Gabarit EDJ

 

 

ARBITRAGE EN VERTU DU RÈGLEMENT SUR LE PLAN

DE GARANTIE DES BÂTIMENTS RÉSIDENTIELS NEUFS

(décret 841-98 du 17 juin 1998)

 

Organisme d'arbitrage autorisé par la Régie du bâtiment :

Le Groupe d'arbitrage et de médiation sur mesure (GAMM)

 

 

 

ENTRE :

9264-3212 Québec inc./Habitations Lussier

(ci-après l’« entrepreneur »)

 

ET :

Dinos Papoulias

(ci-après le « bénéficiaire »)

 

ET :

La Garantie de construction résidentielle (GCR)

(ci-après l'« administrateur »)

 

 

No dossier GCR : 112706 - 187

No dossier GAMM : 2016-16-016

 

 

SENTENCE ARBITRALE

Remboursement d’acomptes

 

 

 

Arbitre :

M. Claude Dupuis

 

Pour l’entrepreneur :

M. Richard Lussier

 

Pour le bénéficiaire :

M. Dinos Papoulias

 

Pour l'administrateur :

Me Pierre-Marc Boyer

 

Date d’audience :

23 novembre 2016

 

Lieu d’audience :

Anjou

 

 

Date de la sentence :

6 décembre 2016

I : INTRODUCTION

[1]           En cours d’enquête, les personnes suivantes ont témoigné :

        M. Richard Lussier, entrepreneur

        M. Dinos Papoulias, bénéficiaire

        M. Joseph Sagaria, inspecteur en bâtiments

        M. Jocelyn Dubuc, T.P., conciliateur

[2]           Le 21 octobre 2015, le bénéficiaire, M. Papoulias, signait avec l’entrepreneur un contrat préliminaire pour l’acquisition d’une unité d’habitation non détenue en copropriété divise, devant être construite au [...] d’une rue située dans une municipalité de la Rive-Sud de Montréal.

[3]                  Ultérieurement, soit au début mai 2016, à la suite de problèmes techniques, il y eut une entente entre les deux parties pour substituer l’immeuble portant le numéro civique [...] de la même rue à l’immeuble précité ([...]); la date de livraison, 8 juillet 2016, demeurait la même.

[4]           Ayant découvert des malfaçons affectant le bâtiment de substitution ([...]), le bénéficiaire, en date du 5 juillet 2016, fait parvenir à l’entrepreneur une mise en demeure lui demandant de venir constater lesdites malfaçons et de les corriger.

[5]           Le 15 juillet 2016, le bénéficiaire et l’entrepreneur ont fait une visite des lieux et ont convenu d’une date de livraison pour le 29 juillet.

[6]           Le 20 juillet, le bénéficiaire et M. Sagaria, professionnel du bâtiment, ont procédé à une inspection en profondeur; après cette visite, selon le bénéficiaire, l’entrepreneur n’était plus disponible.

[7]           Le 28 juillet, il y a rencontre entre le bénéficiaire, l’entrepreneur et M. Sagaria; avant de compléter le formulaire d’inspection pré-réception, l’entrepreneur exige que le bénéficiaire signe au préalable un document intitulé « ENTENTE DE RÉCIPROCITÉ, LIMITATION ET SATISFACTION », composé par son avocat.

[8]           Le bénéficiaire témoigne à l’effet qu’il était prêt à passer à l’inspection pré-réception, mais qu’il ne voulait pas signer le document ci-devant cité. L’inspection pré-réception n’a donc pas eu lieu.

[9]           Subséquemment, le bénéficiaire s’est adressé à l’entrepreneur pour le remboursement d’acomptes totalisant un montant de 16 400 $, somme versée entre novembre 2015 et juin 2016.

[10]        Cette demande lui ayant été refusée par l’entrepreneur, le bénéficiaire, en date du 3 août 2016, a alors adressé une réclamation à la Garantie de construction résidentielle (GCR).

[11]        Le 2 septembre 2016, l’administrateur rendait une décision favorable au bénéficiaire.

[12]        Insatisfait de cette décision de l’administrateur, l’entrepreneur, en date du 29 septembre 2016, adressait au Groupe d’Arbitrage et de Médiation sur Mesure (GAMM) une demande d’arbitrage.

[13]        Pour sa part, l’entrepreneur prétend que le changement du [...] au [...] lui a coûté entre 10 000 $ et 12 000 $, et qu’il a été très généreux en acceptant sans frais cette transaction.

[14]        Pour s’assurer une super protection, l’entrepreneur a donc décidé de faire préparer une entente de réciprocité, car témoigne-t-il, il avait peur de son client; si ce dernier ne signait pas cette entente, il ne lui livrait pas la propriété.

[15]        L’entrepreneur cite l’article 5.6 du contrat préliminaire qu’il a fait signer au bénéficiaire et qui s’intitule « Défaut du promettant-acheteur ».

[16]        Au soutien de ses prétentions, le procureur de l’administrateur a soumis la jurisprudence suivante :

        Sandra Dubois Monette c. Construction LMA (6019315 Canada inc.) et La Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ inc., sentence arbitrale rendue le 2 octobre 2009 par Me Jean Morissette (GAMM).

        Gilbert Champagne et Le Groupe Lagacé Habitations inc. et La Garantie Qualité Habitation inc., sentence arbitrale rendue le 23 juillet 2007 par M. Alcide Fournier (SORECONI).

II : DÉCISION ET MOTIFS

[17]        Dans sa décision datée du 2 septembre 2016, l’administrateur ordonne à l’entrepreneur de rembourser au bénéficiaire la somme de 16 400 $.

[18]        Je cite ci-après le principal motif de l’administrateur pour justifier sa décision :

[…] D’ailleurs, voici ce que stipule l’article 9 du règlement à l’égard du remboursement des acomptes :

« 9. La garantie d’un plan dans le cas de manquement de l’entrepreneur à ses obligations légales ou contractuelles avant la réception du bâtiment doit couvrir :

                         1°         dans le cas d’un contrat de vente :

                         a)         soit les acomptes versés par le bénéficiaire;

                         b)         soit le parachèvement des travaux si le bénéficiaire est détenteur des titres de propriété, à la condition qu’il n’y ait pas d’enrichissement injustifié de ce dernier; »

Dans le cas qui nous concerne, l’administrateur considère que l’entrepreneur a manqué à ses obligations contractuelles en décidant unilatéralement de ne plus vendre la propriété au bénéficiaire, ce qui va à l’encontre du contrat préliminaire qui a été signé par les parties.

[…]

[19]        Il existe une preuve non contredite qu’en ce jour du 28 juillet 2016, le bénéficiaire, accompagné de son inspecteur et en présence de l’entrepreneur, était prêt à procéder à l’inspection pré-réception du bâtiment; il n’a donc pas manqué à ses obligations.

[20]        Les obligations communes relativement à l’inspection pré-réception sont décrites aux articles 8 et 17 du « Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs » :

8. Pour l’application de la présente sous-section, à moins que le contexte n’indique un sens différent, on entend par:

[…]

«réception du bâtiment»: l’acte par lequel le bénéficiaire déclare accepter le bâtiment qui est en état de servir à l’usage auquel on le destine et qui indique, le cas échéant, les travaux à parachever ou à corriger.

 

17. Chaque bâtiment visé par la garantie doit être inspecté avant la réception. Cette inspection doit être effectuée conjointement par l’entrepreneur et le bénéficiaire à partir d’une liste préétablie d’éléments à vérifier fournie par l’administrateur et adaptée à chaque catégorie de bâtiments. Le bénéficiaire peut être assisté par une personne de son choix.

Lors de cette inspection, le bénéficiaire et l’entrepreneur identifient ce qu’il reste à parachever et les vices et malfaçons apparents qui sont à corriger. Le bénéficiaire et l’entrepreneur conviennent lors de cette inspection d’un délai qui ne peut pas dépasser 6 mois pour la réalisation de ces travaux de parachèvement et de correction.

S’il n’y a pas de bénéficiaire connu lors de la fin des travaux, l’inspection doit être différée.

[21]        Ce même 28 juillet, l’entrepreneur refuse de procéder à l’inspection pré-réception, à moins que son client ne signe une « ENTENTE DE RÉCIPROCITÉ, LIMITATION ET SATISFACTION » préparée par son avocat, et je cite l’entrepreneur : « Si mon client ne signe pas cette entente, je ne lui livre pas la propriété ».

[22]        Or, cette entente est un ajout et ne fait pas partie du processus global du plan de garantie.

[23]        Cette entente proposée par l’entrepreneur comporte treize conventions; je n’en cite que deux :

AFIN D’ÉVITER TOUTES AMBIGUITÉS LES PARTIES CONVIENNENT DE CE QUI SUIT :

                         […]

5.         Le Bénéficiaire reconnaît et déclare que l’étendue, portée et qualité de tous les travaux sont réalisés à sa satisfaction conformément au contrat préliminaire 3837 RG en conformité avec les modifications aux plans qu’il a demandé, y incluant le déplacements des divisions, les choix de couleur, grade des matériaux ainsi intégrés et renonce par conséquent à toutes doléances qu’il a, aurait ou prétend avoir formulé par écrit ou verbalement avant le 15 juillet 2016;

6.         Le Bénéficiaire reconnaît que ses doléances, demandes de correction, parachèvement, vices ou malfaçons qu’il prétend apparent sont inclus et limités à la liste de parachèvement préparée conjointement avec le représentant de l’Entrepreneur signée le 15 juillet 2016, préalablement à la signature des présentes;

[…]

[sic]

[24]        La convention numéro 6 exige que les demandes de correction du bénéficiaire soient limitées à une liste préparée et signée le 15 juillet 2016, alors que l’inspection du bénéficiaire avec la personne de son choix n’a eu lieu que le 20 juillet. Cette convention de l’entente proposée va donc à l’encontre de l’article 17 du plan de garantie ci-devant cité.

[25]        En accord avec l’administrateur, le soussigné est d’avis qu’il s’agit ici d’un droit auquel le bénéficiaire ne peut renoncer.

[26]        À cet effet, je cite ci-après l’article 140 du « Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs » :

140. Un bénéficiaire ne peut, par convention particulière, renoncer aux droits que lui confère le présent règlement.

[27]        L’entrepreneur témoigne à l’effet qu’il a introduit cette entente de réciprocité pour s’assurer d’une super protection à l’égard d’un client trop tatillon et trop exigeant.

[28]        Considérant le plan de garantie, je soumets qu’un entrepreneur n’a pas besoin de ce genre de protection, vu que dans le processus, l’administrateur peut intervenir, et qu’en bout de ligne, un arbitre peut également intervenir, le cas échéant.

[29]        L’entrepreneur invoque également l’article 5.6 du contrat préliminaire qu’il a fait signer au bénéficiaire le 21 octobre 2015, article intitulé « Défaut du promettant-acheteur », permettant à l’entrepreneur de mettre fin au contrat suite à certains manquements du bénéficiaire.

[30]        En accord avec l’administrateur, le soussigné estime que cet article du contrat préliminaire n’est pas conforme à l’article 5 du plan de garantie :

5. Toute disposition d’un plan de garantie qui est inconciliable avec le présent règlement est nulle.

Dispositif

[31]        Pour les motifs ci-devant énoncés, concernant le remboursement d’acomptes, le tribunal

CONFIRME   la décision de l’administrateur datée du 2 septembre 2016; et

ORDONNE    donc à l’entrepreneur de rembourser au bénéficiaire la somme de seize mille quatre cents dollars (16 400 $), et ce, dans les vingt (20) jours de la présente.

Coûts de l’arbitrage

[32]        Conformément à l’article 37 du « Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs », les coûts du présent arbitrage sont partagés à parts égales entre l’administrateur et l’entrepreneur.

 

 

BOUCHERVILLE, le 6 décembre 2016.

 

                                                                                                                                              

 

 

 

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Claude Dupuis, arbitre