Organisme d’arbitrage autorisé par la Régie du bâtiment:
SOCIÉTÉ POUR LA RESOLUTION DE CONFLITS INC.
ENTRE: Mme. DEBBIE BASDRAVALAS
M. MOURAD ABADA
(ci-après «les Bénéficiaires»)
ET: 9114-4477 QUÉBEC INC.
(Gestion Michel Plouffe)
(ci-après «l'Entrepreneur»)
ET: LA GARANTIE QUALITÉ HABITATION INC.
(ci-après «l’Administrateur»)
No dossier SORECONI: 130403001
Arbitre: Me Lydia Milazzo
Pour le Bénéficiaire: Mme. Debbie Basdravalas
M. Mourad Abada
Pour l'Entrepreneur: M. Michel Plouffe
Pour l’Administrateur: Me François-Olivier Godin
M. Richard Massé,
Inspecteur
Date de l’audition: 7 octobre 2013
Identification complète des parties
Bénéficiaires: Mme. Debbie Basdravalas
M. Mourad Abada
[…] Laval (Québec) […]
Entrepreneur: 9114-4477 Québec Inc.
Gestion Michel Plouffe
M. Michel Plouffe
511, rue Lavergne
Laval (Québec) H7X 3L7
Administrateur: La Garantie Qualité Habitation Inc.
9200,boul. Métropolitain Est
Montréal (Québec) H1K 4L2
M. Richard Massé,
Inspecteur
Procureur: Me François-Olivier Godin
MANDAT
L’arbitre a reçu son mandat de la Société Pour la Résolution de Conflits Inc. (SORECONI) le 25 mars 2013.
7 juin 2010 : Formulaire d’Inspection Pré-réception : Pièce A-5;
8 juin 2010: Contrat de vente entre les Bénéficiaires et l’Entrepreneur ayant comme objet une unité de condominium située au […], dans la ville de Laval, Province de Québec :Pièce A-4;
3 avril 2012: Courriel de la part de Mme. Basdravalas adressé à l’Entrepreneur (avec copie à l’Administrateur), dans lequel celle-ci l’avise de problèmes reliés au plancher de l’Unité et lui demande de procéder à des réparations à cet égard : Pièce A-3, Note A (ci-après « la Dénonciation»);
15 août 2012 : Visite de l’Unité par M. Richard Massé, inspecteur agissant pour l’Administrateur;
19 septembre 2012 : Décision et Rapport de Conciliation de l’Administrateur : Pièce A-3 (ci-après « la Décision Initiale »);
30 janvier 2013 : Rapport de Conciliation Complémentaire et Décision de l’Administrateur :Pièce A-2 (ci-après « la Décision Finale »);
4 mars 2013 : Demande d’arbitrage de la part des Bénéficiaires : Pièce A-1 (ci-après « la Demande d’Arbitrage »);
25 mars 2013 : Nomination de l’arbitre;
11 avril 2013 : Réception du cahier de pièces de l’Administrateur;
12 juin 2013: Audience préliminaire par conférence téléphonique;
7 octobre 2013 : Enquête et Audition.
JURIDICTION
1. Aucune objection quant à la compétence du Tribunal n’a été soulevée par les parties. Le tribunal déclare que juridiction lui est acquise.
LE LITIGE
2. Les Bénéficiaires se plaignent d’un problème d’ondulation des plancher de boisfranc dans leur unité de condominium située au […], dans la ville de Laval (ci-après « l’Unité »). Ils ont pris possession de l’Unité en juin 2010. Ils ont dénoncé ce problème à l’Administrateur le 3 avril 2012.
3. Une première décision fut rendue par l’Administrateur le 19 septembre 2012, soit la Pièce A-3, suite à une inspection laquelle a lieu le 15 août 2012 (ci-après « la Décision Initiale »).
4. Dans la Décision Initiale, l’Administrateur fait état d’un taux d’humidité intérieure de 70% et extérieur de 80%, ainsi que du fait que plusieurs fenêtres étaient ouvertes au moment de la visite. Les taux d’humidités dans les planchers sont notés comme étant de l’ordre de 6% et 7% et les courbures desdits planchers comme étant inférieures à 1/16 de pouces. L’administrateur fait des recommandations dans le but de réduire le taux d’humidité intérieur à entre 45%-50%. Il recommande aux Bénéficiaires de faire fonctionner un système de contrôle pour l’humidité et de se procurer un baromètre au mercure. L’Administrateur s’engage à procéder à une inspection supplémentaire au moment opportun pour, par la suite, statuer sur la situation.
5. L’Administrateur procède à une deuxième inspection le 29 janvier 2013. Une décision est rendue le 30 janvier 2013, tel qu’il appert à la Pièce A-2 de son Cahier de pièces, soit la Décision Finale. Lors de cette deuxième visite, la Bénéficiaire, Mme. Basdravalas, mentionne qu’elle avait connaissance du problème depuis l’hiver 2010-2011, lorsqu’un ouvrier qui était venu faire des améliorations dans la cuisine lui a fait part du fait que son plancher était coffré. L’Administrateur déclare ne pouvoir reconnaitre le problème soulevé par les Bénéficiaires vu la tardivité de la dénonciation, effectuée en avril 2012, soit plus d’un an suivant la connaissance de la problématique.
6. Les Bénéficiaires ont interjeté appel de la Décision Finalepar voie de demande d’arbitrage à la Société pour la résolution de conflits inc. (ci-après la « Soreconi ») dans le cadre de la garantie prévue au Règlementsur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs ( L.R.Q . B-1.1, r. 02) (ci-après le « Règlement »).
Le Déroulement de l’Audience
7. À l’audience,Mme. Debbie Basdravalas et M. Mourad Abadasont témoigné à titre de Bénéficiaires, M. Michel Plouffe a témoigné pour l’Entrepreneur et M. Richard Massé a témoigné pour l’Administrateur.
8. L’Administrateur a produit les Pièces A-1 à A-5, soit les documents suivants :
a) Pièce A-1 : Demande d’Arbitrage des Bénéficiaires datée le 25 mars 2013;
b) Pièce A-2 : Rapport de conciliation complémentaire de l’Administrateur du 30 janvier 2013, soit la Décision Finale;
c) Pièce A-3 : Rapport de conciliation de l’Administrateur daté le 19 septembre 2012, soit la Décision Initiale;
d) Pièce A-4 :Contrat de vente entre 9114-4477 Québec Inc. et Mme. DespinaBasdravalas et M. Mourad Abada;
e) Pièce A-5 : Formulaire d’Inspection Pré-réception.
9. Les Bénéficiaires ont produit la Pièce B-1, soit une lettre émanant de Mme. Sonia Chrétien, datée le 6 février 2013.
La preuve et la position des parties
10. Les Bénéficiaires ont pris possession de l’Unité au mois de juin 2010.
11. La dénonciation à l’Administrateur est effectuée le 3 avril 2012. Dans ladite dénonciation, Mme. Basdravalas mentionne que depuis la prise de possession de l’Unité en juin 2010, « le plancher est devenu complètement ondulé ».
12. Lors de l’audience, les deux Bénéficiaires témoignent que selon eux, le problème existe depuis la construction de l’Unité, peu importe le taux d’humidité.
13. Par contre, ils disent ne pas l’avoir remarqué avant l’hiver 2010-2011, soit lorsqu’un ouvrier est venu apporter des améliorations dans leur cuisine et leur a mentionné que leur plancher était coffré un peu partout.
14. Ils disent quand même de ne pas avoir pris la situation trop au sérieux à ce moment-là. Ils mentionnent que c’est leur premier condo.
15. C’est plutôt par la suite,lorsque plusieurs de leurs invités ont remarqué qu’ils ressentaient l’ondulation du plancher en marchant dessus pieds nus, que les Bénéficiaires ont commencé a réalisé le sérieux du problème et ont décidé de contacter Mme. Sonia Chrétien, l’agent impliqué dans l’achat de l’Unité par les Bénéficiaires.
16. Selon la lettre datée le 6 février 2013 et produite par les Bénéficiaires comme Pièce B-1, Mme. Chrétien a visité l’Unité le 8 février 2012. Cette dernière s’est faite demandée par les Bénéficiaires ce qu’elle pensait de leur plancher et si, d’après elle, « c’était normal que les lattes de bois aient bougé de cette façon. »Mme Chrétien s’exprime ainsi : « J’ai vite constaté que ce n’était absolument pas normal et je savais également que plusieurs condos dans ce projet avaient subi le même problème. Je leur ai fortement conseillé de communiquer avec le contracteur ainsi que la garantie qualité habitation le plus rapidement possible. »
17. Mme. Chrétien n’était pas présente à l’audience. Par contre, aucune objection n’a été soulevée à la mise en preuve de cette lettre, ni aux témoignages des Bénéficiaires par rapport à son contenu.
18. Les Bénéficiaires témoigne que c’est suite à cette confirmation seulement, soit 20 mois après la prise de possession, qu’ils ont réalisé l’ampleur du problème. Selon Mme. Basdravalas, Mme. Chrétien lui a dit qu’il s’agissait d’une perte de valeur de l’Unité. Elle aurait aussi dévoilé que l’Entrepreneur avait changé d’installateur.
19. Par la suite, les Bénéficiaires contactent l’Entrepreneur. Le fils de M. Michel Plouffe est venu prendre des photos, mais l’Entrepreneur n’a plus donné suite.
20. Le 3 avril 2012, une dénonciation écrite est envoyée par courriel à l’Entrepreneur, ainsi qu’à l’Administrateur.
21. L’administrateur assigne M. Richard Massé au dossier, à titre de technicien professionnel et conciliateur;
22. M. Massé explique au Tribunal qu’il est technicien professionnel en architecture. Il fait des inspections depuis 20 ans, dont les deux dernières à titre de conciliateur pour l’Association de Construction du Québec (ci-après « l’ACQ »).
23. Aucune objection n’a été soulevée par rapport aux compétences de M. Massé relativement à la problématique sous étude.
24. Lors de la première visite de l’inspecteur, M. Richard Massé, en août 2013, ce dernier a fait les constatations suivantes, le tout tel qu’il appert à la Décision Initiale, pièce A-3 :
a) le Bénéficiaire dénonce que le plancher ondule depuis la prise de possession;
b) suite à des prises de mesureseffectuées avec un appareil DELMHORST J-Lite pour déterminer l’humidité à l’intérieur des planches de bois, un taux d’humidité de l’ordre entre 6% et 7% a été démontré;
c) un test effectué avec une pièce d’un sou noir et un objet horizontal a révélé que les courbures des planches étaient inférieures à 1/16 de pouces;
d) le taux d’humidité intérieur est de 70%;
e) bien qu’équipé avec un système pour contrôler l’humidité, ce dernier était en position « arrêt »;
f) au moment de l’inspection, plusieurs fenêtres étaient ouvertes et le taux d’humidité extérieur, lequel a une influence directe sur le taux d’humidité intérieur, était de 85%.
25. Il dit avoir été frappé par le taux d’humidité intérieur si élevé, ainsi que par le fait que plusieurs fenêtres étaient ouvertes.
26. Des recommandations ont été faites aux Bénéficiaires, soit la mise en marche du système de contrôle pour l’humidité afin d’obtenir un taux d’humidité intérieur compris entre 45% et 50%, et la procurationd’un baromètre au mercure.
27. Il s’engage à revenir durant l’hiver, soit la période chauffée, lorsque le taux d’humidité est plus bas.
28. Les Bénéficiaires disent avoir suivi ses recommandations, incluant le fait de garder les fenêtres fermées, mais soutiennent que ça n’a pas faite de différence.
29. Par contre, lors de la deuxième visite au mois de janvier 2013, l’inspecteur, M. Massé a pu constater que le taux d’humidité intérieur était de 26% et que la déformation des planchers était inférieure à 1/32ième de pouces, soit la moitié de ce qu’elle était lors de la première visite en août 2012. Le taux d’humidité desdits planchers demeurait à 6%.
30. Lors de son témoignage,il explique que le bois « travaille » et les veines se contractent de sorte que le bois répond aux taux d’humidité. Il prend du volume, ce qui donne l’effet de coffrage. Il s’est référé aux normes de l’ACQ pour dire qu’une déformation inférieure à 1/32 de pouce, avec un taux d’humidité (intérieur et bois) normal, rentrait dans les normes établies par cette association, la mesure de 1/32ième de pouce représentant la limite acceptable.
31. Aucune preuve n’a été présentée pour contredire ce témoignage, à part le témoignage de M. Abada à l’effet que le problème existe depuis le début et pour cette raison a été immédiatement constaté par l’ouvrier en décembre 2010, et donc ne saurait être causé uniquement par des taux d’humidités intérieurs élevés. Mme. Basdravalas ajoute qu’il s’agissait d’un condo modèle.
32. Ils disent aussi que le plancher s’est plutôt aggravé avec le temps, mais pas de façon catastrophique, et que le résultat ne peut être considéré comme normale ou standard.
33. M. Massé explique que les problèmes de planchers éprouvés par les Bénéficiaires sont le résultat d’un taux d’humidité élevé, lequel n’a pas été contrôlé pendant une période prolongée, soit de juin 2010 à août 2013, incluant donc deux étés. Les taux d’humidité sont généralement beaucoup plus élevés durant l’été, surtout dans le cas de l’Unité, laquelle n’était pas équipée d’un système d’air climatisée au moment des deux visites par l’inspecteur. Les Bénéficiaires témoignent à l’effet qu’un système d’air climatisé avait été installé dans l’Unité depuis, mais que cela n’a rien changé.
34. Selon M. Massé, s’il s’agissait d’un problème causé par un élément autre que l’humidité, les planchers seraient ondulés sur le bord des murs, et non de façon généralisée comme dans le cas des Bénéficiaires et, il n’y aurait pas eu de changement par rapport à l’ondulation suite à la réduction du taux d’humidité intérieur.
35. Selon, M. Plouffe, témoin pour l’Entrepreneur, ce problème d’ondulation se voit souvent avec ce type de plancher, qu’il nomme « planchers bananes ». Il ajoute, «ça se voit immédiatement; c’est clair.».
36. Il dit en avoir fait 140 planchers de ce type dans les environs, incluant celui de sa propre fille. Il explique qu’auparavant, les planchers étaient posés sans vernis, faisant en sorte qu’il y avait moins d’air qui rentrait dans le bois, mais que depuis un certain temps, soit 7-8 ans, les planchers posés sont du type « pré-vernis », faisant en sorte que l’humidité rentre beaucoup plus facilement, d’où l’importance de bien contrôler l’humidité intérieur.
37. Il avoue avoir changé d’installateur, mais dit que c’est suite à des plaintes de « craquements » dans le bois, plutôt que de l’ondulation.
38. Les Bénéficiaires demandent la correction du problème d’ondulation de leur plancher qu’il qualifie d’anormal dès le départ, peu importe le taux d’humidité.
39. L’Entrepreneur prétend qu’une certaine ondulation de ce type de plancher représente la norme. M. Plouffe témoigne que normalement, le problème se règle en contrôlant ladite humidité. Dans le cas des Bénéficiaires, le taux d’humidité intérieur excessif a aggravé cette situation de façon importante, et ce pour une période prolongée. Dans les circonstances, la responsabilité de l’Entrepreneur ne peut être engagée.
40. L’Administrateur plaide que la dénonciation est tardive selon le Règlement applicable, ayant été faite en avril 2012, soit plus de 6 mois suivants la découverte du problématique, soit en hiver 2010-2011. Il ajoute que ce délai est de rigueur.
41. Subsidiairement, ce dernier plaide que le problème soulevé par les Bénéficiaires est dû à une humidité excessive intérieur maintenue par lesdits Bénéficiaires, et ce pour une période prolongée durant laquelle le plancher s’est gonflé en été et séché en hiver (la prise de possession s’est faite en juin 2010 et les mesures de contrôle d’humidité n’ont été prises qu’en août 2012).
42. S’appuyant sur les témoignages de M. Massé et M. Plouffe, Me Godin plaide que si la dénonciation avait été faite au moment de la découverte, les recommandations de l’Administrateur auraient pu être mises en places bien avant et le problème ne se serait pas aggravé au point où le bois ne pourra peut-être plus revenir, comme ça aurait été le cas autrement. Encore-là, ceci est dû aux Bénéficiaires, de sorte que la garantie ne peut s’appliquer en leur faveur.
ANALYSE ET DÉCISION
43. La Décision faisant l’objet du présent appel rejette la demande des Bénéficiaires sur la base du fait que, selon l’Administrateur, la dénonciation écrite a été faite hors le délai prescrit par le Règlement.
44. La dénonciation a été faite dans la deuxième année de la garantie applicable et la situation dénoncée doit en conséquence satisfaire aux critères du vice caché.Le délai de dénonciation prévu au Règlement dans le cas de bâtiments détenus en copropriété divise, en matière de vices cachés, se lit comme suit :
« 27. La garantie d’un plan dans le cas de manquement de l’entrepreneur ses obligations égales ou contractuelles après la réception du bâtiment doit couvrir :
[…]
4. la réparation des vices cachés au sens de l’article 1726 ou de l’article 2103 du Code Civil qui sont découverts dans les trois ans suivant la réception du bâtiment et dénoncé par écrit, à l’entrepreneur et à l’administrateur dans un délai raisonnable, lequel ne peut excéder sixmois de la découverte des vices cachés au sens de l’article 1739 du Code civil. » Nos soulignés.
45. L’Article 1739 du Code Civil du Québec prévoit que ce délai commence à courir, lorsque le vice apparait graduellement, du jour où l’acheteur a pu en soupçonner la gravité et l’étendue.
46. Le fardeau de démontrer au Tribunal que la dénonciation requise a été faite dans les délais prescrits par le Règlement repose sur les Bénéficiaires.
47. D’une part, les Bénéficiaires témoignent que le problème d’ondulation de plancher est un vice qui existait dès le départ, indépendamment du taux d’humidité intérieur. Ils disent qu’un ouvrier l’a immédiatement constaté et leur en a fait part en hiver 2010-2011. Ils témoignent que le problème s’est aggravé avec le temps, mais pas de façon catastrophique. D’autre part, ils témoignent ne pas avoir réalisé la gravité de la situation avant d’avoir entendu les propos de Mme Chrétien, lors da la visite de cette dernière en février 2012. Ils ont dénoncé le problème par écrit à l’Administrateur en avril 2012, soit trois mois plus tard.
48. Le tribunal doit déterminer le point de départ du délai de six mois, prévu au Règlement, soit le moment de la découverte du vice en question, selon les termes de l’Article 1739 du Code Civile du Québec, précitée.
49. Ainsi, « la découverte » a lieu lorsque l’acheteur peut raisonnablement soupçonner la gravité et l’étendu du problème.
50. L’utilisation du mot « raisonnablement » par le législateur implique que le test a appliqué n’est pas purement subjectif, mais repose aussi sur des éléments objectifs.
51. Dans le présent cas, le fait qu’un ouvrier a, selon le témoignages des Bénéficiaires, immédiatement constaté que le plancher était coffré et leur en a fait part, représente pour le Tribunal un indice suffisamment important pour permettre aux Bénéficiaires de non seulement connaitre l’existence du vice, mais d’en soupçonner la gravité.
52. Vu ce qui précède, ainsi que le témoignage des Bénéficiaires à l’effet que le problème existait depuis le début(et selon eux, indépendamment du taux d’humidité intérieur) et qu’il ne s’est pas aggravée de façon importante avec l’écoulement du temps, il ne peut s’agir d’un problème dont la gravité ne pouvait raisonnablement s’apprécier avant l’écoulement du temps, et surtout pas une période d’un an et demi suite à la prise de possession, comme voudraient faire croire les Bénéficiaires. La réaction de Mme. Chrétien, laquelle, selon le contenu de sa lettre, la Pièce B-1, en voyant le plancher, a vite constaté que le problème était anormal et leur a fortement suggéré de communiquer avec l’Entrepreneurle plus vite possible, suggère plutôt que le problème était apparent, et ce en toute probabilité depuis déjà un certain temps.
53. Dans les circonstances du présent dossier, le tribunal considère que le point de départ du calcul du délai de dénonciation prévu au Règlement se situe au moment que les Bénéficiaires ont été avisé par un ouvrier que leurs planchers étaient coffré : en hiver 2010-2011. Les Bénéficiaires ne se sont pas déchargé de leur fardeau de prouver que le point de départ devrait se situait un an plus tard, soit lors de la visite de Mme. Chrétien en février 2012.
54. La dénonciation écrite des Bénéficiaires, datée le 3 avril 2012, est hors délai, ayant été faite plus de six mois après la découverte du vice, au sens de l’Article 1739 du Code Civil du Québec, et donc n’a pas été en faite en conformité avec les termes du Règlement.
55. Le délai de dénonciation prévu au Règlement est de rigueur et de déchéance et si ce délai n’est pas respecté, le droit d’un Bénéficiaire à la couverture du plan de garantie visé et au droit à l’arbitrage qui peut en découler est éteint : CarmelinaColoccia-Giuseppe Borreggine c. Trilikon Construction Inc. et la Garantie des Bâtiments Résidentiels Neufs de l’APCHQ Inc. (CCAC S09-231001-NP, Me Jean-Philippe Ewart, arbitre, 30 juillet 2010).
56. Tel qu’exprimé par Me Joanne Despatis, arbitre, dans l’affaire EkramBessadok et Anis Farhat c. Groupe Axxco Inc. et la garantie Qualité habitation (GAMM 2010-12-003, 31 janvier 2011) :
« La raison d’être de dispositions exigeant, sous peine d’irrecevabilité, que la dénonciation d’un vice soit faite à l’intérieur d’un délai ferme, est notamment de permettre à l’Administrateur qui s’est engagé à cautionner certaines obligations de l’Entrepreneur, de prévenir une dégradation plus importante du bien affecté en lui fournissant l’occasion de le corriger s’il le désire. »
57. Ces énoncés trouvent application particulière ici pour les raisons suivantes. Dans le présent cas, la prépondérance de la preuve est à l’effet que le taux d’humidité intérieur affecte le degré d’ondulation des planchers dans l’Unité. Lorsque contrôlé, suivant les recommandations initiales de l’Administrateur, le degré d’ondulation rentre dans les limites des normes applicable, le tout selon le témoignage de M. Massé. Par contre, celui-ci informe le tribunal que le fait d’avoir permis un taux d’humidité élevé causant le gonflement dudit plancher en été, pour ensuite se rétrécir en hiver, le tout pour une période de deux ans, fait en sorte que le problème a pu s’aggravé, au sens que le bois ne peut probablement plus revenir complètement. Selon la preuve, cette situation aurait pu s’éviter moyennant la mise en place des mesures recommandées par l’Administrateur bien avant août 2012, d’où l’importance d’une dénonciation audit Administrateur dans les délais prévus à cet égard dans le Règlement.
Conclusion
58. Suivant mon appréciation des faits, de la preuve versée au dossier et présentée à l’audition, des témoignages entendus et du droit applicable, je suis d’avis que l’appel des Bénéficiaires doit être rejetée et la décision de l’Administrateur,datée le 30 janvier 2013,maintenue.
59. Je tiens à préciser que ma décision se situe à l’intérieur des paramètres dictés par le législateur dans le cadre du Règlement sur le Plan de Garantie des Bâtiments Résidentiels Neufs et est donc sans préjudice et sous toutesréserves du droit du Bénéficiaire de porter devant les tribunaux civils sa prétention ainsi que de rechercher les correctifs qu’il réclame, sujet, bien entendu, aux règles de droit commun et à la prescription civile.
60. Vu la conclusion du Tribunal sur l’objection préliminaire, il n’est pas nécessaire d’aborder le mérite des représentations respectives des parties.
Les frais d’arbitrage
45. En vertu de l’article 123 du Règlement sur le Plan de Garantie des Bâtiments Résidentiels Neufs, et vu que le Bénéficiaire appelant n’a eu gain de cause, je me dois de départager les coûts d’arbitrage entre l’Administrateur du Plan et le Bénéficiaire.
46. En conséquence, les frais d’arbitrage, aussi bien en droit qu’en équité, selon l’article 116 et 123 du Plan de Garantie, seront partagés entre le Bénéficiaire pour la somme de cinquante dollars (50.00$) et l’Administrateur du Plan de Garantie de la Garantie Qualité Habitation Inc. pour la balance des frais du présent arbitrage.
POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL D’ARBITRAGE:
REJETTE l’appel des Bénéficiaire;
CONDAMNE les Bénéficiaires au paiement des frais du présent arbitrage, limités au montant de 50.00$ et l’Administrateur au paiement de la balance de ces frais.
Montréal, le 21 novembre 2013
Copie conforme : L. Milazzo
_________________________
ME LYDIA MILAZZO