ARBITRAGE EN VERTU DU RÈGLEMENT SUR LE PLAN DE GARANTIE
DES BÂTIMENTS RÉSIDENTIELS NEUFS (DÉCRET 841-98)

ENTRE :

 

 

JOSÉE PEDNEAULT
YVES GAGNON

 

 

(LES « BÉNÉFICIAIRES »)

ET :

 

 

LA GARANTIE DES BATIMENTS RÉSIDENTIELS
NEUFS DE L’APCHQ INC.

 

 

(L’« ADMINISTRATEUR »)

ET :

 

 

GROUPE IMMOBILIER FARAND INC.

 

 

(L’« ENTREPRENEUR »)

SENTENCE ARBITRALE

Arbitre :                                                           Me Johanne Despatis

 

Comparutions pour les bénéficiaires :                M. Yves Gagnon assisté de : Mme Josée Pedneault

M. Yvon Sauvé

Comparutions pour l’administrateur :

Me François Laplante assisté de : M. Michel Hamel,

Comparutions pour

l’entrepreneur :

Mme Sylvie Poirier assistée de:

 M. Daniel Farand M. Carol Bernard

Date d’audience :

Dates de réception correspondance : Lieu d’audience :

Date de la sentence :

20 octobre 2005

28 octobre et 9 novembre 2005 Vaudreuil-sur-le-Lac, Québec

21 novembre 2005

Adjudex inc. 0507-8204-GAMM S/A 8015-05

 

 


I
LE RECOURS

[1]               Dans une demande d’arbitrage datée du 19 juillet 2005, madame Josée Pedneault et monsieur Yves Gagnon, les bénéficiaires, contestent en vertu de l’article 19 du Règlement sur le Plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs (décret 841-98), le Règlement, les éléments suivants de la décision rendue le 27 juin 2005 par la Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ inc., l’administrateur, suite à des réclamations relatives à leur propriété nouvellement construite par Groupe Immobilier Farand inc., l’entrepreneur :

« Concernant les points qui suivent, nous sommes d’avis que les situations observées ne peuvent être considérées comme des malfaçons pouvant être de nature à porter atteinte à la qualité, la sécurité ou l’utilisation du bâtiment

28. Fascias d’aluminium extérieurs gondolés et asymétrique à refaire [...]

31 Sablage et vernissage de l’escalier de la main courante menant à l’étage

[...], nous n ’avons constaté aucune malfaçon lors de notre visite.

Le travail efectué rencontre selon nous, les tolérances habituelles, reconnues dans le milieu de la construction et les règles de l’art.

[2]               Initialement, j ’étais également saisie de la contestation par les bénéficiaires du point 6 : « Retouches de peinture ». Toutefois, ce point a été réglé à l’audience, l’entrepreneur s’étant engagé à compléter d’ici le 28 octobre prochain les retouches de peinture sur les moulures du walk-in et sur le manteau du foyer.

[3]               J’étais également saisie de la contestation par les bénéficiaires du point 24 : « Étanchéité des solins des fenêtres de la chambre des maitres et à la tourelle avant à assurer ». A cet égard, il fut convenu que cette réclamation ne concernait pas l’étanchéité des solins mais plutôt les travaux de finition à ces endroits ainsi qu’à la tourelle arrière. L’entrepreneur a déclaré à l’audience qu’il allait faire le nécessaire pour corriger la situation d’ici le 28 octobre 2005.

[4]               J’étais également saisie du point 30 : « Étanchéité et isolation du cadre de la porte située entre le garage et le sous-sol à assurer ». Toutefois, les bénéficiaires ont indiqué en début d’audience que ce point n’était plus en litige de sorte que je n’ai pas eu à m’y pencher.

[5]               J’étais également saisie du point 42 : «Isolation derrière le panneau électrique ». À l’audience, l’entrepreneur a déclaré qu’il allait faire le nécessaire en vue de corriger ce problème d’ici le 28 octobre 2005 de sorte que je n’ai pas eu à me pencher sur cette question.

[6]               Je donne cependant acte de ces déclarations de désistement et de règlement dans mes conclusions finales.

[7]               À la suite d’une conférence téléphonique tenue avant l’audience avec les parties, les bénéficiaires ont annoncé le 3 octobre 2005 qu’ils entendaient également contester les points 25, 29, 32, 33 et 40 du rapport rendu par l’administrateur. Le matin de l’audience, ils ont fait savoir qu’ils voulaient également en contester les points 19, 20, 27, 35, 36, 38 et 39.

[8]               Pour sa part, l’administrateur m’a informée qu’il entendait présenter un moyen d’irrecevabilité à l’encontre de ces demandes d’ajout annoncées par les bénéficiaires à leur demande d’arbitrage initiale.

[9]               À l’audience, nonobstant le moyen soulevé qui a été pris sous réserve, les bénéficiaire ont indiqué que le point 20, une addition annoncée, n’était plus en litige. De même un règlement est intervenu au sujet du point 33 « Céramique tachetée de teinture à nettoyer ou remplacer dans l’entrée menant au garage », l’entrepreneur s’étant engagé à remplacer la moulure installée à cet endroit d’ici le 28 octobre 2005.

[10]           Ainsi, les points visés par le moyen préliminaire présenté par l’administrateur sont les suivants :

Concernant les points qui suivent, nous sommes en présence de situations apparentes qui, contrairement aux exigences de l’article 3.2 du contrat de garantie, n ’ont pas été dénoncées par écrit au moment de la réception du bâtiment.

[...]

19. Absence de bordure de granit derrière la cuisinière

Nous avons constaté la présence d’un espacement derrière la cuisinière. Les bénéficiaires prétendent qu ’il devait y avoir une finition de granit.

Nous sommes d’avis que la situation observée ne peut être considérée comme une malfaçon pouvant être de nature à porter atteinte à la qualité, la sécurité ou l’utilisation du bâtiment.

Concernant les points qui suivent, les bénéficiaires n ’ont pas été en mesure de nous démontrer la présence de malfaçons lors de l’inspection

[...]

25. Étanchéité du mur du garage adjacent à la maison à assurer

Nous n ’avons constaté aucune malfaçon au système d’étanchéité à l’air du mur contigu au bâtiment, le pare-vapeur assurant l’étanchéité.

[...]

27. Robinet mural du garage à solidifier

Concernant les points qui suivent, nous sommes d’avis que les situations observées ne peuvent être considérées comme des malfaçons pouvant être de nature à porter atteinte à la qualité, la sécurité ou l’utilisation du bâtiment.

29. Finition d’aluminium au pourtour de la porte de garage [...]

32. Escalier menant au garage

[...], nous n ’avons constaté aucune malfaçon lors de notre visite.

Le travail efectué rencontre selon nous, les tolérances habituelles, reconnues dans le milieu de la construction et les règles de l’art.

35.       Largeur et profondeur de l’espace conçu pour encastrer le réfrigérateur

Nous avons constaté que le réfrigérateur n ’était pas entièrement encastré dans le meuble.

Aucun dessin d’atelier n ’était disponible pour nous permettre de vérifier les spécifications des modules.

36.       Bande de finition de chaque côté du lave-vaisselle [...]

38.  Égratignures sur le plancher du second étage

Nous avons constaté que les égratignures sont mineures et ne peuvent être observées que sous un certain angle et une certaine luminosité.

Elles ne sont peu ou pas du tout visibles à hauteur d’homme.

39.  Joint apparent dans la corniche de la salle de bain des maitres

A la suite de correctifs efectués par l’entrepreneur, le joint est maintenant légèrement apparent.

40.  Joint apparent sur le cadre de la fenêtre ovale.

II
MOYEN PRÉLIMINAIRE

[11]           Avant de passer au fond du litige, il y a lieu de décider d’abord du moyen d’irrecevabilité présenté par l’administrateur et qui vise certains éléments du rapport du conciliateur présenté le 27 juin 2005. Il s’agit des points 19, 25, 27, 29, 32, 35, 36, 38, 39 et 40.

III
PLAIDOIRIES SUR LE MOYEN PRÉLIMINAIRE

L’administrateur

[12]           Pour le procureur de l’administrateur, un bénéficiaire ne peut en aucune circonstance amender sa demande d’arbitrage pour y ajouter la contestation de points du rapport qui n’auraient pas été contestés au départ.

[13]         Essentiellement, soutient Me Laplante, les ajouts annoncés sont des amendements irrecevables au motif qu’ils constitueraient une demande nouvelle et présentée hors délai puisque présentée en octobre 2005 alors que la demande initiale était du 19 juillet 2005. En effet, plaide le procureur, le recours à l’arbitrage est soumis à un processus impératif qui exige qu’une demande soit faite dans un délai précis qu’on ne peut contourner sous couvert d’une demande d’amendement. A cet égard, il invoque la clause 19 du Règlement.

[14]           Le procureur a invoqué et commenté les autorités suivantes : Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ inc. et Me Suzanne Chartier, CA, 700-17-002454-055, 24 février 2005, Juge Clément Gascon; Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ inc. et Desindes et Larochelle, CA, 500-09-013349-030, 15 décembre 2004, Juges Thérèse Rousseau-Houle, Benoit Morin, Pierrette Rayle.

Les bénéficiaires

[15]           Monsieur Gagnon soutient que le libellé de la clause 2.1.1 du Contrat de garantie émis en leur faveur, clause relative au recours à l’arbitrage, n’exige pas qu’une demande d’arbitrage comporte une énumération exhaustive des points contestés d’une décision.

[16]           Concrètement, monsieur Gagnon explique que son omission d’identifier nommément dans sa demande initiale chacun des points contestés résulte d’une méprise de sa part au sujet du recours exercé, recours dont il dit n’avoir pas bien saisi l’étendue avant la tenue de la conférence téléphonique mentionnée plus haut. Il ajoute que même les informations reçues jusque-là de l’APCHQ et du service d’arbitrage ne spécifiaient pas que la demande devait comporter l’énumération exhaustive des points qu’il entendait porter en arbitrage. Il invoque en outre l’autorité suivante : Thivierge et Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ inc., SA, 040827001, 29 novembre 2004, arbitre Marcel Chartier.

[17]           En réponse à l’argument de l’administrateur au sujet du caractère impératif du délai de la clause 19 du Règlement, le bénéficiaire a invoqué et commenté les autorités suivantes : Thivierge et Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ inc., SA, 19 avril 2004, arbitre Marcel Chartier; Pariente-Muller et Perreault et Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ inc., SA, 16 mars 2005, arbitre Suzanne Chartier; Les maisons Zibeline inc. et Garantie des maisons neuves de l’APCHQ, SA, 18 juillet 2005, arbitre Jeffrey Edwards.

IV
ANALYSE ET DÉCISION RELATIVES
AU MOYEN PRÉLIMINAIRE

[18]           Essentiellement, pour décider du moyen préliminaire, il y a lieu de déterminer si dans le cadre du présent recours en arbitrage, les bénéficiaires peuvent être autorisés à amender la procédure afin d’ajouter aux points en litige mentionnés dans leur demande initiale d’autres non mentionnés à celle-ci. Ce moyen vise les points 19, 25, 27, 29, 32, 35, 36, 38, 39 et 40.

[19]           Le Code de procédure civile régit généralement l’ensemble des questions procédurales en matières civiles. Son article 199 qui porte sur l’amendement peut donc sûrement guider le Tribunal dans le traitement de ce moyen préliminaire. Cette disposition se lit ainsi :

« Une partie peut, en tout temps avant jugement, amender leurs actes de procédure sans autorisation et aussi souvent que nécessaire en autant que l’amendement n ’est pas inutile, contraire aux intérêts de la justice ou qu’il n’en résulte pas une demande entièrement nouvelle sans rapport avec la demande originaire.

L’amendement peut notamment viser à modifier, rectifier ou compléter les énonciations ou conclusions, invoquer des faits nouveaux ou faire valoir un droit échu depuis la signification de la requête introductive d’instance. »

[20]              Selon cette disposition, une partie peut en tout temps avant jugement amender un acte de procédure, sauf si l’amendement est inutile, contraire aux intérêts de la justice ou s’il en résulte une demande entièrement nouvelle sans rapport avec la demande originaire.

[21]              En l’espèce, selon ma compréhension des prétentions de l’administrateur, l’amendement serait inadmissible en ce qu’il constituerait une demande entièrement nouvelle. Étant nouvelle, la demande en question n’aurait fatalement pas été présentée à l’intérieur des délais prescrits au Règlement et devrait être rejetée pour cause de tardivité.

[22]            La question se pose donc de savoir s’il résulterait des amendements souhaités par les bénéficiaires « une demande entièrement nouvelle sans rapport avec la demande originaire »?

[23]              Pour bien répondre à cette question, il importe à nos yeux d’apprécier la demande dans son contexte factuel et juridique. On retrouve aux articles 17 et 18 du Règlement le mécanisme de mise en œuvre de la garantie. Ces dispositions se lisent ainsi :

« 17. Chaque bâtiment visé par la garantie doit être inspecté avant la réception. Cette inspection doit être efectuée conjointement par l'entrepreneur et le bénéficiaire à partir d'une liste préétablie d'éléments à vérifier fournie par l'administrateur et adaptée à chaque catégorie de bâtiments. Le bénéficiaire peut être assisté par une personne de son choix.

L 'inspection doit être difé rée lorsque la réception du bâtiment intervient après la fin des travaux.

18. La procédure suivante s'applique à toute réclamation faite en vertu du Règlement de garantie :

1° dans le délai de garantie d'un, 3 ou 5 ans selon le cas, le bénéficiaire dénonce par écrit à l'entrepreneur le défaut de construction constaté et transmet une copie de cette dénonciation à l'administrateur en vue d'interrompre la prescription;

20 au moins 15 jours après l'expédition de la dénonciation, le bénéficiaire avise par écrit l'administrateur s 'il est insatisfait de l'intervention de l'entrepreneur ou si celui-ci n 'est pas intervenu; il doit verser à l'administrateur des frais de 100 $ pour l'ouverture du dossier et ces frais ne lui sont remboursés que si la décision rendue lui est favorable, en tout ou en partie, ou que si une entente intervient entre les parties impliquées;

30 dans les 15 jours de la réception de l'avis prévu au paragraphe 20, l'administrateur demande à l'entrepreneur d'intervenir dans le dossier et de l'informer, dans les 15 jours qui suivent, des mesures qu'il entend prendre pour remédier à la situation dénoncée par le bénéficiaire;

40 dans les 15 jours qui suivent l'expiration du délai accordé à l'entrepreneur en vertu du paragraphe 30, l'administrateur doit procéder sur place à une inspection;

50 dans les 20 jours qui suivent l'inspection, l'administrateur doit produire un rapport écrit et détaillé constatant le règlement du dossier ou l'absence de règlement et il en transmet copie, par poste recommandée aux parties impliquées;

60 en l'absence de règlement, l'administrateur statue sur la demande de réclamation et, le cas échéant, il ordonne à l'entrepreneur de rembourser le bénéficiaire pour les réparations conservatoires nécessaires et urgentes, de parachever ou de corriger les travaux dans le délai qu'il indique et qui est convenu avec le bénéficiaire;

[...] »

[24]           L'article 19 du Règlement traite en particulier du recours à la médiation ou à l'arbitrage. Il se lit ainsi :

«19. Le bénéficiaire ou l'entrepreneur, insatisfait d'une décision de l'administrateur, doit, pour que la garantie s'applique, soumettre le différend à l'arbitrage dans les 15 jours de la réception par poste recommandée de la décision de l'administrateur à moins que le bénéficiaire et l'entrepreneur ne s'entendent pour soumettre, dans ce même délai, le différend à un médiateur choisi sur une liste dressée par le ministre du Travail afin de tenter d'en arriver à une entente. Dans ce cas, le délai pour soumettre le différend à l'arbitrage est de 15 jours à compter de la réception par poste recommandée de l'avis du médiateur constatant l'échec total ou partiel de la médiation. »

[25]           Ainsi, ce qui selon le Règlement est susceptible d’être soumis à l’arbitrage est un différend dont l’essence est le désaccord du bénéficiaire, ou de l’entrepreneur, avec la décision rendue par l’administrateur suite à une réclamation faite en vertu du Règlement. Ce désaccord peut être total ou partiel.

[26]           En l’espèce, la demande d’arbitrage présentée par les bénéficiaires le 19 juillet 2005 constatait le désaccord des bénéficiaires avec des éléments de la décision de l’inspecteur qu’ils estimaient couverts par leur Contrat de garantie et que ce dernier avait dans sa décision écartés.

[27]           En l’espèce, la demande, que j’ai qualifiée de demande d’amendement, vise à ajouter aux objets spécifiques de l’arbitrage engagé le 19 juillet 2005, certains éléments de la même décision de l’administrateur mais qui n’avaient pas nommément été identifiés en juillet. Une chose est certaine, tous les éléments que souhaitent contester les bénéficiaires ont pour dénominateur commun d’être tirés tous de la décision de l’inspecteur du 27 juin 2005.

[28]           Nous sommes ici dans un contexte de consommation où un bénéficiaire exerce un recours qui se veut informel et convivial. On aurait tort d’y pécher par excès de formalisme.

[29]           Il s’en suit à mes yeux que l’on ne saurait dans un contexte comme celui-ci conclure que les amendements demandés constitueraient une demande entièrement nouvelle et sans rapport avec la demande initiale, la demande initiale est la contestation d’une décision bien précise de l’administrateur, décision qui définit le champ potentiel du différend. Autrement dit, la source de la demande originaire est la décision de l’administrateur et les éléments que les bénéficiaires veulent contester en proviennent tous. On ne saurait considérer la mention tardive de l’un ou l’autre comme une « demande entièrement nouvelle sans rapport avec la demande originaire ».

[30]           Les bénéficiaires en réalité ne font que demander de compléter, de préciser leurs énoncés et conclusions de départ. Or, l’alinéa 2 de l'article 199 du Code de procédure civile autorise expressément l'amendement qui vise « à modifier, rectifier ou compléter les énonciations ou conclusions d'une procédure ».

[31]           Cela dit, il est vrai que la demande des bénéficiaires faite à ce moment-ci est susceptible d’élargir la teneur de la preuve et des arguments présentés. Il n’empêche que cela n’en fait pas une demande entièrement nouvelle. Le débat porte toujours sur le bien fondé des conclusions de l’administrateur. Il va sans dire cependant que suivant les circonstances l’arbitre devra tenir compte de l’effet de surprise possible et permettre à tous de pouvoir se préparer à débattre convenablement des questions en litige.

[32]           En l’espèce, hormis l’argument formel rapporté plus haut, personne n’a prétendu que la demande d’amendement aurait pu être contraire aux intérêts de la justice, ce qui pourrait se concevoir si l’addition souhaitée devait causer des inconvénients ou entrainer des délais et des coûts qu’une action plus diligente aurait pu prévenir.

[33]           À l’opposé une demande présentée comme un amendement mais qui viserait en vérité des points qui n’ont pas été l’objet de l’inspection, et par conséquent de la décision de l’inspecteur, constituerait une véritable demande nouvelle sans aucun rapport avec la demande originaire. Autrement dit, on ne pourrait pas permettre au stade de l’arbitrage que des questions étrangères à la réclamation à l’inspection et au rapport de départ soient subitement l’objet d’un arbitrage. Bref, la demande d’arbitrage ne peut sûrement pas aller au-delà de l’objet de la réclamation et du rapport qui l’a suivie.

[34]           En conséquence ici, je considère admissible l’addition des points 19, 25, 27, 29, 32, 35, 36, 38, 39 et 40 de sorte que j’en traiterai au fond.


V
LES FAITS

[35]           Les bénéficiaires ont signé l’acte de réception de leur résidence située au 51 Des Caryers à Vaudreuil-sur-Le-Lac le 2 décembre 2004. Il s’agissait d’une nouvelle propriété construite par l’entrepreneur.

[36]            Ils ont par la suite fait savoir à l’entrepreneur qu’ils étaient insatisfaits de ses interventions censées avoir corrigé, ou parachevé, certains des éléments dénoncés au moment de la réception dans une liste dont la validité est admise. Leurs demandes à l’entrepreneur visaient aussi certains problèmes non signalés à la réception mais qu’ils estimaient couverts par le Règlement, à un titre ou à un autre.

[37]           C’est dans ces circonstances que l’administrateur a été saisi de l’affaire et que monsieur Michel Hamel, inspecteur-conciliateur au service de l’administrateur, a procédé à une visite des lieux le 31 mai 2005. Il a fait rapport le 27 juin suivant, rapport dont l’essentiel pertinent à nos fins est reproduit plus haut.

[38]           Insatisfaits de certaines des conclusions du rapport de l’inspecteur-conciliateur, les bénéficiaires se sont donc pourvus en arbitrage.

[39]           Je résume dans les paragraphes qui suivent les éléments de preuve présentés à l’égard des points demeurés en litige.

[40]           25: Étanchéité au gaz du mur du garage adjacent à la maison

[41]           Monsieur Gagnon explique avoir vainement demandé à l’entrepreneur de lui remettre un certificat de conformité lui garantissant que le mur du garage adjacent à la maison était bien étanche et, à défaut, de finir certains joints dans le garage pour s’en assurer. Selon le bénéficiaire, le pare-vapeur censé assurer cette étanchéité n’est pas continu à certains endroits visibles à l’œil nu et il lui est impossible d’obtenir l’assurance que le phénomène ne se produit pas aussi ailleurs où il est impossible de voir.

[42]           Les bénéficiaires ont fait entendre à titre d’expert monsieur Yvon Sauvé, technologue en génie civil, qui se réfère à la clause 9.10.16.3 du Code national du bâtiment, le CNB, pour affirmer qu’il y a problème :

« Lorsqu’un garage de stationnement dessert uniquement le logement auquel il est incorporé ou contigu, il fait partie intégrante du logement et la séparation coupe-feu exigée au paragraphe 2) entre le garage et le logement n ’est pas obligatoire, à condition :

a)      que la construction entre le garage et le logem ent forme une barrière eficace contre les vapeurs de carburant et les gaz d’échappement; et

b)      que toute porte située entre le garage et le logement soit conforme à l’article 9.1 0.13.15 »

[43]           Il réfère également à l’annexe A-9.10.9.16 3) du CNB où on peut lire :

« La barrière étanche aux gaz entre un logement et un garage doit fournir une protection contre l’oxyde de carbone et les vapeurs d’essence pénétrant dans le logement. Les ensembles de construction comportant un système d’étanchéité à l’air assurent une étanchéité adéquate au x gaz si certaines précautions sont prises aux endroits où les installations techniques traversent le mur ou le plafond. »

[44]           Tout en reconnaissant que le CNB ne définit pas le moyen à utiliser pour rendre le mur étanche, monsieur Sauvé affirme que le pare-vapeur en est un mais que puisqu’il est impossible de vérifier si celui installé par l’entrepreneur est continu on ne peut donc savoir s’il y a vraiment étanchéité.

[45]      Par contre, ajoute-t-il, là où des ouvertures ont été pratiquées, notamment pour l’installation de prises électriques, on peut constater que le pare-vapeur a été coupé de sorte que la situation ne serait pas conforme au CNB. Il signale en particulier un endroit situé sous l’escalier menant au garage où on peut clairement voir une ouverture, i.e. un trou entre le mur du garage et celui du sous-sol. Cette situation, selon lui, n’est pas non plus conforme au CNB.

[46]           Pour sa part, monsieur Hamel affirme avoir jugé après son inspection que les travaux effectués par l’entrepreneur pour assurer l’étanchéité respectaient l’esprit du CNB en ce sens que l’entrepreneur aurait fait le nécessaire pour rendre le mur aussi étanche que possible, son obligation n’était pas selon lui de le rendre parfaitement étanche. En effet, selon lui, si tel eût été le cas, le CNB aurait alors prévu des tests pour mesurer l’étanchéité.

[47]             Monsieur Hamel ajoute également que le mur intérieur de la résidence adjacent au garage est lui-même fini, ce qui constitue également une barrière en assurant aussi l’étanchéité.

[48]            Cela dit, il reconnait que le pare-vapeur avait bel et bien été coupé derrière les prises électriques mais selon lui, sans affecter l’étanchéité du mur. Quant à l’ouverture situé sous l’escalier et observée au cours de notre visite des lieux, monsieur Hamel reconnait qu’elle doit être bouchée.

[49]           Pour sa part, l’entrepreneur assure que le mur est étanche mais estime ne pas avoir l’obligation de fournir aux bénéficiaires un certificat de conformité. Il reconnait toutefois que le trou observé sous l’escalier doit être bouché et il s’engage à le faire.

[50]           27 : Robinet mural du garage à solidifier

[51]           Concernant ce point, monsieur Hamel explique l’avoir considéré exclu par le Règlement puisqu’il ne s’agissait pas selon lui d’un problème de malfaçon.

[52]             Selon monsieur Gagnon, le robinet n’est pas bien solidifié puisqu’il est possible de le faire bouger.

[53]             Selon l’entrepreneur, la situation est normale, le robinet étant bien vissé.

[54]           28 : Fascias d’aluminium extérieurs gondolés et asymétriques à refaire

[55]           Monsieur Hamel dit avoir lui-même observé que les fascias en question sont gondolés et asymétriques. Toutefois selon lui, ce problème, esthétique selon lui, n’est pas une malfaçon au sens du Règlement, i.e. un problème de nature à porter atteinte à la qualité, la sécurité ou l’utilisation du bâtiment.

[56]              La visite des lieux m’a permis de constater qu’effectivement ces fascias d’aluminium sont asymétriques, gondolés et qu’ils ont tendance à décoller. Selon monsieur Sauvé, l’installation de ces fascias ne rencontre pas les règles de l’art.

[57]              Selon l’entrepreneur, le fait que les fascias soient de couleur foncé en fait davantage ressortir les défauts mais il ne s’agirait pas de malfaçons.

[58]              29 : Finition d’aluminium au pourtour de la porte de garage

[59]              Comme pour le précédent, monsieur Hamel explique ne avoir considéré ce point couvert par le Règlement parce qu’il ne s’agissait pas selon lui d’une malfaçon comme il l’a décrite plus tôt mais d’une simple question d’esthétique. Ce point de vue est du reste partagé par l’entrepreneur.

[60]              Selon monsieur Gagnon, ce problème avait été dénoncé au moment de la réception.

[61]              La visite des lieux a permis de constater que le pourtour de la porte de garage est égratigné et qu’il était mal découpé à l’intérieur.

[62]              31 : Sablage et vernissage de l’escalier de la main courante menant à l’étage; 32 : Escalier menant au garage

[63]              Selon les bénéficiaires ces points ont été dénoncés au moment de la réception dans les termes suivants :

« Revernir les marches de l’escalier, des marque de ruban à masquer qui y était installé paraissent encore et des retouches sont à faire sur les rampes et barreaux.

[64]              L’entrepreneur assure que ces travaux ont été effectués.

[65]              Quant à monsieur Hamel, il a jugé là aussi qu’il n’y avait pas malfaçon au sens du Règlement et que la situation était acceptable. Il reconnait avoir vu des marques de ruban sur les marches en les regardant de près mais a jugé que dans l’ensemble le travail était acceptable quand on l’observait à une distance d’environ 10 pieds, à hauteur d’homme, alors qu’on n’apercevait plus les traces de ruban.

[66]           En revanche, le technologue Sauvé opine que le travail se devait d’être homogène et qu’il doit y avoir du vernis uniformément partout, ce qui n’est le cas. Selon monsieur Sauvé, on ne peut pas à une distance de 10 pieds avoir une vue d’ensembles des marches d’escalier. En outre, selon monsieur Sauvé, le travail n’a pas été fait selon les règles de l’art.

[67]           19 : Absence de bordure de granit derrière la cuisinière. 35 : Largeur et profondeur de l’espace conçu pour encastrer le réfrigérateur. 36 : Bande de finition de chaque côté du lave-vaisselle

[68]           Concernant le point 19, l’inspecteur Hamel affirme avoir considéré ce point exclu de la couverture du Règlement parce qu’il se serait, selon lui, agi d’une malfaçon apparente non dénoncée au moment de la réception du bâtiment. Ce qui a été dénoncé, ajoute monsieur Hamel, est le fait que les encastrements pour la cuisinière devaient être modifiés et non qu’il manquait une bordure de granit, ce qui d’ailleurs n’a pas été contredit.

[69]           Monsieur Gagnon dit avoir en possession la bordure de granit manquante et qu’il ne resterait qu’à l’installer.

[70]      Relativement aux points 35 et 36, monsieur Hamel a jugé qu’il n’y avait pas là malfaçon au sens du Règlement.

[71]           Selon monsieur Gagnon, les ouvertures prévues pour l’encastrement de ces électroménagers ne sont pas conformes aux spécifications données au sous-traitant de l’entrepreneur, affirmation qui n’a pas non plus été contredite.

[72]           Pour sa part, l’entrepreneur nie être responsable du problème.

[73]           38 : Égratignures sur le plancher du second étage

[74]           Comme pour plusieurs points, monsieur Hamel explique avoir considéré ce point exclu par le Règlement puisqu’il ne se qualifierait pas comme une malfaçon.

[75]           Il reprend essentiellement les mêmes explications que pour les points 31 et 32.

[76]           39 : Joint apparent dans la corniche de la salle de bain des maitres

[77]           Monsieur Gagnon explique que cette situation résulte du travail d’un sous-traitant de l’entrepreneur venu réparer une égratignure à la corniche de l’armoire de la salle de bain. Selon monsieur Gagnon, en réinstallant la corniche, la moulure a été déplacée et le joint est devenu apparent. Le témoignage de monsieur Gagnon n’est pas contredit.

[78] Toutefois, selon monsieur Hamel, ce point est exclu du Règlement puisqu’il ne constitue pas une malfaçon au sens de ce dernier.

 

[79] 40 : Joint apparent sur le cadre de la fenêtre ovale

 

[80] Monsieur Hamel explique avoir considéré ce point exclu par le Règlement puisqu’il ne s’agissait pas selon lui d’un problème de malfaçon au sens du Règlement.

[81] Hormis la visite des lieux qui m’a permis de constater qu’effectivement apparent aucune autre preuve n’a été présentée.

 


 

VI

PLAIDOIRIES

Les bénéficiaires

[82]         L’essentiel de l’argumentation des bénéficiaires se retrouve dans une lettre datée du 25 octobre 2005 et qu’il y a lieu de reproduire in extenso :

«Tout d’abord un élément qui nous a surpris c’est l’énoncé de l’Article 10 soumis par Me Laplante lors de l’audience et repris par le jugement de l’arbitre , Me Bernard Lefebvre, dans la cause Malette-Duncan c. Goyette, Duchesnes et Lemieux et l’administrateur de la Garantie, il nous était tout à fait inconnu.

Il nous semble que l’Article 10 et les énoncés retrouvés aux points 3 et 4 du contrat de Garantie, que le bénéficiaire signe, diffèrent. En effet, on peut croire en lisant le contrat de garantie que les exclusions cités aux points 4.2 à 4.5 sont des malfaçons couvertes par le plan de garantie si elles découlent d’un manquement de se conformer aux règles de l’art ou à une norme en vigueur applicable au bâtiment et qu’en plus elles portent atteintes à la qualité, à la sécurité ou à l’utilisation du bâtiment. On ne trouve aucune mention de cette nature quant à l’énoncé définissant les malfaçons couvertes par le plan de Garantie au point 3.2.

L'arbitre Lefebvre dans son jugement ne considère pas les énoncés du plan de garantie mais bien l'article 10 du règlement. Et il en vient à la conclusion à la page 10 que « Ainsi, la malfaçon dont il est question à l'article 10 du règlement a une extension moindre que celle qui découle de l'application de l'article 2111 du code civil du Québec ». Si le paragraphe 5 de l'article 10 est si prépondérant et qu'au jugement de l'arbitre Lefebvre il diminue la définition de malfaçon visé à l'article 211 du Code civil, pourquoi l'administrateur du plan de garantie a-t-il omis de l'inclure dans le contrat de garantie à la suite du point 3.4? Cette omission n'entraîne-t-elle pas que le contrat de garantie signé par l'entrepreneur et le bénéficiaire implique une interprétation plus large du terme malfaçon que celle de l'article 10 puisque selon l'article 136 « La signature apposée par l'entrepreneur lie l'administrateur »?

Dans son jugement l'arbitre Lefebvre conclut que l'arbitre doit déterminer s'il y a atteinte à la qualité, à la sécurité ou l'utilisation du bâtiment de façon objective malgré que les parties aient tendance à déterminer la qualité, la sécurité et l'utilisation du bâtiment sur des critères subjectifs. Selon lui, la question est de savoir si le défaut de conformité est une condition d'habitation normale dans le genre de bâtiment habité par les bénéficiaires.

Finalement, l'arbitre conclut dans sa décision pour le point 15 du bénéficiaire que le défaut observé constitue une malfaçon au sens du règlement puisqu'il ne découle pas de manquement normaux des matériaux mais bien d'une mauvaise utilisation des matériaux (bas de gamme) et à des défauts de ponçage et de vernissage. Il se rend donc à l'argument des bénéficiaires qu'il y a une atteinte à la qualité et la sécurité entraînant une perte de valeur marchande. Malgré que le conciliateur de l'administrateur n'ait conclut qu'à une très légère différence de niveau perceptibles à certains endroits de la parqueterie.

L'arbitre Ouellet dans son jugement du 16 septembre (050518001) en vient aux mêmes conclusions soit qu'il y a atteinte de la qualité sur une base esthétique.

« [36] En ce qui a trait au 2e alinéa de l'article 10, il faut établir que les situations qui nous intéressent dans le présent arbitrage, sont reliées au critère «qualité ». Il n'y eut aucune évidence de présenter à l'effet que la sécurité ou l'utilisation du bâtiment puisse être affectée.

[42] En l'occurrence, je suis convaincu que la qualité du bâtiment serait affectée si les malfaçons devant nous n'étaient pas corrigées. Il y a eu mauvaise construction en ce qui a trait aux points 17 et 18. Il y a eu mauvaises réparations en ce qui a trait aux points 20 et 25. »

Il nous semble que les points 28 à 42 de la décision de M. Hamel, que nous contestons en arbitrage, constitue des malfaçons au sens du règlement même dans son esprit plus restreint puisqu'il y a atteinte au niveau de la qualité. M. Hamel n'a pas amené à notre avis d'argument prouvant que les malfaçons que nous avons dénoncées ne sont pas dû à des défauts de conformité à la règle de l'art de la construction ou n'affecte pas la qualité. Il a plutôt affirmé que ces malfaçons sont tolérables selon les règles de l'art de l'inspection (regardé l'ensemble des travaux à dix pieds pour les murs et l'escalier, à hauteur d'homme les planchers, et à propos des défauts de fascia en façade, je ne l'aurais pas vu si vous ne me l'aviez pas montré).

Notre expert qui a aussi une expertise reconnue en inspection a dénoncé ces malfaçons suite à sa visite pré livraison. Ce qui nous intéresse ici c 'est plutôt de savoir s 'il y a eu défaut de conformité et si ce défaut entraîne une atteinte à la qualité, à la sécurité ou l'utilisation du bâtiment.

De plus lors de l'audience, M. Hamel laissait entendre que le point 6 qu'il avait évalué comme une malfaçon au sens du règlement n'en était pas une finalement et qu'il n'aurait pas dû nous l'accordé dans son rapport. Ceci démontre à notre avis la subjectivité de son rapport. Si on évalue ce point au sens de la décision de Me Lefebvre, il nous semble qu'il jugerait ce point comme une malfaçon portant atteinte à la qualité. En effet, les défauts dans l'application de la peinture découlent d'un travail mal fait par le peintre et affecte l'esthétisme de l'ensemble du travail et par conséquent la qualité. Ce qui ne serait pas le cas si par exemple on dénonçait une peinture bien appliquée mais une couleur un peu différente de ce que l'on voulait ou l'apparition de retrait normal dû aux matériaux.

Me Laplante suggérait aussi que les points 31 et 32, étaient plutôt couverts par l'article 3,1 comme parachèvement des travaux. Nous ne sommes pas de cet avis puisque l'entrepreneur a témoigné que le travail a été complété et que pour lui l'escalier est acceptable. Le fait d'ajouter ou non une dernière couche de vernis ne relève pas le professionnel qui a réalisé le travail de se conformer aux règles de l'art. Malgré qu'on doute ici que la dernière couche de vernis ait été appliquée, notre dénonciation relève plutôt d'un manquement lors de l'exécution des travaux que du manque pur et simple d'une couche de verni.

Nous avons démontré visuellement que les défauts comme le ponçage et le vernissage inégal ainsi que des marques de ruban à masquer contreviennent aux règles de l'art. De plus, comme le soulignait notre expert, on est en présence de l'escalier principal de la maison, visible de l'entrée principale et de plusieurs pièces de la maison, qui joue un rôle autant fonctionnel qu'esthétique. Nous croyons donc que les malfaçons apparentes dénoncées pour ce qui est de l'escalier découle d'un manquement aux règles de l'art et entraîne une perte de valeur marchande. Deux arguments auxquels l'arbitre Lefebvre s'est rendu lors de son jugement du point 15 de la jurisprudence cité par Me Laplante.

De plus, deux décisions récentes en arbitrage montrent bien que l'arbitre en plus de se baser sur le règlement dans sa décision doit tenir compte de l'équité. Ces deux jugements en arbitrage viennent à notre avis amoindrir l'importance de l'alinéa 5 de l'article 10 dans l'évaluation des malfaçons.

D'abord, il nous apparaît que l'arbitre Fournier dans sa décision concernant les lattes de plancher mat au lieu de semi lustré, rendue en faveur du bénéficiaire, conclut en un cas d'espèce où l'équité prime sur l'alinéa 5 de l'article 10. En effet, l'arbitre Fournier base ses décisions sur la définition de malfaçon pour plusieurs points de son jugement. Toutefois pour ce qui est du plancher, on ne peut invoquer que le fini mat au lieu de semi lustré porte atteinte à la qualité, à la sécurité ou à l'utilisation du bâtiment. Il considère ce point comme un cas d'espèce où l'esthétique de l'ensemble des plancher est en cause et en toute équité pour le bénéficiaire demande que le plancher soit changé pour un fini identique au plancher initial.

Quant à lui l'arbitre LeBire, dans sa décision du 02 juin 2005 répond aux arguments que Me Laplante y a plaidé et qui sont essentiellement les mêmes qu'il a plaidé dans la cause qui nous intéresse. Au paragraphe 1.22 l'arbitre LeBire écrit :

« Souvent, les parties ont tendance à déterminer la qualité, la sécurité et à l'utilisation du bâtiment sur des notions subjectives. En effet, le soussigné doit déterminer si il y a atteinte à la qualité, à la sécurité ou à l'utilisation du bâtiment; également tenir compte de l'équité car, certaines situations ou contextes l'exigent. De plus, chaque cas peut être considéré d'espèce. Conséquemment, suite aux témoignages lors de l'audition, l'étude des dossiers, la visite des lieux à la lueur du droit, de la jurisprudence et compte tenu du libellé de la demande d'arbitrage, le soussigné en vient à la conclusion suivante; »

Dans son énoncé, l'arbitre LeBire, fait appel à l'article 116 qu'il cite au paragraphe 1.28 : « Selon la preuve, le soussigné se sent justifié défaire appel à l'article 116 du Règlement. Un arbitre statue conformément aux règles de droit; et fait appel à l'équité lorsque les circonstances le justifient. »

[sic]

[83]           Monsieur Gagnon a invoqué les autorités suivantes : Grieb et Groupe Maltais et La Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ inc., SA, 4 avril 2005, arbitre Alcide Fournier; Brodique et Damy Construction et La Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ inc., SA, 16 septembre 2005, arbitre Jacques E. Ouellet; Joly et Lefebvre et Construction André Taillon inc. et La Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ inc., SA, 2 juin 2005, arbitre Gilles Lebire.

L’administrateur

[84]           Concernant le point 25, Me Laplante soutient que les travaux sont conformes au CNB, répondent aux normes et qu’il n’y donc pas malfaçon.

[85]           Concernant les points 27, 28, 29, 31, 32, 38 et 39, le procureur soutient qu’aucune malfaçon n’a été démontrée et ce, malgré la présence parfois admise d’un quelconque problème esthétique.

[86]           Relativement aux points 19, 35 et 36, le procureur soutient qu’il n’y a pas là malfaçon, s’agissant tout au plus de cas de mésententes contractuelles entre bénéficiaires et entrepreneur.

[87]           Finalement, concernant le point 40, Me Laplante soutient que même si l’on concluait qu’il y avait malfaçon, ce qui selon lui n’est pas le cas, il reste que ce problème, apparent, n’a pas été dénoncé au moment de la réception du bâtiment contrairement aux exigences du Règlement relativement aux malfaçons et vices apparents à la livraison.

[88]           Le procureur a invoqué l’autorité suivante : Nathalie Malette et Michael Duncan et La Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ inc. et Goyette Duchesnes et Lemieux SA., 10 novembre 2003, arbitre Bernard Lefebvre.

VII

ANALYSE ET DÉCISION

[89]           Le litige porte sur les points 19, 25, 27, 28, 29, 31, 32, 35, 36, 38, 39 et 40 de la décision rendue le 27 juin 2005 par l’administrateur.

[90]         Juridiquement, la partie demanderesse a généralement le fardeau de démontrer le bien fondé de son droit, de ses prétentions et des faits allégués. La norme de la qualité de la preuve présentée en matière civile est celle de la prépondérance. (Voir les articles 2803 et 2804 du Code civil du Québec).

[91]           En l’espèce, le Règlement énonce et encadre les obligations respectives de l'entrepreneur et de l’administrateur envers les bénéficiaires. C’est donc d’abord en vertu de celui-ci que je dois déterminer les droits et obligations de chacun. Cela n’écarte pas que d’autres recours puissent être institués par les bénéficiaires pour les réclamations qui ne seraient pas couvertes par le Règlement mais ma compétence en l’espèce se limite à vérifier si la garantie offerte par le Règlement a été respectée.

[92]           Le premier paragraphe de l’article 10 du Règlement se lit ainsi :

« La garantie d'un Règlement dans le cas de manquement de l'entrepreneur à ses obligations légales ou contractuelles après la réception du bâtiment doit couvrir:

1- le parachèvement des travaux relatifs au bâtiment et dénoncés, par écrit, au moment de la réception ou, tant que le bénéficiaires n ’a pas emménagé, dans les trois jours qui suivent la réception;

2-        la réparation des vices et malfaçons apparents visés à l’article 2111 du Code civil et dénoncés par écrit, au moment de la réception ou, tant que le bénéficiaires n ’a pas emménagé, dans les trois jours qui suivent la réception;

3-        la réparation des malfaçons existantes et non apparentes au moment de la réception et découvertes dans l'année qui suit la réception, visées aux articles 2113 et 2120 du Code civil et dénoncées, par écrit, à l'entrepreneur et à l'administrateur dans un délai raisonnable, lequel ne peut excéder 6 mois de la découverte des malfaçons;

4-        la réparation des vices cachés au sens de l'article 1726 ou de l'article 2103 du Code civil qui sont découverts dans les 3 ans suivant la réception du bâtiment et dénoncés, par écrit, à l'entrepreneur et à l'administrateur dans un délai raisonnable, lequel ne peut excéder 6 mois de la découverte des vices cachés au sens de l'article 1739 du Code civil;

Le défaut de se conformer aux règles de l'art ou à une norme en vigueur applicable au bâtiment, notamment celles contenues au Code national du bâtiment du Canada, au Code canadien de l'électricité et au Code de plomberie, constitue une malfaçon sauf s 'il ne porte pas atteinte ou n 'est pas de nature à porter atteinte à la qualité, à la sécurité ou à l'utilisation du bâtiment. »

[93]              En l’espèce, l’administrateur a conclu que la majorité des points contestés n’étaient pas couverts par le Règlement, soit au motif qu’ils ne constituaient pas des malfaçons au sens de ce dernier, soit qu’aucune malfaçon n’avait été démontrée à leur égard.

[94]            Celui-ci étant au cœur du débat, il est utile de rappeler le concept de malfaçon au sens du Règlement.

[95]            L’arbitre Bernard Lefebvre dans Nathalie Malette et Michael Duncan, [précité] écrivait ceci au sujet du concept de malfaçon au sens de l’alinéa 2 du paragraphe 10 (1) du Règlement :

« Le Règlement rattache la malfaçon couverte par un Règlement de Garantie à la malfaçon mentionnée à l'article 2111 du Code civil du Québec.

L'article 2111 du Code civil du Québec ne définit pas la malfaçon.

Le législateur a donné la clé de la solution mais il appartient aux Tribunaux d'en trouver le maniement.

Les décideurs chargés d'appliquer l'article 2111 du Code civil du Québec définissent généralement la malfaçon comme étant une défectuosité résultant d'une mauvaise exécution des travaux. Ce peut être un manquement à une règle de l'art applicable au bâtiment. Chaque cas est d'espèce.

Qu'en est-il de la malfaçon au sens du Règlement ?

Le paragraphe 2 de l'article 10 du Règlement indique que la garantie du Règlement doit couvrir, entre autres, les malfaçons apparentes visées à l'article 2111 du Code civil du Québec.

Mais au sens du deuxième alinéa du paragraphe 5 de l'article 10 du Règlement, les défauts de conformité aux règles de l'art ou à une norme en vigueur applicable au bâtiment constituent une malfaçon...sauf s'il ne porte pas atteinte ou n'est pas de nature à porter atteinte à la qualité, à la sécurité ou à l'utilisation du bâtiment.

Comme le Code civil du Québec ne définit pas la malfaçon, l'arbitre chargé de trancher un litige basé sur la notion de malfaçon qui découle de l'application du Règlement de Garantie de l'Administrateur peut, sinon doit, se référer aux jugements rendus par les décideurs chargés d'appliquer l'article 2111 du Code civil du Québec.

Toutefois, l'arbitre ne doit pas oublier que le deuxième alinéa du paragraphe cinq de l'article 10 du Règlement exclut du concept « malfaçon » le défaut de conformité qui... ne porte pas atteinte à la qualité ou n 'est pas de nature à porter atteinte à la qualité, à la sécurité ou à l'utilisation du bâtiment.

Ainsi, la malfaçon dont il est question à l'article 10 du Règlement a une extension moindre que celle qui découle de l'application de l'article 2111 du Code civil du Québec.

En conséquence, l'arbitre ne peut pas assimiler à des malfaçons les défauts de conformité aux règles de l'art qui ne portent pas atteinte ou ne sont pas de nature à porter atteinte à la qualité, à la sécurité ou à l'utilisation du bâtiment,

À l'inverse, sont assimilés à des malfaçons au sens du Règlement, les défauts de conformité aux règles de l'art ou à une norme en vigueur applicable au bâtiment qui portent atteinte ou qui sont de nature à porter atteinte à la qualité, à la sécurité ou à l'utilisation du bâtiment.

En principe, le bâtiment ou ses parties dont la construction est conforme aux Règlements et devis du contrat d'entreprise ne soufre pas de défaut de conformité assimilable à une malfaçon au sens de l'article 10 du Règlement. Toutefois, il y a malfaçon si la construction déroge à une norme d'ordre public même si le bâtiment a été construit selon les Règlements et devis.

On se doute bien que la situation est plus complexe s'il s'agit d'un défaut de conformité aux règles de l'art ou à une norme en vigueur qui n'est pas d'ordre public et qui... ne porte pas atteinte ou n 'est pas de nature à porter atteinte à la qualité, à la sécurité ou à l'utilisation du bâtiment.

En efet, l'arbitre doit déterminer s'il y a atteinte à la qualité, à la sécurité ou à l'utilisation du bâtiment de façon objective. Or, les parties ont souvent tendance à déterminer la qualité, la sécurité et l'utilisation du bâtiment sur des critères subjectifs.

Néanmoins, la détermination objective de la qualité, la sécurité ou l'utilisation du bâtiment peut quand même être réalisée en répondant à la question de savoir si le défaut de conformité est une condition d'habitation normale dans le genre de bâtiment habité par les bénéficiaires. »

[Caractères gras ajoutés]

[96]           Je souscris à cette analyse de l’arbitre Lefebvre, laquelle vaut également lorsqu’il s’agit de cerner la notion de ce qui constitue une malfaçon non apparente au sens de l’alinéa 3 du paragraphe 10 (1) du Règlement. Autrement dit, une malfaçon au sens du Règlement, apparente ou non, répondra à la définition qu’en donne l’arbitre Lefebvre, chaque cas, bien sûr, en étant un d’espèce.

[97]           A cet égard, les bénéficiaires ont soutenu qu’étant donné que le Contrat de garantie émis en leur faveur ne comportait pas la restriction que l’on retrouve à l’article 10 du Règlement concernant la portée du concept de malfaçon, cette restriction ne pouvait pas leur être opposée.

[98]           Bien que sensible à leur situation, avec égards, j ’estime devoir rejeter cet argument. En effet, la Loi sur le bâtiment, L.R.Q. c. B-1.1 oblige les entrepreneurs à adhérer à un plan de garantie. C'est le Règlement adopté en vertu de cette loi qui régit le contenu des plans de garantie (ou contrats de garantie) comme celui émis en faveur des bénéficiaires. L'article 7 du Règlement définit comme suit le contenu d’un tel plan :

« Un plan de garantie doit garantir l'exécution des obligations légales et contractuelles d'un entrepreneur dans la mesure et de la manière prévues par la présente section. »

[99]           Or, un examen attentif de celui-ci indique que le Plan de garantie (Contrat de garantie) émis en l’espèce l’est en vertu du Règlement et qu’il reprend pratiquement mot pour mot certaines des clauses dictées au Règlement, bien qu'avec une numérotation différente.

[100]       Cela dit, toutes les clauses du Règlement ne se retrouvent pas au Plan de garantie. Toutefois l’article 139 du Règlement stipule que « toute clause d’un contrat de garantie qui est inconciliable avec le présent règlement est nulle. » A l’inverse, les clauses du Plan de garantie non inconciliables avec le Règlement ne sont pas nulles.

[101]     Cela dit, même si la notion de malfaçon au sens du Règlement n’est pas reproduite dans le Plan de garantie, à moins d’invoquer l’ignorance de la loi, ce qui ne saurait se faire ici, l’argument des bénéficiaires ne peut juridiquement résister à l’analyse. En effet, la définition qu’ils suggèrent de la définition de malfaçon serait en effet inconciliable avec le Règlement puisqu’elle n’incorporerait pas les restrictions qu’y impose le Règlement. C’est donc la définition du Règlement qu’il nous faut tenir pour incorporée au Plan de garantie.

[102]          Cela dit, je traiterai maintenant de chaque point.

[103]          25: Étanchéité au gaz du mur du garage adjacent à la maison

[104]          Selon ma compréhension, les bénéficiaires demandent en fait à l’entrepreneur de leur remettre un certificat de conformité leur assurant que ce mur est bien étanche, ou à défaut de les en assurer par ce moyen, qu’il scelle les joints à l’intérieur du garage.

[105]          Selon la preuve, l’entrepreneur a installé un pare-vapeur, un dispositif dont il est admis qu’il constitue normalement selon le CNB une barrière efficace contre l’infiltration à l’intérieur de la maison des gaz d’échappement provenant d’un garage. Il n’est pas nié par ailleurs que la finition du même mur adjacent mais à l’intérieur de la résidence peut constituer elle aussi une barrière efficace supplémentaire.

[106]          Notre visite des lieux a par ailleurs révélé la présence sous l’escalier menant au garage d’une ouverture non étanche entre celui-ci et la maison, ouverture par laquelle il pourrait y avoir infiltration. Le même phénomène est aussi possible là où en raison notamment de l’installation de prises électriques, le pare-vapeur a été coupé sans précaution.

[107]        La clause A-9.10.9.16 3) du CNB prévoit que la « barrière étanche aux gaz entre un logement et un garage doit fournir une protection contre l’oxyde de carbone et les vapeurs d’essence pénétrant dans le logement. Les ensembles de construction comportant un système d’étanchéité à l’air assurent une étanchéité adéquate aux gaz si certaines précautions sont prises aux endroits où les installations techniques traversent le mur ou le plafond. »

[108]          De toute évidence, les prises électriques constituent des installations techniques au sens de cette disposition. Il s’ensuit que contrairement aux conclusions du rapport du conciliateur, la barrière mise en place pour rendre le mur étanche ne répond pas aux exigences du CNB puisque, d’une part, un trou n’a pas été obturé sous l’escalier et que, d’autre part, aucune précaution adéquate pour parer aux infiltrations n’a été prise aux endroits où le pare-vapeur a été coupé en vue des installations techniques.

[109]       Pour ces raisons, j’estime que cette situation constitue une malfaçon au sens du Règlement qui doit être corrigée.

[110]     J’ordonne donc à l’entrepreneur de prendre les mesures nécessaires pour s’assurer que le mur est étanche aux gaz et ce, en conformité du CNB.

[111]       27 : Robinet mural du garage

[112]       Notre visite des lieux a permis de constater que le tuyau, et par conséquent le robinet, sortent effectivement du mur de quelques pouces. A l’évidence, cette finition boiteuse n’est pas esthétique.

[113]     Toutefois, j ’estime que les bénéficiaires n’ont pas démontré en quoi cette situation constituerait une malfaçon au sens du Règlement.

[114]       28 : Fascias d’aluminium extérieurs gondolés et asymétriques

[115]     L’administrateur a reconnu la situation mais jugé qu’il n’y avait pas là malfaçon au sens du Règlement.

[116]     Ma visite des lieux m’a permis de constater qu’effectivement les fascias d’aluminium sont asymétriques, gondolés et ont tendance à décoller. Avec égards, j ’estime que ce problème n’est pas purement esthétique, que le travail a été mal fait, n’est pas acceptable et que la situation est effectivement de nature à porter atteinte à la qualité du bâtiment, les défauts observés n’étant pas mineurs. Il s’agit donc d’une malfaçon au sens du Règlement.

[117]       Cette réclamation est accueillie.

[118]       29 : Finition d’aluminium au pourtour de la porte de garage

[119]     La visite des lieux a effectivement permis de constater que le contour de la porte est grafigné et que sa bordure interne est mal découpée à certains endroits. Cela dit, ces défauts mineurs sont toutefois difficilement perceptibles. Avec égards, j’estime qu’il s’agit là tout au plus de légères imperfections qui ne sauraient être qualifiées de malfaçons au sens du Règlement.

[120]          19 : Absence de bordure de granit derrière la cuisinière. 35 : Largeur et profondeur de l’espace conçu pour encastrer le réfrigérateur. 36 : Bande de finition de chaque côté du lave-vaisselle

[121]          Selon ma compréhension des prétentions des bénéficiaires concernant les points 35 et 36, l’entrepreneur ne se serait pas conformé à un engagement contractuel dans la mesure où les spécifications pour les encastrements de ses électroménagers n’auraient pas été respectées.

[122]        Or, même en le tenant pour acquis, ce fait relatif à une entente contractuelle entre les bénéficiaires et l’entrepreneur ne constitue pas une malfaçon, ni généralement, ni au sens du Règlement.

[123]          Certes, les électroménagers ne sont pas encastrés parfaitement mais ce problème ne saurait constituer une malfaçon en ce que la preuve ne révèle pas qu’il y ait là quelque contravention aux règles de l’art ou aux normes de construction ni atteinte aux exigences relatives à la destination de l’immeuble, de sa qualité ou à sa sécurité.

[124]          Il est utile de revenir aux propos de l’arbitre Lefebvre dans Beaulieu & Gosselin c. Les Maisons Juteau inc. et La Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l'APCHQ inc., SA, 24 avril 2003 :

« [...] Le droit de la construction définit la malfaçon en fonction de l’objet du contrat conclu entre l’entrepreneur et les bénéficiaires. Il s’agit en l’espèce d’un bâtiment résidentiel neuf.

La jurisprudence relative à la responsabilité des entrepreneurs de construction caractérise la malfaçon en rapport avec l’utilisation du bâtiment en termes de qualité et de sécurité.

[...]

C'est la conformité aux exigences de construction qui constitue le point de référence à la malfaçon et non pas la conformité aux exigences des bénéficiaires si celles-ci ne se rapportent pas aux exigences relatives à la destination du bâtiment.

En l’espèce que les fenêtres soient quadrillées ou non n ’afecte pas la qualité de la construction ou la sécurité des bénéficiaires. L ’installation de fenêtres non quadrillées n ’est pas conforme aux exigences contractuelles mais ne constitue pas une malfaçon au sens du droit. »

[Caractères gras ajoutés]

[125]       Ces réclamations sont donc rejetées.

[126]       Quant au point 19, selon ma compréhension, les bénéficiaires ne soutiennent pas que les spécifications pour les encastrements de cet électroménager n’auraient pas été respectées mais plutôt que le travail n’aurait pas été complété en ce sens qu’il devait y avoir installation d’une finition de granit à l’arrière de la cuisinière. Or, il s’agit ici d’une question de parachèvement et il n’est pas contredit que la situation n’a pas été dénoncée à la liste des travaux à parachever.

[127]       Cette réclamation est également rejetée.

[128]       31 : Sablage et vernissage de l’escalier, de la main courante menant à l’étage. 32 : Escalier menant au garage

[129]       La visite des lieux a permis de constater la présence de marques de ruban à masquer sur la majorité des marches, en outre qu’à certains endroits le vernis n’est pas uniforme ou est même inexistant.

[130]       Avec égards, le Tribunal estime qu’il ne s’agit pas ici de légères imperfections difficilement perceptibles à hauteur d’homme. En l’espèce, selon la preuve prépondérante, le travail a tout simplement été mal fait : une couche de vernis a été appliquée sans que les marches ne soient préalablement poncées convenablement de sorte que les marques laissées par le ruban adhésif sont visibles sur pratiquement toutes les marches de ces escaliers. De plus, on constate qu’à certains endroits sur la main courante, il n’y a pas de vernis.

[131]       Pour ces raisons, j ’estime que la situation est de nature à porter atteinte à la qualité du bâtiment. Ces réclamations sont donc accueillies.

[132]       38 : Égratignures sur le plancher du second étage

[133]       Contrairement aux points précédents, il s’agit ici d’égratignures très mineures, à peine visibles et encore, que selon un certain angle et sous un certain éclairage.

[134]   Avec égards, j ’estime qu’elles ne constituent pas une malfaçon au sens du Règlement.

[135]       En conséquence, ce point est rejeté.

[136]       39 : Joint apparent dans la corniche de la salle de bain des maitres

[137]          Selon ma compréhension, ce problème, qualifié d’esthétique par l’administrateur, n’existait pas au moment de la réception du bâtiment. Il est apparu à l’occasion d’une correction à la corniche de la salle de bain par un sous-traitant.

[138]          Or, même en prenant pour acquis que le Règlement couvre une telle situation, il reste que concrètement ce problème somme toute mineur ne constitue pas une malfaçon au sens du Règlement, n’étant évidemment pas de nature à porter atteinte à la qualité, la sécurité ou l’utilisation du bâtiment. Cette réclamation est donc rejetée.

[139]          40 : Joint apparent sur le cadre de la fenêtre ovale

[140]          Tout comme le précédent, il s’agit d’un défaut mineur qui ne constitue pas une malfaçon.

VIII
CONCLUSION ET DISPOSITIF

[141]          Pour toutes les raisons qui précèdent, les réclamations concernant les points 19, 27, 29, 35, 36, 38, 39 et 40 sont rejetées.

[142]          En revanche les réclamations concernant les points 25, 28, 31 et 32 sont accueillies. Le Tribunal ordonne en conséquence à l’entrepreneur de prendre les mesures nécessaires pour corriger ces situations dans un délai raisonnable, convenu entre les bénéficiaires et l’entrepreneur, et qu’à défaut d’accord que je déterminerai sur demande.

[143]    A défaut, par l’entrepreneur de procéder à ces travaux dans le délai déterminé, le Tribunal ordonne qu’il soit procédé à ces correctifs par l’administrateur en conformité du Règlement.

[144]          En outre, le Tribunal réserve le droit des bénéficiaires de demander à l’administrateur d’inspecter les travaux à effectuer en exécution des présentes en vue d’en assurer la conformité.

[145]          Le Tribunal prend acte de l’entente intervenue entre les bénéficiaires et l’entrepreneur à l’effet que ce dernier corrigera d’ici le 28 octobre 2005 les problèmes mentionnés aux points 6, 24, 33 et 42. Également, le Tribunal prend acte du désistement des bénéficiaires à l’égard des points 20 et 30.

[146]       Les bénéficiaires ont demandé à l’audience, en s’appuyant sur l’article 22 du Règlement que l'administrateur assume les frais d'expertises encourus par eux en l’occurrence les honoraires payés à monsieur Sauvé pour sa présence à l’audience.

[147]       Cette disposition stipule :

« L 'arbitre doit statuer, s 'il y a lieu, quant au quantum des frais raisonnables d'expertises pertinentes que l'administrateur doit rembourser au demandeur lorsque celui-ci a gain de cause total ou partiel. »

[148]       La facture présentée par les bénéficiaires à ce titre totalise la somme de 934,58 pour la présence de l’expert à l’audience. Aucun argument n’a été présenté pour suggérer que ces frais ne seraient pas raisonnables. La présence de monsieur Sauvé à l’audience était pertinente et a été utile. Il y a donc lieu de faire droit à cette conclusion.

[149]       Je déclare en vertu de l’article 22 du Règlement que les frais de 934, 58 $ encourus pour la présence de l’expert Sauvé seront à la charge de l’administrateur qui devra par conséquent les rembourser aux bénéficiaires sans délai.

[150]       Finalement, le Tribunal déclare, conformément aux dispositions de l'article 123 du Règlement, que les coûts seront eux aussi à la charge de l'administrateur.

Montréal, le 21 novembre 2005

Johanne Despatis, avocate Arbitre