ARBITRAGE EN VERTU DU RÈGLEMENT SUR LE PLAN DE GARANTIE DES BÂTIMENTS RÉSIDENTIELS NEUFS

(Décret 841-98 du 17 juin 1998)

 

Organisme d’arbitrage autorisé par la Régie du bâtiment : CCAC

 

 

ENTRE : SYNDICAT DE COPROPRIÉTÉ 3196-3198, FRÉDÉRIC LÉGARÉ ;

 

(ci-après le «Bénéficiaire»)

 

 

C. : CONSTRUCTIONS RICHARD CLICHE INC. ;

(ci-après l «Entrepreneur»)

 

 

ET : LA GARANTIE DE CONSTRUCTION RÉSIDENTIELLE;

 

(ci-après l’« Administrateur »)

 

 

Dossier CCAC : S20-081401-NP

 

 

DÉCISION ARBITRALE RECTIFIÉE

 

 

Arbitre : Michel A. Jeanniot, CIArb

 

Pour le Bénéficiaire :  Me Maxime L. Blanchard

 

Pour lEntrepreneur : Madame Lucie Gilbert

 

Pour l’Administrateur : Me Éric Provençal

 

Date de l’audition :  31 mars 2021

 

Date de la Décision : 27 mai 2021


Identification complète des parties

 

 

 

Entrepreneur : Constructions Richard Cliche inc.  

 2170, rue Principale

 Saint-Frédéric (Québec) G0N 1P0

 

 Et sa représentante :

 

 Madame Lucie Gilbert

 2170, rue Principale

 Saint-Frédéric (Québec) G0N 1P0

 

 

Bénéficiaire :   Syndicat de copropriété

 3196-3198, Frédéric Légaré

 Madame Marie-Claude Gagnon

 [...]

 Québec (Québec) [...]

 

 Et son procureur :

 

 Me Maxime L. Blanchard

BCF Avocats d’affaires

2828, boul. Laurie, 12ème étage

Québec (Québec) G1V 0B9

 

 

Administrateur :  Garantie de construction Résidentielle

 4041, rue Molson 3e étage

 Montréal (Québec) H1Y 3L1

 

Et son procureur :

 

Me Éric Provençal

La Garantie Construction Résidentielle

4041, rue Molson 3e étage

 Montréal (Québec) H1Y 3L1

 

 


Mandat

 

L’arbitre a reçu son mandat du CCAC le 9 septembre 2020.

 

Extraits pertinents du Plumitif

 

10.08.2020 Réception par le greffe du CCAC de l’avis d’arbitrage du Bénéficiaire

14.08.2020 Transmission aux parties de la notification d’arbitrage

09.09.2020 Nomination de Michel A. Jeanniot à titre d’arbitre

06.10.2021 Réception des pièces de l’Administrateur

29.10.2020 Lettre de l’Arbitre pour solliciter les disponibilités des parties pour une conférence téléphonique

03.11.2020 Lettre de l’Arbitre pour convoquer un appel conférence dans le dossier

30.11.2020 Appel conférence et conférence de gestion

30.11.2020 Courriel de l’Administrateur au sujet de la nécessité d’une analyse technique supplémentaire

03.12.2020 Appel conférence et conférence de gestion

19.01.2021 Communication à l’arbitre des pièces concernant la formation de glace

10.02.2021 Appel conférence et conférence de gestion

11.02.2021    Envoi par le Bénéficiaire du rapport d’expertise aux parties

22.02.2021 Réception du compte-rendu des visites de l’Administrateur

09.03.2021 Communication à l’Arbitre de l’avis de représentation de Me Maxime L. Blanchard pour le Bénéficiaire

25.03.2021 Réception des pièces du Bénéficiaire

31.03.2021 Audition

31.02.2021 Réception des autorités de l’Administrateur

27.05.2021 Décision

 

 


SENTENCE ARBITRALE

 

 

Introduction

 

[1]          Il s’agit d’un bâtiment unifamilial jumelé située au 3196 et 3198, rue Frédéric-Légaré, Québec (Québec) G2A 0C1.

 

[2]          La date de fin des travaux fut le 7 juillet 2016; le Bénéficiaire a reçu les parties communes du bâtiment (dont il est question dans le présent arbitrage) le 26 août 2016.

 

[3]          Une première dénonciation écrite portant sur quelques dix (10) points fut signée le 20 septembre 2016, ce qui a donné lieu à une visite du bâtiment en date du 4 novembre 2016 et à une décision sous la plume de M. Jocelyn Dubuc (dossier 103033-260) accueillant la réclamation du Bénéficiaire sur plusieurs points en date du 22 novembre 2016.

 

[4]          Cette décision de l’Administrateur fut portée en arbitrage; une sentence arbitrale sous la plume de Me Luc Chamberland accueillant la demande d’arbitrage du Bénéficiaire, confirmant la décision de l’Administrateur du 22 novembre 2016, et ordonnant à l’Entrepreneur d’exécuter des travaux fut signée le 26 juillet 2017 (CCAC, dossier S16-112802-NP) (cette sentence fut rectifiée le lendemain pour modifier l’une des conclusions afin de reconnaître le rejet de la demande d’arbitrage de l’Entrepreneur).

 

[5]          Le 1er février 2018, une autre dénonciation écrite fut signée par le Bénéficiaire. Une inspection supplémentaire des lieux a eu lieu le 27 mars 2018, suivie par des échanges de courriels entre l’Administrateur et le Bénéficiaire.

 

[6]          Le 1er mai 2018, une décision administrative sous la plume de M. Normand Pitre accueillant la réclamation du Bénéficiaire à l’égard des traces de moisissure dans le vide sous toit et cernes au plafond de la chambre de l’unité 3196 et ordonnant à l’Entrepreneur de régler la situation fut rendue (dossier 103033-1065). Cette décision fut suivie le 17 mai 2018 par une décision complémentaire précisant que le choix de la méthode corrective pour régler la situation reconnue incombait à l’Entrepreneur.

 

[7]          Les échanges par courriel entre les parties et l’Administrateur se sont poursuivis en 2018. Notamment, en date du 2 décembre 2018, le Bénéficiaire a écrit à l’Administrateur concernant la présence de glaçons en débord de la toiture. Le 21 janvier 2020, les propriétaires ont signé un formulaire de dénonciation concernant une problématique de glace excessive au niveau de la toiture arrière suggérant une mauvaise ventilation de l’entretoit. Le Bénéficiaire a communiqué dénonciation de la situation à l’Entrepreneur le 6 février 2020.

 

[8]          Une visite des lieux a ensuite eu lieu le 21 mai 2020 (au printemps, date à laquelle il était forcément impossible de constater la gravité des accumulations de glace). Une seconde visite a eu lieu 16 juin 2020. Le 28 juillet 2020, fût rendue sous la plume de M. Yvan Gadbois une décision (dossier 103033-3801), ainsi qu’une décision complémentaire, toujours en date du 28 juillet 2020 (dossier 103033-1065).

 

La décision de l’Administrateur

 

[9]          La décision, dans le dossier 103033-3801, en date du 28 juillet 2020 portait uniquement sur une (1) question, soit celle de la formation de glace et de glaçons en débord de la toiture. Les propriétaires du 3196 constatent que la formation de glace revient sur leur unité (contrairement aux autres unités sur leur rue, pour lesquelles les formations de glaces sont plus petites) chaque hiver depuis la réception des éléments communs, et ce, malgré les travaux effectués à l’entretoit à l’été 2018.

 

[10]      Ce problème fut dénoncé par le Bénéficiaire à l’Administrateur le 2 décembre 2018 et à l’Entrepreneur le 6 février 2020, soit trois (3) ans après sa découverte. L’Administrateur considère qu’il s’agit d’un délai déraisonnable et rejette alors la réclamation du Bénéficiaire.

 

[11]      Dans sa décision complémentaire du 28 juillet 2020 (dossier 103033-1065), l’Administrateur a traité une dénonciation écrite soumise par correspondance en date du 1er février 2018, dénonciation qui a par la suite fait l’objet d’une réclamation auprès de l’Administrateur. Pendant la visite des lieux qui eut lieu le 21 mai 2020 dans le contexte d’une nouvelle demande de réclamation, le représentant du Bénéficiaire a informé l’Administrateur que le problème de moisissure au vide sous toit n’était toujours pas réglé. Cette conversation a donné lieu à la décision complémentaire, qui portait alors sur les traces de moisissure dans le vide sous toit et cernes au plafond de la chambre de l’unité 3196.

 

[12]      Cette situation fut découverte dans les trois (3) ans suivant la réception du bâtiment et dénoncée par écrit dans un délai raisonnable suivant sa découverte. L’Entrepreneur a entrepris des travaux correctifs à l’été 2018 en raison de la qualification du désordre comme vice caché au sens du paragraphe 4 de l’article 27 du Règlement.

 

[13]      L’Administrateur a précisé que, pour continuer de bénéficier de la garantie, la situation devait satisfaire à nouveau les critères de vice caché; il a conclu que ce n’était pas le cas en l’espèce. L’Administrateur a conclu que la situation n’était pas de nature à rendre le bâtiment impropre à l’usage auquel il est destiné, et a alors rejeté la réclamation du Bénéficiaire.

 

 

 

 

Éléments portés en arbitrage

 

[14]      Le Bénéficiaire demande au Tribunal d’ordonner à l’Entrepreneur d’entreprendre des travaux correctifs dans les aires communes des deux (2) côtés du mur mitoyen (soit dans les deux unités, 3196 et 3198) tel que décrit dans le rapport d’expertise de M. Renaud Bergeron, le tout sous la supervision de la personne de son choix.

 

Admissions

 

[15]      Toutes les deux parties ont reconnu les points suivants :

 

1)     Que l’unité 3196 est atteinte d’un vice, souffrant des problèmes importants d’étanchéité ;

 

2)     Que l’entretoit est une aire commune ;

 

3)     Que, sil y a des problèmes dans le bâtiment nécessitant quelconque intervention, cette intervention devrait être commune pour les deux unités afin de les uniformiser (même si l’intervention requise est moins importante de l’un côté que de l’autre).

 

Sommaire des positions respectives

 

[16]      Tel qu’il m’en est coutume, je ne reprendrai pas ici au long l’ensemble des points et/ou arguments qui me furent soumis. Je me permettrai de me limiter aux éléments ginglymes de mon processus décisionnel.

 

Ce que je retiens de l’argumentaire du Bénéficiaire

 

[17]      Je ne trouve pas utile de résumer le témoignage du Bénéficiaire sur la survenance du désordre et la chronologie de la dénonciation pour les raisons expliquées plus bas.

 

[18]      Le Bénéficiaire a convoqué l’auteur du rapport d’expertise du 4 février 2021, M. Renaud Bergeron. M. Bergeron fut reconnu par toutes les parties en tant qu’expert. Il a décrit les conditions de sa visite des lieux le 3 février 2021 : il faisait -5 degrés Celsius et les conditions étaient propices pour une analyse par caméra infrarouge, ce qui a permis à M. Bergeron de bien constater le désordre.

 

[19]      Le rapport d’expertise de M. Bergeron porte sur quatre (4) aspects de l’édifice :

 

1)     La ventilation du comble sous toit : L’expert constate que la problématique actuelle quant à la ventilation des combles est d’abord une surface insuffisante en ventilation et ensuite une disposition inadéquate des ouvertures.

 

2)     L’étanchéité à l’air : La moyenne de taux d’étanchéité obtenu à l’aide de l’infiltromètre pour une maison récente serait de 2,50 CAH. Pour l’unité 3196, le taux obtenu est de 3,06 et pour l’unité 3198, 1,86, ce qui indique qu’il y a environ 39% plus de fuites d’air dans l’unité 3196. M. Bergeron a précisé lors de son témoignage que, même si le taux de fuites d’air moyen obtenu pour l’unité 3198 est inférieur à la moyenne pour une maison récente, les fuites peuvent néanmoins s’avérer plus importanteset inacceptablesdans certaines zones clés.

 

3)     Le balayage thermique : M. Bergeron a constaté une quantité relativement importante de fuites et est d’avis qu’un nouveau plan pare-air doit être mis en place pour le plafond de l’édifice.

 

4)     L’état du comble : Le rapport raconte l’historique de l’importante croissance fongique dans le comble de l’unité en 2018 et note que, selon les informations reçues de l’Administrateur, les travaux de décontamination n’auraient pas été faits de manière satisfaisante. En raison de la présence fongique actuelle, M. Bergeron constate la nécessite d’intervenir dans le comble de l’unité 3196 et ajoute que, si des traces de moisissure dans l’unité 3198 sont observées lors des travaux de démolition, il faudra procéder à une décontamination du comble de 3198 également. M. Bergeron termine en soulignant que l’intégrité du comble sous toit doit être restaurée et, vu l’échec des travaux tentés dans le passé, recommande que la décontamination soit réalisée de manière invasive.

 

[20]      Les conclusions du rapport recommandent de procéder comme suite pour rectifier le désordre :

 

        Retirer le pontage de la toiture (3196 et 3198);

        Retirer l’isolant en vrac (3196 et 3198);

        Décontaminer le comble de l’unité 3196 (décontaminer 3198 si des traces sont observées en cours de travaux);

        Appliquer un rang de mousse d’uréthane sur toute la surface du plafond (3196 et 3198);

        Compléter l’isolation (isolant en vrac ou mousse d’uréthane selon le choix) (3196 et 3198);

        Remettre en place le pontage et le revêtement de toiture (3196 et 3198);

        Assurer l’équilibre de la ventilation des combles (3196 et 3198).

 

[21]      Dans son témoignage lors de l’audition, M. Bergeron a témoigné que, selon son avis professionnel, les travaux qu’il recommande sont nécessaires pour assurer l’étanchéité à l’air de l’entretoit en raison des pertes aux endroits stratégiques, qui sont de nature à causer une perte en intégrité du bâtiment. Il a précisé que, même si l’ensemble des mesures recommandées n’avait pas été attendu durant la construction, il doit maintenant recommander l’ensemble des mesures énumérées dans son rapport afin de corriger la situation actuelle.

 

[22]      Sur la question spécifique des accumulations de glace, M. Bergeron a témoigné que, lors de sa visite du 3 février 2021, il a pu constater lesdites accumulations. Il a souligné que les accumulations étaient d’une largeur assez importante au centre, et que le problème d’accumulation de glace était visible sur les deux (2) côtés de l’édifice, ce qui lui indique que le désordre est présent dans les deux (2) unités. Il a précisé que, même si la présence de moisissure s’avère différente à l’intérieur des sous-toits, et même si lesdits sous-toits sont séparés par un mur mitoyen, l’entretoit reste une aire commune, les problèmes de ventilation sont équivalents sur les deux (2) côtés et le niveau d’intégrité du bâtiment est le même.

 

Ce que je retiens de l’argumentaire de l’Administrateur

 

[23]      L’Administrateur avait auparavant communiqué son intention de soulever un moyen préliminaire en irrecevabilité de la demande d’arbitrage en raison de la tardiveté de la dénonciation, ce qui aurait eu pour effet d’exclure la réclamation du Bénéficiaire dépendamment de la gravité du désordre (les parties étaient en accord que s’il s’agissait d’un vice caché, la dénonciation a été faite en temps utile). Au début de l’audience, l’Administrateur a choisi d’entendre la preuve et l’argumentaire du Bénéficiaire avant de décider s’il souhaitait poursuivre avec son moyen préliminaire. Après avoir entendu la preuve, l’Administrateur a décidé de ne pas poursuivre le moyen préliminaire.

 

[24]      En tant que témoin pour l’Administrateur, M. Yvan Gadbois, l’auteur des décisions administratives dans l’espèce, reconnaît la présence d’un problème important d’étanchéité dans l’unité 3196, même s’il ignore la source du problème et la raison pour laquelle le problème s’avère plus important sur le côté de l’unité 3196 que sur celui de 3198. Certes, il constate que s’il avait à réécrire sa décision aujourd’hui, il en viendrait à la conclusion qu’il s’agissait d’un problème. Sur la base du rapport d’expertise de M. Bergeron, M. Gadbois admet également que le problème reviendra sans question.

 

[25]      Par contre, l’Administrateur est en désaccord avec la solution proposée par l’expert M. Bergeron, soit une intervention des deux côtés de l’entretoit. Dans son estimation, le fait que le coupe-feu/mur mitoyen continue jusqu’au toit fait en sorte que les entretoits du 3196 et du 3198 sont deux entités séparées et il serait alors inapproprié d’appliquer une même solution aux deux côtés, surtout considérant que l’on n’a pas constaté la présence de moisissure dans l’unité 3198 lors de la visite des lieux le 3 février 2021.

 

[26]      L’Administrateur souligne que dans le cadre du Règlement, l’Entrepreneur a le libre choix des travaux correctifs et n’est pas tenu à adopter la meilleure solution possible. À cet effet, l’Administrateur cite la décision arbitrale dans Racaniello et Ricci c. Développement Domont Inc. Aux paragraphes 119 et suivant, cette décision cite Demers-Brisson et 9141-1074 Québec inc. (Construction Norjo) sous la plume du soussigné :

 

« [16] Considérant de plus qu’un entrepreneur (ou le prestataire de services) a le libre choix des moyens d’exécution et qu’il n’existe entre ce(s) dernier(s) et l’administrateur et les bénéficiaires aucun lien de subordination; le choix des correctifs et/ou la méthode de correction appartient à l’entrepreneur (in fine, article 2099 C.c.Q.) sujet bien entendu, et tel que ci-haut repris, à son obligation de résultat. »

 

[27]      Dans Racaniello, l’arbitre a appliqué ce principe pour conclure comme suit :

 

« [121] Le Tribunal d’arbitrage ne rend ici aucune décision sur le détail des travaux correctifs qu’il doit effectuer selon les règles de l’art ».  

 

[28]      L’Administrateur cite également une décision de la Cour d’appel, Construction Réal Landry inc. c. Rae, 2011 QCCA 1851, où la Cour avait à statuer sur le caractère raisonnable d’une décision arbitrale dans laquelle l’arbitre avait à choisir entre trois (3) solutions envisagées par les experts. L’arbitre a fini par rejeter la solution proposée par l’expert des bénéficiaires en faveur d’une option moins invasive, tout en soulignant que les bénéficiaires retenaient tous leurs droits pour poursuivre l’entrepreneur si l’effet de la solution retenue était de diminuer la valeur du bâtiment ou de causer quelconque autre préjudice. La Cour d’appel a jugé la décision raisonnable, s’exprimant comme suit :

 

« [30] Certes, la solution recommandée par l’expert des intimés serait plus durable que celle favorisée par la Garantie et par l’arbitre. Toutefois, le rôle de l’arbitre, rappelons-le encore une fois, n’était pas de vérifier si l’administrateur avait choisi « la meilleure solution possible », mais seulement de s’assurer que la solution retenue était conforme au plan. En outre, la preuve est lacunaire sur la durée de vie de la membrane d’étanchéité. »

 

Analyse

 

[29]      Considérant que toutes les parties s’entendent sur la nature et gravité du désordresoit un vice cachéet le fait que la dénonciation fut faite en temps utile, il ne me reste qu’à statuer sur la nécessité de l’intervention requise.

 

[30]      Le désaccord dans l’espèce entoure essentiellement l’intensité de l’intervention requise afin de régler adéquatement le désordre décrit par l’expert M. Bergeron dans son rapport et son témoignage, et surtout de savoir à quel point une intervention est justifiée sur le côté de l’unité 3198 (et, si oui, à quel point cette intervention devrait être invasive). Le Bénéficiaire demande au Tribunal arbitral d’ordonner à l’Entrepreneur d’entreprendre les travaux correctifs tel que décrit dans le rapport d’expertise de M. Bergeron, le tout sous supervision d’un individu choisi par le Bénéficiaire.  

 

[31]      Je souligne que l’unique individu qualifié pour parler en détail de la source et des effets du désordre en l’espèce est M. Bergeron (l’Entrepreneur n’était pas en mesure lors de l’audience de témoigner sur le sujet des travaux correctifs entrepris auparavant et en quoi la situation aurait évolué ou régressée depuis 2018). Je note également que le rapport d’expertise de M. Bergeron est d’une excellente qualité et explique très clairement les problèmes tels que constatés. Ses recommandations sont clairement détaillées et liées aux problématiques décrites. De plus, il n’y a pas d’autre proposition d’intervention devant moi.

 

[32]      Cependant, et tel que fut répété à de nombreuses reprises dans les décisions antérieures sous le plan de garantie et dans la jurisprudence, l’entrepreneur qui a le libre choix des moyens correctifs dans la mesure où les moyens choisis sont conformes au plan ne proscrit pas pour autant au Tribunal d’ordonner l’exécution d’une solution possible, et il n’est pas question pour le Bénéficiaire (ni l’Administrateur) de subordonner l’Entrepreneur à leurs propres préférences ou positions, à moins que la solution retenue par l’Entrepreneur soit en respect du plan et de son obligation de résultat.

 

[33]      Pour ces raisons, le soussigné est prêt à accueillir la demande du Bénéficiaire et puisqu’il n’y a pas alors de réel débat qui subsiste sur la nature et l’étendue des correctifs en raison du fait que la seule preuve retenue est celle offerte par le rapport d’expertise de M. Renaud Bergeron, il en va de même que je suis aussi prêt à ordonner à l’Entrepreneur d’entreprendre spécifiquement les travaux recommandés par M. Bergeron dans son rapport. L’Entrepreneur aura par contre le libre choix des moyens d’exécution et des méthodes de correction.

 

POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL D’ARBITRAGE :

 

ACCUEILLE à la demande du Bénéficiaire ;

 

ORDONNE à l’Entrepreneur et, à défaut, à l’Administrateur d’effectuer des travaux pour rectifier le désordre, ce désordre tel que décrit dans le rapport d’expertise de M. Renaud Gagnon en date du 4 février 2021, à savoir :

 

        Retirer le pontage de la toiture (3196 et 3198);

        Retirer l’isolant en vrac (3196 et 3198);

        Décontaminer le comble de l’unité 3196 (décontaminer 3198 si des traces sont observées en cours de travaux);

        Appliquer un rang de mousse d’uréthane sur toute la surface du plafond (3196 et 3198);

        Compléter l’isolation (isolant en vrac ou mousse d’uréthane selon le choix) (3196 et 3198);

        Remettre en place le pontage et le revêtement de toiture (3196 et 3198);

        Assurer l’équilibre de la ventilation des combles (3196 et 3198).

 

PERMET à l’Entrepreneur d’adresser et de corriger le désordre selon la méthode qu’il suggère et/ou considère approprié, sujet à son obligation de résultat ;

 

RÉSERVE au Bénéficiaire le droit de s’adresser de nouveau à l’Entrepreneur et à l’Administrateur en temps utile, si la méthode corrective s’avère inefficace ;

 

ORDONNE, vu l’article 123 du Règlement, que l’Administrateur assume les frais d’arbitrage relatifs aux conclusions précitées et la présente décision ;

 

LE TOUT, avec les frais de l’arbitrage tel qu’ordonné à la charge de La Garantie Construction Résidentielle conformément au Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs, avec les intérêts au taux légal majoré de l’indemnité additionnelle prévue à l’article 1619 du Code civil du Québec à compter de la date de la facture émise par l’organisme d’arbitrage, après un délai de grâce de trente (30) jours.

 

 

 

Montréal, le 27 mai 2021

 

 

 

 

 

_______________________

Michel A. Jeanniot, ClArb.