ARBITRAGE EN VERTU DU RÈGLEMENT SUR LE

PLAN DE GARANTIE DES BÂTIMENTS RÉSIDENTIELS NEUFS

(Décret 841-98 du 17 juin 1998)

(Loi sur le bâtiment, L.R.Q., c. B-1.1)

 

Organisme d’arbitrage autorisé par la Régie du bâtiment :

Société pour la résolution de conflits inc. (SORECONI)

 

 

ENTRE :                                                        Syndicat de la copropriété 8980 à 8994 Croissant du Louvre

 

(ci-après « Le Bénéficiaire »)

 

ET :                                                                Le Village Parisien inc.

(ci-après « L’Entrepreneur »)

 

 

ET :                                                                La Garantie Habitation du Québec inc.

 

(ci-après « l’Administrateur »)

 

Nos des dossiers SORECONI : 110612001 et 120611001

 

 

SENTENCE ARBITRALE

 

 

 

Arbitre :

 

Me Albert Zoltowski

 

 

 

Pour le Bénéficiaire :

 

Me Imane Ben Bahri et madame Monique Bouchard

 

 

 

Pour l’Entrepreneur :

 

Me Raymond Daoust

 

 

 

Pour l’Administrateur :

 

Me François-Olivier Godin

 

 

 

Date de la décision :

 

Le 19 mars 2015


 

 

Identification complète des parties

 

 

Arbitre :

 

Me Albert Zoltowski

1010, de la Gauchetière Ouest

Bureau 950

Montréal (Québec) H3B 2N2

 

 

 

Bénéficiaire :

 

Syndicat de la copropriété 8980 à 8994 Croissant du Louvre

8980 Croissant du Louvre,

Brossard (Québec) J3Y 0A2

 

À l’attention de madame Monique Bouchard

 

Me Imane Ben Bahri

3516 avenue Lacombe, bureau 307

Montréal (Québec) H3T 1M1

 

 

 

 

Entrepreneur :

 

Village Parisien inc..

6, Place du Commerce, bureau 100

Brossard (Québec) J4W 3J9

 

Me Raymond Daoust

Crochetière Pétrin

5800 boul. Louis-H.-Lafontaine

Montréal (Québec) H1M 1S7

 

 

 

Administrateur :

 

La Garantie Habitation du Québec inc.

9200 boulevard Métropolitain Est

Anjou (Québec) H1K 4L2

 

À l’attention de Me François-Olivier Godin

Bélanger Paradis Avocats inc.

9200 boulevard Métropolitain Est

Anjou (Québec) H1K 4L2

 

 

 


 

 

Sentence

 

 

Historique du dossier :

 

 

15 novembre 2011 :

Décision de l’Administrateur (points 1 à 14) du dossier SORECONI 110612001;

 

 

6 janvier 2012:

Demande d’arbitrage du Bénéficiaire déposée auprès de SORECONI;

 

 

31 janvier 2012:

Avis de conférence préparatoire aux procureurs;

 

 

7 février 2012:

Conférence téléphonique avec les procureurs;

 

 

2 mars 2012:

Conférence téléphonique avec les procureurs;

 

 

6 mars 2012:

Avis d’audience qui est prevue pour le 4 juin 2012;

 

 

12 mars 2012:

Lettre du procureur de l’Entrepreneur de modifier la date de l’audience;

 

 

27 mars 2012:

Avis d’audience fixée pour le 26 juin 2012;

 

 

26 juin 2012:

Audience au 1010 de la Gauchetière Ouest, bureau 950 à Montréal;

 

 

25 juillet 2012:

Avis d’une nouvelle conférence téléphonique fixée au 30 août 2012;

 

 

30 août 2012:

Conférence téléphonique avec les procureurs;

 

 

14 septembre 2012:

Lettre du procureur du Bénéficiaire (Me Daniel Lévesque) exposant la position de son client sur les trois points en litige;

 

 

17 septembre 2012:

Conférence téléphonique avec les procureurs;

 

 

3 octobre 2012:

Avis de l’audience fixée au 28 et 29 janvier 2013;

 

 

23 octobre 2012:

Deuxième décision de l’Administrateur (points 14 et 15)  du dossier SORECONI 120611001;

 

 

6 décembre 2012:

Demande d’arbitrage du Bénéficiaire déposée auprès de SORECONI;

 

 

15 janvier 2013:

Conférence préparatoire avec les procureurs;

 

 

23 janvier 2013:

Lettre du procureur du Bénéficiaire (Me Daniel Lévesque) exposant la position conjointe des procureurs de remettre l’audience « à une date à déterminer »;

 

 

28 et 29 janvier 2013:

Audience fixée et remise conformément à la lettre du 23 janvier 2013;

 

 

28 janvier 2013:

Avis d’une conférence téléphonique prévue pour le 11 février 2013;

 

 

11 février 2013:

Conférence téléphonique avec les procureurs;

 

 

1er mars 2013:

Lettre du procureur du Bénéficiaire demandant la remise de la conférence du 8 mars 2013;

 

 

14 mars 2013:

Conférence téléphonique avec les procureurs;

 

 

14 mars 2013:

Avis d’une conférence prévue pour le 14 avril 2013;

 

 

29 avril 2013:

Conférence téléphonique avec les procureurs;

 

 

28 mai 2013:

Avis d’une confeérence téléphonique prevue pour le 21 juin 2013;

 

 

21 juin 2013:

Demande de remise du procureur de l’Entrepreneur de la conférence téléphonique de ce jour;

 

 

9 juillet 2013:

Conférence téléphonique avec les procureurs;

 

 

10 juillet 2013:

Avis d’une conférence téléphonique prévue pour le 29 août 2013;

 

 

30 août 2013:

Confirmation de la remise de la conférence prévue pour le 29 août 2013 et une nouvelle conférence fixée pour le 6 septembre 2013;

 

 

5 septembre 2013:

Lettre de Me D. Lévesque avec avis de changement du procureur du Bénéficiaire;

 

 

6 septembre 2013:

Conférence téléphonique avec les procureurs;

 

 

26 septembre 2013:

Conférence téléphonique avec les procureurs;

 

 

30 septembre 2013:

Avis d’une conférence fixée au 3 octobre 2013;

 

 

3 octobre 2013 :

Lettre du procureur du Bénéficiaire de remettre la conférence de ce jour;

 

 

9 octobre 2013:

Conférence préparatoire;

 

 

10 octobre 2013:

Avis aux parties de l’audition prévue pour le 18 et 20 février 2014;

 

 

28 novembre 2013:

Lettre de l’arbitre confirmant entre autres les trois questions en litige;

 

 

8 janvier 2014:

Lettre du procureur du Bénéficiaire confirmant son remplacement par un nouveau procureur;

 

 

17 janvier 2014:

Demande de remise de l’audition des 18 et 20 février 2014 de la part du procureur du Bénéficiaire;

 

 

18 et 20 février 2014 :

Audience remise;

 

 

6 février 2014:

Avis du procureur du Bénéficiaire de la terminaison de son mandat;

 

 

10 février 2014:

Lettre du nouveau procureur du Bénéficiaire (Me Imane Ben Bahri) confirmant son mandat;

 

 

11 février 2014:

Visite de Me Ben Bahri accompagné d’un copropriétaire au bureau de l’arbitre;

 

 

11 février 2014:

Lettre au procureur du Bénéficiaire (avec copie aux autres procureurs);

 

 

14 février 2014:

Réception d’une lettre de la présidente du syndicat des copropriétaires, madame Monique Bouchard;

 

 

25 et 27 février 2014:

Avis de conférence préparatoire prévue pour le 6 mars 2014;

 

 

25 février 2014:

Avis d’audience prévue pour les 17 et 18 juin 2014;

 

 

6 mars 2014:

Conférence préparatoire;

 

 

23 mai 2014:

Lettre aux procureurs confirmant les questions en litige;

 

 

17 juin 2014:

Audience

 

 

18 juin 2014:

Deuxième jour d’audience annulé à la demande des procureurs de l’Entrepreneur et de l’Administrateur;

 

 

19 juin 2014:

Avis d’une nouvelle conférence téléphonique prévue pour le 19 août 2014 et avis d’une audition prévue pour les 25 et 26 août 2014;

 

 

25 juillet 2014:

Nouvel avis d’audition prévue pour les 25 et 26 août 2014;

 

 

19 août 2014:

Conférence téléphonique avec les procureurs;

 

 

25 et 26 août 2014:

Audience;

 

 

8 septembre 2014:

Lettre au procureur du Bénéficiaire;

 

 

19 mars 2015:

Sentence arbitrale

 

 

SENTENCE ARBITRALE

Introduction

 

[1]       Le 15 novembre 2011, l’Administrateur, sous la plume de madame Karine Pépin, conciliatrice a rendu une décision dans laquelle elle rejetait la réclamation du Bénéficiaire. Ce dernier administre un bâtiment détenu en copropriété divise comprenant huit unités de condo portant les adresses 8980, 8982, 8984, 8986, 8988, 8990, 8992 et 8994 Croissant du Louvre à Brossard.

[2]       Dans sa décision, l’Administrateur a rejeté la réclamation du Bénéficiaire décrite aux points 1 à 14 et ce, pour diverses raisons. Le Bénéficiaire non satisfait de cette décision, la porta à l’arbitrage auprès de l’organisme d’arbitrage SORECONI qui désigna l’arbitre soussigné (ci-après aussi appelé « le tribunal arbitral » ou « le tribunal »).

[3]       Au cours des conférences téléphoniques de l’arbitre avec les procureurs, le procureur du Bénéficiaire nous a informé que l’Administrateur a omis de rendre une décision sur deux autres points de réclamation du Bénéficiaire. Le 23 octobre 2012, soit presqu’un an après la date de sa première décision, l’Administrateur a rendu une deuxième décision concernant ces deux points soit les points 14 et 15. Ces deux points de réclamation ont également été rejetés par l’Administrateur dans sa deuxième décision. À la demande des parties, ce tribunal a été saisi des deux demandes d’arbitrage pour les fins de leur cheminement procédural et pour les entendre lors d’une même audition.

[4]       En résumé, sur les 16 points de réclamation décrits dans les deux décisions de l’Administrateur, ce dernier a rejeté :

-       Treize (13) points entre autres motifs, à cause du dépassement du délai de la couverture de garantie de un an, trois ans ou cinq ans prévue par le plan de garantie et régie par le Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs[1] (ci-après le « Règlement »), et

 

-       Trois (3) points pour le dépassement du délai maximal de six mois entre la découverte de la déficience alléguée par le Bénéficiaire et sa dénonciation écrite par ce dernier à l’Entrepreneur et à l’Administrateur. Il s’agit des points 1 et 2 de la première décision de l’Administrateur et du point 16 de sa deuxième décision.

 

[5]       D’un commun accord, les parties ont décidé, dans un premier temps, de débattre devant le tribunal arbitral la question des délais. Ensuite, dépendamment de la décision du tribunal arbitral sur ces questions, elles ont décidé de débattre, dans un deuxième temps, les questions liées à l’existence et à la nature des diverses déficiences alléguées.

[6]       Étant donné que les délais de couverture de la garantie d’un an, trois ans ou cinq ans débutent soit à la date de la réception des parties communes (pour les malfaçons non apparentes et les vices cachés), soit de la date de la fin des travaux des parties communes (pour les vices de conception, de construction ou de réalisation et des vices du sol au sens de l’article 2118 du Code civil du Québec) - les deux premiers points en litige que le tribunal devait déterminer étaient :

-       la date de la réception des parties communes, et

-       la date de la fin des travaux des parties communes.

[7]       Le troisième point sur lequel le tribunal devait statuer était celui du délai maximal de dénonciation de six mois entre la découverte de certaines déficiences alléguées et leur dénonciation écrite à l’Entrepreneur et à l’Administrateur.

[8]       À la lecture de l’historique de ce dossier décrit ci-haut, qui n’est que partiel, on s’aperçoit rapidement que le cheminement procédural de ce dossier était particulièrement long.

[9]       Depuis que ce tribunal a été saisi de ces deux demandes d’arbitrage, le Bénéficiaire a été représenté successivement par quatre procureurs.

[10]    De plus, une première audience a eu lieu le 26 juin 2012. À la fin de cette audience, les parties ont réalisé qu’il leur manquait certains documents à l’appui de leurs prétentions. À cet effet, des engagements ont été pris par les procureurs de l’Administrateur et de l’Entrepreneur de les communiquer aux autres parties et au tribunal arbitral.

[11]    Ensuite, la prochaine audition de deux jours prévue pour les 28 et 29 janvier 2013 a été remise avant la date prévue, à la demande du procureur du Bénéficiaire « à une date à déterminer ». L’audition subséquente fixée pour les 18 et 20 février 2014 a aussi été remise à la demande du procureur du Bénéficiaire.

[12]    Enfin, l’audition a débuté le 17 juin 2014. À la fin de cette audition, l’avocate du Bénéficiaire a remis un cartable (« le cartable bleu ») avec des documents numérotés de 1 à 56. Pour permettre aux autres procureurs d’examiner ces documents, l’audition qui devait se poursuivre le lendemain soit le 18 juin 2014, a été annulée et deux autres journées d’audition ont été fixées aux 25 et 26 août 2014.

[13]    Vers le milieu du mois de septembre 2014, le tribunal arbitral a reçu un cahier de jurisprudence de la part du Bénéficiaire.

Pièces du Bénéficiaire déposées lors de l’audition du 17 juin 2014

[14]    Lors de l’audience du 17 juin 2014 le Bénéficiaire a introduit en preuve les documents suivants :

-       Pièce B-1 - Avis de fin des travaux des parties communes de l’Entrepreneur à monsieur Carl De Nitto;

-       Pièce B-1.1 (8 avis en liasse) - Avis de fin des travaux des parties communes de l’Entrepreneur adressés au Syndicat de copropriété 8980 à 8994 Croissant du Louvre à l’attention de monsieur Frédéric Leclerc (président) et à sept autres adresses de copropriétaires (dont 2 unités non encore vendues);

-       Pièce B-2 - Copie d’une lettre sur la papeterie de l’Entrepreneur adressée à « Chers clients » sans date et non signée (10 pages);

-       Pièce B-3 - Formulaire autorisé par l’Administrateur intitulé « Inspection - préréception - fin des travaux - réception du bâtiment » (2 pages) avec une lettre y annexée intitulée « Vérification au 8994 du Louvre à Brossard - 28 décembre 2005 - Liste de déficiences »;

-       Pièce B-4 - Courriel de monsieur Serge Ferron aux cinq autres copropriétaires, en date du 23 mai 2006 soit à monsieur Carl De Nitto, Frédéric Leclerc, David St-Germain, Carole Gaouette et Manh T. Nguyen;

-       Pièce B-5 - Copie d’une lettre sur la papeterie de l’Entrepreneur datée du 9 mai 2006 intitulée : « Objet : remise des documents suite au transfert de la gestion de la copropriété »;

-       Pièce B-6 - Extrait du Registre des entreprises du Québec avec une liste des documents déposés à ce registre (1 page);

-       Pièce B-7 - Déclaration modificative d’une personne morale déposée au Registre des entreprises du Québec le 21 juillet 2006 par le Syndicat de la copropriété 8980 à 8994 Croissant du Louvre et signée par monsieur Frédéric Leclerc en date du 10 juin 2006;

-       Pièce B-8 - Copie d’une lettre du 12 février 2014 de la Banque Nationale à madame Monique Bouchard;

-       Pièce B-9 - Copie d’une lettre non signée sur la papeterie de l’Entrepreneur datée du 8 mai 2006 (2 pages) adressée à monsieur Serge Ferron;

-       Pièce B-10 - Copie d’une lettre sur la papeterie de l’Entrepreneur datée du 4 mai 2006 adressée à monsieur Serge Ferron, non signée (1 page);

-       Pièce B-11 (en liasse) - Avis de fin des travaux des parties communes adressé à monsieur Serge Ferron au 8992 Croissant du Louvre avec une télécopie de monsieur Serge Ferron à l’Entrepreneur en date du 17 mai 2006 avec une correction de l’adresse qui devait se lire 8982 Croissant du Louvre, Brossard;

-       Pièce B-12 - Copie d’un courriel daté du 27 juin 2006 de monsieur Serge Ferron à monsieur Frédéric Leclerc concernant « Condo - inspection des parties communes»;

-       Pièce B-13 - Copie d’une lettre intitulée « Demande de réparations à l’entrepreneur Les Habitations Signature inc. / Le Village Parisien inc. datée du 5 juin 2011 et adressée à Qualité Habitation et à l’Entrepreneur (8 pages);

-       Pièce B-14 - Copie de la facture no 27695 de L. A. Hébert ltée à l’Entrepreneur (« pierre conc. »).

[15]    Lors de la prochaine journée d’audience, les pièces supplémentaires suivantes ont été déposées en preuve par le Bénéficiaire :

-       B-15 - Copie du rapport d’expertise de ProspecPlus Génie-Conseil daté du 1er juin 2011;

-       B-16 - Copie du Rapport d’inspection de ProspecPlus Génie-Conseil daté du 21 novembre 2011;

-       B-17 - Copie du Rapport d’inspection finale concernant les aires communes de monsieur Martin Dion du 22 juin 2010.


 

Partie 1 - Transfert de contrôle du Syndicat des copropriétaires

[16]    Avant que les copropriétaires des huit unités du bâtiment aient acquis le contrôle du syndicat, soit le contrôle du Bénéficiaire, ce dernier était sous le contrôle de l’Entrepreneur. La date de ce transfert de contrôle du Bénéficiaire a un impact sur la détermination de la date de la fin des travaux des parties communes et de la date de leur réception. Pour cette raison, nous allons traiter de ce sujet à la Partie 1 de cette sentence.

Preuve

[17]    Selon le témoignage de madame Karine Pépin, conciliatrice et l’auteur des deux décisions de l’Administrateur, le contrôle du Bénéficiaire a été transféré par l’Entrepreneur aux autres copropriétaires le 23 mai 2006.  À l’appui, elle réfère au courriel du 23 mai 2006 d’un des copropriétaires, monsieur Serge Ferron adressé aux cinq autres copropriétaires (pièce B-4). Le premier paragraphe de ce courriel se lit comme suit :

              « Bonsoir,

 

              Dans le prolongement de notre rencontre de ce jour, voici tel que convenu les coordonnées des personnes qui étaient présentes à la réunion. »

[18]    Ensuite, l’auteur de ce courriel énumère les noms, les numéros de téléphone et les adresses courriel des cinq autres copropriétaires ainsi que les siens.

[19]    Le témoin réfère également à la pièce B-10, une lettre du 4 mai 2006 sur la papeterie de l’Entrepreneur qui est non signée où il est écrit :

              « Il est donc important d’entrer en contact avec les autres copropriétaires car vous devrez dans lesjours qui suivent vous rencontrer pour élire votre président et votre secrétaire à qui nous transférerons la gestion de ce syndicat en date du 24 mai 2006.  »

[20]    Témoignant pour le compte du Bénéficiaire, monsieur Carl De Nitto, un des copropriétaires qui était présent lors de la réunion du 23 mai 2006 déclare que l’objectif de cette première réunion était d’échanger les coordonnées des six copropriétaires entre eux. Lors de cette réunion, aucun administrateur, président ou secrétaire n’ont été élu(s).

[21]    Selon ce témoin, d’autres réunions des copropriétaires ont eu lieu en juin et juillet 2006. Selon lui, le nouveau président a été élu vers la fin de juin 2006. C’est à cette époque qu’un nouveau compte de banque a été ouvert par les copropriétaires afin de déposer leurs chèques pour subvenir aux dépenses communes.

[22]    Ce témoin (M. De Nitto) n’était pas en 2006 un administrateur ou un dirigeant du Bénéficiaire et ne l’a jamais été subséquemment.

[23]    Il affirme qu’à cette époque, monsieur Serge Ferron n’était qu’un des copropriétaires. Il n’occupait pas de poste d’administrateur, président ou secrétaire du Bénéficiaire. Selon ce témoin, le premier président nouvellement élu par les copropriétaires était monsieur Frédéric Leclerc.

[24]    Toutefois, il est incapable d’affirmer que le 10 juin 2006, monsieur Leclerc était le président du syndicat et ce même lorsqu’en contre-interrogatoire, le procureur de l’Entrepreneur lui montre la déclaration modificative du Syndicat déposé au Registre des entrepreneurs du Québec datée du 10 juin 2006 et signée par monsieur Leclerc (pièce B-7).

[25]    Témoignant également pour le compte du Bénéficiaire, madame Monique Bouchard, déclare qu’elle n’était pas copropriétaire en 2006 et qu’elle l’est devenue seulement en 2010.

[26]    Elle est aussi présidente du syndicat depuis mai 2010. Après son élection, elle a commencé à ramasser divers documents qui étaient détenus par les autres copropriétaires. Elle n’a vu aucun document qui pourrait prouver que le 23 mai ou le 24 mai 2006, un président et un secrétaire ont été nouvellement élus.

[27]    Selon elle, le transfert de contrôle du syndicat a eu lieu le 21 juillet 2006. Cette date est étampée par le Registraire des entreprises du Québec pour confirmer le dépôt de la Déclaration modificative du Bénéficiaire  au REQ (pièce B-7). Cette déclaration est signée par Frédéric Leclerc le 10 juin 2006. Elle démontre l’ajout de monsieur Frédéric Leclerc comme président et de madame Évelyne Rondeau comme secrétaire du Bénéficiaire ainsi que le retrait de monsieur Jacques Fournier comme administrateur du Syndicat. Monsieur Jacques Fournier, selon le témoin, était une personne désignée par l’Entrepreneur.

Analyse et décision concernant le transfert du contrôle du syndicat

[28]    Malgré que lors de l’audition, les parties aient souvent utilisé l’expression « le transfert de contrôle du syndicat des copropriétaires », elles n’ont jamais bien précisé ce qu’elles comprenaient par cette expression.

[29]    Il est intéressant de noter que dans un chapitre du Code civil qui traite « De la copropriété divise d’un immeuble » à la section VIII intitulée « De la perte de contrôle du promoteur sur le syndicat », l’article 1104 prévoit l’élection d’un nouveau conseil d’administration lors d’une assemblée extraordinaire des copropriétaires qui doit être convoquée par le conseil d’administration en place dans les 90 jours à compter du jour où le promoteur, (il s’agit ici de l’Entrepreneur) ne détient plus la majorité des voix à l’assemblée des copropriétaires. La nomination par ce nouveau conseil d’administration de dirigeants, tels que le président et le secrétaire, est habituellement prévue dans la déclaration de copropriété, un document publié au registre foncier selon l’article 1039 du Code civil.  Cette déclaration de copropriété n’a pas été soumise en preuve par les parties.

[30]    Pour les fins de cette sentence, le tribunal arbitral présume que les parties comprennent par l’expression « transfert de contrôle du syndicat » l’élection d’un nouveau président et d’un secrétaire qui, en principe, ont aussi été élus comme les nouveaux administrateurs de ce syndicat, soit le Bénéficiaire.

[31]    En résumé, le tribunal arbitral est appelé à déterminer la date du transfert de contrôle du Bénéficiaire de l’Entrepreneur aux copropriétaires. Parmi les dates qui ont été soumises en preuve par les parties, on retrouve quatre dates possibles :

-       le 23 mai 2006;

-       le 24 mai 2006;

-       le 10 juin 2006; et

-       le 21 juillet 2006.

[32]    Le tribunal écarte d’emblée la date du  21 juillet 2006 qui repose sur la date de dépôt de la déclaration modificative du Bénéficiaire (pièce B-7) au Registre des entreprises. Étant donné que cette même déclaration a été signée par le nouveau président le 10 juin 2006, c’est cette dernière date que le tribunal préfère retenir pour les fins de son analyse.

[33]    Le tribunal élimine également la date du 23 mai 2006. Selon le témoignage de monsieur De Nitto qui était présent lors de la première réunion qui a eu lieu à cette date, il n’y avait aucune élection d’administrateur(s) pour remplacer monsieur Jacques Fournier (désigné par l’Entrepreneur), ou pour nommer un nouveau président et secrétaire. Son témoignage qui est clair à ce sujet, est corroboré par le courriel du 23 mai 2006 de monsieur Serge Ferron aux cinq autres copropriétaires, déposé comme la pièce B-4.

[34]    En ce qui concerne la date du 23 mai 2006 qui apparaît dans le courriel du 27 juin 2006 de monsieur Serge Ferron à monsieur Frédéric Leclerc où il mentionne cette date comme celle de la formation du Syndicat des copropriétaires, le tribunal note que l’extrait cité ne démontre pas qu’un nouveau conseil d’administration a été élu et que le contrôle du Bénéficiaire a été transféré à cette date (pièce B-12).

[35]    Il reste donc deux dates possibles parmi celles soumises en preuve : celles du 24 mai 2006 et du 10 juin 2006.

[36]    Le Bénéficiaire a aussi déposé en preuve copie d’une lettre datée du 9 mai 2006 sur la papeterie de l’Entrepreneur (pièce B-5). Cette lettre dont l’objet est intitulé « Remise des documents suite au transfert de la gestion de la copropriété » fait référence à quatre documents soit, les plans de l’architecte et de l’ingénieur, copie de la facture de la pierre utilisée pour le fond de cave, la Déclaration modificative d’une personne morale qui « vous sera nécessaire afin d’ouvrir votre compte de banque » et l’avis de fin des travaux. Ce qui est important aux yeux du tribunal est que ce document porte deux signatures. À côté de l’expression « Nom du président» apparaît la signature de monsieur Frédéric Leclerc ainsi que la date du 24 mai 2006. En-dessous apparaît une deuxième signature qui est illisible.

[37]    La signature de monsieur Leclerc (ce dernier n’ayant pas témoigné à l’audience) sur le document (pièce B-5) est semblable à celle qui apparaît sous son nom sur la Déclaration modificative (pièce B-7). De plus, aucune partie n’a contesté l’authenticité de cette signature.

[38]    Cette reconnaissance par monsieur Leclerc, à titre de président du syndicat, sur la pièce B-5 datée du 24 mai 2006 amène le tribunal à conclure que le contrôle du Bénéficiaire a été transféré de l’Entrepreneur aux copropriétaires le 24 mai 2006.

Partie 2 - Fin des travaux des parties communes

[39]    Dans ses décisions, l’Administrateur a fixé la date de la fin des travaux des parties communes au 28 décembre 2005.

[40]    Selon le Bénéficiaire, cette date serait plutôt celle du 27 juin 2006, une date à laquelle l’ingénieur, M. Marc Couture désigné par l’Entrepreneur a attesté que toutes les déficiences avaient été corrigées (pièce B-3, page 3).

Preuve

[41]    Témoignant pour le compte de l’Administrateur, madame Karine Pépin, conciliatrice, déclare qu’elle a choisi  la date du 28 décembre 2005 car il s’agit de la même date que celle qui apparaît à côté de l’expression « date de la fin des travaux des parties communes » apparaissant sur les huit avis de fin des travaux déposés en liasse comme la pièce B-1.1. Ces avis sont signés par le représentant de l’Entrepreneur, madame Francine Viens. Parmi ces avis, se trouve celui adressé au « Syndicat de copropriété 8980 à 8994 Croissant du Louvre » à l’attention de monsieur « Frédéric Leclerc, président ».

[42]    Cependant, parmi les documents déposés en preuve par le Bénéficiaire, notamment la pièce B-3 se trouve le formulaire intitulé « Inspection préréception - fin des travaux - réception du bâtiment ». Sur ce document, la date de fin des travaux des parties communes est laissée en blanc. Le nom du représentant du syndicat est monsieur Jacques Fournier et celui du professionnel choisi par le syndicat des copropriétaires est monsieur Marc Couture, ingénieur. Ces personnes ont été désignées par l’Entrepreneur.

[43]    Annexée à ce document ( pièce B-3) se trouve la liste de déficiences signée par monsieur Marc Couture, ingénieur. Deux déficiences y sont indiquées. Sur ce même document, apparaît une note à l’effet qu’une nouvelle visite a eu lieu le 27 juin 2006 avec l’ajout que « toutes les déficiences ont été corrigées adéquatement ». En-dessous de cet ajout apparaît la signature de monsieur Marc Couture, ingénieur.


 

Analyse et décision concernant la fin des travaux des parties communes

[44]    Au tout début de cette analyse, le tribunal arbitral remarque que la position du Bénéficiaire quant à la détermination de la date de la fin des travaux des parties communes a évolué au cours de l’audition du 17 juin 2014. Lors des conférences préparatoires précédant cette audition, la position du Bénéficiaire, tel qu’exprimée par ses ex-procureurs,  Me Daniel Lévesque, dans sa lettre du 14 septembre 2012 et par Me Karl de Grandpré dans la sienne du 7 novembre 2013, était à l’effet que la fin des travaux n’a pas eu lieu car les travaux relatifs à l’immeuble n’ont pas été terminés « puisque des interventions additionnelles ont été réalisées par l’entrepreneur et qu’au moment du dépôt de la demande d’intervention à l’administrateur, l’entrepreneur promettait et s’était engagé à réaliser des travaux additionnels, l’ouvrage n’ayant donc pas été terminé ».

[45]    Immédiatement avant l’audition du 17 juin 2014, la nouvelle avocate du Bénéficiaire qui l’a représenté à cette audition, a déclaré que la date de la fin des travaux des parties communes n’était pas encore survenue. Elle confirmait ainsi que la position de son client demeurait celle exprimée par ses prédécesseurs, Me Lévesque et Me De Grandpré.

[46]    Cependant, au cours de l’audition, lorsque le tribunal arbitral lui a demandé de préciser à nouveau la position du Bénéficiaire concernant la date de fin des travaux, l’avocate du Bénéficiaire a indiqué qu’il s’agissait du 27 juin 2006, soit la date qui apparaît à la page 3 de la pièce B-3.

[47]    Le tribunal doit donc décider si la date de la fin des travaux des parties communes était le 28 décembre 2005 (tel que déterminée par l’Administrateur) ou le 27 juin 2006.

[48]    La définition de la « fin des travaux des parties communes » apparaît à l’article 25 du Règlement et elle se lit comme suit :

              « la date à laquelle tous les travaux de l’entrepreneur convenus par écrit avec le bénéficiaire et relatifs aux parties communes sont exécutés et le bâtiment est en état de servir conformément à l’usage auquel on le destine;  ».

[49]    Et que signifie le mot « bénéficiaire » dans cette définition? Tel que défini à l’article 1 du Règlement, ce mot, dans le cas des parties communes d’un bâtiment détenu en copropriété divise, signifie le « syndicat de copropriétaires ».

[50]    Peut-il s’agir d’un syndicat de copropriétaires qui est encore contrôlé par l’entrepreneur?

[51]    Ce tribunal s’est déjà penché sur la signification qu’on devait attribuer au mot « bénéficiaire » dans la définition de l’expression « fin des travaux des parties communes » dans une sentence antérieure[2] :

          « (83)    Ceci m’amène à la conclusion que dans les circonstances, comme celles en cette cause, où il y a absence de preuve que tous les travaux de l’entrepreneur relativement aux parties communes convenus par écrit avec tous les copropriétaires (ont été effectués) - le mot « bénéficiaire » dans la définition de « fin des travaux des parties communes » à l’article 25 du Règlement signifie un syndicat de copropriétaires qui n’est pas sous le contrôle de cet entrepreneur. »(Soulignement par le tribunal arbitral)

[52]    Nous avons vu ci-haut que le contrôle du Bénéficiaire est passé de l’Entrepreneur aux nouveaux copropriétaires seulement le 24 mai 2006.

[53]    Comme le tribunal est appelé à choisir seulement entre deux dates, celle du 28 décembre 2005 à l’époque où le Bénéficiaire était encore contrôlé par l’Entrepreneur et celle du 27 juin 2006, il n’a d’autre alternative que de choisir cette dernière date comme la date de fin des travaux des parties communes.

Partie 3 - Date de la réception des parties communes

Prétentions des parties

[54]    Selon le Bénéficiaire, la réception des parties communes n’a jamais eu lieu. Comme motif, il invoque qu’aucun formulaire de réception des parties communes n’a été signé par un professionnel désigné par le Syndicat des copropriétaires (soit le Bénéficiaire) après le transfert du contrôle de l’Entrepreneur aux copropriétaires.

[55]    En ce qui concerne une réception présumée au sens de l’article 25.1 du Règlement, le Bénéficiaire soutient que les modifications apportées par cet article 25.1 au plan de garantie, ne s’appliquent pas aux faits de cette cause.

[56]    Selon l’Administrateur, la réception des parties communes a eu lieu le 23 mai 2006. C’est la date qui a été retenue par la conciliatrice, madame Karine Pépin dans sa décision. Cette date correspond, selon le témoignage de madame Pépin, à la date du transfert de contrôle du syndicat, de l’Entrepreneur aux copropriétaires

[57]    L’Administrateur plaide également que si, après avoir gagné son autonomie en mai 2006, le Syndicat des copropriétaires n’a pas procédé à une inspection par un professionnel qu’il aurait pu désigner, c’est à cause de son incurie.

[58]    L’Entrepreneur partage la position de l’Administrateur quant à la date de réception des parties communes.

Analyse et décision concernant la date de réception des parties communes

[59]    Étant donné que les travaux de construction du bâtiment ont débuté avant le 7 août 2006, il faut regarder la définition de l’expression « réception des parties communes » telle qu’elle existait avant sa modification par le décret 39-2006 publié dans la Gazette Officielle du Québec le 8 février 2006[3].

[60]    Cette « ancienne » définition à l’article 25 du Règlement se lisait comme suit :

              « 25.     Pour l’application de la présente sous-section, à moins que le contexte n’indique un sens différent, on entend par :

 

              « réception des parties communes » : l’acte par lequel un professionnel du bâtiment choisi par le syndicat de copropriétaires déclare la date de la fin des travaux des parties communes. Cette déclaration s’effectue à la suite de la réception d’un avis de fin des travaux expédié par l’entrepreneur à chaque bénéficiaire connu et au syndicat de copropriétaires. »

[61]    Selon une jurisprudence quasi constante, y compris la sentence de l’arbitre Guy Pelletier, dans Syndicat en copropriété 670 Manoir Masson[4], citée par le Bénéficiaire, le professionnel du bâtiment dont il s’agit dans cette définition doit être celui choisi par un syndicat de copropriétaires qui ne se trouve plus sous le contrôle de l’entrepreneur.

[62]    De plus, selon les termes de l’article 33 du Règlement, une telle réception des parties communes doit être précédée d’une inspection :

              « 33.     …

 

              Les parties communes visées par la garantie doivent être inspectées avant leur réception. Cette inspection doit être effectuée conjointement par l’entrepreneur, le professionnel du bâtiment choisi par le syndicat de copropriétaires et ce dernier à partir d’une liste préétablie d’éléments à vérifier fournie par l’administrateur. »

[63]    Selon la preuve, une inspection qui rencontrerait tous les critères de l’article 33 n’a jamais eu lieu.

[64]    À ce stade de notre analyse, on peut se demander si une « réception présumée » des parties communes qui est prévue par l’article 25.1 du Règlement pourrait nous aider à fixer la date de cette réception. Il faut noter que l’article 25.1 a aussi été introduit par le décret 39-2006 mentionné au paragraphe 59 ci-dessus.

Réception présumée selon l’article 25.1 du Règlement

[65]    L’article 25.1 exige une preuve de plusieurs éléments pour nous permettre de conclure à l’existence d’une réception présumée des parties communes :

              « 25.1        Aux fins de la présente sous-section, la réception est présumée avoir eu lieu au plus tard 6 mois après la réception de l’avis de fin de travaux si les conditions suivantes sont remplies :

 

1.    les travaux sont terminés;

2.    le syndicat est formé et n’est plus sous le contrôle de l’entrepreneur;

3.    l’avis de fin des travaux transmis au syndicat par l’entrepreneur l’informait de la fin des travaux et de ses obligations en regard de la réception;

4.    il s’est écoulé un délai de 6 mois depuis la réception de cet avis par le syndicat et ce dernier, sans motif, n’a pas reçu les parties communes. »

[66]    J’adhère à l’interprétation de cet article adoptée par l’arbitre Johanne Despatis dans le Syndicat de copriétés Les Jardins St-Hyppolite[5] :

              « 28.     Malgré ou en dépit de cette jurisprudence, le règlement est amendé en février 2006 alors qu’y est ajouté l’article 25.1 qui reconnaît la notion de réception présumée et en énonce les conditions de réalisation. Il se lit ainsi :

 

                        25.1    …

 

                        29.      Cette disposition crée une présomption selon laquelle malgré l’absence de réception formelle, il peut néanmoins y avoir constat de réception. Cette présomption assujettie pareil constat à des conditions strictes. Son texte ne laisse d’ailleurs aucun doute sur le fait que si l’une de ces conditions n’est pas remplie, il ne saurait y avoir présomption de réception des parties communes. »

[67]    Selon la preuve, l’Entrepreneur n’a jamais informé le Syndicat des copropriétaires après le 24 mai 2006 (soit après le transfert de contrôle) de ses obligations en regard de la réception, tel qu’exigé par le paragraphe 3 de l’article 25.1. Ceci découle, entre autres, de l’extrait suivant d’un projet de lettre (pièce B-12) devant être adressée à l’Administrateur et envoyé par un des copropriétaires, monsieur Serge Ferron, au président du Syndicat, monsieur Frédéric Leclerc :

              « … Bonjour,

 

              Afin d’être en conformité avec le plan de garantie « Qualité Habitation », nous désirons obtenir des éclaircissements en rapport aux étapes à suivre pour la réalisation de la pré-inspection des parties communes de la copropriété et ce, en prenant compte des éléments suivants :

 

·       

·       

·       

·       

           

            Selon les points précités, et considérant de plus que l’entrepreneur nous répond actuellement que d’une part il n’y a pas lieu pour le syndicat de mandater un expert étant donné que l’inspection par un ingénieur a été effectuée antérieurement et d’autre part, que le délai de six (6) mois pour dénoncer les vices et malfaçons prendra fin d’ici peu (selon la date indiquée dans l’avis de fin des travaux).

 

            Dans les circonstances, et compte tenu de la confusion des renseignements que nous avons obtenus de la part de l’entrepreneur et de Qualité Habitation, nous demandons l’assistance de l’administrateur du plan de garantie « Qualité Habitation » de nous indiquer la marche à suivre.

 

            Merci par avance pour le suivi qui sera apporté à la présente,

 

            Bien à vous.»

[68]    Cet extrait démontre que le syndicat de copropriété était confus quant à « ses obligations en regard de la réception ». L’avis de l’Entrepreneur prévu au paragraphe 3 de l’article 25.1 n’informait pas le syndicat de copropriétaires « de ses obligations en regard de la réception ».

[69]    Avant de conclure la discussion sur une « réception présumée » - le tribunal désire commenter une lettre de l’Entrepreneur qui a été déposée en preuve. Il s’agit d’une lettre de l’Entrepreneur datée du 8 mai 2006 à un des copropriétaires, monsieur Serge Ferron (pièce B-9).

[70]    Le premier paragraphe de cette lettre se lit comme suit :

              « Vous avez maintenant élu le(la) président(e) et le(la) secrétaire du syndicat des copropriétés du 8982 Croissant du Louvre.

 

              Nous demandons à votre président(e) du syndicat de copropriété ou à son représentant de venir chercher les documents suivants (ils seront disponibles à notre bureau de ventes situé au 9070 Le Corbusier : 

             

·        Plan de l’architecte ou de l’ingénieur;        

 

·        Copie de la facture de la pierre utilisée…

 

·        Déclaration modificative d’une personne morale qui vous sera nécessaire afin d’ouvrir votre compte de banque…

 

·        Avis de fin des travaux         

 

 

              Nous espérons votre participation et soyez assurés de notre entière collaboration.

             

              Le Village Parisien inc. »

[71]    Selon le tribunal arbitral, cette lettre est déficiente à sa face même. Elle est datée du 8 mai 2006 soit avant le transfert de contrôle du syndicat qui a eu lieu seulement le 24 mai 2006. Elle est adressée à monsieur Serge Ferron qui n’a pas été en 2006 un administrateur ou un dirigeant du syndicat des copropriétaires. Elle n’est pas signée. Finalement, elle n’informe pas le syndicat, une fois qu’il sera affranchi du contrôle de l’Entrepreneur, de son obligation première, soit celle de mandater un professionnel du bâtiment qu’il aura choisi pour qu’il déclare la date de la fin des travaux des parties communes et qu’il procède, conjointement avec l’Entrepreneur, à une inspection des parties communes, selon les exigences de l’article 33 du Règlement mentionné ci-haut.

[72]    Le tribunal doit donc conclure qu’en absence de la réalisation d’une des conditions prévues au paragraphe 3 de l’article 25.1 du Règlement il n’y a pas eu de réception présumée des parties communes.

Date de réception des parties communes

[73]    En écartant la date du 23 mai 2006 retenue par l’Administrateur comme celle de la réception des parties communes et ne pouvant pas déterminer cette date à l’aide de l’article 25.1, est-ce que la preuve soumise peut permettre au tribunal arbitral de statuer que la réception des parties communes n’a pas encore eu lieu, comme le prétend le Bénéficiaire?

[74]    Selon la preuve, le syndicat des copropriétaires après son affranchissement en date du 24 mai 2006, a commandé trois inspections des parties communes, comme suit :

a)    L’inspection par monsieur Martin Dion, inspecteur, décrite à son rapport du 22 juin 2010 (pièce B-17);

b)    L’inspection de ProspecPlus Génie-Conseil décrite à son rapport du 1er juin 2011, et  (pièce B-15);

c)    L’inspection de ProspectPlus Génie-Conseil décrite au rapport du 21 novembre 2011 (pièce B-16).

[75]    Est-ce qu’une de ces inspections pourrait être considérée comme celle mentionnée à la définition de réception des parties communes sous l’article 25 du Règlement ?

[76]    Analysons le premier rapport d’inspection, soit celui de l’inspecteur, Martin Dion.

[77]    Ce rapport déposé comme la pièce B-17 est un document de 11 pages. Il est  intitulé « Syndicat des copropriétaires du projet de condominiums situé au 8980 à 8994 Croissant du Louvre à Brossard - Rapport d’inspection finale concernant les aires communes ». Il est daté du 22 juin 2010 et signé par monsieur Martin Dion, inspecteur en bâtiment T.S.A. Monsieur Dion a témoigné à l’audience et il a été contre-interrogé par les procureurs de l’Administrateur et de l’Entrepreneur.

[78]    La rédaction de ce rapport a été précédé de deux visites d’inspection par monsieur Dion au bâtiment. Ces visites ont eu lieu en mai 2010. Il a remis son rapport à madame Bouchard, la présidente du syndicat, quelque temps après le 22 juin 2010 mais il ne se rappelle pas de la date exacte.

[79]    Madame Bouchard a témoigné qu’après avoir reçu ce rapport, elle l’a annexé à une lettre adressée à l’Entrepreneur en date du 31 juillet 2010 (document no 11 du cartable bleu). Dans sa lettre, elle écrit :

              « À qui de droit,

 

              Par la présente et suite à la réception récente du rapport d’inspection de notre bâtiment, nous vous adressons les éléments soulevés dans ce document et nous vous demandons d’avoir l’obligeance d’y apporter les correctifs, les réparations et remplacements nécessaires attendu que nous avons le privilège de notre garantie de 5 ans. »

 

Ensuite, dans sa lettre, madame Bouchard dresse une liste de quelque 17 déficiences décrites dans le rapport d’inspection de monsieur Dion.

[80]    Madame Bouchard a envoyé une copie de la lettre et du rapport de monsieur Dion aux autres copropriétaires.

[81]    L’inspection de monsieur Dion des parties communes (deux visites en mai 2010) qui a précédé la rédaction de son rapport n’était pas faite conjointement avec l’Entrepreneur. Son rapport contient presqu’exclusivement une description des déficiences dans les aires communes et exceptionnellement dans quelques aires privatives. Il n’y a pas de preuve que cette inspection a été effectuée à partir d’une liste préétablie d’éléments à vérifier fournie par l’Administrateur, tel qu’exigé par l’article 33 du Règlement.

[82]    Les deux autres rapports commandés par madame Monique Bouchard au nom du syndicat des copropriétaires à la firme ProspecPlus-Génie Conseil, soit celui daté du 1er juin 2011 (Pièce B-15) et l’autre daté du 21 novembre 2011 (pièce B-16) visaient des problèmes de construction potentiels plus spécifiques liés à la structure du bâtiment. Pour cette raison le tribunal arbitral ne les retient pas comme pouvant servir à déterminer la date de la réception des parties communes.

[83]    À la lumière des circonstances très particulières de ce dossier y compris, un délai de quelque 4 ans entre la date de l’affranchissement du Bénéficiaire du contrôle de l’Entrepreneur (24 mai 2006) ainsi que la date de la fin des travaux des parties communes (27 juin 2006) et la date de l’inspection par monsieur Dion et la date de son rapport, le fait que l’Entrepreneur lui-même a informé erronément le Bénéficiaire qu’une inspection pré-réception après la date de cet affranchissement n’est plus requise car elle a déjà été effectuée par un ingénieur choisi par l’Entrepreneur, le fait que le Bénéficiaire était conscient qu’une inspection pré-réception est requise depuis le 27 juin 2006 (pièce B-12) mais qu’il était confus quant à ses modalités exactes, le fait qu’une réception présumée selon les exigences de l’article 25.1 ne peut pas être déterminée,- le tribunal arbitral vient à la conclusion que la réception des parties communes du bâtiment a eu lieu le 5 juillet 2010 soit le 14e jour qui suit la date du rapport de monsieur Dion. Selon les faits mis en preuve, le tribunal a droit de présumer que madame Bouchard a pris connaissance de ce rapport au plus tard le 14e jour après sa rédaction.

[84]    Le tribunal arbitral arrive à cette conclusion quant à la date de réception des parties communes en s’appuyant sur l’équité, eu égard aux circonstances particulières citées ci-haut, plutôt que sur une adhérence stricte au texte des articles 25 et 33 du Règlement.

Partie 4 -      Dénonciation écrite à l’Administrateur dans un délai maximal de six mois après la date de la découverte de la déficience

[85]    Dans ses décisions, l’Administrateur a rejeté 3 points de réclamation du Bénéficiaire au motif que les situations décrites sous ces points doivent être dénoncées par écrit à l’Entrepreneur et à l’Administrateur dans un délai raisonnable lequel ne peut excéder six mois de leur découverte. Il faut préciser que dans ses décisions, l’Administrateur n’a pas qualifié la nature exacte de chacune de ces situations. Il a simplement invoqué 3 possibilités prévues sous les paragraphes 27(3) (malfaçons existantes et non apparentes au moment de la réception), 27(4) (vices cachés) et 27(5) du Règlement (vices de conception, de construction ou de réalisation et des vices du sol au sens de l’article 21.18 du Code civil), et par les articles correspondants dans le contrat de garantie.

[86]    Ces 3 points de réclamations sont décrits dans les décisions de l’Administrateur sous les points 1 intitulé « Affaissement de la dalle »,  2 « Unités 8980 - 8982 - 8988 - 8990 : Rangement sous escalier et étanchéité », et au point 16 « Foyers : mur coupe-feu pour cheminées ».

1.           Affaissement de la dalle

[87]    Il s’agit de l’affaissement de la dalle de béton de quatre logements portant les numéro 8980, 8984, 8988 et 8992 Croissant du Louvre. Chacun de ces logements possède un sous-sol avec un plancher qui repose sur une dalle de béton.

Preuve

[88]    La preuve retenue par le tribunal arbitral quant à l’affaissement de la dalle de béton peut être résumée comme suit :

[89]    Avant la date de la dénonciation écrite du Bénéficiaire à l’Administrateur datée du 2 juin 2011 et reçue par ce dernier le 6 juin 2011, il y a eu trois épisodes d’affaissement de planchers dans les quatre unités possédant un sous-sol :

-      Le premier épisode est survenu en octobre 2006 dans les unités 8984 et 8988, soit quelques mois après la date de la fin des travaux des parties communes que le tribunal a fixée au 27 juin 2006. Les affaissements ont été réparés par l’Entrepreneur. Ces réparations ont été décrites par les Bénéficiaires comme étant un « remplissage des planchers »;

-      Le deuxième épisode est survenu en mars 2010. Il s’agissait d’un deuxième affaissement progressif à l’unité 8984 et un premier affaissement à l’unité 8992. L’Entrepreneur a effectué des travaux (un remplissage des planchers du sous-sol) Il n’a rien fait à l’unité 8984.

-      Le troisième épisode est survenu le 10 mai 2010. L’unité 8980 en était affecté.

-      Le Bénéficiaire avise l’Entrepreneur du problème d’affaissement le 12 mai 2010 et lui envoie deux autres courriels de rappel. Le 9 juin 2010, le représentant de l’Entrepreneur, monsieur Beaulieu, visite le bâtiment. Aucun travail de réparation n’est effectué.

[90]    Entre-temps, soit en mai 2010, le Bénéficiaire demande à monsieur Martin Dion, inspecteur de bâtiments, d’inspecter les parties communes du bâtiment. Il fait deux visites d’inspection et rédige son rapport qui est daté du 22 juin 2010 (pièce B - 17).

[91]    Dans son rapport (pièce B-17), monsieur Dion relate qu’il a visité trois des quatre logements affectés par les affaissements (les unités 8980, 8988 et 8992).

[92]    À la même période soit en mai 2010, la quatrième unité affectée par les affaissements, l’unité 8984 appartenant à monsieur Carl De Nitto, est inspectée par un ingénieur, monsieur Michel Provencher. Ce dernier rédige son rapport daté du 21 mai 2010. Ce rapport est communiqué par monsieur De Nitto à la présidente du Bénéficiaire, madame Monique Bouchard.

[93]    Le 31 juillet 2010, le Bénéficiaire envoie une copie du rapport de monsieur Dion à l’Entrepreneur. En même temps il lui soumet une liste des déficiences décrites au rapport de monsieur Dion, y compris la déficience décrite comme « Affaissement des surfaces de planchers des unités de sous-sol.». (document no 11).

[94]    Le 2 septembre 2010, le représentant de l’Entrepreneur, monsieur Beaulieu, se présente sur les lieux pour discuter des 17 points mentionnés à la lettre de dénonciation (document no 11). Après sa rencontre avec monsieur Beaulieu,  Madame Bouchard écrit à l’Entrepreneur « Dans l’ensemble, je suis satisfaite des réponses et des engagements obtenus », selon son courriel du 4 septembre 2010 (document no 13).

[95]    Toutefois, à l’audience, madame Bouchard a témoigné que monsieur Beaulieu « était mélangé dans ses réponses »concernant les causes des affaissements et de leur réparation.

[96]    Elle a aussi témoigné que monsieur Beaulieu avait promis d’inspecter le drain français.

[97]    Cet examen du drain français par l’Entrepreneur a eu lieu en septembre 2010. L’Entrepreneur a mentionné qu’avec une caméra vidéo, il a filmé l’intérieur du drain. Malgré 4 ou 5 demandes du Bénéficiaire à l’Entrepreneur pour obtenir cette vidéo, elle ne lui a jamais été fournie.

[98]    En octobre 2010, le représentant de l’Entrepreneur a confirmé à madame Bouchard que deux drains français ont été échangés. Il ne lui a pas dit lesquels. De plus, le 22 octobre 2010, l’Entrepreneur a confirmé à madame Bouchard que le problème sera révisé au printemps 2011 :« d’affaissement des surfaces de planchers des unités des sous-sols : À voir au printemps 2011 » (document no 22). (soulignement par le tribunal)

[99]    Le 6 mars 2011, madame Bouchard envoie un courriel à l’Entrepreneur dans lequel elle écrit : « Nous souhaitons nous assurer que les réparations auront lieu au printemps, tel que convenu avec monsieur Beaulieu » (document no 28).

[100]      Au cours des quatre prochaines semaines, un échange de courriels entre les deux parties a lieu. L’Entrepreneur annonce que monsieur Beaulieu n’est plus à son emploi et que son remplaçant procédera à une investigation du problème. Aucune des réparations promises y compris celle concernant l’affaissement des planchers n’est effectuée, malgré plusieurs courriels de rappel de madame Bouchard à l’Entrepreneur.

[101]      Le 13 avril 2011, à la demande de madame Bouchard pour le compte du Bénéficiaire, une nouvelle firme d’experts, ProspecPlus Génie-Conseil inc. procède à une inspection de trois problèmes structuraux affectant le bâtiment, y compris celui de l’affaissement des planchers dans les unités avec un sous-sol. Cette firme produit un rapport rédigé en date du 1er juin 2011(pièce B-15).

[102]      Madame Bouchard a témoigné qu’elle a commandé cette nouvelle inspection et expertise car elle voulait connaître la vraie cause de l’affaissement des planchers. Dans les conclusions du rapport de ProspecPlus Génie-Conseil inc., on lit à ce sujet ce qui suit :

              « À la lumière de l’historique fournie des problèmes et de leur évolution depuis la construction du bâtiment, il appert que nous sommes en présence d’une consolidation progressive du remblai de pierres concassées installé afin de rehausser le niveau du sol entre les fondations. La mauvaise gestion des eaux de ruissellement au pourtour du bâtiment augmente la sensibilité de ce remblai compactable au tassement. Les événements de 2006 reflètent le fait du tassement initial alors que ceux de 2010 démontrent une phase de consolidation plus importante.

 

              Il sera nécessaire de procéder à des forages exploratoires sous la dalle de plancher du sous-sol afin de déterminer le degré de consolidation du remblai ainsi que le niveau de la nappe phréatique à l’intérieur des fondations » (p. 27 de B-15).

[103]      Le 2 juin 2011, le Bénéficiaire transmet une lettre de dénonciation à l’Administrateur et à l’Entrepreneur (6 pages) (pièces A-4 et B-13). L’Administrateur la reçoit le 6 juin 2011.Y annexés sont les rapports de monsieur Michel Provencher, de l’inspecteur Martin Dion avec quelque 186 photos et le rapport de ProspecPlus Conseil inc. du 1er juin 2011.

Prétentions des parties

[104]      Selon le Bénéficiaire, son obligation de dénoncer la situation débute à la date où il « connaît la gravité du préjudice ». Il plaide qu’il était impossible pour lui de connaître cette gravité en 2010 ou avant. Il a acquis une certaine connaissance de cette gravité en lisant le rapport d’inspection de la firme ProspecPlus Génie-Conseil qui est daté du 1er juin 2011. Même après la révision de ce rapport, le représentant de l’Entrepreneur, monsieur Lamoureux a appelé madame Bouchard pour lui dire que le problème d’affaissement des planchers allait se stabiliser.

[105]      L’Administrateur, quant à lui, plaide que la lettre de dénonciation du Bénéficiaire à l’Entrepreneur du 31 juillet 2010 qui contient une référence à « l’affaissement des surfaces de planchers des unités des sous-sols « (document 11) » démontre que le Bénéficiaire avait une connaissance suffisante de cette déficience. Pourquoi il ne l’a pas dénoncé aussi à l’Administrateur?

[106]      Selon l’Administrateur, le Bénéficiaire n’avait pas besoin de connaître la cause exacte de cette déficience pour la dénoncer à l’Administrateur.

[107]      Selon lui, s’il s’agit d’un vice caché, la question est de savoir si le Bénéficiaire aurait pu raisonnablement soupçonner la gravité et l’étendue de cette déficience. Ce test n’est pas totalement subjectif mais il contient des éléments objectifs.

[108]      Finalement, selon l’Administrateur, le délai de dénonciation de six mois entre la date de la découverte et la dénonciation écrite à l’Entrepreneur et à l’Administrateur est un délai de rigueur et de déchéance.

[109]      Selon l’Entrepreneur, le Bénéficiaire a découvert cette déficience en prenant connaissance du rapport d’inspection de monsieur Martin Dion (pièce B-17) que le Bénéficiaire a reçu dans les deux semaines après la date de la rédaction (22 juin 2010) de ce rapport.

 

Analyse et décision concernant le point 1 « Affaissement de la dalle »

[110]      Le bâtiment dont les parties communes sont administrées par le Bénéficiaire comprend huit unités dont les quatre unités suivantes possèdent des sous-sols dont les planchers reposent sur une dalle en béton : il s’agit des unités 8980, 8984, 8988 et 8992.

[111]      Les paragraphes 27(3), 27(4), 27(5) du Règlement invoqués par l’Administrateur dans sa décision concernant l’affaissement de la dalle, se lisent comme suit :

              « 27. La garantie d’un plan dans le cas d’un manquement de l’entrepreneur à ses obligations légales ou contractuelles après la réception de la partie privative ou des parties communes doit couvrir :

 

              3.      la réparation des malfaçons existantes et non apparentes au moment de la réception et découvertes dans l’année qui suit la réception, visées aux articles 2113 et 2120 du Code civil et dénoncées, par écrit, à l’entrepreneur et à l’administrateur dans un délai raisonnable, lequel ne peut excéder 6 mois de la découverte des malfaçons;

 

4.    la réparation des vices cachés au sens de l’article 1726 ou de l’article 2103 du Code civil qui sont découverts dans les 3 ans suivant la réception et dénoncés, par écrit, à l’entrepreneur et à l’administrateur dans un délai raisonnable, lequel ne peut excéder 6 mois de la découverte des vices cachés au sens de l’article 1739 du Code civil;

 

5.    la réparation des vices de conception, de construction ou de réalisation et des vices du sol, au sens de l’article 2118 du Code civil, qui apparaissent dans les 5 ans suivant la fin des travaux des parties communes ou, lorsqu’il n’y a pas de parties communes faisant partie du bâtiment, de la partie privative et dénoncés, par écrit, à l’entrepreneur et à l’administrateur dans un délai raisonnable, lequel ne peut excéder 6 mois de la découverte ou survenance du vice ou, en cas de vices ou de pertes graduelles, de leur première manifestation.  »

[112]      En lisant attentivement ces trois paragraphes du Règlement, on constate que dépendamment de la nature exacte du vice ou de la malfaçon, le délai de six mois commence à courir à partir d’une date différente : dans le cas de malfaçons existantes, non apparentes au moment de la réception, cette date est celle de la découverte des malfaçons. Dans le cas de vices cachés, ce point de départ est aussi la découverte des vices. Toutefois, dans le cas d’un vice qui apparaît graduellement, l’article 1739 du Code civil du Québec précise que ce délai commence à courir du jour où le Bénéficiaire « a pu en soupçonner la gravité et l’étendue ».

[113]      Finalement, dans le cas de vices décrits au paragraphe 27 (5) du Règlement, ce délai de 6 mois commence à courir à partir de la date de la découverte ou survenance du vice ou en cas de vices ou de pertes graduelles,«  de leur première manifestation ».

[114]      Selon la preuve, l’affaissement des planchers du sous-sol des quatre logements et donc la dalle de béton sur laquelle reposent ces planchers, s’est manifesté de façon graduelle. Dans le cas des unités 8984 et 8988, la première manifestation a eu lieu en octobre 2006.

[115]      Lors de sa plaidoirie, le Bénéficiaire déclare que sa découverte du vice a eu lieu seulement lorsqu’il a pu connaître la gravité de son préjudice soit depuis la réception du rapport de ProspecPlus du 1er juin 2011 (pièce B-15).

[116]      Lors de son contre-interrogatoire, madame Bouchard, questionnée de façon soutenue par les procureurs de l’Administrateur et de l’Entrepreneur pour connaître la raison pour laquelle elle considérait que le rapport de monsieur Martin Dion du 22 juin 2010 était insuffisant pour dénoncer l’affaissement de la dalle à l’Administrateur, elle répondait que ce rapport ne décrivait pas la vraie cause de l’affaissement des planchers.

[117]      Analysons donc le rapport de monsieur Dion pour voir s’il a pu servir ou pas à déterminer la date de la connaissance du Bénéficiaire du problème de la dalle et ainsi vérifier s’il a pu ma                   rquer le début du délai de dénonciation maximal de six mois.

[118]      Il faut préciser que dans son rapport, monsieur Dion discute seulement de 3 des 4 unités munis d’un sous-sol. Il ne réfère pas directement dans son rapport à l’unité 8984 qui a fait l’objet d’un autre rapport et que nous analyserons ci-dessous.

[119]      Voici ce qu’écrit monsieur Dion au sujet de chacune des 3 unités :

a)    Unité de condominium située au 8980 Croissant du Louvre :

« Il y a eu aussi mouvements majeurs à l’intérieur de cette unité de condominium, concernant les aires exclusives au sous-sol. On peut voir en effet à l’intérieur des chambres à coucher, dont l’une ou l’affaissement est plus particulièrement marqué, qu’il y a eu baisse de la surface du plancher (voir photographies…) il y a eu aussi mouvement concernant la surface de plancher de la salle de bains puisqu’un écart supérieur à plus de ½ pouce est visible entre la surface horizontale du podium et le lambris en tuile de céramique au périmètre (voir photographies…) Évidemment, ce mouvement possède une répercussion sur l’ensemble du revêtement en tuile de céramique…soit concernant l’encoignure à la jonction du lambris et de la surface horizontale (voir photographies…)

On peut d’ailleurs observer aussi un affaissement de la surface de plancher à l’arrière du cabinet d’aisance (voir photographies…)», celui étant de plus de 3/8 de pouce de hauteur (voir photographies…)

b)  Unité de condominium située au 8988 Croissant du Louvre « À l’intérieur de cette unité de condominium, nous avons pu constater qu’il y a eu des affaissements majeurs (souligné par le tribunal) de la surface du plancher concernant les aires exclusives au sous-sol, principalement concernant les murs de périmètre adjacents à la fondation. À noter qu’il s’agit d’un faux plancher composé de panneaux de contreplaqué avec fourrure qui lui-même repose sur la dalle de béton…Il est certain que s’il y a eu mouvement au niveau de la dalle, il y aura aussi mouvement concernant la surface de la structure du faux plancher.

On peut observer à l’intérieur des chambres à coucher au sous-sol qu’il y a eu mouvements, ceci pouvant varier de ¼ de pouce de hauteur à plus de 5/8 de pouce de hauteur (voir photographies no      ). Il en est de même concernant un espace de rangement où il y a absence de revêtement de plancher. On peut voir en effet l’affaissement de la surface de plancher (voir photographies nos …) de presque ½ pouce de hauteur (3/8).

Concernant la salle de bain au sous-sol, il y a quand même une légère fissuration à la jonction du lambris en tuile de céramique de la surface horizontale du podium de la baignoire (voir photographie no      ). On peut voir aussi qu’il y a eu mouvement de la surface de plancher à proximité du limon latéral de l’escalier (voir photographie no…) »

c)  Unité de condominium située au 8992 Croissant du Louvre :

         « À l’intérieur de cette unité, il semble y avoir eu certains travaux exécutés par l’entrepreneur concernant les portions exclusives au sous-sol. En effet, l’affaissement des planchers semble avoir été dissimulé principalement à l’aide de quarts-de-rond, tel qu’à l’intérieur de l’espace de rangement où il y a présence d’un revêtement de plancher en tuile de céramique (voir photographie no … ) On peut observer, où est localisée l’installation de la laveuse-sécheuse, qu’il y a eu affaissement aussi de la surface de plancher en tuile de céramique (voir photographies…) Cet affaissement étant de plus ou moins ¼ de pouce d’épaisseur.

Concernant le revêtement de stratifié, tel qu’au niveau du corridor central, on peut constater qu’il y a eu pente visible, soit renflement, à proximité des portes d’accès des chambres… On peut voir que même si ce revêtement de plancher est récent, il y a eu quand même fort dégagement entre les quarts-de-rond et la surface en stratifié (plancher flottant) (voir photographie…)»

[120]      Dans sa conclusion, intitulé « Conclusion concernant ces affaissements des de plancher au sous-sol » l’inspecteur Dion écrit comme suit :

              « Il est difficile de définir la nature exacte de ces mouvements, toutefois il ne s’agit pas de gonflements mais bien d’affaissements (souligné par le tribunal). Par conséquent, il est fort probable que cela soit causé par des tassements différentiels de la dalle de béton. Ces tassements différentiels de la dalle en béton apparaissent lorsque le drainage au périmètre de la fondation est inadéquat (drain français) et/ou lorsque le matériel de remblai n’a pas été suffisamment compacté avant d’y couler la dalle de béton.

 

              … Une analyse plus exhaustive s’avère nécessaire, soit par ingénieur en sols et entreprise spécialisée pour vérification de drain français.

 

              Évidemment, ces mouvements occasionnent de nombreux désagréments aux copropriétaires possédant ces parties exclusives au sous-sol. Si l’on désire corriger la situation de façon définitive, cela peut constituer des travaux majeurs impliquant une main d’œuvre en sous-œuvre (souligné parle tribunal). Il serait dans l’intérêt de l’ensemble des copropriétaires de ce projet de condominiums de procéder à un recours collectif, avec d’autres copropriétaires de projets similaires, si lors d’une vérification plus exhaustive pouvant nécessiter carottage des travaux majeurs doivent être entrepris à court terme  »

[121]      Tel que déjà mentionné plus haut, madame Bouchard, comme présidente du Bénéficiaire a transmis une copie de ce rapport aux autres copropriétaires. Elle a aussi annexé ce rapport à sa lettre de dénonciation du 31 juillet 2010 à l’Entrepreneur. Le dernier point dans l’énumération des déficiences dans cette lettre de dénonciation à l’Entrepreneur se lit : « affaissement des surfaces de planchers des unités des sous-sols ». (Document no 11).

[122]      Dans son rapport, monsieur Dion a identifié deux causes probables des tassements différentiels de la dalle : soit le drainage au périmètre de la fondation qui est inadéquat (drain français) et/ou le matériel de remblai n’a pas été suffisamment compacté avant d’y couler la dalle de béton. Dans le cas de 2 des 3 unités, il a qualifié les affaissements comme étant « majeurs ».De plus, il indique que les mesures correctives pourront entraîner des « travaux majeurs » impliquant une main-d’œuvre en sous-œuvre.

Unité 8984 Croissant du Louvre

[123]      L’unité 8984 Croissant du Louvre appartenant à monsieur Carl De Nitto qui comprend  un sous-sol n’a pas été inspectée par monsieur Dion. Elle l’a été par monsieur Michel Provencher, ingénieur conseil, le 11 mai 2010 à la demande de monsieur De Nitto. Son rapport est daté du 21 mai 2010.

[124]      À la première page de son rapport, l’ingénieur Provencher résume l’historique. Il mentionne que le bâtiment a été construit en 2005 et que monsieur De Nitto a acheté son unité en  novembre 2005. Le premier affaissement du plancher du sous-sol a eu lieu fin octobre 2006. L’Entrepreneur a effectué des travaux correctifs qui consistaient en un ajustement des plinthes et moulures, plus particulièrement à la jonction planchers-murs, au niveau du sous-sol.

[125]      De plus, monsieur Provencher rapportant les résultats de son investigation écrit que de nouvelles fissures sont apparues là où les ajustements et scellements ont été effectués et tout indique, « selon les déclarations de monsieur De Nitto, » que le problème n’a pas été réglé.

[126]      Parmi ces « observations », recueillies lors de son inspection, l’ingénieur Provencher note les observations suivantes au sous-sol de l’unité de monsieur De Nitto :

 

              « Les deux coins arrière, de même que le coin avant gauche, montrent des affaissements. Les affaissements sont inscrits sur le croquis D-1, joint en annexe;

              …

 

-  Des fissures affectent la cloison séparant le corridor, à l’escalier;

 

-  L’affaissement est aussi devenu perceptible par l’ouverture du joint entre le carrelage du mur et celui sur podium de la baignoire (photographie no      );

 

-  Des différentiels sont notés au plancher de la chambre à coucher des maîtres (CH1), (photographies nos       );

 

-  D’autres différentiels ont été notés à la chambre arrière (CH2), (photographies nos       ); »

[127]      Sous le sous-titre « Discussion », l’ingénieur Provencher écrit ceci :

              « Il est clair, à partir des observations menées sur les lieux que les dommages observés à l’intérieur sont reliés à l’affaissement de la dalle par le tassement du remblai sous la dalle et qui assure le support intégral. Il peut être question d’un sol sous le remblai relativement instable ou bien d’une compaction non-conforme avec pour résultat une consolidation progressive. »

 

Sous la rubrique « Recommandations » il écrit ce qui suit :

 

              « À partir des observations et des commentaires émis, les recommandations sont les suivantes, à savoir :

 

              Vérifier si l’affaissement des différentes parties de la dalle est complété;

 

·        Si oui,

 

-   Procéder aux travaux de réparation;

 

-   Ajuster les finis architecturaux selon les déformations;

 

·        Sinon

 

-       Procéder au prélèvement d’échantillons du sol naturel sous le remblai;

 

-       Prendre note, dans le cadre des mêmes travaux de prélèvement, de la composition du remblai. »

[128]      Le rapport de l’ingénieur Provencher est daté du 21 mai 2010. Il a été acheminé au propriétaire de l’unité monsieur Carl De Nitto qui l’a transmis à la présidente du Bénéficiaire, madame Bouchard au mois de juin 2010, soit avant sa lettre de dénonciation à l’Entrepreneur du 31 juillet 2010.

[129]      Un mois après la lettre de dénonciation à l’Entrepreneur du 31 juillet 2010, monsieur De Nitto a envoyé un courriel à l’Entrepreneur (document no 14) avec une copie du rapport de l’ingénieur Provencher. Ce courriel est adressé à monsieur Normand Lamoureux, un haut dirigeant de l’Entrepreneur. Dans ce courriel il écrit comme suit :

              « Cependant, de nouvelles fissures apparaissent là où les ajustements ont été effectués et tout nous indique que l’affaissement du plancher du sous-sol se poursuit.

 

              Suite à ces constatations, j’ai retenu les services de monsieur Michel Provencher, ingénieur conseil, dont nous joignons une copie de son rapport à la présente. Aussi, une copie du rapport a été déposée à madame Monique Bouchard, présidente du syndicat de l’unité.

 

              Suite à la réunion qui a eu lieu avec votre représentant monsieur Daniel Beaulieu ainsi que madame Bouchard, cet envoi se veut une démarche de procédure et s’intègre à la demande globale des réparations présentée par madame Bouchard. »

[130]      Selon le tribunal arbitral, le rapport de l’ingénieur Provencher (unité 8984) contient une description semblable de la problématique probable (soit un problème de tassement du remblai sous la dalle de béton) que le rapport de M. Dion (unités 8980, 8988 et 8992). Il a été communiqué par monsieur De Nitto à la présidente du Bénéficiaire qui, après en avoir pris connaissance, a envoyé sa lettre de dénonciation du 31 juillet à l’Entrepreneur concernant divers problèmes y compris celui de l’affaissement des surfaces de planchers des unités des sous-sols.

[131]      Selon le tribunal arbitral, lorsque la présidente du Bénéficiaire, madame Monique Bouchard a pris connaissance des rapports de monsieur Dion et de l’ingénieur Provencher, concernant les quatre unités de condominium avec un sous-sol, elle a pu soupçonner la gravité et l’étendue du vice. Étant donné que le rapport de l’ingénieur Provencher lui a été transmis en juin 2010 et que selon la preuve, elle a pris connaissance du rapport de l’inspecteur Dion qui est daté du 22 juin 2010 dans les deux prochaines semaines soit le ou avant le 5 juillet 2010, le tribunal conclut que le 5 juillet 2010 est la date qui marque la découverte du ou de ces vices par le Bénéficiaire.

[132]      Cette date de la découverte du ou des vices s’applique non seulement si on les qualifie de vices cachés qui apparaissent graduellement sous le paragraphe 27(4) et l’article 1739 du Code civil  mais aussi si on les qualifie comme des malfaçons non apparentes sous le paragraphe 27(3) du Règlement. Cette conclusion est suffisante pour déterminer la date de la découverte de ces problèmes selon le paragraphe 27(3) et 27(4) du Règlement sans qu’il soit nécessaire de déterminer cette date de la découverte sous le paragraphe 27(5) du Règlement qui traite des vices de conception, de construction ou de réalisation et des vices du sol, au sens de l’article 2118 du Code civil .

[133]      Étant donné que le Bénéficiaire a jugé que la description du problème de l’affaissement des planchers par l’inspecteur Dion et l’ingénieur Provencher était suffisamment sérieuse pour servir de fondement à la lettre de dénonciation de ce problème, ainsi que des autres déficiences, à l’Entrepreneur le 31 juillet 2010, on peut se poser la question pourquoi le Bénéficiaire ne l’a pas aussi envoyée à l’Administrateur.

[134]      Lors de son témoignage, madame Bouchard a répondu à cette question en déclarant qu’elle voulait connaître la vraie cause des problèmes d’affaissement. Selon elle, ce n’est qu’en lisant l’expertise de ProspecPlus datée du 1er juin 2011, soit quelque 11 mois après sa révision des rapports de messieurs Provencher et Dion, qu’elle a connu cette cause. Le lendemain, soit le 2 juin 2011, elle a transmis sa dénonciation écrite à l’Administrateur qui l’a reçue le 6 juin 2011.

[135]      Le tribunal a examiné le rapport du 1er juin 2011 de ProspecPlus Génie-Conseil et a entendu le témoignage d’un de ses auteurs, l’ingénieur Claude Guertin. Pour les fins de cette sentence, il n’est pas nécessaire de faire une étude approfondie de ce rapport. Ce que le tribunal en retient et selon le témoignage de l’ingénieur Guertin, la vraie cause de l’affaissement de la dalle n’est pas mentionnée dans ce rapport. Il semblerait, selon ce témoignage qu’elle a été découverte plusieurs mois plus tard. De plus, dans son rapport ProspecPlus recommande à l’instar de l’inspecteur Dion de procéder à des forages exploratoires sous la dalle de béton.

[136]      Selon le tribunal, la raison probable pour laquelle le Bénéficiaire n’a pas envoyé de dénonciation écrite à l’Administrateur en juillet 2010 est à cause des promesses qui lui ont été faites par monsieur Beaulieu, le représentant de l’Entrepreneur. En effet, dans son courriel du 4 septembre 2010 aux autres copropriétaires, madame Bouchard écrit ceci :

              « Bonjour à tous,

 

              Jeudi dernier, soit le 2 septembre, monsieur Beaulieu des Habitations Signature a été rencontré afin de discuter des 17 points du rapport d’inspection.

 

              Dans l’ensemble, je suis satisfaite des réponses et des engagements obtenus. »

[137]      Toutefois, les nombreux courriels de madame Bouchard à l’Entrepreneur et quelques courriels de réponse de l’Entrepreneur démontrent que l’Entrepreneur n’a pas respecté divers promesses et engagements qu’il a faits à madame Bouchard, y compris sa promesse d’envoyer la vidéo d’inspection par caméra des drains français et de faire le suivi concernant le problème d’affaissement de la dalle au printemps 2011 (documents nos 22, 28 et 30).

[138]      Lorsqu’en avril 2011, l’Entrepreneur avise madame Bouchard que son représentant monsieur Daniel Beaulieu « ne travaille plus pour nous » et que « votre dossier est en investigation avec le département technique » (document no 31), madame Bouchard exprime sa frustration :

              « Maintenant pourquoi sommes-nous encore une fois en investigation quand elle a été déjà faite et qu’une liste de réparations avait été acceptée. Allons-nous rester en investigation encore une autre année. Vous aviez accepté de faire les réparations, veuillez réviser vos courriels » (document no 32).

[139]      Malgré le fait que la correspondance entre le Bénéficiaire et l’Entrepreneur mise en preuve (voir le cartable bleu) est éloquente quant à la rigueur de madame Bouchard à faire le suivi auprès de l’Entrepreneur concernant les 17 déficiences qu’elle lui a dénoncées le 31 juillet 2010 (document no 11) et pour lui rappeler ses promesses et engagements - elle ne permet pas au tribunal arbitral de suspendre ou de prolonger le délai maximal de six mois entre la découverte d’un vice ou d’une malfaçon et sa dénonciation écrite à l’Entrepreneur et à l’Administrateur. Selon une jurisprudence arbitrale qui sera mentionnée ci-dessous, il s’agit d’un délai de rigueur et de déchéance.

Point 2 - Unités 8980 - 8982 - 8988 - 8990 : Rangement sous escalier étanchéité

[140]      Le premier incident d’infiltration d’eau est survenu le 15 octobre 2010. Madame Monique Bouchard l’a décrit comme suit dans son courriel à l’Entrepreneur du même jour :

              « Aussi, en raison de la forte pluie d’aujourd’hui, l’eau s’est infiltrée à travers les murs jusqu’à détremper les tapis et les murs d’au moins cinq copropriétaires (photos de mon condo en pièce jointe) (document 19). »

[141]      Un deuxième incident d’infiltration est survenu le 14 novembre 2010. Il est décrit brièvement dans le courriel de madame Bouchard du 6 mars 2011 (document 28) à l’Entrepreneur:

              « Le 14 novembre dernier, de fortes pluies ont occasionné des infiltrations d’eau dans trois des quatre unités du bas.

 

              Il avait alors été convenu avec monsieur Beaulieu que les fissures seraient réparées au cours de la semaine prochaine, toutefois nous sommes toujours sans nouvelle. »

[142]      Dans la description du problème d’infiltration d’eau qui fait partie de la lettre de dénonciation à l’Administrateur et à l’Entrepreneur du 2 juin 2011, le Bénéficiaire fait référence à un « deuxième épisode en 2011 d’infiltration d’eau ». Toutefois, en lisant la description de ce qui devait être ce deuxième épisode en 2011, on ne retrouve aucune description d’un tel épisode.

[143]      Lors de son témoignage, madame Bouchard n’a donné aucune description d’une infiltration d’eau en 2011 qui, logiquement aurait dû survenir entre le 1er janvier 2011 et la date de la lettre de dénonciation du 2 juin 2011.

[144]      Lors de sa plaidoirie, le Bénéficiaire par l’entremise de madame Bouchard n’a soumis aucun argument spécifique concernant le délai de dénonciation de ces infiltrations.

[145]      L’Administrateur, quant à lui, soumet que la découverte a eu lieu le 15 octobre 2010 tel que décrit par madame Sonia Bradshaw, copropriétaire du logement 8988, dans son courriel à l’Administrateur dont une copie a été envoyée au Bénéficiaire, à l’attention de madame Monique Bouchard (document no 20).

 

Analyse et décision concernant le point 2 « Unités 8980 - 8982 - 8988 - 8990 : Rangement sous escalier étanchéité »

[146]      Selon la preuve présentée devant le tribunal arbitral, il y a eu deux épisodes d’infiltrations d’eau.

[147]      Le premier est survenu le 15 octobre 2010. Il est décrit dans le courriel du même jour de madame Bouchard à l’Entrepreneur (document no 19) et dans la lettre du 19 octobre 2010 de madame Bradshaw à l’Entrepreneur (document no 20).

[148]      Le deuxième incidentest survenu le 14 novembre 2010 selon le courriel de madame Bouchard à l’Entrepreneur du 6 mars 2011 (document no 28).

[149]      Il n’y a aucune preuve que d’autres infiltrations d’eau sont survenues après le 14 novembre 2010 mais avant la lettre de dénonciation à l’Administrateur et à l’Entrepreneur du 2 juin 2011.

[150]      Par ailleurs, le tribunal note que le vice ou la malfaçon qui était la cause probable de ces infiltrations n’a été porté à la connaissance du Bénéficiaire que quelque six mois suivant la dénonciation écrite du 2 juin 2011 à l’Administrateur, lorsqu’il a pris connaissance du rapport d’inspection de ProspecPlus Génie-Conseil daté du 21 novembre 2011.

[151]      La question se pose pourquoi le Bénéficiaire n’a pas dénoncé par écrit à l’Administrateur avant le 2 juin 2011 les infiltrations d’eau aux unités décrites dans la décision de l’Administrateur. Selon une correspondance abondante mise en preuve entre madame Bouchard et l’Entrepreneur, ceci découlait des promesses de réparation des problèmes causés par ces infiltrations lesquelles n’ont pas été tenues.

[152]      Même dans sa décision du 15 novembre 2011, l’Administrateur a noté un engagement semblable de l’Entrepreneur : « Toutefois, sur place l’entrepreneur s’est engagé à procéder aux vérifications et correctifs nécessaires selon l’usage courant du marché ».

[153]      Malheureusement pour le Bénéficiaire, ces promesses et autres représentations de l’Entrepreneur de faire les réparations requises n’ont pas comme effet de suspendre ou de prolonger le délai de dénonciation de 6 mois qui est un délai de déchéance et de rigueur.

[154]      Étant donné que le délai entre la découverte par le Bénéficiaire de la première infiltration survenue le 15 octobre 2010 et de la deuxième survenue le 14 novembre 2010 et leur dénonciation écrite à l’Administrateur ainsi qu’à l’Entrepreneur le 2 juin 2011 excède le délai maximal de six mois prévu par le Règlement, le tribunal arbitral n’a pas d’autres alternatives que de rejeter la demande d’arbitrage du Bénéficiaire concernant ce point.

 

16.         Foyers : mur coupe-feu pour cheminées

[155]      Dans sa deuxième décision datée du 23 octobre 2012, l’Administrateur a rejeté le point 16 décrit comme « Foyer : mur coupe-feu pour cheminée ». Selon les constatations notés par la conciliatrice, madame Karine Pépin, ce problème a été dénoncé à l’Entrepreneur le 31 juillet 2010 mais l’Administrateur en a été avisé seulement le 6 juin 2011 (par la lettre du 2 juin 2011 mais reçue seulement par l’Administrateur le 6 juin 2011).

[156]      Selon la décision de l’Administrateur, le Bénéficiaire a pris connaissance du problème le 30 juillet 2010. On peut présumer qu’il s’agit du jour précédant la rédaction de dénonciation du 31 juillet 2010. Le motif du rejet est que la période du 30 juillet 2010 jusqu’au 6 juin 2011 excède le délai maximal de six mois entre la découverte et la dénonciation écrite à l’Entrepreneur et à l’Administrateur prévu au contrat de garantie.

[157]      À l’audience, le Bénéficiaire n’a apporté aucune preuve que la découverte de ce problème par le Bénéficiaire a eu lieu après le 31 juillet 2010 et à l’intérieur du délai de six mois précédant la dénonciation à l’Administrateur qu’il a reçue le 6 juin 2011.

Analyse et décision concernant le point 16 « Foyers - mur coupe-feu pour cheminées »

[158]      En l’absence de preuve factuelle et d’arguments de la part du Bénéficiaire qui pourraient permettre au tribunal arbitral de modifier la décision de l’Administrateur, le tribunal n’a d’autre choix que de rejeter la demande d’arbitrage du Bénéficiaire à l’égard de ce point.

Partie 5 -      Dépassement du délai de dénonciation de six mois à l’égard d’autres points des 2 décisions de l’Administrateur

La preuve

[159]      Lors de son contre-interrogatoire par le procureur de l’Administrateur concernant la date précise de sa connaissance de l’affaissement de la dalle (point no  1 « Affaissement de la dalle » ci-haut) madame Bouchard a fait l’admission suivante : elle a reconnu avoir eu une connaissance suffisante de tous les points de déficience mentionnés dans le rapport d’inspection de monsieur Martin Dion (pièce B-17 datée du 22 juin 2010), sauf des deux problèmes qu’elle qualifie de « majeurs » suivants qui ont déjà été analysés et déterminés ci-haut soit 1) celui de l’affaissement de la dalle, et 2) celui des infiltrations d’eau dans les unités 8980 - 8982 - 8988 - 8990.

 

 

Prétentions de l’Administrateur

[160]      Lors de sa plaidoirie, l’Administrateur a demandé au tribunal arbitral de statuer que le délai maximal de six mois a été dépassé à l’égard des autres points décrits dans les deux décisions de l’Administrateur et non seulement les trois points soit les points 1, 2 et 16 mentionnés ci-haut. Sa prétention s’appuyait sur l’admission précitée de madame Bouchard.

[161]      Le procureur de l’Administrateur n’a pas énuméré chacun de ces autres points.

[162]      La position de l’Entrepreneur est qu’il adoptait les arguments du procureur de l’Administrateur.

[163]      Il a ajouté que, selon la jurisprudence arbitrale, le délai de dénonciation de six mois est un délai de rigueur et de déchéance.

Analyse et décision concernant le dépassement du délai de dénonciation de six mois à l’égard d’autres points des 2 décisions de l’Administrateur.

[164]      Il est exact que la jurisprudence arbitrale dominante relativement au délai maximal de dénonciation de 6 mois prévu par les articles 10 et 27 du Règlement est à l’effet que ce délai maximal de 6 mois était un délai de rigueur et de déchéance.

[165]      Une des premières sentences arbitrales qui a établi ce courant jurisprudentiel est la décision de Niki Apollonatos du 4 juin 2008 sous la plume de Me Jean-Philippe Ewart, arbitre[6]. Au paragraphe 54 de sa décision, l’arbitre Ewart s’exprime ainsi :

                « (54)    En résumé, la dénonciation prévue à l'article 10 du Règlement se doit d'être par écrit, est impérative et essentielle, le délai de six mois prévu au même article emporte et est un délai de déchéance, et si ce délai n'est pas respecté, le droit des Bénéficiaires à la couverture du plan de garantie visé et au droit à l'arbitrage qui peut en découler sont respectivement éteints, forclos et ne peuvent être exercés. »

[166]      La décision Niki Apollonatos a été citée et suivie dans des décisions arbitrales subséquentes, y compris celle de l’arbitre Michel Jeanniot, arbitre dans Syndicat de copropriété 7000 chemin Chambly[7] Cette décision a été reconnue comme représentant l’état du droit actuel en matière d’arbitrage du Règlement quant au délai maximal de dénonciation écrite de six mois par l’arbitre Raynald Poulin dans sa décision Patrick Bégin et Les Construction S.P.R. Pouliot inc. et La Garantie des maisons neuves de l’APCHQ datée du 15 avril 2010. Le tribunal arbitral ajoute que la référence à l’article 10 du Règlement dans ces décisions s’applique aux bâtiments non détenus en copropriété divise. Un article analogue, soit l’article 27 du Règlement s’applique aux bâtiments détenus en copropriété divise. Il est clair que les principes dégagés quant au délai de six mois dans les décisions arbitrales rendues sous l’article 10 s’appliquent également aux paragraphes correspondants de l’article 27 lorsqu’il s’agit de bâtiments détenus en copropriété divise, comme c’est le cas traité présentement.

[167]      Que signifie donc que le délai maximal de six mois est un délai « de déchéance? » Dans la décision Niki Apollonatos, l’arbitre Ewart répond à cette question :

                « (53)    Une des conséquences de la déchéance, la perte ou forclusion du droit d'exercice d'un droit particulier, dans le cas des présentes quant à l'Administrateur, le droit des Bénéficiaires de requérir la couverture du plan de garantie Plan, n'est pas sujet aux dispositions de la suspension ou interruption de la prescription applicables dans certaines circonstances:

 

                        “… alors qu’un délai de prescription peut être suspendu et interrompu (articles 2289 et s.), …, la solution contraire prévaut pour le délai de déchéance, qui éteint le droit de créance dès que la période est expirée sans que le créancier ait exercé son recours et quoi qu’il arrive. Le titulaire du droit, de ce fait, ne peut même plus invoquer celui-ci par voie d’exception. »

[168]      Il est exact que dans ce dossier, l’Administrateur a rejeté la réclamation du Bénéficiaire à l’égard de 13 points, autres que les points nos  1, 2 et 16 analysés ci-haut, en invoquant d’autres motifs que celui du dépassement du délai de dénonciation de six mois. Toutefois, et compte tenu de l’argument de l’Administrateur, adopté également par l’Entrepreneur, que ces autres points faisant l’objet de la demande d’arbitrage du Bénéficiaire devraient également être rejetés à cause du dépassement de ce délai maximal de six mois qui, comme déjà noté, est un délai de rigueur et de déchéance, le tribunal arbitral considère qu’il doit statuer sur cette question.

[169]      Il est intéressant de noter que dans une autre décision arbitrale, un entrepreneur et un administrateur ont plaidé, une fois que la preuve en arbitrage ait été terminée, que la demande d’arbitrage des bénéficiaires doit être rejetée à cause du non respect du délai de dénonciation maximal de six mois de la connaissance du vice. Voici ce qu’écrit l’arbitre Me Reynald Poulin à ce sujet dans sa sentence Linda Jacques et Alain Beaudoin citée par le Bénéficiaire :

              « (57)         …Le procureur des Bénéficiaires a requis du Tribunal de considérer que ce moyen d’irrecevabilité ne devrait pas être admissible à ce stade des procédures parce que tardif et donc inéquitable. Considérant que l’Administrateur a traité la demande de réclamation des Bénéficiaires selon la législation applicable et que l’Entrepreneur peut, au moment d’une demande d’arbitrage, faire valoir ses motifs de contestation, le Tribunal rejette l’argument du procureur des Bénéficiaires à l’effet qu’il serait inéquitable de traiter même ce moyen de défense en l’instance.

 

              (58)   Ce moyen n'a pas été soulevé par l'Administrateur dans le cadre de sa décision du 29 novembre 2010 A-6….mais le Tribunal peut constater que l’Administrateur semble appliquer, comme prévu à la Loi, ce moyen d’irrecevabilité lorsqu’il y a des éléments démontrant qu’un réclamant aux termes du Plan de garantie ne rencontrent pas les exigences procédurales. Tel n’a pas été le cas dans la décision conduisant au présent arbitrage.

 

              (59)   À tout événement, suivant la demande qui lui a été faite, le Tribunal se doit d'analyser la preuve concernant le respect ou non du délai de dénonciation. » [8]

[170]      À la lumière de l’admission de la représentante du Bénéficiaire, madame Bouchard, qu’elle connaissait tous les points de déficience, à l’exception de deux points majeurs soit l’affaissement de la dalle et les infiltrations d’eau, qui sont mentionnés à l’expertise de monsieur Martin Dion du 22 juin 2010, le tribunal a examiné 13 autres points mentionnés dans les deux décisions de l’Administrateur sujettes à cet arbitrage et il conclut que les 12 points suivants ont tous été mentionnés au rapport de monsieur Dion :

-       3.  Revêtement de maçonnerie : nettoyage;

-       4. Maçonnerie : joints effrités;

-       5. Sortie extérieure : alignement;

-       6. Calfeutrage appareil d’éclairage manquant;

-       7.    Calfeutrage : fissures;

-       8.  Unités 8980 et 8986 : fenêtres jambage contre-pente;

-       9.  Fenestration - cran d’arrêt;

-       10.            Galerie et marches de béton : façade

-       11. Garde-corps : fixations;

-       12.            Galerie arrière;

-       13.            Trottoirs affaissés;

-       14.            Toiture de tôle : clôture à neige sur le toit.

[171]      Comme le vice ou la malfaçon allégué sous chacun de ces 12 points a été connu et donc découvert par le Bénéficiaire le 5 juillet en lisant le rapport de M. Martin Dion et comme sa dénonciation par la lettre à l’Administrateur et à l’Entrepreneur datée du 2 juin 2011 a été effectuée quelque 11 mois plus tard, le tribunal arbitral vient à la conclusion que le délai de dénonciation maximal de 6 mois a été excédé

[172]      Le seul autre point qui n’a pas encore été traité par le tribunal arbitral est le point 15 - drain français : ocre ferreux. Ce point n’est pas mentionné au rapport de monsieur Dion ni à la dénonciation écrite à l’Entrepreneur du 31 juillet 2010. Il n’y a pas de preuve devant le tribunal arbitral quant au non-respect du délai de dénonciation maximal de six mois. Par conséquent, le tribunal arbitral ne se prononce pas sur ce point. Si le Bénéficiaire le désire, ce point pourra être traité lors d’une audition future devant ce tribunal quant à l’existence et la qualification de ce point pour établir s’il est ou pas couvert par le plan de garantie de l’Administrateur.

Remboursement des frais d’experts

[173]      L’article 124 du Règlement énonce ce qui suit :

              « 124.        L’arbitre doit statuer, s’il y a lieu, quant au quantum des frais raisonnables d’expertises pertinentes que l’administrateur doit rembourser au demandeur lorsque celui-ci a gain de cause total ou partiel.»

 

[174]      Cette sentence démontre que le Bénéficiaire a eu gain de cause partiel relativement à sa demande.

[175]      Malgré le fait que lors de l’audience, le Bénéficiaire n’a pas fait de demande expresse quant au remboursement des frais d’expertises, l’article 124 oblige le tribunal arbitral de statuer sur cette question.

[176]      Le tribunal note que dans la lettre de dénonciation du Bénéficiaire du 2 juin 2011 que l’Administrateur a reçue le 6 juin 2011, le Bénéficiaire adresse une demande à l’Administrateur de lui rembourser certains frais d’évaluation et d’expertise, soit les frais suivants :

-       Martin Dion, l’inspecteur                                     800 $

-       Michel Provencher, ingénieur                             550 $

-       ProspecPlus Conseil inc.                               2 300 $

À ces montants, s’ajoutent les taxes applicables. Cette demande fait référence à des « reçus en annexe ». Aucun reçu n’a été mis en preuve devant ce tribunal.

[177]      Selon le tribunal arbitral qui, sous réserve de la transmission de factures appropriées à l’Administrateur par le Bénéficiaire, les frais d’expertises énumérés ci-haut des Messieurs Martin Dion et Michel Provencher sont raisonnables et leurs expertises étaient pertinentes. Ces frais, plus les taxes applicables, devront donc être remboursés par l’Administrateur au Bénéficiaire.

[178]      De plus des frais raisonnables au taux habituel de monsieur Dion qui ne pourront pas excéder 125 $ de l’heure pour sa présence de 4 heures lors de l’audience du 25 août 2014, plus les taxes applicables, devront également être remboursés par l’Administrateur au Bénéficiaire sur présentation de la facture pertinente de monsieur Dion adressée au Bénéficiaire.

[179]      En ce qui concerne les frais d’évaluation et d’expertise de ProspecPlus Conseil inc. de 2 300 $ plus les taxes, le tribunal arbitral estime que le rapport du 1er juin 2011 avait une certaine pertinence relativement au débat concernant le respect du délai de dénonciation maximal de six mois. Pour cette raison, le tribunal arbitral fixe le montant que l’Administrateur devra rembourser au Bénéficiaire relativement à la préparation de ce rapport à la somme de 1 000 $, plus les taxes. De plus, l’Administrateur devra rembourser au Bénéficiaire les honoraires de l’expert monsieur Claude Guertin qui est l’un des auteurs du rapport de ProspecPlus, pour sa présence de 3 heures à l’audience du 25 août 2014. Ses honoraires devront être calculés à son taux horaire habituel mais ne pouvent pas excéder 125 $ de l’heure, plus les taxes applicables. Il va sans dire que le Bénéficiaire devra transmettre la facture de ProspecPlus à l’Administrateur faisant état des honoraires de l’expert Guertin pour sa présence à l’audition du 25 août 2014.

Conclusions supplémentaires

 

[180] .Selon l’article 120 du Règlement, cette sentence arbitrale est finale et sans appel.

[181]   Le tribunal arbitral statue conformément aux règles de droit; il fait aussi appel à l’équité lorsque les circonstances le justifient (art. 116 du Règlement).

[182]   Il n’y avait pas de preuve directe présentée lors de l’audition quant à la valeur des 16 points de réclamation du Bénéficiaire en vertu du plan de garantie qui ont fait l’objet des deux décisions de l’Administrateur et qui ont été soumis à l’arbitrage. Toutefois, l’avocate du Bénéficiaire, Me Ben Bahri a soumis à SORECONI copie de la requête du Bénéficiaire et de madame Monique Bouchard (« partie demanderesse ») contre les Habitations Signature inc. et autres, concernant, entre autres, tous ou certains des vices et malfaçons mentionnés dans cette sentence. Le montant de la réclamation de la partie demanderesse qui apparaît au plumitif de la Cour supérieure de Longueuil est de 495 596 $.

           

POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL ARBITRAL :

 

ACCUEILLE la demande du Bénéficiaire, MODIFIE les décisions de l’Administrateur du 15 novembre 2011 et 23 octobre 2012 quant à la date de la fin des travaux des parties communes du bâtiment situé au 8980, 8982, 8984, 8986, 8988, 8990, 8992 et 8994 Croissant du Louvre à Brossard (appelé le « bâtiment ») et DÉCLARE que la date de la fin des travaux des parties communes de ce bâtiment a eu lieu le 27 juin 2006;

ACCUEILLE en partie la demande du Bénéficiaire de modifier la date de la réception des parties communes du bâtiment et DÉCLARE que la réception des parties communes de ce bâtiment a eu lieu le 5 juillet 2010;

DÉCLARE que le délai maximal de six mois entre la découverte de déficiences  et leur dénonciation écrite à l’Administrateur et l’Entrepreneur décrites aux points 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13 et 14 de la décision de l’Administrateur du 15 novembre 2011 et au point 16 de la décision de l’Administrateur du 23 octobre 2012 n’a pas été respecté par le Bénéficiaire et CONCLUT que la demande d’arbitrage du Bénéficiaire à l’égard de chacun de ces 15 points doit être rejetée ;

RÉSERVE au Bénéficiaire le droit de continuer la procédure arbitrale à l’égard du point no 15 « Drain français : ocre ferreux » décrit à la décision de l’Administrateur du 23 octobre 2012, DÉCLARE que le Bénéficiaire devra aviser par écrit l’Administrateur, l’Entrepreneur et l’arbitre soussigné de son intention de continuer ou pas la procédure arbitrale à l’égard de ce point le ou avant le 1er juin 2015, et DÉCLARE que l’arbitre soussigné conserve sa juridiction à l’égard de ce point.

DÉCLARE que les frais d’experts suivants devront être remboursés par l’Administrateur au Bénéficiaire le ou avant le 15 mai 2015, sous réserve de la présentation par le Bénéficiaire à l’Administrateur de factures appropriées émises par les experts concernés :

            a)        800 $ (plus la TPS et la TVQ) pour les services de l’expert monsieur Martin Dion, inspecteur de bâtiments;

            b)        550 $ (plus la TPS et la TVQ) pour les services rendus par l’expert monsieur Michel Provencher, ingénieur; et

              c)      1 000 $ (plus la TPS et la TVQ) pour les services d’un expert de ProspecPlus Génie-Conseil, relativement à son rapport du 1er juin 2011;

DÉCLARE que l’Administrateur devra rembourser au Bénéficiaire dans les 20 jours suivant la réception des factures appropriées, les frais de présence de 4 heures lors de l’audition du témoin expert monsieur Martin Dion et de 3 heures de présence lors de cette audition du témoin expert monsieur Claude Guertin selon leur taux horaire habituel, ne pouvant pas excéder 125 $ de l’heure, plus les TPS et TVQ.

DÉCLARE que les coûts de cet arbitrage sont à la charge de l’Administrateur.

 

 

 

Montréal, le 19 mars 2015

 

 

 

 

 

 

 

 

Me ALBERT ZOLTOWSKI

Arbitre  / SORECONI

 

 

 


 

Autres sentances arbitrales

 

-          Mme. Debbie Basdravalas et M. Mourad Abada c.9114-4477 Québec inc. (Gestion Michel Plouffe) et La Garantie Qualité Habitation inc., Dossier SORECONI no 130403001, Me Lydia Milazzo, arbitre, le 21 novembre 2013.

-          Syndicat de la copropriété La Gondola c. ME-RA Développement inc. et La Garantie Habitation du Québec inc., dossier du Centre Canadien d’Arbitrage Commercial no  S13-032101-NP, Me  Roland-Yves Gagné, arbitre, le 12 août 2013.

 

-          Syndicat de copropriété MRLH c. Les Constructions G. Mélatti inc. et La Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ inc.  Dossier Société pour la résolution de conflits inc. (SORECONI) n050713001, Me Jeffrey Edwards, arbitre, le 7 juin 2006.

 

-          Syndicat des copropriétaires Le Vignoble du 4370 du Catamaran, Laval et Le Groupe Cama inc. et La Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ inc.  Dossier Société pour la résolution de conflits inc. (SORECONI) n080603001, Me Guy Pelletier, le 15 octobre 2008.

 

-          Monsieur Patrick Bégin et Les Constructions S.P.R. Pouliot inc. et La Garantie des maisons neuves de l’APCHQ, Dossier du Centre Canadien d’Arbitrage Commercial (CCAC) no  S09-191101-NP, Me Reynald Poulin, le 15 avril 2010

 

-          Syndicat Hillsdale et 9127-6295 Québec inc. (Développements Hillsdale) et La Garantie des Maîtres Bâtisseurs inc., Dossier du Centre Canadien d’arbitrage Commercial (CCAC) no S09-210701-NP, Me Albert Zoltowski, le 15 octobre 2010

 

-          Syndicat  des copropriétaires du Château Lausanne et I.G.R. construction inc. et La Garantie des Maîtres Bâtisseurs inc. (GMB), Dossier de la Société pour la résolution des conflits inc. (SORECONI) no 091019001, M. Claude Mérineau, arbitre, le 3 mars 2010



[1]      R.Q. c. B-1.1, r.0.2

[2]        Syndicat de copropriété 3667346 c. Les Habitations Trigone 2000 inc., et La Garantie Habitation du Québec, Centre Canadien d’Arbitrage Commercial (CCAC), Dossier CCAC S12-021301-NP, Me Albert Zoltowski, le 6 août 2012;

[3]        Gazette Officielle du Québec, 8 février 2006, partie 2, page 994

[4]        Syndicat en copropriété 670 Manoir Masson et Développement Magma inc. et La Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ inc., Dossier SORECONI no 090304001, Arbitre : Guy Pelletier, 15 mars 2010, p. 7

[5]        Le Syndicat des copropriétés Les Jardins St-Hippolyte et la Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ inc. et 9129-2516 Québec inc. - Les Jardins St-Hippolyte, dossier de GAMM 2008-09-002, Me Johanne Despatis, arbitre, le 20 novembre 2008

[6]        Niki Apollonatos & George Karounis c. Habitations Luxim inc. et La Garantie des maisons neuves de l’APCHQ INC. Dossier CCAC : 5017-112801-NP, Me Jean-Philippe Ewart, arbitre, le 4 juin 2008

[7]        Syndicat de copropriété 7000 chemin Chambly c. Landry & Pépin Construction inc. et la Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ inc. , SORECONI dossier no  080424001, Me Michel Jeanniot, arbitre, 17 novembre 2008

[8]        Madame Linda Jacques, monsieur Alain Beaudoin c. A.G.P. Couture & Fils inc. et La Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ inc, Centre Canadien d’Arbitrage Commercial (CCAC), Dossier CCAC S10-241202-NP, Me Raynald Poulin, le 5 septembre 2012.