ARBITRAGE En vertu du Règlement sur le plan

de garantie des bâtiments résidentiels neufs

(Décret 841-98 du 17 juin 1998)

Organisme d’arbitrage autorisé par la Régie du bâtiment :

Centre canadien d’arbitrage commercial (CCAC)

 

No dossier CCAC :                  S11-041801-NP

No dossier Garantie :              155459-1

No dossier Administrateur :    11-210FL

Date:                                       2 août 2011

 

ENTRE                        MONSIEUR GAETAN BEAUDRY ET

MADAME KATHLEEN DOWNS BEAUDRY

(ci-après « les Bénéficiaires»)

 

ET                               CONSTRUCTION JPS CHARBONNEAU LTEE

(ci-après « l’Entrepreneur »)

 

ET :                             La Garantie DES BATIMENTS RÉSIDENTIELS NEUFS DE L’APCHQ INC.

(ci-après « l’Administrateur »)

 

 

SENTENCE ARBITRALE

 

Arbitre :                                   Me France Desjardins

Pour les Bénéficiaires :           Monsieur Gaetan Beaudry

 Madame Kathleen Downs Beaudry

Pour l’Entrepreneur :               Monsieur Serge Charbonneau,

Pour l’Administrateur :            Me François Laplante, procureur

                                                Monsieur Richard Berthiaume

 

Mandat 

L’arbitre a reçu son mandat du CCAC le  28 avril 2011 

Historique du dossier 

8 avril 2008                             Contrat préliminaire et contrat de garantie

4 mai 2009                              Réception du bâtiment

5 mai 2009                              Acte de vente

8 septembre 2009                  Lettre des Bénéficiaires à l’Entrepreneur

11 septembre 2009                Lettre de l’Entrepreneur aux Bénéficiaires

30 septembre  2009               Demande de réclamation à l’Administrateur

6 mars 2010                           Lettre des Bénéficiaires à l’Entrepreneur

10 mars 2010                         Lettre de l’Entrepreneur aux Bénéficiaires

31 mars 2010                         Inspection de l’Administrateur

31 mars 2010                         Lettre des Bénéficiaires à l’Administrateur

7 juin 2010                              Décision de l’Administrateur

2 juillet 2010                           Demande d’arbitrage des Bénéficiaires

13 décembre 2010                 Décision de l’Arbitre

21 janvier 2011                       Inspection supplémentaire de l’Administrateur

14 mars 2011                         Décision de l’Administrateur sur les points 16,18,22 et 33

15 avril 2011                           Demande d’arbitrage des Bénéficiaires

28 avril 2011                           Nomination de l’arbitre

1er juin 2011                            Conférence préparatoire

30 juin 2011                            Audition

 

______________________________________________________________________

Sentence arbitrale

 

 

[1]       Aucune objection préliminaire n’ayant été soulevée par l’une ou l’autre des parties, la compétence du Tribunal à entendre la demande d’arbitrage est établie.

 

[2]       Les Bénéficiaires ont déposé une réclamation à l’Administrateur en mars 2010, à la suite de laquelle l’Administrateur a rendu une première décision le 7 juin 2010 portant sur 33 points dont un était à revoir. 

 

[3]       Cette décision fut portée en arbitrage par les Bénéficiaires et une sentence arbitrale a été rendue le 13 décembre 2010, disposant comme suit de certains points :

 

«Retourne le dossier à l’Administrateur concernant les points 16 et 18 afin qu’après vérifications appropriées, il procède à rendre décision et, advenant que les situations dénoncées ne rencontrent pas les critères de tolérance de l’industrie, il soit procédé aux travaux correctifs

Rejette la décision de l’Administrateur sur le point 22 et lui retourne le dossier pour décision sur la réclamation»

 

[4]       Le présent arbitrage, demandé par les Bénéficiaires, vise la nouvelle décision rendue par l’Administrateur sur les points identifiés 16.1, 16.2, 16.3, 18 et 22 ainsi que sur le point 33 qui était à revoir, selon la première décision rendue par celui-ci.

 

[5]       À l’audition, les Bénéficiaires déclarent abandonner la demande d’arbitrage  concernant les points 16.2, 16.3 et 33 de la décision de l’Administrateur. L’audition porte donc sur 3 points en litige. Il s’agit des points suivants :

-          Point 16.1  : Mur du foyer croche. Ce point a été rejeté par l’Administrateur au motif que la situation est exclue de la garantie en vertu de l’article 12(3)  du Règlement sur la garantie des bâtiments résidentiels neufs[1] (ci-après le Règlement), les Bénéficiaires ayant réalisé eux-mêmes les travaux de recouvrement du plancher et de finition du foyer.

-          Point 18     : Accumulation d’eau sur le balcon arrière.

-          Point 22     : Remplacement des ampoules des luminaires extérieurs

Les points 18 et 22 ont été rejetés par l’Administrateur au motif que les situations dénoncées ne permettaient pas de conclure à une malfaçon.

 

 

LA PREUVE ET L’ARGUMENTATION

 

[6]       Au soutien de leurs prétentions sur les point 16 et 18, les Bénéficiaires ont produit un rapport d’expertise préparé par monsieur Denis St-Aubin, reconnu expert à l’audition.

 

Point 16.1 : Mur du foyer croche

 

[7]       Invités à expliquer la séquence des travaux au sous-sol, madame Downs explique que, selon ce qui était convenu avec l’Entrepreneur, le sous-sol devait être livré avec les murs au gypse, les joints, l’électricité et la plomberie faits. Le foyer a été installé en février. Le menuisier de l’Entrepreneur a ensuite construit une boîte autour du foyer. Les Bénéficiaires ont fait  le plancher à l’été 2009 et ont procédé à la finition du foyer en octobre ou novembre 2009. Ils ont constaté que le mur était croche lors des travaux au plancher.

[8]       Les Bénéficiaires ont fait entendre monsieur Denis St-Aubin qui a observé un différentiel de 3/4 de pouce entre la largeur du mur latéral gauche du foyer et celle du mur droit sur une distance de moins de 48 pouces. Celui-ci attribue cette différence à la mise en place des matériaux d’origine. Il recommande l’installation d’un trompe-l’œil pour atténuer l’effet.

 

[9]       Contre-interrogé par Me Laplante sur le trompe-l’œil envisagé, monsieur St-Aubin évalue  approximativement entre 500$ et 600$ le coût de l’installation d’une base de céramique par un expert.

 

[10]    Le témoin confirme qu’il a été informé du fait que le fini du foyer a été installé par les Bénéficiaires. À la question s’il aurait été plus économique d’intervenir avant la finition, le témoin indique que les Bénéficiaires n’ont pas la connaissance suffisante pour constater si le mur est droit ou croche.

 

[11]    À la question de Me Laplante en quoi la situation déroge aux standards de l’industrie, monsieur St-Aubin indique que certaines choses sont tolérables mais «autant de marge sur une si petite distance, ce n’est pas acceptable». Invité à référer au Code du bâtiment, monsieur St-Aubin répond que comme ce n’est pas de niveau, ce n’est pas correct. Il ajoute qu’il «n’y a pas de niveau qui indique »pas pire»».

 

[12]    Référant à la dénonciation qu’ils ont transmise le 8 septembre 2009, Me Laplante demande aux Bénéficiaires pourquoi ils ont fini le foyer après avoir dénoncé que le mur était croche, ce à quoi madame Downs répond qu’il fallait utiliser le sous-sol. Elle témoigne à l’effet que «on se disait : on recommencera». Considérant les délais encourus jusqu’ici, madame ajoute qu’ils auraient dû attendre 2 à 3 ans.

 

[13]    Contre-interrogés par l’Entrepreneur, les Bénéficiaires indiquent qu’ils ont installé la pierre de finition sur le foyer avec des amis.

 

[14]    Monsieur Richard Berthiaume, signataire de la décision de l’Administrateur,  témoigne qu’il a conclu que la réclamation était exclue de la garantie parce que, lors de sa seconde inspection, il a recueilli d’autres faits sur les lieux confirmant que les Bénéficiaires ont fini le foyer eux-mêmes. Connaissant la situation et effectuant quand-même les travaux, ils ont contrevenu à l’article 4.3 du contrat de garantie.

 

[15]    Le témoin partage l’avis de l’expert St-Aubin à l’effet qu’un mur qu n’est pas de niveau ne répond pas aux exigences de l’industrie. Toutefois, les Bénéficiaires ont eux-mêmes admis que si la coupe de certaines moulures avait été effectuée de manière différente lors de la réalisation des travaux de finition, l’effet aurait été atténué.

 

[16]    À la question des Bénéficiaires sur l’apparition d’une nouvelle conclusion (exclusion de la garantie) dans la deuxième décision seulement, monsieur Berthiaume indique qu’il s’agit d’une nouvelle décision suite à une deuxième inspection, se conformant ainsi à la décision de l’Arbitre. 

 

[17]    Monsieur Berthiaume confirme ensuite qu’il a vu la même chose lors des deux inspections mais la seconde fois, il a mesuré et obtenu des précisions sur les travaux effectués par les Bénéficiaires.

 

[18]    En argumentation, les Bénéficiaires  plaident qu’ils savaient que le mur était croche mais «faire la finition par-dessus, ça ne le mettait pas moins croche. On ne voulait pas attendre 2 à 3 ans. On demande juste l’installation d’un trompe-l’œil»

 

[19]    L’Entrepreneur plaide que la situation était apparente lors de la réception du bâtiment et qu’ils ne l’ont pas dénoncée. Il met en cause l’objectif des Bénéficiaires de finir les travaux sur un mur qu’ils savent croche. Il ajoute que leur excuse à l’effet qu’ils ne voulaient pas attendre 2 à 3 ans n’est pas valable.

 

[20]    Le procureur de l’Administrateur rappelle que la preuve est à l’effet que le contrat prévoyait la constructions des murs, l’électricité et la plomberie. La finition était à la charge des bénéficiaires pour le foyer et le plancher. C’est en juillet qu’ils ont réalisé que le mur tait croche. Malgré cela, ils ont décidé de le finir en octobre-novembre après avoir dénoncé à l’Entrepreneur en septembre. Me Laplante plaide qu’il y a acceptation sinon implicite, au moins tacite de la situation. L’inspecteur a peut-être étiré l’application de l’exclusion de la garantie mais s’il y a eu malfaçon au départ, il y a eu acceptation de la situation et il est déraisonnable de se plaindre.

 

[21]    Les Bénéficiaires répliquent qu’ils n’ont pas vu que le mur était croche lors de l’inspection.

 

 

Point 18 : Accumulation d’eau sur le balcon arrière

 

[22]    Monsieur Saint-Aubin témoigne pour les Bénéficiaires. Il explique qu’il a pris des relevés à l’aide d’un niveau laser rotatif et qu’il a procédé à une vérification à l’aide d’une règle télescopique et d’intercalaires gradués. Selon lui, les pentes générales du balcon ne respectent pas le 1% nécessaire. Il a noté un affaissement de l’ordre de 3/16 de pouce au milieu du balcon. Il le juge intolérable. Il est d’avis qu’il y a eu mauvaise mise en place de la dalle de béton. Le poids de la dalle a légèrement compressé le pilier central, soit à cause d’un affaissement de sol, soit à cause d’une mauvaise mise en place du béton.  Dans son  rapport écrit, il recommande l’ajout d’un soutènement approprié car le pilier ne fait pas le travail pour lequel il est en place. Il croit toutefois que les probabilités de grand désordre structural sont minimes.

 

[23]    Contre-interrogé par Me Laplante, monsieur St-Aubin confirme l’absence d’indice de désordre structural. À la question si un recouvrement pourrait avoir des conséquences plus fâcheuses, le témoin indique que c’est une question de perception et qu’il s’agit d’un point significatif pour les Bénéficiaires. Monsieur St-Aubin sait que les Bénéficiaires voulaient éventuellement fermer le balcon et il est d’avis que le problème serait réglé dans cette éventualité. Il comprend très bien qu’il n’y a pas d’accumulation à chaque fois mais il n’a pas évalué leur fréquence. Il n’a pas observé d’eau lors de son inspection.

 

[24]    À la question s’il a noté des signes quelconques de détérioration depuis 2 ans à cause de l’eau, monsieur St-Aubin dit avoir seulement noté des taches à la surface mais ajoute que cela peut prendre plus de temps à se détériorer. Il n’est pas inquiet que des infiltrations d’eau se produisent dans le bâtiment. Il conclut qu’un résultat acceptable n’a pas été obtenu et cela cause des inconvénients aux Bénéficiaires. Il ne croit pas que ce soit normal qu’il y ait formation de glace en hiver sur une surface de béton comme le suggère l’Administrateur.

 

[25]    Contre-interrogé par le représentant de l’Entrepreneur sur la dimension de la dépression, monsieur St-Aubin indique que son étendue est là où l’eau s’accumule, soit sous la table de patio. Il confirme qu’il n’a jamais inspecté  quand il y avait de l’eau sur le balcon, il n’a pas fait de tests d’évaporation d’eau non plus. Seuls les cernes observés sur la dalle lui font dire que l’eau s’y accumule.

 

[26]    Les Bénéficiaires déposent des photos. Selon leur témoignage, elles auraient été prises sur une période de 3 à 4 jours mais ils ne peuvent dire la température qu’il faisait alors. En contre-interrogatoire, les Bénéficiaires indiquent que la situation se produit 7 à 8 fois par années, l’eau reste sur le balcon 3 à 4 jours, surtout s’il ne vente pas. En ce qui concerne l’entretien, s’ils n’utilisent pas le balcon, ils laissent l’eau s’évaporer alors que s’ils en font usage, ils passent une vadrouille, ce qui nécessite 5 minutes de travail. Quant à leur projet de finir le balcon en véranda, ils l’ont mis de côté à cause de la localisation des colonnes. Les Bénéficiaires disent attendre la décision en arbitrage avant de faire installer des garde-corps.

 

[27]    Les Bénéficiaires arguent enfin qu’ils n’ont pas payé 9 000$ en extra pour avoir de l’eau sur leur balcon. Selon eux, personne d’autre n’accepterait cela. La situation se produit «5 à 6 fois par année à cause de la pluie mais quand on arrose, ça arrive aussi».

 

[28]    L’Entrepreneur rappelle que l’expert des Bénéficiaires n’est pas en mesure de dire combien de temps l’eau demeure sur le balcon. Par expérience, un grand balcon comme cela n’est pas nécessairement droit. Lors de l’inspection, les Bénéficiaires n’ont rien inscrit dans le document de parachèvement. En plus, ils voulaient le fermer en véranda. Il est possible de corriger le vallon mais «au niveau esthétique, ça aura l’air de quoi?»

 

[29]     L’Administrateur fait ensuite entendre monsieur Richard Berthiaume, l’inspecteur conciliateur signataire de la décision. Celui-ci indique qu’il a mesuré les pentes avec un niveau à corde. Il confirme qu’il n’y a pas de risque de dommages au bâtiment, donc, pas de malfaçon. Invité à identifier les travaux qui pourraient être faits pour atténuer l’effet de la dépression. Monsieur Berthiaume opine que les travaux seraient apparents et visuellement pire. Il ajoute qu’il tient compte de la présence d’un toit dans ses conclusions.

 

[30]    En contre-interrogatoire, Monsieur Beaudry demande des explications sur l’adéquation de la pente du balcon aux normes. Monsieur Berthiaume confirme qu’il n’a pas pris les mesures au centre du balcon mais seulement à gauche et à droite pour vérifier la pente. Il n’a jamais nié le problème, dit-il, mais il n’y a pas de conséquence sur le béton, pas d’affaissement depuis 2 ans. «C’est stable et ça va rester stable». Pour lui, il n’est pas rare de trouver une petite dénivellation ( ici 3/16 de pouce). Même à 1/16 de pouce, il est d’avis qu’il y aurait une petite accumulation d’eau.

 

[31]    En argumentation, Me Laplante rappelle que l’arbitre a demandé de vérifier les pentes, que les experts s’entendent sur leur existence et sur les risques plus que faibles qu’il y ait infiltration. Il est vrai qu’il y a une dépression mais selon le procureur, cette situation n’est pas suffisante pour appliquer les règles concernant les malfaçons car il s’agit d’un problème ponctuel qui se produit surtout lors d’orages et de vents. Me Laplante plaide la règle de la balance des inconvénients et de la proportionnalité. Il convient qu’il n’est pas agréable d’avoir de l’eau sur son balcon mais, selon la preuve, le seul entretien que ça demande, c’est l’utilisation d’une vadrouille pendant 5 minutes. En ce qui concerne les correctifs, Me Laplante rappelle que les experts sont d’avis que la réparation pourrait être inesthétique.  S’il y a malfaçon, la réparation devra être effectuée par un produit auto-nivelant qui va laisser des traces. En ce qui concerne la règle de la proportionnalité, est-ce que l’entretien justifie la réparation, argue-t-il enfin.

 

[32]    Les Bénéficiaires répliquent que le balcon n’était pas décoffré lors de la réception du bâtiment.

 

Point 22 : Remplacement  continuel des ampoules des luminaires extérieurs

 

[33]    Les Bénéficiaires réfèrent au rapport de monsieur Michel Guimont, l’entrepreneur électricien dont les services ont été retenus par l’Administrateur pour vérifier le système électrique. Les Bénéficiaires ne contestent pas ses conclusions à l’effet que l’installation électrique ne comporte pas de problématique. Toutefois, malgré leur admission du rapport, ils contestent maintenant l’information rapportée par son signataire à l’effet  que, selon les dires du propriétaire (monsieur Beaudry), la durée d’utilisation des luminaires était de l’ordre de 10 à 12 heures par jour les premiers mois suivant la réception du bâtiment.

 

[34]    L’entrepreneur électricien recommande d’installer des ampoules d’une durée de 6000 heures. Les Bénéficiaires croient que ce n’est pas ce qui a été installé puisqu’ils ont dû commencer à les changer après deux semaines. Ils réclament donc le coût du remplacement des ampoules, soit 140.45$. Ils déposent à cet effet une soumission de CDE St-Jérôme. S’ils devaient faire exécuter les travaux par un expert, les coûts seraient de l’ordre de 510$, selon la soumission qu’ils ont obtenue de Michel Guimont Entrepreneur électricien ltée et déposée.

 

[35]    Monsieur Beaudry montre ensuite un contenant d’ampoules qu’il aurait achetées et qui serait identique à celui des ampoules originalement installées par l’Entrepreneur. Or, ces ampoules sont destinées à l’installation à l’intérieur. Il explique qu’il a toujours acheté ces ampoules jusqu’à ce qu’on lui explique que ça ne convenait pas.

 

[36]    En argumentation, les Bénéficiaires plaident que l’Entrepreneur n’a pas posé les bonnes ampoules, que ce n’est pas normal que toutes les ampoules brûlent à l’achat d’une maison et qu’ils ont payé un extra pour faire installer ces luminaires.

 

[37]    En contre-interrogatoire,  les Bénéficiaires confirment que le contrat ne contenait aucune indication quant au type d’ampoules.

 

[38]    L’Entrepreneur plaide que les ampoules n’étaient pas comprises mais que l’électricien en a installé par courtoisie.

 

[39]    Me Laplante interroge monsieur Berthiaume qui explique que le fait de poser des ampoules de 900, 1500 ou 3000 heures au lieu d’ampoules de 6000 heures n’est pas une malfaçon.

 

[40]    En argumentation, Me Laplante plaide qu’il n’a pas été démontré que les ampoules étaient prévues au contrat. Le rapport de l’électricien retenu par l’Administrateur confirme l’absence de problématique au système électrique.. Il y aurait eu malfaçon s’il y avait eu défectuosité. Ce rapport est admis par les Bénéficiaires. Ils ne peuvent pas aujourd’hui remettre en question les informations qu’il contient concernant leur durée de consommation quotidienne. Le procureur ajoute qu’il n’y a rien dans le plan de garantie qui permet le remboursement des ampoules.

 

[41]    Me Laplante argue que le choix des ampoules ne relève pas de l’Entrepreneur qui ne peut être tenu responsable de toutes les ampoules qui brûlent dans la première année. Au surplus, dit-il, on demande d’indemniser un préjudice qui n’est pas survenu car les ampoules n’ont pas encore été achetées, ce qui contrevient à l’article 18(5) du Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs. (ci-après le Règlement)

 

L’ANALYSE ET LA DÉCISION

 

[42]    Le présent arbitrage se tient suite à une première sentence arbitrale rendue en décembre 2010 par la soussignée. Conformément aux conclusions de cette sentence, l’Administrateur a procédé à des vérifications additionnelles et rendu une nouvelle décision, que les Bénéficiaires ont portée en arbitrage. Il s’agit d’un nouvel arbitrage mais comme le premier, celui-ci s’exerce en vertu du Règlement.

 

[43]    Suivant l’article 116 du Règlement, l’arbitre doit statuer «conformément aux règles de droit;  il fait aussi appel à l’équité lorsque les circonstances le justifient».[2] Sa décision lie les parties; elle est finale et sans appel.[3]

 

[44]    Rappelons qu’en vertu de l’article 10 du  Règlement, la garantie d’un plan trouve application  dans le cas de manquement de l'entrepreneur à ses obligations légales ou contractuelles après la réception du bâtiment et de dénonciation de ces malfaçons ou vices dans les délais prévus.

 

10.   La garantie d'un plan dans le cas de manquement de l'entrepreneur à ses obligations légales ou contractuelles après la réception du bâtiment doit couvrir:

 

  1°    le parachèvement des travaux relatifs au bâtiment et dénoncés, par écrit, au moment de la réception ou, tant que le bénéficiaire n'a pas emménagé, dans les 3 jours qui suivent la réception;

 

  2°    la réparation des vices et malfaçons apparents visés à l'article 2111 du Code civil et dénoncés, par écrit, au moment de la réception ou, tant que le bénéficiaire n'a pas emménagé, dans les 3 jours qui suivent la réception;

 

  3°    la réparation des malfaçons existantes et non apparentes au moment de la réception et découvertes dans l'année qui suit la réception, visées aux articles 2113 et 2120 du Code civil et dénoncées, par écrit, à l'entrepreneur et à l'administrateur dans un délai raisonnable, lequel ne peut excéder 6 mois de la découverte des malfaçons;

 

  4°    la réparation des vices cachés au sens de l'article 1726 ou de l'article 2103 du Code civil qui sont découverts dans les 3 ans suivant la réception du bâtiment et dénoncés, par écrit, à l'entrepreneur et à l'administrateur dans un délai raisonnable, lequel ne peut excéder 6 mois de la découverte des vices cachés au sens de l'article 1739 du Code civil;

 

  5°    la réparation des vices de conception, de construction ou de réalisation et des vices du sol, au sens de l'article 2118 du Code civil, qui apparaissent dans les 5 ans suivant la fin des travaux et dénoncés, par écrit, à l'entrepreneur et à l'administrateur dans un délai raisonnable, lequel ne peut excéder 6 mois de la découverte ou survenance du vice ou, en cas de vices ou de pertes graduelles, de leur première manifestation.

 

 

 

[45]     Dans le présent dossier, l’Administrateur a rejeté le points 16.1 au motif que la situation est exclue de la garantie, les réparations étant rendues nécessaires par la faute des Bénéficiaires. Les points 18 et 22 ont été rejetés parce que ne constituant pas une malfaçon.

 

[46]    L’Arbitre doit donc décider si les situations dénoncées constituent des malfaçons ou sont exclues de la garantie.

 

 

 Point 16.1 : Mur du foyer croche

 

[47]    Les experts entendus de part et d’autre ont constaté un différentiel entre le mur gauche et le mur droit du pourtour du foyer. La situation est donc admise. Les conclusions diffèrent toutefois de manière importante entre l’expert des Bénéficiaires et l’Administrateur. En effet, monsieur St-Aubin attribue la situation à la mise en place des matériaux d’origine alors que monsieur Berthiaume a rejeté la réclamation comme étant exclue de la garantie par l’article 12(3) du Règlement parce que la finition du foyer et les recouvrements de plancher ont été réalisés par les Bénéficiaires.

 

[48]    Pour monsieur St-Aubin, l’obligation de résultat de l’Entrepreneur n’est pas atteinte et les anomalies doivent être corrigées par l’ajout d’un trompe-l’œil dont il évalue les coûts approximatifs entre 500$ et 600$. Selon lui, cette proposition, tout comme l’abandon de la réclamation concernant les autres murs de la maison, démontrent la bonne foi des Bénéficiaires. Avec respect, il ressort du témoignage même de monsieur St-Aubin, que l’abandon de la réclamation concernant les autres murs prend en compte les dommages plus importants que leur réparation pourrait engendrer. Cependant, le Tribunal croit que, pour apprécier le caractère raisonnable de la solution proposée pour le mur du foyer, il doit également analyser la réclamation en prenant en considération l’ensemble de la preuve.

 

[49]    Ainsi, il appert de la preuve non contestée qu’il y a malfaçon.  Par ailleurs, la recommandation de monsieur St-Aubin ne tient pas compte d’un élément majeur qui a conduit l’Administrateur à rejeter la réclamation à savoir : la finition du foyer en octobre-novembre par les Bénéficiaires alors qu’ils avaient découvert en juillet que le mur était croche, situation qu’ils ont dénoncée en septembre 2009.

 

[50]    Or, il est bien établi par la Loi et la jurisprudence que l’Entrepreneur a le droit de procéder aux réparations et a le choix des moyens pour atteindre les résultats. La preuve a démontré qu’un simple soufflage aurait permis de minimiser l’effet, une correction qui aurait pu être effectuée à un coût minime. Il appert que ce droit lui a été nié par les Bénéficiaires qui ont procédé à la finition du mur du foyer sans attendre le résultat de leur dénonciation.

 

[51]    Les Bénéficiaires plaident qu’ils ne voulaient pas attendre 2 ans avant de profiter de leur sous-sol. Le Tribunal est conscient des inconvénients que la situation pouvait occasionner. Toutefois,  les Bénéficiaires étaient-ils justifiés d’entreprendre les travaux malgré leur réclamation à l’Administrateur qui a l’obligation se respecter la procédure prévue à l’article 18 du Règlement?.

18.   La procédure suivante s'applique à toute réclamation fondée sur la garantie prévue à l'article 10:

 

  1°    dans le délai de garantie d'un, 3 ou 5 ans selon le cas, le bénéficiaire dénonce par écrit à l'entrepreneur le défaut de construction constaté et transmet une copie de cette dénonciation à l'administrateur en vue d'interrompre la prescription;

 

  2°    au moins 15 jours après l'expédition de la dénonciation, le bénéficiaire avise par écrit l'administrateur s'il est insatisfait de l'intervention de l'entrepreneur ou si celui-ci n'est pas intervenu; il doit verser à l'administrateur des frais de 100 $ pour l'ouverture du dossier et ces frais ne lui sont remboursés que si la décision rendue lui est favorable, en tout ou en partie, ou que si une entente intervient entre les parties impliquées;

 

  3°    dans les 15 jours de la réception de l'avis prévu au paragraphe 2, l'administrateur demande à l'entrepreneur d'intervenir dans le dossier et de l'informer, dans les 15 jours qui suivent, des mesures qu'il entend prendre pour remédier à la situation dénoncée par le bénéficiaire;

 

  4°    dans les 15 jours qui suivent l'expiration du délai accordé à l'entrepreneur en vertu du paragraphe 3, l'administrateur doit procéder sur place à une inspection;

 

  5°    dans les 20 jours qui suivent l'inspection, l'administrateur doit produire un rapport écrit et détaillé constatant le règlement du dossier ou l'absence de règlement et en transmettre copie, par poste recommandée, aux parties impliquées. En l'absence de règlement, l'administrateur statue sur la demande de réclamation et ordonne, le cas échéant, à l'entrepreneur de rembourser au bénéficiaire le coût des réparations conservatoires nécessaires et urgentes et de parachever ou corriger les travaux dans le délai qu'il indique, convenu avec le bénéficiaire ;

 

 6°    à défaut par l'entrepreneur de rembourser le bénéficiaire, de parachever ou de corriger les travaux et en l'absence de recours à la médiation ou de contestation en arbitrage de la décision de l'administrateur par l'une des parties, l'administrateur, dans les 15 jours qui suivent l'expiration du délai convenu avec le bénéficiaire en vertu du paragraphe 5, effectue le remboursement ou prend en charge le parachèvement ou les corrections, convient pour ce faire d'un délai avec le bénéficiaire et entreprend, le cas échéant, la préparation d'un devis correctif et d'un appel d'offres, choisit des entrepreneurs et surveille les travaux;

 

[52]     L’analyse de ces délais de procédure amène le Tribunal à conclure que les Bénéficiaires ont procédé aux travaux dans un délai trop court suivant la dénonciation du défaut, sans laisser la latitude suffisante à l’Administrateur pour mettre en œuvre la garantie conformément aux exigences du Règlement.  Au surplus, lorsque les travaux ont été effectués, rien ne laissait présager que la procédure jusqu’à décision finale nécessiterait 2 ans.

 

[53]    Ce faisant, les Bénéficiaires ont agi de manière déraisonnable et la décision de l’Administrateur doit par conséquent être maintenue.

 

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Point 18 :  Accumulation d’eau sur le balcon arrière

 

[54]    La preuve non contredite est à l’effet qu’il y a une légère dépression de l’ordre de 3/16 de pouce dans la partie centrale du balcon arrière. Selon ce qu’on peut lire dans le rapport produit par l’expert des Bénéficiaires, la dénivellation est possiblement la conséquence d’une mise en place inadéquate de la dalle de béton et les inclinaisons de drainage observées ne respectent pas les performances minimales attendues.» Selon l’inspecteur conciliateur qui a rendu la décision pour l’Administrateur, la pente constatée respecte les règles de l’art en ce qu’elle permet d’évacuer l’eau en l’éloignant des murs adjacents.

 

[55]    À l’audition, les experts de part et d’autre ont par ailleurs témoigné n’avoir aucune crainte que des infiltrations d’eau se produisent dans le bâtiment. Ils n’ont constaté aucun dommage et aucun signe de détérioration depuis la construction.

 

[56]    En rendant sa nouvelle décision, l’Administrateur s’est conformé à la lettre à la sentence arbitrale qui lui ordonnait de vérifier les pentes du balcon, sans toutefois examiner à nouveau la situation en regard du Guide de performance de l’APCHQ qui prévoit que de petites accumulations d’eau, qui ne demeurent pas plus de 24 heures après une pluie, sont tolérables.

 

[57]    Le Tribunal est cependant d’avis que cette omission n’a pas de conséquences sur l’issue du litige. En effet, malgré que l’Administrateur ait été invité par le Tribunal à rendre de nouvelles décisions à la lumière de précisions additionnelles obtenues, ce n’est pas sur lui que repose le fardeau de la preuve mais bien sur les Bénéficiaires qui font une réclamation. C’est à celui qui fait la demande de prouver ses prétentions et cette preuve doit prendre appui sur les dispositions du Règlement et sur les standards reconnus dans l’industrie.

 

[58]    À l’examen de la preuve soumise par les Bénéficiaires, il est difficile de conclure à l’existence de malfaçon. En effet, outres les cernes observés sur le béton, l’expert des Bénéficiaires n’a pas constaté d’accumulation d’eau lors de son inspection et n’a pas non plus effectué de tests d’évaporation d’eau qui lui permettraient d’identifier la durée de rétention de l’eau sur le balcon.

 

[59]    Quant aux photos produites par les Bénéficiaires, elles ne comportent aucune date permettant d’établir sur quelle période de temps elles ont été prises.

 

[60]    Il est clair que les Bénéficiaires n’étaient pas en mesure de constater le problème lors de la réception du bâtiment en raison de la présence du coffrage et de nombreux débris sur le balcon. Il n’en demeure pas moins que la preuve non contredite est à l’effet que le balcon devait être fermé et que, s’il en avait été ainsi, il aurait été à l’abri des intempéries et les inconvénients aujourd’hui rencontrés n’auraient pas existé.

 

[61]    Qui plus est, il faut considérer d’une part, que le balcon est couvert d’un toit et d’autre part, que l’accumulation d’eau observée par les Bénéficiaires se situe sous l’ameublement de patio. Ces obstacles contribuent à empêcher les éléments de favoriser l’assèchement rapide de la dalle.

 

 

[62]    Le Tribunal ne nie pas que la situation comporte des inconvénients pour les Bénéficiaires. Toutefois, la preuve prépondérante ne lui permet pas de conclure à  une malfaçon, d’autant plus que le problème se manifeste ponctuellement lors d’orages violents et que son entretien nécessite simplement de passer la vadrouille 5 à 7 fois par année, une opération qui exige 5 minutes chaque fois.

 

[63]     En l’absence de preuve suffisante, la décision de l’Administrateur doit être maintenue.

 

Point 22 : Remplacement continuel des ampoules des luminaires extérieurs

 

[64]    Les Bénéficiaires ne contestent pas le rapport de l’électricien dont les services ont été retenus par l’Administrateur et qui conclut que le système électrique ne comporte aucune anomalie S’appuyant sur ledit rapport qui recommande d’installer des ampoules d’une durée de 6000 heures, ils réclament le coût d’installation de ces  ampoules.

 

[65]    Dans la sentence arbitrale rendue en décembre 2010, l’Arbitre avait retourné le dossier à l’Administrateur afin qu’il soit procédé à une vérification de la conformité de l’installation électrique. La découverte d’une telle défectuosité aurait pu donner ouverture à l’application de la garantie pour malfaçon. Ce n’est pas le cas en l’espèce, comme l’ont d’ailleurs admis les Bénéficiaires.

 

[66]    En ce qui concerne la durée de vie des ampoules, la responsabilité de l’Entrepreneur ne peut être engagée que si le contrat exigeait l’installation d’un type particulier d’ampoules, ce qui n’a pas été démontré.  Autrement, aucune faute ne peut lui être imputée. La recommandation de l’expert d’installer des ampoules d’une durée de 6000 heures ne peut être créatrice de droit pour les Bénéficiaires à cet égard.

 

[67]    L’Arbitre croit que les Bénéficiaires ont mal interprété les conclusions du rapport de l’expert électricien eu égard à leurs droits en vertu du plan de garantie. Autrement, ils auraient certainement abandonné leur réclamation sur ce point.

 

[68]    Vu l’absence de malfaçon, la décision de l’Administrateur est maintenue.

 

 

Frais d’expertise et d’arbitrage

 

[69]    L’article 124 du Règlement stipule que :

124. L'arbitre doit statuer, s'il y a lieu, quant au quantum des frais raisonnables d'expertises pertinentes que l'administrateur doit rembourser au demandeur lorsque celui-ci a gain de cause total ou partiel.

 

[70]    Les Bénéficiaires n’ayant eu gain de cause sur aucun des points, le Tribunal n’aurait d’autre choix que de n’accorder aucun remboursement des frais d’expertise qu’ils ont engagés pour la préparation du rapport. Toutefois, en ce qui concerne les points débattus à l’audition en arbitrage, le témoignage de monsieur Saint-Aubin a permis de bien cerner le débat. De plus, sa présence à l’audition et ses échanges avec les représentants des autres parties ont certainement favorisé une meilleure compréhension, par les Bénéficiaires, des enjeux de leur réclamation et de la procédure en arbitrage. Considérant les circonstances particulières, s’autorisant  des règles d’équité prévues à l’article 116 du Règlement, le Tribunal décide que l’Administrateur devra supporter 200 $ des frais facturés par l'expert.

 

[71]    En ce qui concerne les coûts de l’arbitrage, l’article 123 du Règlement prévoit que :

 

123.   Les coûts de l'arbitrage sont partagés à parts égales entre l'administrateur et l'entrepreneur lorsque ce dernier est le demandeur.

Lorsque le demandeur est le bénéficiaire, ces coûts sont à la charge de l'administrateur à moins que le bénéficiaire n'obtienne gain de cause sur aucun des aspects de sa réclamation, auquel cas l'arbitre départage ces coûts.

 

[72]    Le Tribunal comprend  que les Bénéficiaires aient pu être encouragés à porter leur différend en arbitrage considérant que, dans la sentence arbitrale initiale rendue, l’Arbitre soussignée a retourné le dossier à l’Administrateur pour vérifications additionnelles.   Par conséquent, s’autorisant ici encore des règles d’équité, le Tribunal conclut que les coûts du présent arbitrage seront à la charge de l’Administrateur.

 

 

 POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL D’ARBITRAGE :

 

Prend acte de l’abandon de la demande d’arbitrage concernant les points 16.2, 16.3 et 33 ;

REJETTE la demande d’arbitrage des Bénéficiaires et MAINTIENT la décision de l’Administrateur concernant  les points 16.1, 18 et 22;

ORDONNE à l’Administrateur de rembourser 200$ des frais d’expert facturés par la firme St-Aubin et Associés Inc.;

 

CONDAMNE l’Administrateur à payer les frais d’arbitrage

           

 

Me France Desjardins

Arbitre/CCAC



[1] LRQ, c.B-1.1, r.0.2

[2]               Article 116 du Règlement

[3]               Articles 20 et 120 du Règlement