ARBITRAGE En vertu du Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs (Décret 841-98 du 17 juin 1998) | |
CANADA |
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Province de Québec |
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Organisme d’arbitrage autorisé par la Régie du bâtiment : | |
Centre Canadien d’Arbitrage Commercial (CCAC) | |
No dossier Garantie : | 8077 |
No dossier CCAC : | S23-041201-NP |
No dossier Arbitre : | 308944-14 |
Entre |
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S.D.C. BOBOIS PHASE 2 | |
Bénéficiaire |
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Et |
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LES TOURS UTOPIA INC. / DOMAINE BOBOIS | |
Entrepreneur |
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Et |
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GARANTIE CONSTRUCTION RÉSIDENTIELLE | |
Administrateur de La Garantie | |
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SENTENCE ARBITRALE |
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Arbitre : |
Me Pierre Champagne |
Pour le bénéficiaire : | Monsieur Ahmed (Ted) Hassanein |
Pour l’entrepreneur : | Monsieur André Lacombe |
Pour l’administrateur : | Me Marc Baillargeon |
Date(s) d’audience : | 19 octobre 2023 |
Lieu d’audience : | Montréal |
Date de la décision : | 9 février 2024 |
[1] Il s’agit d’une demande d’arbitrage suite à une décision de l’Administrateur en date du 27 mars 2023, ayant rejeté sur tous les points la demande du Syndicat Bénéficiaire.
[2] La demande d’arbitrage est du 12 avril 2023.
[3] Le cahier de pièces de l’Administrateur, concernant sa réclamation 8077, comporte les pièces A-1 à A-10; la demande du Syndicat Bénéficiaire, soit le formulaire de dénonciation et le formulaire de réclamation sont les pièces A-1 et A-2, la décision de l’Administrateur du 27 mars 2023 étant la pièce A-8.
[4] Toutes les parties ont été convoquées à l’audition mais seul le représentant du Syndicat Bénéficiaire, Monsieur Ahmed (Ted) Hassanein, s’est présenté.
[5] L’immeuble comporte seize (16) unités détenues en copropriété divise. Les appareils de chauffage et de climatisation (thermopompes) sont situés, en partie, dans le sous-sol de l’immeuble étant l’allée de circulation du garage, au lieu d’être installés à l’extérieur.
[6] La dénonciation du Syndicat Bénéficiaire comporte deux points, le premier et le plus important étant un défaut de conception lors de la construction et l’installation du système de chauffage à l’intérieur du garage, plutôt qu’à l’extérieur.
[7] Selon la pièce A-1, le Syndicat Bénéficiaire aurait découvert les effets négatifs et la véritable nature de ce problème le 20 janvier 2022.
[8] Le Syndicat mentionne un deuxième point concernant l’entrée du garage, située à l’extérieur, le problème ayant été découvert le 30 mars 2022. Cependant, tel qu’il appert de la décision de l’Administrateur (A-8), il s’agit d’une part de la conception de l’allée véhiculaire d’accès au garage, décrite comme étant le point 2 dans la décision de l’Administrateur (A-8), et, toujours selon l’Administrateur, un troisième point concernant une dépression de la dalle de béton sous la porte de garage.
[9] Le Tribunal traitera donc de ces trois (3) sujets dans la séquence proposée par l’Administrateur.
[10] À titre de point préliminaire, et tel que mentionné par l’Administrateur, à la page 5 de sa décision (A-8), aucun avis de fin des travaux n’a été remis par l’Entrepreneur. En conséquence, le délai de six (6) mois suivant la réception de l’avis de fin des travaux ne saurait s’appliquer ici, puisqu’une des quatre (4) conditions du Règlement n’a pas été remplie. Aucun avis de fin des travaux n’a été envoyé par l’entrepreneur. Cette condition de l’article 25.1 n’a donc pas été remplie et il n’y a pas de date de réception « présumée » des parties communes. Il ne saurait donc ici être question d’expiration d’aucun délai.1
[11] Lors de l’audition, le représentant du Syndicat Bénéficiaire mentionne que sa plainte ne portait pas tant sur le coût excessif du chauffage, mais bel et bien et surtout sur le défaut de conception, c’est-à-dire l’installation d’unités de thermopompe à l’intérieur de l’immeuble, accrochées aux murs de l’allée du stationnement en sous- sol, plutôt qu’à l’extérieur. L’Administrateur a été en position de constater cette situation, tel qu’il appert des photos prises et apparaissant à la page 7 de sa décision (A-8).
[12] Le tribunal n’a bénéficié d’aucune preuve adverse. Il doit donc se fier à la preuve faite par le représentant du Syndicat Bénéficiaire, Monsieur Hassanein. Cette preuve, bien que succincte, est parfaite.
[13] Le témoin a mentionné que dans les autres phases du projet, les unités de chauffage, ventilation et air climatisé (HVAC) ont été installées à l’extérieur des édifices, et non pas à l’intérieur en sous-sol, comme c’est le cas ici. Cet élément, en principe, ne serait d’aucune pertinence puisque ce qui a pu se faire chez le voisin ne devrait pas influencer la décision à rendre concernant l’immeuble sujet de la présente demande.
[14] Mais dans les circonstances, force est d’admettre que le fait d’avoir installé les unités à l’extérieur pour les autres phases, corrobore la thèse du Syndicat bénéficiaire.
[15] Effectivement, vu le nombre d’unités mécaniques installées au sous-sol, le tout développe une chaleur excessive en été, et refroidit inutilement le garage en hiver, nécessitant ainsi un apport de chauffage.
[16] Lors de l’audition, l’Arbitre soussigné a demandé au représentant du Syndicat Bénéficiaire de compléter sa preuve, lorsqu’il mentionnait que cette installation avait été faite contrairement aux instructions du fabricant.
1 Voir article 25.1 du Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs, ch. B-1.1, r.8.
[17] Or, le représentant a bien fait ses devoirs, et a obtenu, à la demande de l’Arbitre, non pas un document de type général, une analyse d’un expert quelconque, ou un manuel qui s’appliquerait à d’autres appareils, mais bel et bien LE manuel d’installation et d’opération du fabricant, applicable aux appareils installés ici.
[18] Dans son courriel du 21 octobre 2023, le représentant du Syndicat fait référence à la documentation pertinente, avec les renvois tout aussi pertinents, savoir le manuel technique de la compagnie Goodman, appelé « Goodman Technical Manual GSZ/VSZ 13SEER Split System Heat Pumps », comportant une date de modification de février 2013. Ce document est bel et bien le manuel d’instructions du fabricant pour les unités en question.
[19] Le représentant du Syndicat Bénéficiaire a d’ailleurs fourni une photographie d’une des unités, démontrant qu’il s’agit bien d’unités du modèle GSZ 130361B, couvertes par le manuel qu’il produit pour supporter sa preuve.
[20] Tel qu’il appert de la page 4 du manuel du fabricant :
« This unit is for outdoor installation only. »
[21] Quant au reste, il s’agit tout simplement d’une question de gros bon sens. L’installation d’une seule unité aurait constitué un défaut ou vice de conception et de construction. Il s’agit ici de l’installation de plusieurs unités qui, en pleine utilisation, produisent une chaleur inacceptable. Même s’il s’agit d’un garage situé au sous-sol de l’immeuble, il est difficile de concevoir qu’on ait voulu le réchauffer en été et le refroidir en hiver !
[22] Pour le Tribunal, l’Entrepreneur, en contrevenant aux règles d’installation contenues au manuel du fabricant, a également contrevenu aux règles de l’art les plus élémentaires.
[23] Une telle installation est inacceptable et les unités devront être déplacées à l’extérieur de l’édifice.
[24] Quant aux coûts de chauffage supplémentaires causés par cette installation défectueuse, une expertise aurait sans doute été requise et la preuve est trop ténue sur ce point. Le Tribunal ne la retient pas.
[25] Il s’agit effectivement ici de l’extérieur du bâtiment. Conformément à la décision rendue par l’Administrateur, il s’agit d’une exclusion prévue par le paragraphe 9 de
l’article 29 du Règlement, excluant tout ouvrage situé à l’extérieur du bâtiment, dont
les trottoirs et les allées.
[26] De l’avis du Tribunal, et selon la preuve du représentant du Syndicat Bénéficiaire, la véritable découverte de cet affaissement léger aurait été à l’hiver 2022. Certaines constatations ont pu être faites avant, mais la réalisation du dommage, soit le léger affaissement de la dalle sous la porte de garage est récente.
[27] De plus, il ne s’agit pas d’une simple malfaçon, mais bel et bien d’un vice d’ordre structurel, aussi léger soit-il.
[28] En conséquence, la dalle au-dessous de la porte du garage devra être relevée pour bien appuyer cette dernière lors de sa fermeture.
a) ACCORDE la demande du Syndicat Bénéficiaire concernant le point 1
« Chauffage de l’allée véhiculaire en sous-sol (vice de conception, de construction pour le Syndicat Bénéficiaire) ».
b) REJETTE la demande du Syndicat Bénéficiaire quant au point 2 « Conception de l’allée véhiculaire d’accès au garage ».
c) ACCORDE la demande du Syndicat Bénéficiaire quant au point 3
« Dépression de la dalle de béton sous la porte de garage ».
d) ORDONNE à l’Administrateur de faire effectuer les travaux nécessaires suivants :
a. Déplacer les seize (16) unités thermopompes HVAC, présentement situées dans l’allée de circulation du garage en sous-sol, à l’extérieur du bâtiment.
b. Effectuer les travaux requis pour relever, de façon durable, la dalle au- dessous de la porte du garage, pour bien appuyer cette dernière lors de sa fermeture.
e) RÉSERVE sa compétence uniquement pour trancher, à la demande de l’une ou l’autre des parties, toute difficulté relative à l’application de l’une ou l’autre
des ordonnances contenues aux présentes, sans autre procédure préalable que l’envoi à l’Arbitre et aux autres parties d’un avis écrit à cet effet, accompagné de la preuve de notification appropriée aux parties.
f) ORDONNE que les coûts de l’arbitrage soient à la charge de l’Administrateur en conformité de l’art. 123 du Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs.
g) RÉSERVE à l’Administrateur ses droits à être indemnisé par l’Entrepreneur, pour toute perte encourue ou tout déboursé effectué pour les travaux requis (para. 5 de l’annexe II du Règlement), incluant les coûts exigibles pour l’arbitrage (para.19 de l’annexe II du Règlement), en ses lieu et place et ce, conformément à la Convention d’adhésion prévue à l’article 78 du Règlement.
h) LE TOUT, avec les coûts et frais de l’arbitrage à la charge de l’Administrateur, conformément au Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs avec les intérêts au taux légal majoré de l’indemnité additionnelle prévue à l’article 1619 du Code civil du Québec à compter de la date de la facture émise par l’organisme d’arbitrage, après un délai de grâce de 30 jours.
Signé à Montréal,
ce 9ème jour du mois de février 2024
Signature numérique de Pierre
Pierre Champagne Champagne
Date :_2024.02.09 16:47:06 -0_5'00'
Me Pierre Champagne, LL.M, Arbitre 2000, avenue McGill College Bureau 1600 Montréal (Québec) H3A 3H3 |
Courriel : champagne.p@djclegal.com |