CANADA PROVINCE DE QUÉBEC DISTRICT DE MONTRÉAL Centre canadien d’arbitrage commercial (CCAC)
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ARBITRAGE
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Entre |
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SYNDICAT DE LA COPROPRIÉTÉ DU 4880 RUE BEAUBIEN EST, MONTRÉAL, QUÉBEC |
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Bénéficiaire |
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c. |
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9036-7236 QUÉBEC Inc. (LES DÉVELOPPEMENTS HÉRITAGE) |
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Entrepreneur |
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-et- |
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LA GARANTIE DES BÂTIMENTS RÉSIDENTIELS NEUFS DE L’APCHQ INC. |
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No dossier du CCAC : |
S09-070101-NP |
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No dossier de l’Arbitre : |
12 913-28 |
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SENTENCE ARBITRALE |
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Arbitre : |
Me Jeffrey Edwards |
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Pour le Bénéficiaire : |
Monsieur Sébastien Corbeil |
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Pour l’Entrepreneur : |
Monsieur Charles Scalia, président |
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Pour l’Administrateur : |
Me Luc Séguin Savoie Fournier |
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Date de la visite et de l’audience :
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Le 16 novembre 2009 |
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Lieu de l’audience : |
4880, rue Beaubien Est, unité 7 Montréal, Québec |
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Date de la décision : |
Le 14 décembre 2009
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Après avoir examiné la preuve et les pièces, visité les lieux, entendu les parties ET leurs témoins, le tribunal d’arbitrage procèDE à rendre sa décision comme suit : |
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1. nature de la demande d’arbitrage, procédures et chronologie
[1] Le Tribunal d’arbitrage est saisi d’une demande d’arbitrage du Bénéficiaire par rapport à certains vices allégués affectant les parties communes du bâtiment en litige.
[2] Selon l’Entrepreneur, la réception des parties communes a eu lieu le 10 mai 2005. L’Entrepreneur produit une déclaration de réception du bâtiment datée du 10 mai 2005 (Pièce A-2). Cependant, la preuve est claire à l’effet que le Bénéficiaire était encore sous le contrôle de l’Entrepreneur à cette date. En effet, la portion concernant la « Déclaration du Syndicat des copropriétaires » de la Pièce A-2 a été signée par le représentant de l’Entrepreneur.
[3] L’Administrateur, dans sa décision (Pièce A-7) datée du 9 décembre 2008 (« Décision ») maintient la date du 10 mai 2005 comme étant la date de réception qui marque le point de départ des garanties prescrites par le Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs[1] (« Règlement »).
[4] L’Administrateur a principalement décidé pour cette raison que les diverses réclamations pour des malfaçons ont été faites hors délai par rapport aux garanties prescrites. Le 7 janvier 2009, le Bénéficiaire a demandé l’arbitrage (Pièce A-8) de la Décision.
[5] L’argument principal du Bénéficiaire est que le transfert du contrôle du Syndicat de copropriété de l’Entrepreneur aux copropriétaires n’a eu lieu que le 5 décembre 2006. À cet effet, le Bénéficiaire a produit une Déclaration modificative déposée auprès du Registraire des entreprises du Québec (Pièce D-3) datée et signée par l’Entrepreneur le 30 novembre 2006 et déposée le 5 décembre 2006. Il est important de noter que l’Entrepreneur a envoyé le 10 août 2006 un avis de fin des travaux (Pièce A-3) aux propriétaires individuels et à l’Administrateur même si le transfert du contrôle du Syndicat n’avait pas été alors officiellement fait.
[6] Selon le tribunal d’arbitrage, il n’y a pas de doute que la date utilisée par l’Administrateur aux fins de la réception des parties communes dans la Décision (Pièce A-7) est mal fondée.
[7] Selon l’article 25.1, alinéa 2 du Règlement, la réception des parties communes n’a pas pu avoir lieu avant que le Syndicat de copropriété ne soit plus sous le contrôle de l’Entrepreneur.
[8] Au terme de l’enquête et de la visite des lieux dans le cadre de l’audition d’arbitrage, et avant le début de l’argumentation, l’Administrateur a reconnu que la Décision était mal fondée à ce sujet, ce qui a pour effet de proroger en l’espèce la date de début de l’application des garanties en vertu du Règlement. Cette révision implique nécessairement que certaines des demandes rejetées au motif qu’elles étaient tardives sont maintenant recevables et bien fondées.
[9] Après discussion entre les parties (Administrateur, Bénéficiaire et Entrepreneur), celles-ci se sont entendues afin de fixer la date de la réception des parties au 5 décembre 2006. Il reste que, malheureusement, il n’y a jamais eu un réel et véritable examen des parties communes par un représentant du Bénéficiaire et durant lequel celui-ci aurait pu dénoncer des déficiences ou malfaçons apparentes. Nous n’avons d’autre choix que de procéder plutôt par fiction juridique à cet égard. Il en résulte une certaine ambiguïté par rapport au moment précis auquel nous pouvons dire que le Syndicat avait l’obligation de dénoncer une malfaçon ou un vice apparent. Dans cette situation, le Tribunal doit prendre en considération tous les facteurs pertinents pour éviter une inéquité, tant pour le Bénéficiaire que pour l’Entrepreneur. Il va de soi que tout vice dénoncé par écrit par le Syndicat de copropriété avant la réception des parties communes protège le Syndicat par rapport à la malfaçon apparente ou le vice apparent. Cependant, l’absence de la capacité, tant juridique que factuelle, pour le Syndicat à agir avant la prise de contrôle du Syndicat fait en sorte qu’il serait inéquitable d’opposer automatiquement au Syndicat de copropriété son inaction avant le moment de transfert de contrôle, avec tous ses effets juridiques, en l’absence d’un examen, en bonne et due forme, des parties communes par un professionnel retenu à cette fin, ou son équivalent, par le Syndicat de copropriété.
2. ANALYSE ET DÉCISION
[10] Le Tribunal d’arbitrage procède, à l’examen de chacune des demandes contenues dans les points d’arbitrage pour examiner si elles sont recevables ou non en vertu du plan de garantie.
Point 1 : Peinture de la cage d’escalier intérieure
[11] Il est admis que plusieurs murs intérieurs de la cage d’escalier n’ont pas été peints. Seule la peinture d’apprêt fut appliquée. L’Administrateur rejette la responsabilité à ce sujet au motif que la seule dénonciation qui lui fut envoyée à ce sujet est datée du 21 mai 2008 (Pièce A-4). L'Administrateur estime qu’il aurait dû être avisé avant la réception des parties communes, car il s’agit de quelque chose d’apparent.
[12] Sébastien Corbeil, pour le Bénéficiaire, a produite une lettre (Pièce B-1) non datée mais qui doit avoir été envoyée, selon la preuve, au début du mois de mai 2007 qui mentionne l’existence de ce vice. Cependant, cette lettre n’a pas été envoyée à l’Administrateur. Par contre, la réponse de l’Entrepreneur, accusant réception de la Pièce B-1 et s’engageant à vérifier ce problème, datée du 22 mai 2007 (Pièce B-2) mentionne qu’il a été envoyée à l’Administrateur en copie conforme. Cette information n’a pas pu être validée par l’Administrateur. Celui-ci invoque également que la réception de cette réponse avec ces termes vagues, ne peut pas constituer une dénonciation à l’Administrateur. Il reste que ce problème a clairement été dénoncé à l’Entrepreneur, et le Tribunal d’arbitrage n’a pas de doute que, si le Syndicat avait eu une opportunité normale d’examen pour pouvoir faire une énumération des déficiences de parachèvement, avec le formulaire obligatoire transmis à l’Administrateur, ce problème aurait été mentionné sur la liste. Étant donné les circonstances factuelles en l’espèce et la présence d’un trou ou d’un écart réglementaire, le Tribunal d’arbitrage invoque l’article 116 du Règlement et la règle de l’équité en faveur des trois parties. Les coûts de ces travaux seront assumés par l’Entrepreneur et le Bénéficiaire, chacun pour moitié. Après que l’Entrepreneur aura transmis une soumission pour ces travaux, et que celle-ci sera validée par l’Administrateur, le Bénéficiaire déposera chez l’Administrateur la moitié du coût de la soumission. Après que le travail soit réalisé et qu’il n’y a pas de demande d’arbitrage ou de contestation concernant ces travaux, l’Administrateur versera le montant reçu à l’Entrepreneur.
Point 2 : Tâches de mortier sur le revêtement de brique
[13] Les faits concernant la dénonciation de ce problème sont les mêmes que ceux décrits au Point 1 ci-haut. Ainsi, la même solution s’impose et le Tribunal d’arbitrage ordonnera aux parties de suivre les mêmes modalités pour réaliser les travaux requis.
Point 3 : Peinture des balcons et des mains courantes extérieures en métal
Point 4 : Peinture de la porte d’entrée principale - unité 5
[14] Au terme de l’enquête, le représentant de l’Administrateur, Monsieur Jocelyn Dubuc, de même que le représentant de l’Entrepreneur, ont déclaré qu’étant donné le changement intervenu quant à la date de réception des parties communes, l’Entrepreneur accepte de réaliser ces travaux. (Points 3 et 4)
Point 5 : Infiltration d’eau par le drain du plancher - unité 1
Point 6 : Infiltration d’eau à l’intérieur de la garde de robe - unité 1
[15] Le représentant du Bénéficiaire, Sébastien Corbeil, a annoncé que le Bénéficiaire abandonne ces deux points. (Points 5 et 6)
Point 7 : Infiltration d’eau par les portes jardins avant et isolation desdites portes - unité 5
[16] Selon le témoignage non contredit du copropriétaire de l’unité 5, les portes jardins avant laissent infiltrer de l’air et la porte droite ne s’ouvre pas. De plus, la porte patio arrière laisse l’air s’infiltrer.
[17] Après l’enquête et la visite des lieux, et lors des plaidoiries, les représentants de l’Entrepreneur et de l’Administrateur ont déclaré qu’ils reconnaissent le bien fondé et la recevabilité de ces points et acceptent de réaliser les travaux correctifs requis.
Point 8 : Égratignures sur une fenêtre de la chambre des maîtres - côté extérieur
[18] Tous admettent l’existence de ce problème et la présence d’égratignures inacceptables sur la fenêtre. Les égratignures sont sur le côté extérieur de la fenêtre. Le vice nous paraît grave et nous sommes surpris de voir qu’il n’est pas encore réglé. Il a été dénoncé à l’Entrepreneur par la lettre du mois de mai 2007 (Pièce B-1) dans les termes qui suivent :
« Unit 5 - Master bedroom window is scratched from the outside and was promised to be changed a few months after possession. »
[19] Dans sa lettre du 22 mai 2007 (Pièce B-2), l’Entrepreneur a nié la responsabilité et a envoyé une copie conforme à l’Administrateur.
[20] Selon le témoignage de l’occupant de l’unité 5, Madame Papagianis, l’Entrepreneur se serait engagé il y a longtemps à remplacer la partie endommagée de la fenêtre. Étant donnée que les égratignures sont sur le côté extérieur de la fenêtre, et que la fenêtre est au deuxième étage, il nous paraît clair que le dommage n’a rien à avoir avec l’occupant de l’unité et relève plutôt d’un vice d’origine ou d’une erreur lors de l’installation de la fenêtre. Dans les six (6) mois de la réception fictive des parties communes, par sa lettre du 21 mai 2008 (Pièce A-4a) à l’Entrepreneur, cette fois avec copie conforme à l’Administrateur, le Bénéficiaire rappelle l’existence de ce problème non encore résolu dans les termes suivants :
« Problem reported and acknowled (sic) on May 22th 2007 not yet resolved.
- Master bedroom window is scratched from the exterior. It is impossible to scratch the window from the outside as it is on the second floor on the property. This is a defect from installation as per our previous letter. »
[21] Considérant l’absence d’une opportunité normale par le Bénéficiaire de détailler, lors de la réception des parties communes, les déficiences et malfaçons des travaux reçus et l’échange des lettres mentionnées, les faits passés, incluant l’engagement de l’Entrepreneur de procéder aux travaux correctifs, la responsabilité contractuelle patente de l’Entrepreneur pour un dommage à la fenêtre lors de son installation et enfin, compte tenu de l’ensemble des circonstances, la possibilité pour le Tribunal de juger en équité selon l’article 116 du Règlement, le Tribunal d’arbitrage décide que ce vice doit être couvert par la garantie en vertu du Règlement et ordonnera à l’Entrepreneur de réaliser les travaux requis.
3. FRAIS D'arbitrage
[22] Étant donné que le Bénéficiaire a eu raison de porter la décision de l’Administrateur en arbitrage, ce dernier devra payer les coûts de l’arbitrage.
PAR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL D’ARBITRAGE :
ACCUEILLE en partie la demande d’arbitrage;
ORDONNE à l’Entrepreneur de réaliser, selon les règles de l’art, les travaux correctifs énoncés aux paragraphes 11, 12, 13, 17 et 21 de la présente sentence arbitrale, selon les modalités qui y sont précisées, dans les trente (30) jours de la réception de la présente sentence arbitrale;
À DÉFAUT par l’Entrepreneur de réaliser les travaux énoncés dans le délai stipulé, ORDONNER à l’Administrateur de les réaliser selon les mêmes modalités, dans les trente (30) jours suivants;
Tenir compte, dans le calcul de tout délai de réalisation des travaux correctifs, des conditions climatiques pour réaliser les travaux saisonniers selon les règles de l'art;
ORDONNER à l’Administrateur de payer les frais d’arbitrage découlant de la présente demande d’arbitrage.
(s) Me Jeffrey Edwards
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Me Jeffrey Edwards, arbitre |
Copie conforme
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Me Jeffrey Edwards, arbitre