérifier et réception du bâtiment;
5 mars 2004 : Mise en demeure des Bénéficiaires à l’Entrepreneur;
8 mars 2004 : Demande de réclamation des Bénéficiaires;
7 avril 2004 : Avis de 15 jours de l’Administrateur à l’Entrepreneur et récépissé postal;
7 juin 2004 : Rapport d’inspection du bâtiment de l’Administrateur et récépissés postaux;
14 juin 2004 : Décision rendue par l’Administrateur;
20 août 2004 : Demande de réouverture et/ou réévaluation des Bénéficiaires;
29 août 2005 : Demande d’arbitrage des Bénéficiaires;
30 août 2005 : SORECONI obtient copie du dossier relatif à la décision de l’Administrateur;
14 septembre 2005 : Nomination de l’arbitre;
16 septembre 2005 : Lettre de l’arbitre aux parties, les informant du processus à venir;
30 septembre 2005 : Convocation des parties à l’arbitrage;
6 octobre 2005 : Réception de l’arbitre du rapport d’inspection du bâtiment par l’inspecteur des Bénéficiaires;
14 octobre 2005 : Audience
Étaient présents pour les Bénéficiaires :
Madame Antonia Diflorio, Monsieur Giuseppe Zito et Monsieur Silverio Marzin. Ce dernier est ingénieur, témoin expert mandaté par les bénéficiaires et venu accompagné d’un rapport préparé sous sa plume et daté du 4 septembre 2005 (ci-après « le rapport Marzin »).
Était présent pour l’Entrepreneur :
Monsieur Pietro Rinollini
Étaient présents pour l’Administrateur :
Me François Laplante et Monsieur Michel Hamel.
[1] L’Administrateur, sous la plume de son procureur Me François Laplante, conteste la recevabilité de la demande d’arbitrage des Bénéficiaires. L’Administrateur plaide que la demande d’arbitrage a été formulée manifestement hors délai.
[2] Considérant la demande du procureur de l’Administrateur d’adresser les représentations d’usage sur leurs moyens d’irrecevabilité avant que débute l’enquête et audition sur le mérite des griefs des Bénéficiaires, il fut décidé, dans la collégialité, de scinder le processus en deux (2) volets; le premier devant adresser la question de recevabilité de la demande des Bénéficiaires; le second volet de bene esse afin de ventiler au mérite les griefs des Bénéficiaires.
Les faits pertinents à l’objection préliminaire :
[3] Fin septembre début octobre 1999, les Bénéficiaires emménagent et, à toutes fins pratiques, habitent le bâtiment objet de la garantie.
[4] Le 5 septembre 2000, les Bénéficiaires acceptent le bâtiment en déclarant par écrit qu’il est en état de servir à l’usage auquel on le destine sans autre commentaire et/ou précision quant à des éléments à achever, à corriger, à parachever et/ou à réparer.
[5] Le 5 mars 2004, les Bénéficiaires mettent en demeure l’Entrepreneur.
[6] Le 6 avril 2004, les Bénéficiaires formulent une demande de réclamation à l’Administrateur.
[7] Le 6 mai 2004, eu lieu une visite des lieux à laquelle était présents les Bénéficiaires, l’Entrepreneur, un représentant de l’Administrateur ainsi que Monsieur Silverio Marzin, ingénieur (expert mandaté par les Bénéficiaires).
[8] Le 7 juin 2004, l’Administrateur complète (par écrit) son rapport d’inspection concluant inter alia que « la garantie des maisons neuves de L’APCHQ ne peut considérer aucun des points soulevés par les Bénéficiaires ».
[9] Ce même 7 juin 2004, et sur une base volontaire, l’Entrepreneur initie des travaux et adresse ce qu’il (l’entrepreneur) considère être les travaux utiles et nécessaires à satisfaire les Bénéficiaires. Considérant la décision de l’Administrateur (du 7 juin), ces travaux effectués sur une base volontaire par l’Entrepreneur sont, et à juste titre, considérés hors-garantie.
[10] Les Bénéficiaires, séance tenante, admettent qu’ils ont reçu, lu et compris dle rapport d’inspection de l’Administrateur le 14 juin 2004.
[11] Les travaux volontaires de l’Entrepreneur sont finis aux alentours du 20 juin 2004 et les Bénéficiaires ne se prononcent pas immédiatement sur la qualité des travaux. Ces derniers décident d’attendre puisqu’ils sont d’opinion que seul le passage du temps saura démontrer si les travaux adressés par l’Entrepreneur les satisferont.
[12] Les Bénéficiaires témoignent ensuite à l’effet qu’ils ont observé de nouveaux affaissements de la dalle de béton du sous-sol, des interstices sous certaines divisions centrales du sous-sol et un certain dénivellement du plancher de céramique. Il est déclaré par les Bénéficiaires que ces constats furent faits le ou vers le 19 avril 2005. Il s’ensuit des discussions avec l’Entrepreneur, que ce dernier propose des solutions, mais qu’elles sont jugées cosmétiques et/ou inadéquates par les Bénéficiaires.
[13] Le 20 août 2005, les Bénéficiaires réclament par écrit à l’Administrateur, la réouverture et la réévaluation du dossier.
[14] Le 29 août 2005, les Bénéficiaires demandent (par écrit) l’arbitrage.
[15] Nous savons que l’article 19 du Règlement sur le Plan de Garantie des bâtiments résidentiels neufs (L.R.Q., C.B-1.1, ci-après le « Règlement ») indique qu’un Bénéficiaire (ou l’entrepreneur) insatisfait d’une décision de l’Administrateur de la Garantie des bâtiments résidentiels neufs doit, pour que la garantie s’applique, soumettre le différend à l’arbitrage dans les quinze (15) jours de la réception par la poste recommandée de la décision de l’Administrateur (à moins que le Bénéficiaire et l’Entrepreneur ne s’entendent pour soumettre dans ce même délai le différend à un médiateur choisi sur une liste dressée par le Ministre du Travail afin de tenter d’en arriver à une entente).
[16] Nous savons que le Règlement est d’ordre public.[1] Il fixe les modalités et les limites du plan de garantie ainsi que, pour ses dispositions essentielles, le contenu du contrat de garantie souscrit par les bénéficiaires de la garantie et il prévoit la procédure s’appliquant à toute réclamation faite en vertu du plan.
[17] L’arbitre désigné est autorisé par la Régie à trancher tout différend découlant des plans de garantie (article 83.1 de la Loi) ceci inclut toute question de procédure.
[18] La Loi et le Règlement ne contiennent pas de clause privative complète. L’arbitre a compétence exclusive, sa décision lie les parties et elle est finale et sans appel.[2] Enfin, l’arbitre doit statuer « conformément aux règles de droit »; il fait aussi appel à l’équité lorsque les circonstances le justifient.[3]
[19] Dans le présent dossier, les parties admettent que l’arbitre est saisi d’une question mixte de faits et de droits. En ce qui concerne l’appréciation des faits, il n’est pas contesté que :
A) La décision de l’Administrateur est datée du 7 juin 2004;
B) La décision de l’Administrateur fut reçue par les Bénéficiaires le 14 juin 2004;
C) Aucun différend ne fut (après le 14 juin 2004) soumis à un médiateur;
D) Les Bénéficiaires ont présenté une demande d’arbitrage en date du 29 août 2005.
[20] Au sein de son rapport d’inspection du 7 juin 2004, l’Administrateur dresse un (premier) constat à l’effet que :
« Les points ont été dénoncés par écrit après l’échéance de la garantie portant sur les vices cachés, dont la durée est de trois (3) ans à partir de la réception. Par conséquent, nous devons statuer sur ces points uniquement dans le cadre de l’article 3.4 du contrat de garantie. Or, nous sommes d’avis que les situations observées ne portent pas le niveau de gravité d’un vice majeur tel que défini au contrat de garantie. »
[21] Les Bénéficiaires séance tenante reconnaissent ce passage du rapport de l’Administrateur, se rappellent l’avoir lu et avoir compris sa signification, le tout de façon contemporaine au 14 juin 2004.
[22] Le délai de quinze (15) jours, à compter de la date où les Bénéficiaires ont acquis connaissance du rapport de l’Administrateur, est un délai de rigueur; l’arbitre peut néanmoins relever des conséquences de son retard la partie qui démontre qu’elle a été, en fait, dans l’impossibilité d’agir plus tôt.
[23] Rien dans la preuve suggère une impossibilité d’agir plus tôt. Au contraire, Madame Antonia Diflorio prend peine de préciser que la demande d’arbitrage en était une de « last resort » ayant épuisée ses demandes et sa patience.
[24] Il est pertinent ici de rappeler que tous travaux faits par l’Entrepreneur sur une base volontaires et après le 7 juin 2004 résultent d’une convention sous seing privée à laquelle l’Administrateur n’était pas partie et pour cause, les travaux de l’Entrepreneur postérieurs au 7 juin 2004 étaient en toute probabilité hors-garantie.
[25] Une fois (séance tenante) sensibilisés sur l’importance du délai entre la connaissance de la décision de l’Administrateur et la demande d’arbitrage, les Bénéficiaires ont soulevé l’absence d’aide, d’assistance et/ou d’information de la part du personnel (administratif) de l’Administrateur.
[26] Nul ne peut plaider sa propre turpitude et la simple ignorance du délai de quinze (15) jours prévu à l’article 19 du Règlement ne constitue pas une raison de la violation dudit délai de rigueur, ce dernier motif ne reposant sur aucun fondement juridique et manifestant une certaine désinvolture. La preuve ne révèle pas qu’il s’agit ici de l’erreur ou de la négligence d’un tiers mandataire et/ou d’un conseiller des Bénéficiaires, situation dans laquelle l’arbitre aurait alors pu avoir une certaine discrétion pour accorder une permission spéciale si la partie avait démontré qu’en fait, il était impossible pour elle d’agir (non pas pour leur représentant et/ou mandataire).
[27] Or, manifestement les Bénéficiaires ne sont plus dans le délai prévu à l’article 19 du Règlement et rien dans la preuve ne permet de croire une situation de fait qui démontre une impossibilité d’agir avant le 29 août 2005.
[28] Suivant mon appréciation des faits et ma compréhension de la Loi et de la jurisprudence connue, je suis d’opinion que les explications soumises pour proposer que le délai de plus ou moins quatorze (14) mois soit raisonnable dans les circonstances, ne peuvent être retenues. Je me dois de faire droit à l’objection préliminaire des procureurs de l’Administrateur et me dois de rejeter l’appel des Bénéficiaires le tout sans préjudice et sous toutes réserves du droit qui est leur, de porter devant les tribunaux civils leur prétention ainsi que de rechercher les correctifs qu’ils réclament, sujets, bien entendu, aux règles de droit commun et de la prescription civile.
[29] En vertu de l’article 123 du Règlement sur le Plan de Garantie des bâtiments résidentiels neufs, et vue que les Bénéficiaires appelants n’ont obtenu gain de cause sur aucun des aspects de leur(s) réclamation(s), l’arbitre doit départager les coûts de l’arbitrage entre l’Administrateur du plan et ceux-ci.
[30] En conséquence, les frais de l’arbitrage aussi bien en droit qu’en équité, selon les articles 116 et 123 du Plan de Garantie, sont partagés entre les Bénéficiaires pour une somme de quatre-vingt-cinq dollars (85.00$), et l’Administrateur du Plan de Garantie de L’APCHQ pour la balance du coût du présent arbitrage.
Montréal, ce 20 octobre 2005
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Me Michel A. Jeanniot
Arbitre / SORECONI