ARBITRAGE
RÈGLEMENT SUR LE PLAN DE GARANTIE
DES BÂTIMENTS RÉSIDENTIELS NEUFS
(Chapitre B-1.1, r. 8)
Organisme d’arbitrage autorisé par la Régie du bâtiment du Québec:
CENTRE CANADIEN D’ARBITRAGE COMMERCIAL
CANADA
PROVINCE DE QUÉBEC
DISTRICT D’ABITIBI
No: S18-112901-NP
Et S18-120401-NP
Et Michel Gaudet
Bénéficiaires
c.
Groupe Pro-Fab Inc.
L’Entrepreneur
Et :
La Garantie de Construction Résidentielle (GCR)
L’Administrateur
DÉCISION ARBITRALE INTÉRIMAIRE
Arbitre : Roland-Yves Gagné
Pour les Bénéficiaires : Me David Bernier
Madame Jocelyne Veillette
Monsieur Lucien Sayeur
Pour l’Entrepreneur : Me Jean Dallaire
Monsieur Christian Bérubé
Pour l’Administrateur : Me Pierre-Marc Boyer
Date de l’audience : 4 février 2019
Date de la décision : 1er mars 2019
DESCRIPTION DES PARTIES
BÉNÉFICIAIRES :
Madame Nicole Brazeau
Monsieur Michel Gaudet
a/s Me David Bernier
Bernier Beaudry
3340, rue
de la Pérade, bureau 300
Québec (Québec) G1X 2L7
ENTREPRENEUR :
Groupe Pro-Fab Inc.
a/s Me Jean Dallaire
BMA Avocats
800 Place d’Youville, 18e étage
Québec (Québec) G1R 3P4
ADMINISTRATEUR:
La Garantie de construction résidentielle (GCR)
a/s Me Pierre-Marc Boyer
7171 rue Jean-Talon Est
Bureau 200
Anjou (Québec) H1M 3N2
PIÈCES
A l’audience, l’Administrateur a produit les pièces suivantes :
A-1 : Contrat de vente de maison modulaire préfabriquée signé entre l’Entrepreneur et le premier propriétaire daté du 23 avril 2015 ;
A-2 : En liasse, le formulaire d’inspection préréception daté du 3 juin 2015 signé par l’Entrepreneur et le premier propriétaire, ainsi qu’une liste de travaux à faire, établie par le premier propriétaire et accompagnée de commentaires de l’Entrepreneur ;
A-3 : Contrat de vente signé entre le premier propriétaire et les Bénéficiaires daté du 17 mai 2016 ;
A-4 : Formulaire de réclamation signé par les Bénéficiaires le 12 juillet 2018 ;
A-5 : En liasse, le courrier de l’avis de 15 jours adressé par l’Administrateur à l’Entrepreneur et aux Bénéficiaires le 22 août 2018, auquel est jointe la lettre de dénonciation du procureur des Bénéficiaires datée du 30 mai 2018 ;
A-6 : Échange de courriels entre l’Administrateur et l’Entrepreneur datés des 11, 13(2) et 25 novembre 2015 ;
A-7 : Échange de courriels entre l’Administrateur et l’Entrepreneur datés du 25(2) septembre 2018 auquel est jointe une facture soumise en A-12 ;
A-8 : En liasse, courriels émis par les Bénéficiaires à l’Administrateur datés du 3 octobre 2018 et auquel sont jointes, respectivement, deux photographies et une liste des fissures établies par les Bénéficiaires ;
A-9 : Échange de courriels entre l’Administrateur et le procureur des Bénéficiaires datés des 26 et 29 novembre 2018 ;
A-10 : L’état de renseignements d’une personne morale au registre des entreprises du Québec de Groupe Pro-Fab inc. daté du 12 décembre 2018 ;
A-11 : Extrait de l’index des immeubles ;
A-12 : Facture acquittée auprès de l’Administrateur des frais d’enregistrement relatif au bien des Bénéficiaires ;
A-13 : En liasse, courriels émis par l’expert mandaté par les Bénéficiaires aux Bénéficiaires datés des 10 et 27 août 2018, auxquels sont joints, respectivement, un rapport de carottage des murs de fondation et un rapport d’échantillonnage du sol ;
A-14 : En liasse, la décision de l’Administrateur datée du 5 novembre 2018, ainsi que les accusés de réception de Postes Canada de l’Entrepreneur et des Bénéficiaires datés, respectivement, du 6 novembre et du 13 novembre 2018 ;
A-15 : Le courriel de la notification de l’organisme d’arbitrage daté du 4 décembre 2018 auquel sont jointes la lettre de notification et de nomination, la demande d’arbitrage des Bénéficiaires et la décision de l’Administrateur datée du 5 novembre 2018 déjà soumise en A-14 ;
A-16 : Le courriel de la notification de l’organisme d’arbitrage daté du 4 décembre 2018 auquel sont joints la lettre de notification et nomination, la demande d’arbitrage de l’Entrepreneur, la décision de l’Administrateur déjà soumise en A-14, le contrat de vente d’une maison modulaire préfabriquée déjà soumis en A-1 et l’échange de courriels entre l’Administrateur et le procureur des Bénéficiaires datés des 26 et 29 novembre 2018 déjà soumis en A-9 ;
A-17 : Curriculum vitae de Monsieur Normand Pitre.
L’Entrepreneur a produit les pièces suivantes :
E-1 : Travaux de finition 1622 Lepage ;
E-2 : Plan C-14746 1622 Lepage ;
E-3 : Échange de courriels Facture 79119 ;
E-4 : Courriel du 2018-09-11 à GCR ;
E-5 : Facture -79119 - maison modèle 2018 ;
E-6 : Projet 18403 - maison modèle 2018.
Les Bénéficiaires ont produit les pièces suivantes :
B-1 : Facture du 14/05/2015 incluant Sommaire du plan de garantie ;
B-2 : Plan 7 pages.
DÉCISION ARBITRALE INTÉRIMAIRE
[1] Le 5 novembre 2018 (pièce A-15), l’Administrateur rendait une décision en vertu du Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs (ci-après le Règlement) suite à une réclamation des Bénéficiaires quant à des fissures.
[2] Le Tribunal d’arbitrage est bref quant au fond de cette décision, puisque la présence ou non de vice(s), n’est pas l’objet de ce qu’il doit trancher à la présente étape.
[3] Le 29 novembre 2018 (date de réception par l’organisme d’arbitrage, pièce A-16), les Bénéficiaires ont demandé l’arbitrage de cette décision.
[4] Le 4 décembre 2018 (date de réception par l’organisme d’arbitrage, pièce A-16), l’Entrepreneur a demandé l’arbitrage de cette décision.
[5] Même si de façon subsidiaire, il conteste le fond de la décision, l’Entrepreneur allègue principalement que le Plan de garantie est inapplicable à l’immeuble des Bénéficiaires, contestant par le même coup, la compétence juridictionnelle du Tribunal d’arbitrage créé par le Règlement.
[6] Lors de la conférence de gestion tenue le 15 janvier 2019, du consentement unanime des parties présentes, il a été décidé qu’il était dans le meilleur intérêt de la justice et des parties de procéder en deux étapes.
[7] Au début de l’audition, le Tribunal d’arbitrage a lu aux parties les questions auxquelles il lui était demandé de répondre, et les parties ont convenu de leurs libellés :
[7.1] 1. Le bâtiment est-il couvert par le Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs
[7.1.1] si oui, considérant que l’Entrepreneur allègue qu’une réclamation basée sur l’article 10.4 du Règlement est prescrite, quelle est la date de la réception du bâtiment mentionnée à l’article 10 du Règlement?
[7.2] 2. En cas de réponse positive à la première question, (soit que le bâtiment est couvert par le Règlement), y a-t-il lieu d’accueillir la demande subsidiaire de l’Entrepreneur ou la demande des Bénéficiaires, ou les deux en parties;
[7.2.1] il va de soi que la question à répondre pour la deuxième étape sera réécrite avec plus de détails en cas de réponse positive à la première question, après communications avec les procureurs des parties.
[8] Le Tribunal d’arbitrage ajoute que pour répondre à la première question, il doit également fixer la date de la fin des travaux, considérant que l’Entrepreneur invoque l’application et l’exclusion de l’article 15 du Règlement qui réfère à la fin des travaux.
[9] Dans sa demande d’arbitrage du 4 décembre 2018, l’Entrepreneur écrit quant à l’objet de la présente étape :
La garantie est inapplicable
4. L’immeuble visé par la décision n’est pas assujetti au Plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs;
5. En effet, l’Immeuble était une maison modèle fabriquée et installée sur son site d’origine en février et les travaux ont été complétés au début mars 2013;
6. Le 23 avril 2015, l’Entrepreneur a vendu l’immeuble à Madame Jocelyne Veillette, tel qu’il appert du contrat de vente, pièce P-2;
7. Le 13 mai 2015, l’immeuble a, par la suite, été livré sur le terrain actuel des Bénéficiaires;
8. Par conséquent, l’immeuble n’a eu aucun bénéficiaire pendant plus de 24 mois, soit entre la fin des travaux en février 2013 et la vente de la maison en avril 2015;
9. La garantie n’est donc pas applicable en vertu de l’article 15 du Règlement […];
10. Subsidiairement, advenant que l’arbitre en venait à conclure que le Plan de garantie s’applique, le délai de trois ans prévus à l’article 10.4 du Règlement est expiré depuis mars 2016.
11. Par conséquent, la réclamation des Bénéficiaires est prescrite.
[10] Voici les extraits pertinents à ce stade, la preuve démontre que l’Entrepreneur remplit la définition de ce terme à l’article 1 du Règlement;
SECTION I
INTERPRÉTATION
1. Dans le présent règlement, à moins que le contexte n’indique un sens différent, on entend par:
«entrepreneur»: une personne titulaire d’une licence d’entrepreneur général l’autorisant à exécuter ou à faire exécuter, en tout ou en partie, pour un bénéficiaire des travaux de construction d’un bâtiment résidentiel neuf visé par le présent règlement;
SECTION II
APPLICATION
2. Le présent règlement s’applique aux plans de garantie qui garantissent l’exécution des obligations légales et contractuelles d’un entrepreneur visées au chapitre II et résultant d’un contrat conclu avec un bénéficiaire pour la vente ou la construction:
1° des bâtiments neufs suivants destinés à des fins principalement résidentielles et non détenus en copropriété divise par le bénéficiaire de la garantie:
a) une maison unifamiliale isolée, jumelée ou en rangée;
SECTION II
CONTENU DE LA GARANTIE
7. Un plan de garantie doit garantir l’exécution des obligations légales et contractuelles d’un entrepreneur dans la mesure et de la manière prévues par la présente section.
§ 1. — Garantie relative aux bâtiments non détenus en copropriété divise
I. Couverture de la garantie
8. Pour l’application de la présente sous-section, à moins que le contexte n’indique un sens différent, on entend par:
«fin des travaux»: la date à laquelle tous les travaux de l’entrepreneur convenus par écrit avec le bénéficiaire et relatifs au bâtiment sont exécutés et le bâtiment est en état de servir conformément à l’usage auquel on le destine;
«parachèvement des travaux»: le parachèvement des travaux relatifs au bâtiment et prévus au contrat original conclu entre le bénéficiaire et l’entrepreneur et celui des travaux supplémentaires convenus par écrit entre les parties;
«réception du bâtiment»: l’acte par lequel le bénéficiaire déclare accepter le bâtiment qui est en état de servir à l’usage auquel on le destine et qui indique, le cas échéant, les travaux à parachever ou à corriger.
15. La garantie d’un plan s’applique à un bâtiment qui n’a pas de bénéficiaire à la fin des travaux pour autant que la réception du bâtiment ait lieu dans les 24 mois qui suivent la fin des travaux.
La garantie relative aux vices de conception, de construction ou de réalisation et aux vices du sol au sens de l’article 2118 du Code civil est toutefois limitée au terme qui reste à courir à la garantie.
La garantie de parachèvement après la réception du bâtiment ne s’applique cependant pas si le bénéficiaire et l’entrepreneur conviennent que le bâtiment est vendu en l’état d’achèvement où il se trouve à la date du contrat.
97. […] Le bénéficiaire qui a conclu un contrat pour la vente ou la construction d’un bâtiment visé à l’article 2 avec un entrepreneur qui a adhéré à un plan approuvé et qui n’a pas enregistré le bâtiment, ne perd pas le bénéfice de la garantie applicable à ce bâtiment.
16. La garantie d’un plan bénéficie à tout acquéreur subséquent pour le terme qui reste à courir à la garantie.
140. Un bénéficiaire ne peut, par convention particulière, renoncer aux droits que lui confère le présent règlement.
PREUVE
Christian Bérubé
[11] L’Entrepreneur a produit comme témoin son directeur des opérations depuis 2016, Christian Bérubé.
[12] Il n’était pas présent lors des évènements cités ci-après mais a témoigné sur les pièces au dossier et sur la procédure normale utilisée par l’Entrepreneur.
[13] La pièce produite en E-2 sont les plans de conception de la maison modèle, construite en usine.
[14] La dernière date indiquée est le 19 décembre 2012.
[15] Le client indiqué sur le plan est « Demo Gatineau ».
[16] La maison modèle a été construite en usine près Québec en janvier 2013 en deux modules, livrée sur le site de vente à Gatineau.
[17] Le témoin ajoute que sur ce site, un électricien et un menuisier raccordent les deux modules, le tout est posé de façon permanente sur des « cages de pruches (bois) ».
[18] C’est là la finition, et la maison est alors prête sur leur site de vente.
[19] Les travaux sont complétés au plus tard le 2 mars 2013.
[20] En effet, la pièce produite en E-1 est la facture du peintre qui a effectué les retouches finales à la maison modèle, cette facture est du 2 mars 2013.
[21] Il affirme que cela démontre que les derniers travaux effectués sur la maison modèle furent, au plus tard, à cette date.
[22] A la question, pourquoi cette maison fut construite, il répond que ce sont des nouveaux modèles qu’ils mettent sur leurs sites de vente pour permettre la visite des clients et que, normalement, ces maisons peuvent rester plus ou moins dix ans sur un site de vente.
[23] Elle était dans un état impeccable, et c’est l’outil pour vendre les maisons.
[24] Il y a normalement un balcon à trois pieds du sol.
[25] Il y a toujours une terrasse sur le devant mais pas nécessairement derrière.
[26] À l’intérieur, ça donne l’impression que c’est complètement terminé
[27] Cette maison-là fut reliée à l’électricité mais pas aux égouts/aqueduc.
[28] Cette maison-là a été vendue en 2015 car l’Entrepreneur a pris la décision à la fin 2014 de fermer son site de vente à Gatineau à cause de sa localisation.
[29] Il affirme que le client est allé dans la région de Québec ou a réglé les derniers détails par téléphone à l’usine (les acheteurs présents affirment avoir acheté tel quel et n’avoir pas fait ces démarches).
[30] Il qualifie le document A-1 de devis (quelqu’un a écrit en haut à la page 1 « contrat de vente »).
[31] Ce devis énumère des éléments sur 8 pages (de 12), avec la Qte (quantité) dans une colonne.
[32] Sur la page 7 de 12, il souligne à « Option Divers », des mentions sur quatre lignes suivies d’un « 1 » dans la colonne Qte.
[33] Ces quatre lignes sont (tout en caractères majuscules) :
Maison vendue tel que vue
Sera remplacé par Profab, Revêtement extérieur abimé et bardeaux en totalité
Les retouches et les réparations de joints, peinture, couvre-sol etc occasionnés
Par le démantèlement et la réinstallation seront au frais du client
[34] A la suite, il y a un élément à la section « Garantie » soit :
Garantie de la Construction Résidentielle (GCR)
qui lui, n’est pas suivi d’un « 1 »; pour ce témoin, cela veut dire que la Garantie GCR ne s’applique pas - le Tribunal d’arbitrage note ici qu’il s’agit d’une opinion juridique qui ne lie pas le Tribunal.
[35] L’acheteur n’a pas payé pour l’enregistrement à la Garantie GCR.
[36] Il affirme que cela a été lu et expliqué à l’acheteur.
[37] Le procureur s’est objecté sur la base d’un ouï-dire, en insistant pour que son objection sur le ouï-dire soit inscrite au « procès-verbal ».
[38] Le soussigné a mentionné que ce n’était pas une question de ouï-dire, le témoin, qui n’était pas présent, qui ne reconnaît pas la signature de la personne qui a signé pour l’Entrepreneur, ne disait pas répéter ce qu’on lui avait dit mais disait expliquer la procédure, alors que deux personnes présentes lors de l’achat, soit Lucien Sayeur et Jocelyne Veillette, étaient dans la salle d’audience et viendraient témoigner par la suite -
[38.1] il s’agit donc pour le soussigné de conclure de la preuve en fonction de ce qui était la meilleure preuve à accueillir, entre quelqu’un qui n’était pas présent qui n’a pas dit qu’il répétait les dires de quelqu’un mais qui expliquait la procédure habituelle, et deux témoins présents qui, d’après leur témoignage, témoignent à l’effet contraire (voir ci-après) de façon très crédible.
[39] La maison est livrée à Val d’Or en mai 2015, on voit à la facture B-1, datée du 14 mai 2015 - il ne sait pas comment elle a été transmise.
[40] L’Entrepreneur a remonté les deux modules.
[41] L’Entrepreneur n’a pas enregistré cette maison modèle en 2013 car, affirme-t-il, les anciens administrateurs de plans de garantie (d’avant le 1er janvier 2015) ne le demandaient pas.
[42] Le 13 novembre 2015 (pièce A-6), Martin Boulet, contrôleur financier de l’Entrepreneur, écrit à l’Administrateur :
Ce dossier est une livraison d’une maison modèle que nous avions sur notre site de vente à Gatineau.
Comme la maison avait plus de deux ans, elle n’était pas admissible à l’enregistrement au plan de garantie.
Au contrat, on peut voir que la maison a été vendue « Tel que vue » et que la garantie GCR n’était pas applicable (il n’y a pas de 1 dans la colonne quantité).
[43] Le 25 novembre 2015 (pièce A-6), Jean-Pascal Labrosse, coordonnateur à l’accréditation et à l’enregistrement de l’Administrateur, répond :
Pour dire qu’un bâtiment a plus de deux ans, il faudrait d’abord enregistrer une fin des travaux officielle sur ce bâtiment, et en effet après 24 mois il n’y aura pas de garantie.
Considérant que votre entreprise construit de la maison usinée, vous fabriquez des « biens meubles ». Vous vous occupez du projet clé en mai dont vous faites l’installation. (raccordement entre autres) Tous ces travaux ont été exécutés en 2015, de là, la demande de permis et la délivrance qui est sorti pour Pro-Fab.
Il appert que ce bâtiment n’a jamais véritablement débuté « sa période garantissable » contrairement à ce que vous croyez. L’enregistrement est donc nécessaire.
[44] Suite à ces courriels de 2015, la maison n’a pas été enregistrée.
[45] Ce n’est qu’en 2018 que la GCR l’a relancé.
[46] L’Administrateur facture l’Entrepreneur le 26 juin 2018 (pièce A-12) pour l’accréditation de la maison des Bénéficiaires, payée à une date indéterminée par l’Entrepreneur.
[47] À l’audience, l’Entrepreneur plaide l’erreur de droit basée sur les fausses représentations de l’Administrateur.
[48] Un représentant de l’Administrateur envoie le 22 août 2018 l’avis de quinze jours prévu à l’article 18 3e du Règlement (soit qu’une réclamation a été produite par les Bénéficiaires) (pièce B-4).
Les maisons construites en 2018
[49] L’Entrepreneur a produit dans le but de soutenir sa preuve (sans contre-preuve à ce sujet, l’Administrateur n’ayant aucun témoin à l’audience) et a plaidé ce que l’Administrateur exige de lui pour les maisons fabriquées en 2018, plaidant que cette position pour les maisons modèles de 2018 contredirait (l’emploi du conditionnel est du soussigné, qui ne se prononce pas) la position de l’Administrateur pour la maison objet de l’arbitrage.
[50] Le témoin produit en B-6, les documents d’enregistrements, et la facture, pour une autre maison modèle d’octobre 2018.
[51] Le témoin et son procureur plaident que ce document démontre la contradiction de la position de l’Administrateur.
[52] Avec égards, comme il a été dit par le soussigné à l’audience, le Tribunal d’arbitrage n’a qu’un différend à trancher ici, à savoir, est-ce que le plan de garantie s’applique à la maison des Bénéficiaires, sur la base d’un Règlement adopté par le Gouvernement du Québec en vertu d’une Loi adoptée par l’Assemblée Nationale, que trois arrêts de la Cour d’appel ont décrété comme étant d’ordre public.
Lucien Sayeur
[53] Lucien Sayeur est produit comme témoin par les Bénéficiaires, il est le conjoint de la première acheteuse, présent à toutes les étapes de l’achat de 2015.
[54] Ils étaient allés sur le site de vente de l’Entrepreneur à Gatineau et ont vu que cette maison modèle était à vendre.
[55] Ils l’ont achetée avec tout ce qui déjà à l’intérieur (y compris les cadres sur les murs).
[56] L’Entrepreneur s’occupait de tout, il mettait la toiture, c’était un projet clé en mains pour eux, ils n’avaient qu’à y mettre la peinture.
[57] Ils ne sont pas allés aux bureaux de Saint-Appolinaire - tout était dedans ils n’avaient rien à changer, tout était là.
[58] Le représentant de l’Entrepreneur lui a dit que c’était une maison neuve.
[59] Il n’y a pas eu beaucoup d’explications car la maison était déjà faite, on n’avait rien à choisir, on ne pouvait rien changer.
[60] « On la prenait telle quelle à Gatineau et on la recevait telle quelle à Val d’Or et on avait juste à peinturer en dedans car elle avait été coupée. »
[61] Il n’y a jamais eu de représentations quant au plan de garantie, le document quand ils l’ont reçu il y avait des petits papiers où il fallait signer.
[62] « Le document n’a jamais été lu. »
[63] La seule chose qu’ils ont fait, fut de poser la peinture intérieure, l’Entrepreneur s’est occupé du gyproc.
Jocelyne Veillette
[64] Jocelyne Veillette est la première acheteuse de la maison, produite comme témoin par les Bénéficiaires.
[65] Le représentant de l’Entrepreneur lui a dit qu’il allait refaire le plancher où c’est raccordé, tout le gyproc, ce qui se reconnecte, c’était clé en mains.
[66] On ne lui a pas lu le document.
[67] Il n’y a pas eu d’explications.
[68] Elle n’a pas lu non plus chaque page qu’elle a initialée « car rien ne pouvait être changé ».
[69] Elle a signé le document à Gatineau, il y avait des « choses » jaunes indiquant où signer.
[70] Personne ne lui a expliqué la facture produite en B-1.
[71] Cette facture, produite par les Bénéficiaires, datée du 14 mai 2015, montre à gauche
[71.1] huit éléments avec une colonne de gauche pour « Quantité Quantity » dans laquelle le chiffre « 1 » est indiqué
[71.2] puis, toujours dans la colonne de gauche, un « -1 » qui ne correspond à aucun élément sur la même ligne.
[72] Quant à la mention « -1 » sur la facture produite en B-1, « c’est la première fois que je vois « -1 » ».
[73] Elle ajoute « je ne l’aurais jamais acheté sans garantie », sans spécifier les détails de cette garantie.
[74] A la page suivante de la facture (qui correspondrait au dos de la facture), il est écrit en haut « Sommaire du plan de garantie », puis « Généralités de la garantie Pro-Fab », puis les Garantie de 1 an, Garantie de 3 ans, Garantie de 5 ans, par la suite, « Généralités du plan de garantie des maisons neuves (complète celui qu’offre Pro-Fab) », quelques détails suivis de « Pour les détails sur ce qui est couvert, consulter votre contrat de garantie ainsi que le livret publié par le Ministère du Québec « Le Plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs ».
[75] Enfin, elle a signé la réception du bâtiment le 3 juin 2015 (pièce A-2).
PLAIDOIRIES
L’Entrepreneur
[76] L’Entrepreneur plaide que la preuve montre deux choses sur l’enregistrement des maisons modèles
[76.1] A. avant l’entrée de la Garantie GCR en janvier 2015, Qualité Habitation et Abritat n’exigeaient pas l’enregistrement des maisons modèles, et
[76.2] B. en 2015, la Garantie GCR a demandé l’enregistrement de cette maison-là, qui a finalement eu lieu en 2018.
[77] Il ajoute que la fin des travaux à laquelle l’article 15 du Règlement fait référence est l’installation de la maison modèle en 2013, aux dates montrées sur les factures E-1 et plan E-2;
[77.1] la facture pour peinture et retouches a été produite après les derniers travaux et elle date du 2 mars 2013, qui est la date maximale que l’on peut fixer.
[78] Il y a une dichotomie importante entre l’article 15 du Règlement qui parle de fin de travaux alors qu’il n’y a pas de bénéficiaires et l’article 8 qui définit la fin de travaux comme des travaux conclus avec un bénéficiaire
15. La garantie d’un plan s’applique à un bâtiment qui n’a pas de bénéficiaire à la fin des travaux pour autant que la réception du bâtiment ait lieu dans les 24 mois qui suivent la fin des travaux.
La garantie relative aux vices de conception, de construction ou de réalisation et aux vices du sol au sens de l’article 2118 du Code civil est toutefois limitée au terme qui reste à courir à la garantie. […]
8. Pour l’application de la présente sous-section, à moins que le contexte n’indique un sens différent, on entend par:
«fin des travaux»: la date à laquelle tous les travaux de l’entrepreneur convenus par écrit avec le bénéficiaire et relatifs au bâtiment sont exécutés et le bâtiment est en état de servir conformément à l’usage auquel on le destine;
[79] Ainsi, la fin des travaux à l’article 15 du Règlement n’est pas celle prévue à l’article 8 du Règlement et est un cas où la première phrase de l’article 8 s’applique soit, à moins que le contexte n’indique un sens différent.
[80] Il s’agit donc de se référer à son sens général à l’article 2110 C.c.
2110. Le client est tenu de recevoir l’ouvrage à la fin des travaux; celle-ci a lieu lorsque l’ouvrage est exécuté et en état de servir conformément à l’usage auquel on le destine.
La réception de l’ouvrage est l’acte par lequel le client déclare l’accepter, avec ou sans réserve.
[81] Le 2 mars 2013, tous les travaux nécessaires à l’usage de la maison modèle étaient finis, son usage était sa visite par des milliers de personnes, puis pour la mettre ailleurs il faut effectuer des travaux de démolition qui prennent une semaine à une équipe de trois
[81.1] la position de l’Administrateur contrevient à l’article 15 quand il soutient que la garantie débute plutôt en 2015 car en 2015 il y a eu seulement le solage et le déplacement.
[82] La destination était une maison modèle et non une maison à être occupée, on a changé la destination pour en faire une maison résidentielle.
[83] Il cite l’exemple du condo non encore vendu, c’est la date de la construction qui est la fin des travaux et non la date d’occupation parce qu’on avait décidé de la personnaliser par la suite, ou l’exemple de la maison centenaire qu’on déménagerait,
[83.1] le Tribunal d’arbitrage considère qu’il n’a pas à rendre jugement sur toutes les comparaisons données en plaidoirie et ne rend jugement que sur la maison des Bénéficiaires.
[84] La fin des travaux a eu lieu le 2 mars 2013, la réception des travaux par l’acheteur Madame Jocelyne Veillette a eu lieu le 3 juin 2015, la maison n’a donc pas eu de bénéficiaire dans les 24 mois qui suivent la fin des travaux, donc selon l’article 15 du Règlement, la garantie d’un plan ne s’applique pas à ce bâtiment.
[85] Il ajoute de plus que la fin des travaux ayant eu lieu en mars 2013, la période de couverture de cinq ans du Plan de garantie est terminée, à supposer que la maison fut sujet au plan de garantie géré par l’Administrateur ou ses prédécesseurs, car la lettre de dénonciation parle de problème découvert en avril 2018.
[86] Il plaide aussi que l’Entrepreneur a payé une facture pour enregistrer cette maison en commettant une erreur de droit, qui ne peut pas lui être reprochée, en citant les arrêts suivants qui avaient conclu à la faute de préposés suite à des erreurs de représentations :
[86.1] Ville de Montréal c. Cordia Ltd[1] ;
[86.2] Maska Auto Spring Ltée c. Corporation municipale du village de Ste-Rosalie[2].
[87] Le Tribunal d’arbitrage note ici qu’il n’est pas saisi d’une action en responsabilité basée sur la faute de l’un ou de l’autre, mais il doit déterminer si la maison des Bénéficiaires est sujette au plan de garantie de l’Administrateur.
[88] L’Entrepreneur a aussi plaidé que la maison modèle était un bien immeuble, ce qui n’a pas semblé être contesté par les autres parties à l’audience.
[89] Il produit les autorités suivantes, toutes lues pendant le délibéré :
[89.1] Maska Auto Spring Ltée c. Corporation municipal du village de Ste-Rosalie[3] ;
[89.2] Ville de Montréal c. Cordia Ltd. et al.[4] ;
[89.3] Pierre-Claude Lafond, Précis de droit des biens[5] ;
[89.4] Caisse Desjardins de la Rive-Nord du Saguenay c. Société d’aide au développement des collectivités du Fjord Inc. et Me Josée Noel[6] ;
[89.5] Société d’aide au développement de la collectivité de Témiscouata c. 9099-3601 Québec Inc. et al.[7] ;
[89.6] Banque Nationale du Canada c. Asselin[8] ;
[89.7] Damato c. Collerette[9].
Administrateur
[90] L’Administrateur plaide que l’article 15 du Règlement réfère à une fin des travaux, ce qui signifie la fin de tous les travaux pour qu’il soit en état de servir à l’usage pour lequel il a été destiné.
[91] Il n’y a pas d’eau courante, ce n’est pas une maison destinée à un occupant.
[92] De toutes façons, vu l’emplacement de la maison, soit un site de vente, on ne peut pas dire que ça sert à accueillir des occupants pour que des gens y habitent sans eau courante.
[93] Le seul moment où le bâtiment devenait en l’état où il peut servir à l’usage destiné est le moment qu’il est installé sur le site des occupants.
[94] D’ailleurs, le représentant de l’Entrepreneur à l’audience a affirmé que la maison modèle était conçue pour donner « l’impression » du résultat final, une impression n’est pas la même chose qu’une fin des travaux.
[95] Il souligne que le contrat de vente (la facture) n’est pas clair, il est écrit en marge « 1 » pour la Garantie CGR mais la ligne suivante met en marge « -1 » sans précision.
[96] Donc le contrat de vente démontre, contrairement à la prétention de l’Entrepreneur, que la garantie GCR est belle et fin offerte.
[97] Ce n’est pas parce qu’il n’y a pas de bénéficiaire qu’un bâtiment ne doit pas être en état de servir à l’usage pour lequel on l’a destiné pour l’application des articles 8 et 15 du Règlement quant à la « fin des travaux ».
[98] La maison des Bénéficiaires n’était pas une maison usagée, n’ayant eu aucun occupant et n’étant pas complétée avant 2015.
[99] Quant à la date de réception, si l’Administrateur a décidé que c’était le 31 mai 2018, alors c’est le 31 mai 2018 (le Tribunal d’arbitrage n’a eu aucun autre motif sur ce point lors de la plaidoirie).
[100] L’Administrateur produit la décision Construction Beau-Vain Inc. et Vitale et La Garantie de Construction Résidentielle (GCR)[10], dans laquelle notre collègue, Karine Poulin, arbitre, écrit :
[136] Vu le caractère d’ordre public du Règlement et les objectifs de protection du consommateur qui le sous-tendent, le Tribunal est d’avis d’adopter une interprétation favorable aux Bénéficiaires […]
[144] Ceci étant, l’équité doit bénéficier autant aux bénéficiaires du plan de garantie qu’à administrateur ou à l’entrepreneur. […]
Bénéficiaires
[101] Les Bénéficiaires plaident que ce qui les ont frappé fut la différence entre les plans et devis produits par l’Entrepreneur (pièce E-2), et ceux sur lesquels ils ont mis la main, produit en B-2, qui ont un élément de plus : les fondations.
[102] A l’évidence, il n’y avait pas avant 2015 de fin des travaux car c’était un parking avec des maisons modèles autour, ce n’est « pas sérieux de dire qu’il y a fin des travaux ».
[103] Pour qu’il y ait fin des travaux, les plans doivent être respectés, à tout le moins, quand les fondations sont faites.
[104] L’article 2110 du Code civil parle de travaux convenus, c’est quand les plans incluant les fondations sont respectés, que l’immeuble est conforme à l’usage ce qui n’est pas le cas d’une maison modèle sur un parking.
[105] Il n’y a pas eu de réception de façon formelle donc la date du 31 mai 2018 déterminée par l’Administrateur est la bonne.
Réplique
[106] L’Entrepreneur réplique
[106.1] que la jurisprudence qu’il a lue au cours de sa pratique professionnelle lui donne raison ;
[106.2] qu’il est normal qu’une seule des maisons modèles soit reliée à l’aqueduc sur un site de vente, il est inutile de le faire pour toutes les maisons, cela ne change rien, le but est de montrer aux acheteurs ce qu’ils vont avoir ;
[106.3] quant au contrat de vente,
[106.3.1] l’acheteur a acheté une maison usagée, l’Entrepreneur l’a « démanchée », il l’a remontée, c’est déconstruit et remis ensemble, ce n’est pas le solage qui fait l’immeuble ;
[106.3.2] c’est clair au contrat que la maison est achetée telle quelle ;
[106.3.3] c’est clair au contrat qu’il ne restait que retouche et peinture à faire ;
[106.3.4] c’est clair au contrat qu’il n’y a aucune garantie GCR ;
[106.4] qu’en serait-il des maisons modèles qui sont sur le parking pendant 10 ou 14 ans (avec égards, le Tribunal d’arbitrage note ici que ce n’est pas le différend qu’il doit trancher car ce n’est pas le cas du présent bâtiment) ;
[106.5] qu’il faut faire un parallèle avec les parties privatives non vendues dans les condos (avec égards, le Tribunal d’arbitrage note ici que ce n’est pas le différend qu’il doit trancher car le présent bâtiment n’est pas une partie privative d’un ensemble immobilier.
DÉCISION
Le différend à trancher et la compétence juridictionnelle
[107] Comme le soussigné l’a mentionné dans les paragraphes ci-haut, l’Entrepreneur a soulevé à l’audience des « situations alléguées » supplémentaires qui débordent le champ de la première question à laquelle le Tribunal d’arbitrage doit répondre lors de la présente première étape.
[108] Il est compréhensible que son représentant ait tenu à s’exprimer sur l’ensemble de ses relations avec les administrateurs de plan de garantie, passés ou présent.
[109] Toutefois, les parties ont porté leur différend actuel devant un tribunal de l’ordre administratif, qui tire sa compétence juridictionnelle de l’article 106 du Règlement, adopté en conformité avec la Loi sur le Bâtiment :
106. Tout différend portant sur une décision de l’administrateur concernant une réclamation ou le refus ou l’annulation de l’adhésion d’un entrepreneur relève de la compétence exclusive de l’arbitre désigné en vertu de la présente section.
Peut demander l’arbitrage, toute partie intéressée:
1° pour une réclamation, le bénéficiaire ou l’entrepreneur; […]
[110] Les différends/questions à trancher ont été déterminés de consentement unanime de l’Entrepreneur, des Bénéficiaires et de l’Administrateur par l’entremise de leur procureur lors de la conférence de gestion du 15 janvier 2019.
[111] Le tribunal d’arbitrage a relu les termes de ces différends/questions avant le début de l’audience, et tous les procureurs présents ont confirmé.
[112] Dans l’arrêt Gignac c. Marcotte[11], la Cour d’appel rappelle :
[52] […] La compétence d’un tribunal est une matière qui vise l’ordre public, faut-il le rappeler.
[113] Le Règlement à l’article 116 prévoit que le soussigné peut faire appel à l’équité quand les circonstances le justifient, or, le Tribunal d’arbitrage a déterminé du consentement unanime des parties les questions (différends) à trancher lors de la présente audience, et a relu ces questions en début d’audience, il serait donc inéquitable et à l’encontre de la justice naturelle vu l’absence de témoin ou de preuve du côté de l’Administrateur, de trancher d’autres différends que ceux déjà déterminés.
[114] De plus, un échange de courriels du 31 janvier 2019, auquel ont participé les trois procureurs présents et le soussigné, a conclu à l’effet de l’absence du représentant de l’Administrateur- Inspecteur Conciliateur Normand Pitre.
[115] Dans ces conditions, comme le Tribunal d’arbitrage l’a signalé à l’audience, la présente décision porte sur le différend qu’il doit trancher, et non pas :
[115.1] sur la différence de traitements, si elle existe, entre les anciens administrateurs de plans de garantie d’avant 2015, et l’Administrateur actuel du plan de garantie, d’autant plus que :
[115.1.1] l’Administrateur est autorisé par la Régie du Bâtiment pour administrer le plan de garantie, il a des obligations en vertu du Règlement tout comme l’Entrepreneur a des obligations en vertu du Règlement,
[115.1.2] il y a, vu l’absence des anciens administrateurs et du témoin de l’Administrateur actuel, absence de preuve à l’audience de différence de traitement produite autant par les anciens administrateurs que par l’Administrateur actuel ;
car cette différence de traitements en général n’est pas le différend à trancher, qui ne porte que sur l’application du Règlement sur la maison des Bénéficiaires ;
[115.2] sur le traitement à être donné pour toutes les maisons modèles installées sur les sites de vente de l’Entrepreneur, ces maisons ne sont pas l’objet du différend à être tranché ;
c’est l’application du Règlement à la maison des Bénéficiaires qui est l’objet de la présente étape du présent arbitrage.
[116] La compétence juridictionnelle étant déterminé par la Règlement et les différends à trancher déterminés avant le début de l’audience, il va de soi que le Tribunal d’arbitrage tranche en vertu de l’ensemble du droit en vigueur; la Cour suprême affirme dans Tranchemontagne c. Ontario (Directeur du Programme ontarien de soutien aux personnes handicapées)[12] :
14 […] Il est bien établi en droit que les tribunaux administratifs créés par une loi qui sont investis du pouvoir de trancher les questions de droit sont présumés avoir le pouvoir d’aller au-delà de leurs lois habilitantes pour appliquer l’ensemble du droit à une affaire dont ils sont dûment saisis. […][13].
[117] Le Tribunal d’arbitrage rappelle qu’il rend sa décision sur la base du Règlement et de l’ensemble du droit et non pas sur la base de la position de l’un ou de l’autre de l’Administrateur ou d’autres administrateurs gérant des plans de garantie d’avant le 1er janvier 2015.
[118] Par exemple, la Cour supérieure a déjà jugé qu’entre un dépliant explicatif émis par la Régie du bâtiment et le Règlement, il fallait se référer au Règlement; dans Construction Lortie c. La Garantie des Bâtiments résidentiels neuf L’Association provinciale des Constructions d’Habitations du Québec[14], l’honorable Marc Lesage de la Cour supérieure écrit :
[44] Le Tribunal ajoute que la loi n'est pas modifiée par un document explicatif. D'ailleurs, dans tout document explicatif sur une loi, il est généralement mentionné de référer à la loi.
[119] Il faut se référer à la Loi et au Règlement et dans l’arrêt Québec (Sous-ministre du Revenu) c. Plastiques Simport Ltée[15], la Cour d’appel note :
[43] […] Or, le législateur n'est pas censé se contredire : au contraire, le principe de la cohérence de la loi et du règlement s'impose comme une règle cardinale de leur interprétation. […]
[120] Le professeur et auteur, Pierre-André CÔTÉ dans Interprétation des lois, 3e éd., Cowansville, Éditions Yvon Blais, 1999, p. 367, invite à privilégier une approche qui ne dissocie pas une interprétation de son contexte :
[…] Rappelons simplement que les études dans le domaine de la sémantique démontrent que les mots du langage n’acquièrent leur sens véritable que lorsqu’ils sont insérés dans un contexte. C’est le contexte (ce qui comprend particulièrement l’objectif de la communication) qui précise le sens des mots et des phrases. Une interprétation qui dissocie la formule légale de son contexte global d’énonciation risque de conduire à des absurdités.
La maison est-elle couverte par le Plan de Garantie?
[121] Pour rappel, l’article 15 du Règlement, invoqué par l’Entrepreneur pour s’exclure de l’application du Règlement, se lit ainsi :
15. La garantie d’un plan s’applique à un bâtiment qui n’a pas de bénéficiaire à la fin des travaux pour autant que la réception du bâtiment ait lieu dans les 24 mois qui suivent la fin des travaux.
La garantie relative aux vices de conception, de construction ou de réalisation et aux vices du sol au sens de l’article 2118 du Code civil est toutefois limitée au terme qui reste à courir à la garantie.
La garantie de parachèvement après la réception du bâtiment ne s’applique cependant pas si le bénéficiaire et l’entrepreneur conviennent que le bâtiment est vendu en l’état d’achèvement où il se trouve à la date du contrat.
[122] La maison actuelle des Bénéficiaires-
[122.1] sortie en morceaux de l’usine début 2013,
[122.2] remise en un seul morceau à 400 km plus loin,
[122.3] fixée sur des « cages » de bois,
[122.4] sur un site de vente géré[16] par l’Entrepreneur,
[122.5] non reliée aux égouts et aqueduc (eau courante),
[122.6] modèle,
[122.7] inoccupée,
[122.8] dont la raison d’être sur ce site de vente est d’être visitée,
[122.9] objet d’une offre d’achat ou contrat de vente signé le 23 avril 2015 puisque le site de ventes sera fermé,
[122.10] remise en morceaux en mai 2015 et
[122.11] installée par le même Entrepreneur 400 km au nord sur le terrain de l’acheteur,
[122.12] les plombiers sous-traitants de l’Entrepreneur la raccordant aux égouts et aqueduc,
[122.13] les électriciens sous-traitants de l’Entrepreneur la raccordant à l’électricité,
[122.14] inspectée par ses acheteurs et nouveaux occupants en juin 2015,
est belle et bien couverte par le Plan de garantie géré par l’Administrateur; vu la preuve et vu le Règlement, le Tribunal d’arbitrage répond par la positive à la première question qu’il doit répondre à cette première étape quant à la couverture.
Fin des Travaux
[123] La maison modèle est sur des blocs de bois (cages de pruches), inoccupée, non raccordée aux égouts, elle est démantelée en deux gros morceaux, posée sur une fondation à quelques centaines de kilomètres plus loin, raccordées aux égouts et à l’électricité.
[124] En droit, vu la preuve, c’est bien en 2015 qu’a lieu la fin des travaux pour cette maison particulière et le soussigné ne peut pas conclure autrement à la lumière de la preuve et du droit en vigueur au Québec.
[125] La jurisprudence et les auteurs démontrent bien qu’à la lumière de la preuve au présent dossier, le soussigné se doit de conclure que la fin des travaux a eu lieu en 2015 et non en 2013.
[126] Le Tribunal d’arbitrage réfère au paragraphe 35 de la décision Maisons Zibeline inc. c. Excavations Panthère inc.[17], qui suit :
[35] D'ailleurs, l'article 2110 C.c.Q. précise bien que la fin des travaux a lieu lorsque l'ouvrage est exécuté et en état de servir à l'usage auquel il est destiné. La fin des travaux a donc lieu lorsque les deux conditions sont remplies. (nos caractères gras)
[127] Ce que la première acheteuse Jocelyne Veillette a acheté, n’est pas une maison modèle sur un stationnement non raccordée aux égouts et inoccupés, c’est une maison à être occupée sur un terrain avec des fondations, raccordés à l’électricité et aux égouts/aqueduc en 2015.
[128] Dans l’affaire Maisons Zibeline inc. c. Excavations Panthère inc.[18], la Cour supérieure écrit :
Discussion
a) La fin des travaux
[29] Tout d'abord, il faut éviter de confondre l'occupation de l'immeuble et la fin des travaux.
[30] S'appuyant sur une abondante jurisprudence, le professeur Ciotola écrit [3][19] :
« 2.99. Fin des travaux et date de l'occupation - La « date de la fin des travaux » ne coïncide pas nécessairement avec la « date de l'occupation par le propriétaire ». L'occupation de l'immeuble n'est pas un critère déterminant. L'occupation de l'immeuble peut survenir bien que les travaux soient suspendus ou non complètement terminés.
L'occupation de facto d'une maison de même que son habitabilité ne sont pas des facteurs décisifs en vue de fixer la date de la fin des travaux. Ce sont là deux choses complètement différentes, l'une ne pouvant aucunement faire présumer de l'autre. On peut bien occuper une maison dont l'occupation n'est pas prête; on peut aussi bien ne pas habiter une maison où les travaux sont terminés.
L'absence d'ouvriers sur les lieux de la construction peut s'avérer un indice de la date de la fin des travaux s'il appert que le travail initialement prévu a été accompli. »
[31] L'occupation des lieux aux fins prévues n'est rien d'autre qu'un indice par d'autres de la fin des travaux que le professeur Ciotola définit ainsi [4][20] :
« Sous-paragraphe 1 - Notions générales
2.93. Définition de la fin des travaux - La notion de fin des travaux n'est pas définie au titre des sûretés mais au chapitre du contrat d'entreprise et de service. La réception de l'ouvrage a essentiellement lieu à la fin des travaux : « celle-ci a lieu lorsque l'ouvrage est exécuté et en état de servir conformément à l'usage auquel on le destine ». Le Code civil du Bas Canada définissait la fin des travaux comme « la date à laquelle la construction est devenue prête pour l'usage auquel elle est destinée. »
2.94. Exécution intégrale des travaux - La jurisprudence s'est alignée vers une fin des travaux qui demande l'exécution intégrale et complète des travaux prévus au contrat. Le facteur déterminant dans l'appréciation de la fin des travaux consiste dans l'exécution intégrale des travaux prévus au contrat. Ne sont pas des facteurs déterminants divers événements telles la date de l'occupation par le propriétaire, la cessation des travaux dans l'attente d'une saison plus clémente pour les poursuivre, l'exécution des travaux de réparation et la date de facturation.
Dans la décision Plomberie Antoine St-Onge Inc. c. Martinique Sportwear Inc., M. le juge Lacoursière s'en rapporte à ce concept usuel de l'accomplissement intégral des travaux ainsi :
Si des travaux de construction de trottoir, de terrains de stationnement et des ouvrages de terrassement autour d'une bâtisse doivent être exécutés parce que stipulés à un contrat de construction sans quoi la « fin des travaux » est retardée jusqu'à leur accomplissement, à plus forte raison en est-il de l'installation des pièces de mécanique indispensables à la mise en marche du système de chauffage d'un édifice.
Dans la décision Boileau c. Plomberie Raynal Robinson et Fils la fin des travaux est fixée à la réalisation des aménagements paysagers. Dans la décision Di Stefano c. Revmet Inc., la fin des travaux survient au parachèvement de l'ensemble immobilier qui comprend plusieurs unités de copropriété divise et non à celui de chacune des unités de copropriété.
Sous-paragraphe 2 - La fin des travaux et l'exécution complète du contrat
La fin des travaux survient à l'exécution complète du contrat, même si tous les travaux n'ont pas été confiés au même entrepreneur. L'inexécution du contrat ou qu'elle soit minime, suffira à retarder la fin des travaux.
Divers événements peuvent survenir qui entraînent un retard ou un arrêt des travaux. La faillite entraîne un arrêt des travaux : elle peut signifier soit une suspension soit un abandon des travaux. La fermeture du chantier de construction peut aussi donner lieu soit à une simple suspension des travaux, soit à un abandon définitif des travaux. La suspension des travaux peut survenir en raison d'un retard dans la livraison de matériel ou en raison de l'attente d'une saison plus clémente; elle peut aussi survenir s'il y a un délai pour un financement ou pour la perception d'une indemnité d'assurance. Il y a alors suspension temporaire ou une interruption temporaire qui n'entraîne pas la fin des travaux.
[…]
[32] La preuve démontre clairement que l'aménagement paysager et les bases d'escalier n'ont été complétés qu'au printemps 2007.
[33] Le seul fait que des escaliers reposaient sur des fondations temporaires est un indice clair que les travaux n'avaient pas été complétés. Par définition, le caractère temporaire d'une installation implique qu'elle n'est pas finale.
[34] Au surplus, les travaux d'aménagement paysager faisaient partie du projet que Zibeline offrait au potentiel acheteur. Il est évident que si de tels travaux n'avaient pas été exécutés, les acheteurs auraient bénéficié d'un recours contre le vendeur qui n'aurait pas livré l'ouvrage qu'il s'était engagé à livrer parce qu'incomplet.
[35] D'ailleurs, l'article 2110 C.c.Q. précise bien que la fin des travaux a lieu lorsque l'ouvrage est exécuté et en état de servir à l'usage auquel il est destiné. La fin des travaux a donc lieu lorsque les deux conditions sont remplies. (nos caractères gras)
[36] Sur cette question, Me Louis Payette écrit [5][21] :
« 1492. L'article 2110 C.c. définit la fin des travaux en des termes qui reprennent ceux de l'article 2013a C.c.B.C.; elle a lieu lorsque « l'ouvrage est exécuté et en état de servir conformément à l'usage auquel on le destine ». L'« ouvrage » dont il s'agit, peut consister en une des phases d'un projet d'aménagement plus vaste; la fin des travaux a lieu lors de la complétion de cette phase quoique le projet d'ensemble demeure à parfaire.
Le législateur n'a pas cru utile de codifier la jurisprudence qui, à l'intérieur de ce concept de « fin des travaux », a eu, à titre d'exemple, à décider qu'il n'y avait qu'une fin des travaux (et non pas autant de fins des travaux que de participants), que la suspension des travaux n'équivalait pas à la fin des travaux mais que leur abandon en constituait une forme.
Les jugements rendus sous le Code civil du Québec ont maintenu ces interprétations.
b) Exécution intégrale des travaux
1493. L'article 2110 C.c. précise que l'arrivée de la fin des travaux ne peut survenir avant l'exécution de l'ouvrage (« celle-ci a lieu lorsque l'ouvrage est exécuté »). Suivant ce premier critère, la fin des travaux n'a pas lieu tant qu'il n'y a pas exécution intégrale du contrat et ce, même si certains des travaux prévus par ce contrat sont, de l'accord de l'entrepreneur et du propriétaire, exécutés après que celui-là a quitté les lieux. La fin des travaux qui a pris place n'est pas reportée même si, postérieurement à ce départ, on effectue des travaux non prévus au contrat. S'il n'y avait pas de plans et devis ou si le contrat manquait de précision dans la description des travaux à faire, le second critère prévu à l'article 2110 C.c. devient déterminant : il faut que l'ouvrage soit prêt aux fins destinées.
En principe, les travaux de correction, de réparation de défectuosités, de mise au point ne retardent ni ne reportent la date de la « fin des travaux ».
[129] Dans l’affaire Construction Socam ltée c. Corporation d'hébergement du Québec[22], la Cour supérieure résume ainsi le concept de la fin des travaux sous 2100 C.c.q. :
[81] Étant donné que la fin des travaux est une question de fait, certains éléments factuels usuels permettent de présumer ou fournissent des indices que les travaux sont finis au sens de l’article 2100 C.c.Q. [56][23]. L’occupation de l’édifice par le propriétaire[57][24], la réception provisoire, les propos et gestes de l’entrepreneur, la démobilisation du chantier, la fin des rapports journaliers, le paiement par l’entrepreneur des derniers comptes d’électricité et de gaz, le retrait des roulottes de chantier, la tenue d’une dernière réunion de chantier, sont autant d’indices qui permettent d’établir la date de la fin des travaux et le point de départ du délai de prescription. Dans le présent dossier, tous ces indices sont réunis comme on l’a vu et précèdent de plus de trois ans le moment où la demanderesse fait timbrer son action.
[82] Or, l’article 2110 C.c.Q. prévoit que la fin des travaux survient lorsque l’ouvrage est exécuté et en état de service conformément à l’usage auquel on le destine. S’il y a des plans et devis, les travaux sont considérés terminés lorsque ces plans et devis sont exécutés[58][25]. Dans le cas présent, les plans et devis énumérés au contrat n’ont pas été versés en preuve.
[83] La Cour d’appel en 1935, dans l’arrêt C.E.C.M. c. Canada Iron Work Co.[59][26] a établi la règle en ces termes :
Mais quelque minime que soit le montant des travaux qui restaient à faire comparé au prix total de l’entreprise, du moment que l’omission de ces travaux constituait une lacune suivant les termes du contrat, on doit les considérer comme étant les parties sans lesquelles le tout n’était pas complet.
[84] Avec le temps toutefois, les tribunaux ont introduit une nuance pour en tempérer le caractère absolu par le canal de la notion de «travaux minimes» qui restent à faire[60][27] afin d’éviter que le dernier boulon à serrer ne devienne prétexte à reporter indéfiniment la date de la fin des travaux avec tous les effets qui y sont associés.
[85] En somme, pour qu’il y ait fin des travaux, ceux prévus au contrat doivent tous avoir été faits puisque c’est l’exécution intégrale du contrat qui marque la fin des travaux et non pas l’occupation du bâtiment ou la fin du contrat. Par contre, des travaux peuvent avoir été faits et se révéler déficients ou encore être si minimes qu’ils sont sans conséquence. Même mal fait, un travail n’en demeure pas moins fait[61][28] avec pour résultat que les malfaçons ne retardent pas la fin des travaux, peu importe leur nombre ou le temps qu’il faut compter pour y pallier.
[86] Dans un passage maintes fois cité sur cette question, la juge Hesler, alors qu’elle était juge de la Cour supérieure, résume ainsi l’état du droit :
Pour déterminer quand survient la fin des travaux, il faut:
a) identifier les travaux qui sont prévus par le contrat. En effet, c'est l'exécution intégrale du projet qui signale la fin des travaux, non la date d'occupation du bâtiment. Même si les travaux prévus qui restent à faire sont minimes, leur omission constitue une lacune qui empêche la fin des travaux;
b) distinguer entre les travaux de construction inachevés et les manquements ou déficiences de l'entrepreneur ou du sous-entrepreneur. En effet, ces derniers ne sont pas admis à invoquer leur propre omission ou manquement pour empêcher la survenance de la fin des travaux. De la même manière, les travaux de réparation rendus nécessaires par des malfaçons ne retardent pas la fin des travaux: (…)[62][29]
[87] Il faut donc distinguer les travaux de construction prévus au contrat qui demeurent inachevés et les travaux de correction des déficiences et malfaçons que l’entrepreneur doit assumer. Les seconds ne retardent pas la fin des travaux comme le souligne la Cour d’appel dans l’arrêt Vieille France inc. c. Construction Leparco inc.[63][30].
[88] Et il en va de même dans l’arrêt London Garantie c. Girard, déjà cité :
[21] En outre, la réparation de malfaçons ou l'accomplissement de travaux minimes ne seront pas nécessairement considérés comme du travail aux fins de la détermination du point de départ du délai.
[89] Ou encore dans l’arrêt Trust Général du Canada c. H.V.A.C. inc.[64][31] :
(…) Cependant, une distinction s'impose entre travaux non exécutés et travaux mal exécutés. La réparation de défectuosités n'est pas de la construction.
[90] Par ailleurs, il est compris que si des travaux supplémentaires sont requis par le propriétaire après la réception provisoire en sus du contrat initial, la fin des travaux n’est pas retardée d’autant, dans la mesure où l’ouvrage peut servir aux fins auxquelles il est destiné et que sont réunies les conditions requises par la fin des travaux[65][32].
[130] La date de la fin des travaux est déterminée de façon objective et non subjective en fonction des divers contrats intervenus, comme l’affirme la Cour supérieure dans l’affaire Graveline c. Construction Raynover inc.[33] :
20 L'expression «fin des travaux», que ce soit pour la construction d'un immeuble neuf ou la rénovation d'un immeuble existant, renvoie à un concept qui doit être déterminé de manière objective et non subjective, tel que l'indique l'article 2110 C.c.Q.. qui se lit comme suit:
Art. 2110 Le client est tenu de recevoir l'ouvrage à la fin des travaux; celle-ci a lieu lorsque l'ouvrage est exécuté et en état de servir conformément à l'usage auquel on le destine.
La réception de l'ouvrage est l'acte par lequel le client déclare l'accepter, avec ou sans réserve. (soulignement ajouté)
21 Commentant cet article, Me Denise Pratte1[34] écrit ce qui suit:
Il y a fin des travaux « lorsque l'ouvrage est exécuté et en état de servir conformément à l'usage auquel on le destine » (Art. 2110, al, 1 C.c.Q.). Cette définition s'inspire de celle donnée à l'ancien article 2013 a) C.c.B.C. Le législateur, après plusieurs hésitations, est revenu à cette notion pour déterminer le départ du calcul des délais, afin d'éviter de rouvrir le débat juridique sur cette notion. Ainsi, la doctrine et la jurisprudence antérieures demeurent applicables pour l'interprétation de la fin des travaux.
22 Personne ne prétend de nos jours que lorsqu'il y a construction d'un immeuble par plusieurs entrepreneurs, sans la présence d'un entrepreneur général, le propriétaire agissant comme maître d'oeuvre, que celui qui a fait les fondations a trente jours pour publié (sic!) son hypothèque, à partir de la fin des travaux prévus à son contrat. C'est plutôt à partir du moment où l'immeuble sera prêt à être occupé, que le délai de trente jours commencera à courir2[35]. On parle donc d'un moment déterminé objectivement qui s'applique à tous et non, d'un moment qui serait subjectif et dépendrait de chacun des contrats intervenus
[131] Pour sa part, la Cour d’appel détermine dans l’arrêt Entrepôt International Québec, s.e.c. c. Protection incendie de la Capitale inc.[36] :
[4] Par ailleurs, Ia prescription ne peut courir avant que naisse le droit d’action. Comme l’article 2118 C.c.Q. ne permet un recours qu’à partir de la fin des travaux, la prescription ne peut débuter avant que ce droit d’action puisse s’exercer.[6][37] Comme le dit l’appelante, il serait absurde de faire courir la prescription avant la fin des travaux, puisque la construction est nécessairement déficiente durant cette période. Au surplus, un vice qui se manifesterait plus de trois ans avant la fin des travaux serait prescrit deux ans avant la fin des travaux, ce qui annihilerait l’utilité de la garantie.
La vocation
[132] Le Tribunal d’arbitrage rejette l’argument de l’Entrepreneur à l’effet que la maison des Bénéficiaires n’est pas sujette au Plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs, argument selon lequel :
[132.1] elle n’est qu’une ancienne maison modèle dont la vocation était d’être inoccupée sur un site de vente, et
[132.2] elle a changé de vocation en cours de route pour être démantelée, transportée ailleurs, mise sur des fondations permanentes du terrain d’un acheteur, raccordée aux services municipaux/provinciaux, devenir occupée.
[133] C’est le législateur qui réglemente le bâtiment résidentiel neuf et non l’Entrepreneur au gré des vocations qu’il fixe personnellement ou selon l’historique des pièces qu’il assemble.
[134] Le Tribunal d’arbitrage doit déterminer si le bâtiment résidentiel des Bénéficiaires est un bâtiment résidentiel neuf visé par l’article 2 du Règlement, à la lumière du Règlement, incluant son article 15.
[135] Avec égards, cette position de l’Entrepreneur est contraire à un Règlement d’ordre public couvrant les obligations des entrepreneurs généraux de bâtiments résidentiels neufs, qui détermine que les bâtiments résidentiels neufs à l’article 2 sont visés par le Règlement, alors que le présent bâtiment résidentiel ne rencontre pas les conditions d’exclusion de l’article 15.
L’article 15 du Règlement
[136] Pour être exclus de l’application du Règlement, l’Entrepreneur devait remplir les conditions de l’article 15 du Règlement, car il n’appartient pas au Tribunal d’arbitrage soussigné de changer les termes d’un Règlement d’ordre public.
[137] La présente situation se distingue de celle décidée en vertu de l’article 15 du Règlement en 2005 dans l’affaire Grenier c. La Garantie des Bâtiments Résidentiels Neufs de l’APCHQ et Les Constructions Levasseur Inc,[38].
[138] Dans cette affaire, la maison modèle avait été louée sur les lieux avant sa vente sur les lieux.
[139] L’arbitre a jugé qu’il y avait eu fin des travaux de cette maison puisqu’elle était occupée par un locataire, les travaux visant à son usage étaient donc exécutés et les termes de l’article 15 étant remplis, l’article 15 s’appliquait.
[140] Notre collègue René Blanchet, arbitre, écrit :
[…] Le 22 novembre 1999, l'Entrepreneur procéda, auprès de l'Administrateur, à l'enregistrement d'un immeuble résidentiel, situé au:
[…],
, ci-après appelé "le bâtiment", avec la mention "bâtiment spéculatif", tel qu'il appert du "certificat d'enregistrement" qui fut émis par l'Administrateur.
Le bâtiment, au début, a servi de "maison modèle" pour l'Entrepreneur puis, fut loué, à compté (sic!) du 1 décembre 2000 jusqu'au 30 novembre 2002.
Le représentant de l'Entrepreneur, M. David Levasseur, a mentionné qu'il ne déclare jamais une maison finie à 100%, avant sa vente, pour éviter certaines taxations. Cependant, il a témoigné que lors de sa location, les travaux au bâtiment étaient entièrement finis sur les 2 étages.
Puis après sa location, le bâtiment a encore été utilisé comme "maison modèle" pour ensuite être vendu aux Requérants.
[…] Par contre, il y a l'article 5.8 précité du Contrat de garantie qui fait référence à une fin de travaux en l'absence de bénéficiaire, soit donc lorsque les travaux sont complétés avant qu'il n'y ait eu de contrat d'achat ou de construction. C'est le cas ici puisque le certificat d'enregistrement de 22 novembre 1999 indique comme bénéficiaire; "Bâtiment spéculatif"
Alors, il faut comprendre que dans la définition de la fin des travaux, les mots "sont exécutés" comprennent les termes "ont été exécutés".
Ainsi donc, aux fins de l'article 15 du Règlement, comme de l'article 5.8 du Contrat de garantie, les travaux du bâtiment ont été complétés au plus tard le 1 décembre 2000, la date de l'occupation par un locataire. En effet, à ce moment le bâtiment était nécessairement en état de servir à l'usage auquel il était destiné (habitation) et, selon M. David Levasseur, les travaux étaient exécutés à 100% sur les 2 étages. (nos soulignés)
[141] Dans notre dossier, la preuve démontre clairement qu’il n’y avait pas eu de fin des travaux en 2013, la maison modèle était sur un site de ventes, non raccordée aux services d’aqueduc et d’égout, inoccupée, et n’était pas encore en état de servir à l’usage auquel elle était destinée avant les travaux finis en 2015; l’article 15, qui est clair, ne reçoit donc pas son application.
[142] Il n’appartient pas au soussigné de changer les termes clairs de l’article 15 du Règlement qui emploie le terme « fin des travaux », qui n’a pas eu lieu ici avant 2015.
Argument contractuel c. Article 140 du Règlement
[143] L’Entrepreneur a plaidé que :
[143.1] son contrat (pièce A-1) en page 9 de 12 a beau indiquer « plan de garantie », il n’y a pas de « 1 » en marge et c’est acheté « tel que vue » donc le Règlement ne s’applique pas ;
[143.2] sa facture (pièce B-1) a une série d’éléments avec « 1 » en marge, le dernier étant plan de garantie, mais comme un « -1 » est ajouté par la suite sur la ligne suivante,
[143.2.1] cela veut dire que le « -1 » s’appliquait au plan de garantie qui n’était pas inclus et que malgré la mention à la page suivante « Sommaire du plan de garantie » qui réfère à un livret du Ministère, l’acheteur devait comprendre que le plan ne s’appliquait pas,
[143.2.2] la procédure est de tout lire et tout expliquer, ce qui a été fait,
143.2.2.1. alors même que les témoins Sayeur et Veillette, présents, nient que cela a été lu et expliqué.
[144] Avec égards, cette plaidoirie de l’Entrepreneur est clairement contraire à l’article 140 du Règlement à l’effet que l’on ne peut pas faire renoncer à la garantie du plan, à supposer bien sûr qu’il s’applique à l’immeuble en vertu du Règlement, ce qui est le cas :
140. Un bénéficiaire ne peut, par convention particulière, renoncer aux droits que lui confère le présent règlement.
[145] La Cour d’appel du Québec, dans trois arrêts, a jugé que le Règlement était d’ordre public :
[145.1] en 2013 dans Consortium M.R. Canada Ltée c. Office municipal d’habitation de Montréal[39] :
[17] La juge avait raison de souligner les différences de vocation entre les recours arbitral et de droit commun.
[18] La procédure d'arbitrage expéditive prévue au Règlement pour réparer rapidement les malfaçons est, comme le note la juge, un complément aux garanties contre les vices cachés du Code civil. Régime d’ordre public[5], le Règlement vise notamment à obliger que les réparations des bâtiments résidentiels neufs soient effectuées rapidement par l'entrepreneur ou prises en charge par l'administrateur de la garantie. ;
[145.2] en 2011 dans Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l'APCHQ inc. c. MYL[40] :
[13] Le Règlement est d'ordre public. Il détermine notamment les dispositions essentielles du contrat de garantie en faveur des tiers. Le contrat doit de plus être approuvé par la Régie du bâtiment (art. 76);
[145.3] en 2004 dans La Garantie des Bâtiments Résidentiels Neufs de l’APCHQ Inc. c. Maryse Desindes et Yvan Larochelle, et René Blanchet mise en cause[41] :
[11] Le Règlement est d’ordre public. Il pose les conditions applicables aux personnes morales qui aspirent à administrer un plan de garantie. Il fixe les modalités et les limites du plan de garantie ainsi que, pour ses dispositions essentielles, le contenu du contrat de garantie souscrit par les bénéficiaires de la garantie, en l’occurrence, les intimés.
[12] L’appelante est autorisée par la Régie du bâtiment du Québec (la Régie) à agir comme administrateur d’un plan de garantie approuvé. Elle s’oblige, dès lors, à cautionner les obligations légales et contractuelles des entrepreneurs généraux qui adhèrent à son plan de garantie.
[13] Toutefois, cette obligation de caution n’est ni illimitée ni inconditionnelle. Elle variera selon les circonstances factuelles […].
[146] D’autre part, la Cour d’appel dans l’affaire Banque de Montréal c. Marcotte[42] déclare:
[128] Une renonciation par une personne à la protection que lui accorde une loi, sauf s'il s'agit d'une loi d'ordre public de direction, est possible une fois le droit acquis, mais non en anticipation de celui-ci (Garcia Transport Ltée c. Cie Trust Royal, [1992] 2 R.C.S. 499 ). Cette renonciation peut alors être expresse, écrite, implicite ou tacite; dans tous les cas, elle doit néanmoins être claire, non ambiguë ou équivoque. En d'autres mots, on ne peut validement renoncer qu'en pleine connaissance de cause et en démontrant l'intention suffisante. (nos soulignés)
[147] La preuve démontre que la première Bénéficiaire signataire n’a pas renoncé à la garantie prévue au Règlement de façon « claire, non ambiguë ou équivoque », « en pleine connaissance de cause et en démontrant l’intention suffisante », une fois un droit acquis (suite à une réclamation réglée hors cour par exemple).
[148] Toute renonciation à cette garantie alléguée dans le présent dossier est donc nulle et non avenue.
La date de la réception et date convenue de fin des travaux
[149] Le Tribunal d’arbitrage ayant répondu par la positive à la première question de la première étape, il reste à déterminer la date de la réception du bâtiment des Bénéficiaires, l’Entrepreneur alléguant de façon subsidiaire que le recours des Bénéficiaires est hors la période de couverture du plan de garantie géré par l’Administrateur.
[150] Dans sa décision du 5 novembre 2018 (pièce A-14), l’Administrateur écrit
[150.1] page 2 sur 19,
Réception du bâtiment, 3 juin 2015 ;
[150.2] page 4 sur 19 :
Faits, analyse et décision
Dans le présent dossier, les actuels bénéficiaires, qui sont les deuxièmes propriétaires du bâtiment, ont soumis à l’administrateur une réclamation relative à […]
Avant de statuer en lien avec la situation dénoncée, l’administrateur doit tout d’abord déterminer une date de réception de la propriété, laquelle, tel que le prévoit le Règlement, est déterminée lorsque l’inspection préréception est faite.
On constate toutefois à la présente, que la réception du bâtiment n’aurait jamais été effectuée par le premier acheteur, aucun document à cet effet n’ayant été transmis à l’administrateur par l’entrepreneur.
Les actuels bénéficiaires ont pour leur part acquis la propriété le 17 mai 2016, ce qui ne peut être utilisé comme date de réception du bâtiment, tel que prescrit par le règlement.
Pour ces raisons, l’administrateur établit la date de début de garantie à la date de réception de la réclamation soumise par les bénéficiaires, soit le 31 mai 2018.
[151] L’Administrateur a plaidé à l’audience que cette affirmation signifiait que la « date de réception » du bâtiment avait été fixée dans la décision par l’Administrateur au 31 mai 2018.
[152] La preuve des faits à l’audience d’arbitrage démontrent que le 3 juin 2015 (pièce A-2), l’Entrepreneur et le Bénéficiaire d’alors Jocelyne Veillette ont rempli un formulaire duquel on a enlevé la page 1 de 4 qui fait normalement référence au Règlement mais sur lequel est écrit à la page 2 de 4,
[152.1] « Liste d’éléments à inspecter - Approuvée par la Régie du bâtiment du Québec » ;
[152.2] le « no Accréditation GCR » de l’Entrepreneur ;
[152.3] le nom du « Bénéficiaire (s) », soit Jocelyne Veillette.
[153] Ce document contient des inscriptions sur les différents éléments du formulaire aux pages 2 de 4 et 3 de 4, et à la page 4 de 4 il est écrit
[153.1] « réception avec réserve » ;
[153.2] et une date convenue de fin des travaux 3 mois après la date de l’inspection, soit le 3 septembre 2015.
[154] Tous ces éléments démontrent qu’une inspection préréception a eu lieu le 3 juin 2015 car la Bénéficiaire d’alors, Jocelyne Veillette, n’a pas, à l’évidence, signé un document en blanc concluant que tout était parfait.
[155] Ajoutons que ce document contient deux signatures,
[155.1] celle de l’Entrepreneur « Simpson Alexandre », sous la mention qu’en ce 3 juin 2015, l’entrepreneur déclare avoir été présent lors de l’Inspection préréception et avoir reçu copie de la liste des éléments à corriger ou à parachever contenue dans le présent document, le cas échéant ;
[155.2] celle du Bénéficiaire à la fin du document à « Date convenue de fins des travaux » 3 septembre 2015 - 3 mois après la date de l’inspection.
[156] L’Entrepreneur dans sa demande d’arbitrage plaide que la date du début de la garantie est en mars 2013, que la dénonciation d’un problème doit être faite à l’intérieur des cinq ans et que la dénonciation est donc prescrite.
[157] Avant de poursuivre, le Tribunal d’arbitrage souligne que ce qui suit ne s’applique qu’au présent bâtiment résidentiel, sur la base de la preuve au dossier, que chaque dossier est différent, et ne vise pas à régler tous les cas où un entrepreneur ne se conforme pas à son obligation en vertu du Règlement, qui se lit comme suit :
78. Pour adhérer à un plan de garantie et obtenir un certificat d’accréditation, une personne doit: […]
3° signer la convention d’adhésion fournie par l’administrateur et comportant les engagements énumérés
à l’annexe II;
ANNEXE II
(a. 78)
LISTE DES ENGAGEMENTS DE L’ENTREPRENEUR
L’entrepreneur s’engage: […]
9° à remettre à l’administrateur, sur la formule fournie par celui-ci, la liste des travaux relatifs au bâtiment dénoncés par écrit au moment de la réception du bâtiment ou de la partie privative, selon le cas, et devant faire l’objet de parachèvement;
[158] Dans le cahier de pièces de l’Administrateur, contrairement aux pièces A-3 (contrat de vente du premier propriétaire Veillette aux Bénéficiaires actuels) et A-4 (formulaire de réclamation), la pièce A-2 - formulaire de préréception n’a aucun sceau de date de réception par l’Administrateur, il n’y a pas eu de preuve de la date de « réception » de ce formulaire par l’Administrateur.
[159] L’arbitrage est un procès « de novo », au cours duquel les parties peuvent apporter toute preuve nouvelle.
[160] La Cour supérieure a confirmé récemment dans 9264-3212 Québec Inc. c. Moseka[43] les décisions rendues en ce sens par les arbitres en vertu de Règlement [44]:
[20] […] L’arbitre peut entendre des témoins, recevoir des expertises et procéder à l’inspection des biens ou à la visite des lieux.
[…] [24] Le Tribunal rappelle que l’arbitre ne siège pas en appel ou en révision de la décision du Conciliateur. Il ne procède pas non plus à décider en se basant uniquement sur le dossier transmis. Les parties peuvent être représentées par avocat devant lui, comme ce fut le cas dans ce dossier.
[161] D’une part, la preuve démontre qu’une telle inspection préréception prévue au Règlement a bel et bien eu lieu dans ce dossier.
[162] D’autre part, l’Administrateur :
[162.1] a écrit le 25 novembre 2015 à l’Entrepreneur (pièce A-6) « L’enregistrement est donc nécessaire »,
[162.2] mais ne soulève le défaut de transmission d’un rapport d’inspection préréception que le 5 novembre 2018 dans sa décision (pièce A-14), et,
[162.3] avec égards, cette non-intervention de l’Administrateur peut difficilement justifier une prolongation de garantie de 2015 à 2018 sans aucun autre motif,
[162.4] l’inspection préréception avait bel et bien eu lieu le 3 juin 2015 et si l’Administrateur n’a pas exigé de voir ce document, s’il existait, en 2015, mais soulève cette question en 2018, le Tribunal n’y voit pas dans le présent dossier une cause de prolongation de garantie,
[162.5] en effet, il y a absence de preuve de mauvaise foi de la part de l’Entrepreneur quant à sa position qu’il a présentée devant le Tribunal d’arbitrage en 2018 et à l’Administrateur en 2015 puis en 2018,
[162.6] le Tribunal conclut que la position de l’Administrateur à l’audience n’est pas équitable et vu les circonstances qui le justifient, il y a lieu de la rectifier.
[163] Pour ces motifs, le Tribunal d’arbitrage :
[163.1] rejette la décision et la position de l’Administrateur quant à la date de début de garantie et la date nouvellement fixée de la réception du bâtiment à la date de réception de la déclaration soumise par les Bénéficiaires ;
[163.2] et sur la base de la preuve, y compris la pièce A-2 :
[163.2.1] fixe la date de réception du bâtiment au 3 juin 2015 ;
[163.2.2] fixe la date de la fin des travaux au 3 septembre 2015.
LA SECONDE ÉTAPE
[164] Le procureur des Bénéficiaires a fait part lors de la conférence de gestion que la période tardive de dégel dans la région où se situe le bâtiment résidentiel entraînerait un délai supplémentaire pour la mise en état de son dossier.
[165] Le tribunal d’arbitrage demandera dans ses conclusions à ce qu’il lui fasse part de la date estimée de la mise en état de son dossier.
[166] La première étape a été initiée par la demande de l’Entrepreneur.
[167] L’article 123 du Règlement se lit ainsi :
123. Les coûts de l’arbitrage sont partagés à parts égales entre l’administrateur et l’entrepreneur lorsque ce dernier est le demandeur. […]
[168] Le soussigné conclut que si le Législateur a pris la peine d’inscrire les mots « partagés à parts égales » dans cet article, c’était que là était son intention.
[169] Le Tribunal d’arbitrage conclut que les coûts de l’arbitrage jusqu’à ce jour seront partagés à parts égales entre l’Administrateur et l’Entrepreneur car ce dernier est le demandeur.
[170] PAR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL D’ARBITRAGE, À CETTE PREMIÈRE ÉTAPE :
[171] ACCUEILLE EN PARTIE la demande d’arbitrage de l’Entrepreneur quant à son moyen préliminaire seulement;
[172] Sur la première question
[173] MAINTIENT la décision de l’Administrateur ET RÉITÈRE que le bâtiment résidentiel des Bénéficiaires est couvert par le Plan de garantie géré par l’Administrateur en vertu du Règlement ;
[174] REJETTE la demande d’arbitrage sur ce point de l’Entrepreneur ;
[175] Sur la question subsidiaire
[176] REJETTE la décision de l’Administrateur et sa position quant à la date de début de la garantie et à la date de réception du bâtiment à la date de réception de la réclamation soumise par les Bénéficiaires actuels;
[177] FIXE la date de réception du bâtiment résidentiel des Bénéficiaires au 3 juin 2015 ;
[178] FIXE la date de la fin des travaux du bâtiment résidentiel des Bénéficiaires au 3 septembre 2015 ;
[179] ORDONNE que les frais d’arbitrage encourus jusqu’à ce jour soient payés moitié par l’Administrateur moitié par l’Entrepreneur avec les intérêts au taux légal majoré de l’indemnité additionnelle prévue à l’article 1619 du Code civil du Québec à compter de la date de la facture émise par l’organisme d’arbitrage, après un délai de grâce de 30 jours ;
[180] DEMANDE au procureur des Bénéficiaires de communiquer par courriel au soussigné, avec les autres parties en c.c., dans les quinze jours des présentes, la date estimée de la mise en état de son dossier, et les démarches qu’il a entreprises à cet effet.
[181] RECOMMUNIQUERA avec les parties sur les étapes suivantes du processus d’arbitrage quant au fond des demandes d’arbitrages.
Montréal, le 1er mars 2019
__________________________
ROLAND-YVES GAGNÉ
Arbitre / CCAC
PROCUREURS:
ENTREPRENEUR:
Me Jean Dallaire
BMA Avocats
BÉNÉFICIAIRES:
Me David Bernier
Bernier Beaudry
ADMINISTRATEUR:
Me Pierre-Marc Boyer
[1] 2003 CanLII 43968 (QC CA).
[2] 1991 2 RC.S 3; Maska Auto Spring Ltée c. Ste-Rosalie (Village) 1988 J.Q. no 885 : « J’estime quant à moi, que la jurisprudence du Québec comme celle de la common law considère qu’une information erronnée peut constituer une faute, selon les circonstances, parce qu’elle ou bien un manquement à un devoir légal ou encore à une norme générale de conduite, celle du bon père de famille. » (page14 de 20).
[3] [1991] 2 R.C.S. 3 et 1988 R.J.Q. 1576 (Cour d’appel).
[4] 2003 CanLII 43968 (QC CA).
[5] Montréal, Les Éditions Thémis 2e édition, 2007, p. 60 à 63.
[6] 2010 QCCS 6499 (Hon. juge Marc Lesage).
[7] 2003 CanLII 47498 (QC CS) (Hon. juge Jean Bouchard).
[8] [2000] J.Q. no 1336, J.E. 2000-1038, 2000 CanLII 18465, REJB 2000-18847 (Hon. juge Gilles Hébert).
[9] 1950 C.S. 414 (Hon. juge André Demers).
[10] GAMM : 2016-13-003, 20 juin 2017, Karine Poulin, arbitre.
[11] 2010 QCCA 821.
[12] 2006 CSC 14.
[13] « 26. La présomption qu’un tribunal administratif peut aller au-delà de sa loi habilitante — contrairement à celle qu’il peut se prononcer sur la constitutionnalité — découle du fait qu’il est peu souhaitable qu’un tribunal administratif se limite à l’examen d’une partie du droit et ferme les yeux sur le reste du droit. Le droit n’est pas compartimenté de manière à ce que l’on puisse facilement trouver toutes les sources pertinentes à l’égard d’une question donnée dans les dispositions de la loi habilitante d’un tribunal administratif. Par conséquent, restreindre la capacité d’un tel tribunal d’examiner l’ensemble du droit revient à accroître la probabilité qu’il tire une conclusion erronée. Les conclusions erronées entraînent à leur tour des appels inefficaces ou, pire encore, un déni de justice. »
[14] 2009 QCCS 1941.
[15] 2007 QCCA 160.
[16] Loué ou acheté, la preuve est déficiente mais ne change rien à la conclusion.
[17] 2008 QCCS 2705 (Hon. juge Jacques R. Fournier).
[18] 2008 QCCS 2705 (Hon. juge Jacques R. Fournier).
[19] [3] Pierre CIOTOLA, Droit des sûretés, 3e éd., Montréal, Éditions Thémis, 1999, p. 180.
[20] [4] Id., p. 172 à 176.
[21] [5] Louis PAYETTE, Les sûretés réelles dans le Code civil du Québec, 2e éd., Cowansville, Éditions Yvon Blais, 2001, p. 643-644.
[22] 2016 QCCS 3404 (Hon. juge Michel Yergeau).
[23] [56] 6622623 Canada inc. c. 6369472 Canada inc. (Equinox JMP) 2010 QCCS 1765 (CanLII).
[24] [57] Laporte c. Gagnon, [1971] C.A. 1.
[25] [58] Jacques DESLAURIERS, Les sûretés réelles au Québec, Montréal, 2008, Wilson & Lafleur, p. 731.
[26] [59] (1935) 58 B.R. 565, par. 54.
[27] [60] London Garantie c. Girard & Girard, J.E. 2004-415 (C.A.), par. 20 et 21; La Garantie, Compagnie d’assurance de l’Amérique du Nord c. Construction Luc Coutu inc., J.E. 95-2160 (CA), p. 2; Entreprises Volteck inc. c. Prévoyants du Canada, J.E. 89-138 (C.A.), p. 2.
[28] [61] Giakoumakis c. Entreprises de rénovation C.V. et C.D. inc., J.E. 88-703 (C.A.), p. 3.
[29] [62] Lloyd V. Lomas Holding Ltd. c. Valmont Nadon Transport, J.E. 96-274, p. 5.
[30] [63] AZ-01010147.
[31] [64] J.E. 92-38, p. 4. Voir aussi : Entreprises Pau-Rob Inc. c. Labine, J.E. 84-207.
[32] [65] Alppi c. Hamel, (1939) 66 B.R. 448. Voir à ce propos: pièce P-7.
[33] Graveline c. Construction Raynover inc. 1995 CanLII 3807 (QC CS) (Hon. juge Pierre J. Dalphond).
[34] [1] Me Denise Pratte, Priorités et hypothèques, Les Éd. Revue de droit, Université de Sherbrooke, 1995, p. 191, no. 420.
[35] [2] Me Serge Binette, “Le privilège de l'ouvrier, du fournisseur de matériaux, du constructeur et de l'architecte: La fin des travaux”, [1975] C.P. du N. 101, pp. 120-121; La Corporation de Crédit Adanac c. Turcotte [1966] B.R. 768 ; Laporte c. Gagnon [1971] C.A. 1 ; Me Pratte, supra note 1, p. 192; Construction Paval c. Entreprise de la Construction ACF [1987] R.J.Q. 2496 C.S.
[36] 2014 QCCA 617.
[37] [6] Huard c. Construction GMHG inc., 2009 QCCQ 1874 (CanLII), paragr. 168. Voir aussi Commission des normes du travail c. BPR-Bechtel inc., 2011 QCCS 1877 (CanLII), paragr. 22; Archevêque catholique romain du Québec, 2009 QCCA 1349 (CanLII), paragr. 134, dissidence du juge Chamberland confirmée en Cour Suprême, 2010 CSC 44 (CanLII).
[38] CCAC S05-0305-NP, 18 août 2005, René Blanchet, arbitre.
[39] 2013 QCCA 1211 Renvoi [5] : Voir art. 3, 4, 5, 18, 105, 139 et 140 du Règlement.
[40] 2011 QCCA 56.
[41] AZ-50285725, J.E. 2005-132.
[42] 2012 QCCA 1396.
[43] 9264-3212 Québec Inc. c. Moseka 2018 QCCS 5286 (Hon. Juge Johanne Brodeur).
[44]3093-2313 Québec c. Létourneau et Bouchard et la Garantie des maisons neuves de l’APCHQ CCAC S15-022401-NP, Décision rectifiée du 12 novembre 2015, Roland-Yves Gagné, arbitre, paragraphe [335]; Syndicat des copropriétaires 6613-6635 boul. des Laurentides Laval c. 9141-0001 Québec Inc. et Garantie des Bâtiments Résidentiels Neufs de l’APCHQ, (CCAC S14-070901-NP, 1er juin 2015, Yves Fournier, arbitre), paragraphe [68] à [76]. Gauthier et Gagnon c. Goyette Duchesne Lemieux inc. et La Garantie des Bâtiment Résidentiels Neufs de l’APCHQ inc., SORECONI 050629001, 3 novembre 2006, Jeffrey Edwards, arbitre, paragraphe [130].