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ARBITRAGE

En vertu du Règlement sur le plan de garantie
des bâtiments résidentiels neufs

(Décret 841-98 du 17 juin 1998)

Organisme d’arbitrage autorisé par la Régie du bâtiment :

Centre canadien d’arbitrage commercial (CCAC)

______________________________________________________________________

 

Entre

Nancy Boulanger & Alain Bergeron

Bénéficiaires, demandeurs

Et

La Garantie des Bâtiments Résidentiels Neufs de l’APCHQ Inc.

Administrateur, défenderesse

Et

Les Constructions Levasseur Inc.

Entrepreneur, Mise en cause

 

 

No dossier Garantie :

06-335 PM

No dossier CCAC :

S05-1007-NP

 

______________________________________________________________________

 

SENTENCE ARBITRALE

______________________________________________________________________

 

Arbitre :

Me René Blanchet, ingénieur-avocat

 

 

Pour les bénéficiaires :

Me Pierre Soucy (Lambert Therrien Bordeleau Soucy)

 

 

Pour l’entrepreneur :

M. Daniel Levasseur

 

 

Pour l’administrateur :

Me Patrick Marcoux (savoie Fournier)

 

Date(s) d’audience :

28 octobre 2009

 

 

Lieu d’audience :

473, rue Radisson, Trois-Rivières

 

 

Date de la décision :

4 novembre 2009

______________________________________________________________________

 

[1]                Les Bénéficiaires ont acquis de l’Entrepreneur une résidence (ci-après appelé « bâtiment ») située au 5150 de la rue Savoie, à Trois-Rivières-Ouest;

[2]                Ce  bâtiment  fut reçu, neuf,  le 27 avril 2001;

[3]                Ce  bâtiment  bénéficie du plan de garantie (ci-après appelé « Plan ») de l’Administrateur, rédigé conformément au Règlement sur le plan de garantie de bâtiments résidentiels neufs (ci-après appelé « Règlement »), fait en vertu du paragraphe 185 de la Loi sur le Bâtiment (L.R.Q., c. B-1.1, r. 02);

[4]                Le 29 janvier 2004[1], les Bénéficiaires dénoncèrent, par écrit, à l’Entrepreneur l’apparition de fissures dans le solage du « bâtiment »;

[5]                Puis, ils en avisèrent l’Administrateur, par lettres, les 22 avril, 15 juillet et 25 août 2004;

[6]                À la suite, l’Administrateur mandata un laboratoire en vue qu’il soit procédé à l’analyse du béton du « bâtiment » et, un ingénieur pour opinion;

[7]                Le 1 septembre 2004[2], l’Administrateur écrivit aux procureurs des Bénéficiaires qu’il se ralliait aux recommandations de ses mandataires, pré-cités, d’attendre pour faire un suivi l’année suivante;

[8]                Le 11 octobre 2005, le Centre reçu une demande d’arbitrage pour les Requérants, transmise le 6 octobre 2005, accompagnée d’un exposé[3] de leurs prétentions, datés du 13 juillet 2005, ainsi que diverses pièces;

[9]                Dans leur exposé, les Requérants attribuent l’apparition des fissures à la présence de pyrite et de pyrrotite dans le gros agrégat du béton des fondations;

[10]            Ils allèguent que la présence de pyrite dans les murs de fondation fait qu’ils sont entachés de vices cachés et de malfaçons qui affectent grandement la qualité de l’immeuble;

[11]            Au surplus, ils allèguent que la seule présence de pyrite entraîne une forte baisse de la valeur marchande de leur immeuble;

[12]            Alors, ils demandent que le « bâtiment » soit soulevé et que les fondations de l’immeuble soient refaites, réparations dont ils évaluent les coûts à 140 000$;

[13]            Aussi, ils font état de l’apparition d’un niveau anormal de fissures à l’endroit des dalles sur le sol du garage et du sous-sol;

[14]            Peu après, le 26 octobre 2005, les Procureurs des Bénéficiaires demandèrent de suspendre le dossier d’arbitrage;

[15]            Cette demande fut réitérée le 20 juin 2006;

[16]            Finalement, le 22 septembre 2006, l‘Administrateur produisit sa décision par laquelle il refuse d’intervenir, au motif que les fissures ne rencontrent pas le critère de gravité d’un vice caché, quant au point soulevé par les Bénéficiaires, à savoir :

1- FISSURES AU MUR DE FONDATION ET À LA DALLE DE BÉTON DU GARAGE

[17]            Alors, les procureurs des Bénéficiaires demandèrent au Centre de réactiver leur demande d’arbitrage du 13 juillet 2005;

[18]            Le 27 octobre 2006, le soussigné fut nommé par le Centre pour agir comme arbitre du présent litige;

[19]            Dès lors, les procureurs des Bénéficiaires ont demandé une suspension en vue de commander une expertise;

[20]            Puis, d’autres demandes de remise ont été formulées et accordées de consentement, de sorte que l’audition n’a pu avoir eu lieu avant le 28 octobre 2009;

- LES FAITS-

[21]            M. Alain Bergeron, l’un des Bénéficiaires, témoigna qu’il a acquis le « bâtiment », de l’Entrepreneur, en avril 2001;

[22]            En janvier 2004, il nota des fissures verticales dans le mur de fondation, des fissures « de bord en bord » aux coins des ouvertures pour les fenêtres du sous-sol;

[23]            Après dénonciation faite le 29 janvier 2004, eut lieu, le 21 avril 2004, une inspection avec des représentants de l’Administrateur;

[24]            Il fut alors constaté l’apparition de nouvelles fissures au solage et, cette fois, au plancher du sous-sol et du garage;

[25]            L’apparition de ces nouvelles fissures fut dénoncée, par écrit, le 22 avril 2004[4];

[26]            M. Bergeron déclare qu’il y avait cinq fissures dans le solage, pouvant atteindre 1/16 pouces de largeur, et, de ce fait, qu’ il y a infiltration d’eau;

 

[27]            À la fin de l’année 2004, eut lieu une autre visite par un expert pour l’Administrateur, M. François Deslaurier, ing., qui donna lieu, le 22 décembre 2004, à un rapport[5] dans lequel il constate la progression des fissures et recommande de poser des témoins sur les fissures pour comprendre le phénomène et son évolution, et enfin déterminer la marche à suivre;

[28]            Par ailleurs, un frère de M. Alain Bergeron, qui avait acquis, peu avant lui, du même constructeur, une résidence dans le même secteur, au 5085 de la rue Savoie, après s’être plaint de l’apparition de fissures à son solage, l’Administrateur commanda la démolition et la reconstruction du solage au motif de la présence d’agrégats sulfureux;

[29]            Puis, M. Bergeron déposa une lettre[6], datée du 20 septembre 2004, adressée par M. Denis Roy, ing., présentant à l’Administrateur un rapport concernant le « bâtiment »;

[30]            Cette lettre mentionne :

« l’étude confirme l’utilisation d’un gros agrégat impropre à la fabrication du béton de ciment »

[31]            M. Bergeron témoigne qu’il n’aurait jamais acheté le « bâtiment » s’il avait su que le béton contenait de la pyrite;

[32]            Un agent immobilier, M. Louis Levasseur, témoigna, à titre d’expert, qu’un vendeur doit déclarer la présence de pyrite ou de pyrotite;

[33]            Il ajoute que les acheteurs « ont peur de cela » et qu’il s’ensuit un désintéressement ou, une perte de valeur;

[34]            Cette affirmation est corroborée par une déclaration écrite d’un autre agent immobilier, M. Robert Charron, faite conformément aux dispositions de l’article 294.1 C.p.c.;

[35]            En contre-interrogatoire, M. Levasseur a dit que son rapport d’expertise avait été rédigé en novembre 2004, en s’appuyant sur le rapport de M. Denis Roy du 20 septembre 2004. Mais, il ajoute que si les rapports d’analyse subséquents indiquent qu’il n’y a pas de problème, alors il n’y aura pas de problème pour les acheteurs;

[36]            Puis, M. Michel Jodoin, ing. témoigna, à titre d’expert pour les Bénéficiaires, après avoir eu déposé son rapport d’expertise, daté du 15 septembre 2009;

 

[37]            M. Jodoin relate que lui et son groupe professionnel « Groupe Qualitas Inc. » ont eu à expertiser, par le passé, une trentaine de cas, pour déterminer la cause de dégradation graduelle du béton et, dans tous les cas, la dégradation était associée à la présence de sulfure dans les gros agrégats utilisés pour la fabrication du béton;

[38]            L’expert cite les dispositions de la norme CSA A-23.1 « Béton - Constituants et exécution des travaux, édition 1994 qui mentionne, à l’article 5.5.2 :

« Les granulats qui provoquent une dilatation excessive du béton à cause d’une réaction ciment-granulat, autre que la réactivité alcaline, ne doivent pas être utilisés dans le béton, à moins que les mesures préventives n’aient été prises à la satisfaction du maître d’ouvrage.

Note : Dans de rares cas, une dilatation considérable peut se produite pour des raisons autre que la réactivité alcali-granulat de sulfures, comme la pyrite, la pyrrhotine et la marcasite, qui peuvent s’oxyder et s’hydrater et causer une augmentation de volume ou encore la libération de sulfate qui attaque la pâte de ciment, ou les deux; »

[39]            Cette norme est prescrite par le Code National du Bâtiment, 1995, à l’article 9.3.1.4 qui se lit comme suit :

« 9.3.1.4 Granulats

1)     les granulats doivent :

a)     se composer de sable, de gravier, de pierre concassée, de laitier de haut-fourneau refroidi à l’air, de schiste expansé ou d’argile expansée conformes à la norme CSA-A23.1 « Béton - Constituants et exécution des travaux »;

b)     être propres et de bonne granulométrie et ne pas contenir une proportion préjudiciable de matières organiques et d’autres matières nuisibles. »

[40]            Il en déduit que le béton ne doit pas contenir de pyrite ou de pyrrhotine;

[41]            Or, à l’étude des rapports d’analyse produits par l’Administrateur, dont il accepte les résultats, il constate que ces rapports révèlent la présence de pyrite ou de pyrrhotine;

[42]            Il en conclue que les gros agrégats qui ont été utilisés pour le béton sont donc impropres à leur fabrication, selon les normes;

[43]            Bien qu’il admet que le béton des murs de fondation ne montre aucune fissure polygonale, caractéristique d’une détérioration due au gonflement de la pyrite ou de la pyrrhotine, il recommande qu’en même que les murs et les dalles sur le sol soient démolies et reconstruites, puisqu’il n’y a aucune garantie que le béton ne subira une telle détérioration;

[44]            Au surplus, il invoque les normes européennes AFNOR, Norme NF EN 12620, Granulats pour béton, août 2006 qui exige, dit-il, une concentration totale en soufre des granulats à un maximum de 1%, mais de 0,1% s’il y a présence de pyrrhotite;

[45]            Encore, les analyses montrent une concentration en soufre variant de 0,58 @ 0,86% et, que la majorité des agrégats contenant des sulfures sont majoritairement de la pyrite, mais il y a aussi de la pyrrhotite (aucune trace n’a cependant été signalée dans la carotte F-6);

[46]            Il en déduit que les résultats des concentrations en souffre sont grandement supérieurs à la valeur maximale spécifiée de 0,1%;

[47]            Par ailleurs, en contre-interrogatoire, M. Jodoin a témoigné qu’il ne peut pas prévoir s’il surviendra, dans le futur, une détérioration du béton des murs de fondation;

[48]            Il a aussi admis que dans la vallée du St-Laurent, les agrégats de béton montrent toujours la présence, ou des traces, de pyrite;

[49]            Pour l’Administrateur, M. Daniel Levasseur, dirigeant de l’Entrepreneur, a témoigné que le fournisseur de béton pour le « bâtiment » était « Béton Boivert », alors que pour l’immeuble du 585 de la rue Savoie, c’était « Béton Maskimo »;

[50]            Puis, M. Denis Roy, ing. a témoigné, à titre d’expert pour l’Administrateur;

[51]            Il a rédigé plusieurs expertises en rapport au « bâtiment », datées du :

- 20 septembre 2005[7]

- 31 janvier 2005[8]

- 26 mai 2006[9]

- 7 septembre 2006[10]

[52]            M. Roy est celui qui a recommandé la démolition et reconstruction du solage de l’immeuble du 5085 de la rue Savoie, mais distingue ce cas avec le présent cas;

[53]            Il témoigne que pour le « bâtiment » faisant l’objet des présentes procédures, le pourcentage de sulfure dans les agrégats est beaucoup moindre et les fissures moins élaborées[11];

[54]            Il ajoute que quant à lui, il y avait une limite, ou une ligne directrice, à établir quant à la crainte d’une éventuelle détérioration future qui serait causée par la présence de sulfure dans les agrégats du béton;

[55]            Il mentionne que c’est pour cette raison qu’en septembre 2004, il avait recommandé d’attendre pour qu’un suivi soit fait afin d’observer si une réaction de sulfatation s’amorcera;

[56]            Toutefois, il observa alors que le « bâtiment » présentait un « niveau anormal de fissures» à l’endroit des dalles sur le sol du garage et du sous-sol[12] mais, que cela n’était pas relié à la présence de sulfure dans le béton;

[57]            Un rapport fut transmis le 26 mai 2005, présentant certaines analyses et suggérant de poursuivre les observations;

[58]            Le 7 septembre 2006, M. Roy présenta son dernier rapport;

[59]            Ce rapport signale qu’aucun mouvement des fissures du solage n’avait été mesuré depuis le relevé d’octobre 2005;

[60]            Le rapport énumère plusieurs analyses de carottes prises dans le mur de fondation du « bâtiment »;

[61]            En particulier, le rapport démontre que les agrégats fin du béton ne contiennent pas de sulfure;

[62]            En conclusion, ce rapport mentionne que le béton du « bâtiment » ne peut être apparenté à ceux des immeubles du secteur dont la détérioration avait conduit à leur démolition et reconstruction;

[63]            Et, il ajoute que les propriétés structurales du béton des fondations du « bâtiment » sont conformes aux exigences du Code du bâtiment;

[64]            M. Roy, tout comme M. Jodoin, affirme que des fissures qui seraient causées par un gonflement des agrégats sulfureux montreraient une forme polygonale, ce que les murs de fondation du « bâtiment » ne montrent pas encore;

 

DISCUSSION

A- Dalles sur le sol

[65]            La dalle sur le sol du garage, ainsi que celle du sous-sol, montrent de multiples fissures, dans tous les sens;

[66]            Que la cause soit la présence de sulfure ou d’un retrait du béton ou de mauvaises fondations (ce que je pense), ces fissures sont « anormales », comme qualifié par l’expert Roy[13];

[67]            Puisque anormales, elles résultent nécessairement d’un vice caché;

[68]            Or, le plan de garantie de l’Administrateur doit couvrir la correction de tels vices, selon le paragraphe 10 du Règlement :

« 10. La garantie d’un plan dans le cas de manquement de l’entrepreneur à ses obligations légales ou contractuelles après la réception du bâtiment doit couvrir :

la réparation des malfaçons existantes et non apparentes au moment de la réception et découvertes dans l'année qui suit la réception, visée aux articles 2113 et 2120 de Code Civil et dénoncées, par écrit, à l’entrepreneur et à l’administrateur dans un délai raisonnable, lequel ne peut excéder 6 mois de la découverte des malfaçons;

4° la réparation des vices cachés au sens de l’article 1726 ou de l’article 2103 du Code civil qui sont découverts dans les 3 ans suivant la réception du bâtiment et dénoncés, par écrit, à l’entrepreneur et à l’administrateur dans un délai raisonnable, lequel ne peut excéder 6 mois de la découverte des vices cachés au sens de l’article 1739 du Code civil;»

[69]            L’exclusion prévue au paragraphe 12-2° du Règlement, qui se lit comme suit:

« 12 Sont exclus de la garantie :

2° les réparation rendues nécessaires par un comportement normal des matériaux tels les fissures et les rétrécissements; 

………

Toutefois, les exclusions visées aux paragraphes 2° et 5° ne s’appliquent pas si l’entrepreneur a fait défaut de se conformer aux règles de l’art ou à une norme en vigueur applicable au bâtiment au sens de l’article 10 »

ne peut recevoir d’application puisque nous parlons ici d’un comportement anormal;

[70]            Alors, ces fissures des dalles sur le sol devront être réparées;

B- Murs des fondations

[71]            Il est compréhensible que les Bénéficiaires, en présence d’un signalement de sulfure dans les agrégats des murs des fondations de leur « bâtiment » en demande leur démantèlement et reconstruction avant la fin de la période de garantie de l’Administrateur;

[72]            Mais, il n’y a aucune certitude qu’une détérioration du béton des murs des fondations du « bâtiment » puisse survenir éventuellement;

[73]            Ces murs ont été coulés en l’an 2000 et, il s’est écoulé près de 10 ans sans qu’il n’y ait eu de détérioration causée par la présence de sulfure dans les agrégats;

[74]            Vu le temps écoulé, il est même probable qu’il n’y aura pas de telle détérioration;

[75]            Une première question se pose : le % de matière sulfureuse présente dans les agrégats du béton contrevient-il aux normes?

[76]            La norme du Code National du Bâtiment renvoie à la norme CSA pré-citée;

[77]            Cette norme indique que des matériaux (granulats de sulfure tel que pyrite, pyrrhotine) qui provoqueront une dilatation excessive ne doivent pas être utilisés dans le béton;

[78]            Il est certain que cette norme n’interdit pas toute présence de granulats de sulfure, puisque alors toute la construction dans la vallée du St-Laurent s’en trouverait paralysée;

[79]            Ce que dicte la norme ce qu’il est interdit que le agrégats contiennent un % de sulfure susceptible de provoquer une dilatation excessive;

[80]            Aucune précision n’est apportée quant à la quantité maximale tolérable de sulfure contenue dans le granulat[14];

[81]            Alors, le % de sulfure que les granulats d’un béton pourront contenir dépendra de l’usage qu’il en sera fait;

[82]            Puisque le gonflement des matières sulfureuses dépend de sa réaction avec l’humidité, un béton devant être utilisé en milieu humides devra contenir moins de granulats sulfureux qu’un autre devant être utilisé en milieu sec;

[83]            Les experts ont fait référence aux norme européenne pré-citée;

[84]            Il est dangereux d’analyser une telle norme, sans connaître sa formulation exacte et, l’interprétation qui en fut donnée;

[85]            Plus est, une telle norme n’est pas imposée ici;

[86]            Quoi qu’il en soit, si on ignore la présence de pyrrhotite, le % de la teneur en soufre mesurée (0,86% max.), le béton serait conforme à cette norme, puisque le % de soufre est inférieur à 1%;

[87]            Je ne puis admettre que s’il n’y avait que la présence d’un seul grain de pyrrhotite, le % total de soufre permis ne devra pas être maintenant supérieur à 0,1%;

[88]            Par ailleurs, la jurisprudence a souvent statué que la conformité aux normes et règlements étaient un minimum à respecter[15] mais cela ne concernait que la possibilité d’utilisation, la facilité de remplacement, en somme assurer l’usage destiné;

[89]            Mais, il est établi, par ailleurs, que la non-conformité au Code National du bâtiment n’est pas, en soi, un vice[16];

[90]            Pour un cas, comme ici, de présence d’agrégats sulfureux dans le béton, l’honorable juge Micheline Laliberté, JCQ a rejeté[17] la réclamation d’un propriétaire acheteur pour les considérations suivantes :

« CONSIDÉRANT que le demandeur ne peut se limiter à alléguer que la seule présence de pyrite constitue un vice caché, mais qu’il doit démontrer également que la présence de cette pyrite entraîne ou entraînera un déficit d’usage, ce qui n’est pas le cas en l’espèce;

CONSIDÉRANT que la seule présence de pyrite n’équivaut pas à vice caché et qu’en l’espèce le demandeur n’a pas prouvé qu’il était probable que des détériorations se manifestent dans le futur »

[91]            Effectivement, les mêmes considérations s’appliquent ici, il n’y a aucune preuve de détérioration, ni de menace de détérioration future du béton;

[92]            Pour clore le débat à propos de la présence d’agrégats sulfureux dans les agrégats du béton du solage des Requérants, je cite les propos suivants de l’honorable juge Giilles Mercure, JCS[18] :

« Les Tribunaux ont décidé de manière constante que la seule présence de pyrite dans le matériau de remblais ne constitue pas un vice caché[19].

Cet enseignement est conforme aux définitions de vices cachés que l’on retrouve aux articles 1522 C.c.B.C et 1726 C.c.Q. Un défaut qui ne rendrait aucunement l’immeuble impropre à l’usage auquel on le destine ou qui ne diminuerait pas son utilité de façon significative ne saurait être qualifié de vice caché.

….

Il n’est pas nécessaire cependant que des dégâts importants se soient produits pour que la présence de pyrite soit considérée comme un vice caché. En somme l’acquéreur n’a pas à attendre que la pyrite ait fait un maximum de ravages pour exercer son recours. Si des dommages importants n’ont pas été causés, il incombera à l’acheteur de faire la preuve d’une menace ou d’une probabilité réelle de désordres importants.

[93]            Ainsi donc, puisque aucune menace ou probabilité réelle de désordre important ne fut mis en preuve, les prétentions des Requérants à l’effet que la présence de granulats sulfureux dans le béton des murs des fondations constitue un vice caché doivent être rejetée car n’est qu’une crainte suggestive, renforcée par le fait que le solage du frère fut démolie et reconstruit. Mais, la teneur en soufre était pour ce cas beaucoup plus grande.

[94]            Mais, il reste qu’il y a des infiltrations d’eau par les murs des fondations.

[95]            Cela constitue un vice caché[20] qui doit être corrigé;

[96]            L’exclusion du paragraphe 12 2° du Règlement ne peut recevoir d’application puisque ce ne sont pas les fissures qu’il faut corriger, mais l’infiltration d’eau par ces fissures;

C- Frais d’arbitrage

[97]            Pour ce qui est des frais d’arbitrage, les articles 21 et 23 du Règlement  prévoient :

« 21 Les coûts de l’arbitrage sont partagés à part égales entre l’administrateur et l’entrepreneur lorsque ce dernier est le demandeur.

Lorsque le demandeur est le bénéficiaire, ces coûts sont à la charge de l’administrateur à moins que le bénéficiaire n’obtienne gain de cause sur aucun des aspects de sa réclamation, auquel cas l’arbitre départage ces coûts.

23 Les dépenses effectuées par le bénéficiaire, l’entrepreneur et  l’administrateur pour la tenue de l’arbitrage sont supportées par chacun d’eux »

[98]            Vu mes conclusions, les coûts du présent arbitrage devront donc être à la charge de l’Administrateur;

CONCLUSION

POUR CES MOTIFS, JE :

[99]            ACCUEILLE, EN PARTIE, la contestation des Bénéficiaires;

[100]       DÉCLARE que les dalles sur le sol du garage, ainsi que du sous-sol devront être réparés;

[101]       DÉCLARE que les infiltrations d’eau à travers les murs des fondations du bâtiment des Requérants, aux endroits des fissures, devront être corrigées;

[102]       DÉCLARE que les coûts du présent arbitrage sont à la charge de l’Administrateur.

 

 

 

__________________________________

Me René Blanchet, ingénieur-avocat

 

          Arbitre

 



[1] Cahier des pièces émis par l’Administrateur, onglet 2

[2] Cahier des pièces, onglet 3

[3] Cahier des pièces, onglet 7

[4] Pièce R-1

[5] Pièce R-2

[6] Pièce R-3

[7] Cahier des pièces, onglet 6

[8] Pièce R-4

[9] Pièce R-5

[10] Cahier des pièces, onglet 8

[11] Rapport du 31 janvier 2004, pièce R-4

[12] Conclusions du rapport, page 4 de l’onglet 6 du cahier des pièces

[13] Rapport du 20 septembre 2004, paragraphe 5 de l’onglet 6 du cahier des pièces

[14] Rapport de M. Denis Roy, 26 mai 2005, page 7, pièce R-5

[15] Creatchman c. Belcourt Construction, 1976 CS 614 ; Immeuble Maude c. Farazli, JE91-1264 (CA); Charlebois c. Cadieux, JE04-762; etc…

[16] Girard c. Larose, REJB00-17359

[17] Villeneuve c. Beaudry, 2005 CanLII 6547

[18] Pageau c. Dupuy, 2008 QCCS 3197 (CanLII)

[19] Petit c. Ricard, EYB 2007-123771 (CS); Lapointe c. Ferron, REJB 2001-25448 (CQ); Demers c. 9079-6905 Québec Inc. (Pyritexpertise), AZ-50389917 (CQ)

[20] Plotnick c. Bartos, 1961 CS 7 ; Bourque c. Gladu, 1977 CA 2; Laurier Vachon c. Girard, 1968 BR 497