ARBITRAGE

En vertu du Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs

(Décret 841-98 du 17 juin 1998, tel qu’amendé, c. B-1.1, r.0.2, 

Loi sur le bâtiment, Lois refondues du Québec (L.R.Q.), c. B-1.1, Canada) Groupe d’arbitrage Juste Décision – GAJD

ENTRE

SERGE LESSARD Bénéficiaire

Et

ARSENAULT CONSTRUCTION & FILS INC.

Entrepreneur

Et

GARANTIE CONSTRUCTION RÉSIDENTIELLE (GCR)

Administrateur

Nos dossiers / Garantie 

:

160470-2462, 2892, 4181 et 4615

No dossier / GAJD 

:

20200412

No dossier / Arbitre 

:

35304-41

 

 

SENTENCE ARBITRALE

Arbitre

:

Me Pierre Brossoit

Pour le Bénéficiaire

:

Serge Lessard

Pour l’Entrepreneur

:

Me François-Pierre Laforest

Pour l’Administrateur 

 

Me Nancy Nantel

Dates d’audience

:

1er, 2 juin 2021 et 9 et 10 mars 2022

Lieu les 1er et 2 juin 2021

:

[...], Cap-Santé et à l’Hôtel Alt au 1200 avenue Germain des Prés, Québec

Lieu les 9 et 10 mars 2022

:

En visioconférence Zoom

Immeuble concerné 

:

[...], Cap-Santé

Date de la décision

:

Le 18 juillet 2022

LES PIÈCES

[1]                Le Bénéficiaire a produit un cahier de pièces de 612 pages. 

[2]                L’Entrepreneur a produit les pièces suivantes :

 E-1:  Rapport d’expertise de M. Arthur De Coux daté du 21 mai 2021;

 E-2:  Curriculum vitae de M. Arthur De Coux;

 E-3:  Courriel de Lortie daté du 11 avril 2019;

 E-4:  Rapport d’expertise de Technorm daté du 7 janvier 2020;

 E-5:  Courriel de M. Faucher de l’APCHQ daté du 23 septembre 2019;

 E-6:  Document intitulé « Livraison maison Serge Lessard »;

 E-7:  Plans datés de novembre 2018;

 E-8:  Facture de Matériaux Audet pour l’achat de la laine datée du 4 janvier 2019;

 E-9:  Vidéo de l’extérieur de la résidence du Bénéficiaire;

E-10: Lettre du 24 janvier 2019 de Bernard Arsenault re : travaux supplémentaires entente No. I19.

[3]                L’Administrateur a produit un cahier de pièces de 402 pages.

LES TÉMOINS ENTENDUS LORS DE L’AUDIENCE

[4]                Pour le Bénéficiaire :

      Serge Lessard

      José Calderone, Ville de Cap Santé

      Michel Chamberland, ing. 

      Robert Cardinal, Cardinal Habitat Inspection

[5]                Pour l’Entrepreneur :

      Hugo Trottier-Arsenault, Arsenault Construction & Fils inc.

      Simon Julien, Arsenault Construction & Fils inc.

      Arthur de Coux, ing., Technorm

[6]                Pour l’Administrateur :

      Martin Bérubé, conciliateur

      Mohammad Hosseini, ing., Ph. D., Dr, Fondasol inc.

LES FAITS

[7]                Le 21 septembre 2018, un contrat (A-1) intervient entre le Bénéficiaire et l’Entrepreneur, pour la construction d’un immeuble résidentiel au coût de 183 960 $ sur un terrain dont est propriétaire le Bénéficiaire et sis au [...], Cap-Santé, Québec (l’« Immeuble »).

[8]                Ce même jour, intervient entre le Bénéficiaire et l’Entrepreneur un contrat de garantie (A3) comme exigé par le Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs (le « Règlement »).

[9]                L’Immeuble a été construit par l’Entrepreneur selon les plans fournis par le Bénéficiaire et préparés pour son compte par le technologue Ghislain Bertrand (E-7).

[10]            Le 6 novembre 2020, Martin Bérubé, conciliateur pour l’Administrateur, rend une décision (la « Décision 1 », A-25) qui fait suite à quatre (4) dénonciations du Bénéficiaire, datées respectivement du 10 avril (A-5) et 12 juillet (A-7) 2019 et du 27 mai (A-10) et 4 août (A-13) 2020.

[11]            Le 18 novembre 2020, le Bénéficiaire demande l’arbitrage (A-26) de certains items de la Décision 1.

[12]            Le 4 décembre 2020, l’Entrepreneur demande également l’arbitrage de certains items de la Décision 1.

[13]            Le 1er juin 2021 débute l’arbitrage par la visite de l’Immeuble en présence des parties et de l’arbitre soussigné et se poursuit à une salle de conférence de l’Hôtel Alt de Québec. Le 2 juin 2021 se termine l’audition d’arbitrage.

[14]            Lors de l’audition, le Bénéficiaire fait part que certains items dénoncés n’ont pas fait l’objet d’une décision de M. Bérubé.

[15]            Certains de ces items étant liés à d’autres items de la Décision 1 et dont le Bénéficiaire demande l’arbitrage, le Tribunal accepte la demande des parties de suspendre la sentence arbitrale des items ci-après énumérés :

         Item 12 - Implantation du bâtiment (12-A et 12-B);

         Item 24 - Infiltrations d’eau dans le vide sous-toit;

         Item 27 - Rehaussement des deux portes du garage;

         Item 33 - Hall d’entrée extérieur trop bas;

         Item 34 - Fenestration du sous-sol; 

         Item 35 - Marche absente au balcon de béton avant;

         Item 37- Terrassement; et

         Item 38 - Aménagement extérieur.

[16]            Le 26 août 2021, l’arbitre soussigné rend une sentence arbitrale qui dispose de la demande d’arbitrage du Bénéficiaire et de l’Entrepreneur, sauf quant aux items laissés en suspend et énumérés au paragraphe précédent.

[17]            Le 14 octobre 2021, M. Bérubé rend une décision supplémentaire (la « Décision 2 ») sur les items dénoncés par le Bénéficiaire, mais non traités à la Décision 1.

[18]            Le Bénéficiaire demande l’arbitrage des items ci-après énumérés de la Décision 2 : 

          Item 45 - Revêtement de fibrociment (selon les plans);

          Item 46 - Fascia d’aluminium en lieu et place du fibrociment;

          Item 48 - Fenestration du sous-sol (dégagement extérieur);

          Item 49 - Balcon du hall d’entrée;

          Item 50 - Nivellement du terrain;

          Item 51 - Isolant devant être remplacé et ajouté; et

          Item 52 - Niveau du plancher de garage.

[19]            Les 9 et 10 mars 2022 a lieu l’audition de la demande d’arbitrage des items mentionnés au paragraphe précédent.  

LA DEMANDE D’ARBITRAGE DU BÉNÉFICIAIRE

Item 12 - Implantation du bâtiment

[20]            À l’entrée de l’Immeuble de type « split level » se trouve un palier (photos A-13) avec un garde-robe. De ce palier, on descend au sous-sol où l’on monte quelques marches pour accéder à une pièce divisée où se situent la cuisine, la salle à manger, le salon, une chambre à coucher et une salle de bain.

[21]            Selon l’ingénieur Michel Chamberland (« M. Chamberland »), l’expert en fondation du Bénéficiaire, le rez-de-chaussée de l’Immeuble ne respecte pas la hauteur minimum exigée par rapport au niveau de la rue selon l’article 6.3.3.2 du Règlement de zonage 14-204 (le « Règlement ») de la Ville qui se lit comme suit :

« Niveau du plancher du rez-de-chaussée

Le plancher du rez-de-chaussée de tout bâtiment principal doit être à une hauteur minimum de 50 centimètres par rapport au niveau fini de la rue. Lorsque la rue est en pente, le calcul de la hauteur du rez-dechaussée se fait en prenant la hauteur moyenne au centre de la fondation par rapport au niveau moyen de la rue, vis-à-vis de la fondation. »

[22]            Pour les fins de sa vérification du respect de cet article, M. Chamberland détermine le palier comme étant le « rez-de-chaussée » de l’Immeuble.

[23]            Tenant compte de ce point de référence (le palier), M. Chamberland conclut à son rapport (A-23) que la pente du terrain de l’Immeuble est de moins de 1% avec la rue. La seule solution possible pour corriger ce défaut de construction et sa conséquence, la possibilité d’infiltration d’eau, est le rehaussement « d’environ 2 ̍ » de la fondation de l’Immeuble.

[24]            L’Administrateur et l’Entrepreneur contestent que le palier soit le rez-de-chaussée de l’Immeuble aux fins de l’application de l’article 6.3.3.2 précité du Règlement. Ils réfèrent le Tribunal à la définition de « rez-de-chaussée » du Règlement qui se lit comme suit :

« Rez-de-chaussée :

Étage d’un bâtiment situé au-dessus de la cave ou du sous-sol, à défaut sur le sol et adjacent à l’entrée principale du bâtiment. Lorsque le soussol est déterré de 1,5 mètre et plus du côté de la rue, ce dernier est considéré comme le rez-de-chaussée. »

[25]            L’Entrepreneur s’appuie également sur l’avis reçu de la Ville le 7 juin 2019 (E-5) qui confirme que le règlement 6.3.3.2 de la Ville au sujet du niveau de hauteur à respecter concerne uniquement « la hauteur entre la rue et le plancher du rez-de-chaussée et que le niveau de l’entrée « split level » et de la dalle du garage n’est pas assujetti à cette règle ».

[26]            Le 7 janvier 2020, à son rapport (E-11) adressé à la compagnie d’assurance IndemniPro inc., l’ingénieur Arthur de Coux de Technorm (« M. de Coux ») commente comme suit le rapport de M. Chamberlain concernant son application du règlement 6.3.3.2 :

« Par ailleurs, l’article 6.3.3.2 du règlement d’urbanisme de la municipalité de Cap-Santé exige bien que le plancher du rez-dechaussée soit 50 cm plus haut que la hauteur de la rue. Toutefois, le plancher de l’entrée (vestibule) ne se trouve pas au niveau du rez-dechaussée, mais bien quelques pieds plus bas. En effet, l’entrée se trouve sur le palier de l’escalier et le rez-de-chaussée se trouve environ 4 pieds (120 cm) plus haut. L’article 6.3.3.2 parle seulement du niveau du rez-de-chaussée, donc cet article est respecté selon nous. »

[27]            Tenant compte de la définition de « rez-de-chaussée » au Règlement, de l’opinion de M.

de Coux (E-11) et de l’avis de la Ville (E-5), le Tribunal est d’avis que le rez-dechaussée de l’Immeuble est l’espace occupé par la cuisine, la salle à manger, le salon, la chambre à coucher et la salle de bain et situé « au-dessus de la cave ou du soussol ».

[28]            Le Tribunal en conclut que le fondement des conclusions de M. Chamberland est erroné et l’item 12 de la réclamation du Bénéficiaire est rejeté.

[29]            La preuve prépondérante ne supporte pas non plus les fins souhaitées par le Bénéficiaire de rehausser l’Immeuble de deux (2) pieds, pour les motifs ci-après exposés.

[30]            Les plans de construction de l’Immeuble ont été préparés par le technologue (M. Bertrand) engagé par le Bénéficiaire et approuvés par la Ville. Aucun avis de nonconformité n’a été émis par la Ville en lien avec la construction de l’Immeuble.

[31]            Comme on peut le constater des photos prises par le Bénéficiaire (p. 59 à 62 et p. 65 à 69 de son cahier) et du plan de localisation de l’Immeuble (p.53 et 54), le terrain avant de la propriété du Bénéficiaire se termine à huit (8) mètres de l’Immeuble. De cette limite, et avant d’accéder à la rue, on retrouve une bande de quatre (4) mètres de largeur, propriété de la Ville de Cap-Santé (la « Ville »), composée d’un passage piétonnier et d’un fossé gazonné où la Ville a fait installer un drain de rive pour l’irrigation des eaux de pluie.  

[32]            Le 6 février 2020, l’Administrateur mandate l’ingénieur Mohamad Hosseini, Ph.D., DR, de Fondasol (« M. Hosseini ») pour effectuer une expertise géotechnique de drainage de l’Immeuble.

[33]            Le 5 août 2020, M. Hosseini remet à l’Administrateur son rapport (A-24).

[34]            M. Hosseini reprend tout d’abord l’extrait de la norme BNQ0605-500/2008 (la « Norme BNQ ») intitulé « Aménagement paysager à l’aide de matériaux inertes, dans un milieu urbain », qui requiert une pente minimale de 2% pour faciliter le drainage de surface. L’extrait de la Norme BNQ est ci-après retranscrit en partie :

« L’aménagement des terrains doit prévoir l’égouttement naturel des eaux de pluie ou de ruissellement selon la topographie du terrain vers la rue ou vers des systèmes d’évacuation existant [sic] et doit respecter les règlements municipaux (…). Une pente minimale de 1% est acceptable pour les surface [sic] lisse [sic]. Un terrain avec une surface irrégulière, notamment une surface gazonnée ou une surface pavée, doit avoir une pente minimale de 2% pour faciliter le drainage de surface. Selon la norme mentionnée : on doit prévoir donner au terrain les pentes nécessaires qui permettrons [sic] un écoulement naturel des eaux de surface vers des points de captation (par exemple, la rue). (…). »

[35]            Partant de cette norme, M. Hosseini a pris quatre (4) points distincts à partir de l’Immeuble et a calculé la pente du terrain jusqu’à la limite du terrain du Bénéficiaire.

[36]            Des quatre (4) points ci-après énumérés, M. Hosseini conclut à une pente de plus de 2% du terrain de l’Immeuble et donc conforme à la Norme BNQ :

      Vis-à-vis le mur gauche du garage : .................................................................... 2,6% Vis-à-vis le mur gauche de l’Immeuble : .............................................................. 2,4% Vis-à-vis du milieu de l’entrée principale : ............................................................ 3,7%

      Vis-à-vis du mur droit de l’Immeuble : .................................................................. 4,3%

[37]            Selon M. Hosseini, la cause de l’accumulation d’eau en bordure du terrain de l’Immeuble est le fossé de drainage de la Ville qui n’est pas construit selon les règles de l’art pour évacuer rapidement les eaux de ruissellement.

[38]            Prenant pour acquis l’affirmation de M. Chamberland à son rapport (A-23) d’une pente inférieure à 1% du niveau du plancher du garage de l’Immeuble à la rue, M. de Coux conclut à son rapport du 7 janvier 2020 (E-11) que « la gestion des eaux de surface est déficiente et pourrait entraîner des infiltrations d’eau dans la résidence ».

[39]            Il suggère toutefois l’utilisation de tranchées drainantes et de drains pour éloigner les eaux de surface de l’Immeuble plutôt que la solution radicale de M. Chamberland de rehausser les fondations « d’environ 2 ̍ ».

[40]            Le 21 mai 2021, M. de Coux produit un second rapport, cette fois pour le compte de l’Entrepreneur (AC-1) et après avoir pris connaissance du rapport de M. Hosseini. Sans se prononcer, M. De Coux reprend la conclusion de M. Hosseini que le drainage autour de l’Immeuble est adéquat, mais que le drainage du fossé doit être corrigé.

[41]            L’entrepreneur Rochette Excavation (« Rochette ») qui a exécuté les travaux de voirie pour la Ville conseille pour sa part d’installer un caniveau devant la porte de garage afin de rediriger les eaux et de maintenir les grilles du caniveaux propres et exemptes de neige (p. 93). 

[42]            Un puits sec temporaire a été installé par Rochette, ce qui a permis de régler l’accumulation d’eau devant la partie droite de l’Immeuble (p. 94).

[43]            La visite de l’Immeuble et les nombreuses photos produites par le Bénéficiaire convainquent également le Tribunal de favoriser les conclusions de l’expert Hosseini :

a)      Les photos produites par le Bénéficiaire ne montrent aucune accumulation d’eau sur le terrain de l’Immeuble (photos p. 59 à 69);

b)      L’eau accumulée sur le passage piétonnier du terrain de la Ville termine sa route dans le fossé de drainage de la Ville (photos p. 59 à 62), ce qui confirme la présence d’une pente négative de l’Immeuble au passage piétonnier et du passage piétonnier vers son point de captation (le fossé de drainage); 

c)      L’effet de « piscine » créé par l’accumulation d’eau dans le fossé de drainage de la Ville (p. 59 à 62) laisse paraitre une évacuation des eaux à cet endroit déficiente en raison notamment de la présence d’un sol sablonneux trop imperméable;

d)      Le Bénéficiaire a produit une photo (reproduite à la p. 73, A-24) où l’on constate la présence de glace sur le terrain du Bénéficiaire, laissant présumer l’existence d’une pente négative du terrain de l’Immeuble ou du moins insuffisante pour irriguer les eaux naturelles. Le Tribunal partage plutôt l’avis de M. Hosseini que la formation de glace est due à la mauvaise performance du fossé de drainage qui n’est pas en mesure de drainer à temps les eaux de ruissellement efficacement, tel que le démontre d’ailleurs les photos p. 59 à 69.

[44]            De plus, aucune infiltration à l’entrée de l’Immeuble n’a été rapportée par le Bénéficiaire depuis la construction de l’Immeuble.

[45]            L’Entrepreneur doit toutefois exécuter les travaux relatifs à l’étanchéité et la protection contre l’humidité du joint froid des murs de fondation latéral gauche et avant de l’Immeuble, tel qu’accordé à la Décision 1. À l’audition, M. Hosseini et M. De Coux ont précisé que ces travaux doivent être exécutés au niveau de la résidence et non pas au niveau du garage.

Item 24 - Infiltrations d’eau dans le vide sous-toit et Item 51 - Isolant devant être remplacé et ajouté

[46]            En décembre 2018, le Bénéficiaire constate des infiltrations d’eau dans l’entretoit et les murs de l’Immeuble et du garage.

[47]            L’infiltration d’eau est causée par une mauvaise imperméabilisation de l’Immeuble par l’Entrepreneur avant le congé du temps des fêtes de 2018, alors que la construction de l’Immeuble n’est pas encore terminée.

[48]            M. Chamberland mentionne à son rapport du 28 mai 2019 (A-23) les infiltrations d’eau au niveau de l’entretoit et la laine détrempée constatée aux photos qui lui ont été remises par le Bénéficiaire, mais ne propose aucune solution pour corriger la situation.

[49]            Le 7 janvier 2019, à la demande de l’Entrepreneur, Guy Simard et Mathieu Fauché de l’APCHQ visitent l’Immeuble.

[50]            Le 23 septembre 2019, M. Fauché résume dans un courriel (E-5) les recommandations de l’APCHQ pour remédier à la situation constatée et ci-après retranscrites :

« Sur place nous avons constaté que certains murs étaient ouverts, qu’il y avait des morceaux de laine de retirés et des ventilateurs pour permettre l’assèchement des matériaux (ce qui avait été recommandé lors d’un appel téléphonique précédant cette visite). »

[51]            L’Entrepreneur remplace la laine minérale mouillée et assèche à l’aide d’un ventilateur la laine humide et le mur.

[52]            Le Bénéficiaire demande plutôt que soit remplacée toute la laine minérale asséchée, par crainte d’une perte de capacité isolante de l’Immeuble.

[53]            Le Bénéficiaire réfère le Tribunal aux recommandations de l’inspecteur en bâtiment Robert Cardinal (« M. Cardinal ») à son rapport du 18 mai 2020 (A-22).

[54]            À l’audition, M. Cardinal confirme toutefois ne s’être fié qu’aux photos du Bénéficiaire et n’a pas vérifié les travaux effectués par l’Entrepreneur.

[55]            À la Décision 1, M. Bérubé conclut que les travaux de l’Entrepreneur sont acceptables et conformes aux règles de l’art.

[56]            Le Bénéficiaire n’a depuis constaté aucune problématique en lien avec les travaux exécutés par l’Entrepreneur en 2019.

[57]            Le Tribunal conclut de la preuve prépondérante à la bonne exécution des travaux de l’Entrepreneur. Le Tribunal rejette ainsi les items 24 et 51 de la réclamation du Bénéficiaire.

Item 27 - Rehaussement des deux portes du garage et Item 52 - Niveau du plancher du garage

[58]            Le Bénéficiaire soumet que lors des travaux de l’Entrepreneur pour rehausser de huit (8) pouces les murs de fondation, il n’a pas relevé le niveau de la porte de garage avant et de la porte d’accès sur le côté gauche du garage.

[59]            Selon le Bénéficiaire, la situation empêche l’éloignement adéquat des eaux de surface de l’Immeuble.

[60]            Le Bénéficiaire réfère le Tribunal au point 7 du rapport A-22 de M. Cardinal qui mentionne :

« Vu la faible hauteur du niveau de plancher de la dalle de béton du garage en lien avec le niveau du terrain, la faible pente de terrain accumule l’eau en été et laisse les véhicules pris dans la glace en hiver. »

[61]            M. Cardinal a fait l’inspection de l’Immeuble le 18 mai 2020. M. Cardinal n’a pas constaté ces accumulations d’eau, il ne fait que rapporter les observations du Bénéficiaire.

[62]            M. Cardinal conclut comme suit à son rapport des observations reçues du Bénéficiaire :

« 7 – La pente du terrain devra être modifiée en façade afin de [sic] l’eau quitte efficacement le terrain. »

[63]            M. Cardinal n’a cependant pas calculé la pente du terrain de l’Immeuble.

[64]            L’expert Hosseini a calculé la pente du terrain devant le garage et a conclu qu’elle était de 2,6%, soit plus élevée que la Norme BNQ de 2%.

[65]            Quant à l’accumulation d’eau constatée à l’avant de l’Immeuble, et comme le Tribunal en a conclu à sa décision portant sur l’item 12, elle est due à la mauvaise évacuation des eaux du drain de fossé de la Ville et non à une trop faible pente du terrain.

[66]            De plus, en période non hivernale, aucune des nombreuses photos produites par le Bénéficiaire ne montre une accumulation d’eau sur la propriété du Bénéficiaire, que ce soit du côté gauche du garage (porte d’accès) ou à l’avant du garage.

[67]            Conséquemment, les items 27 et 52 de la réclamation du Bénéficiaire sont rejetés.

Item 33 - Hall d’entrée extérieur trop bas

[68]            Le Bénéficiaire demande le rehaussement de l’Immeuble afin d’éloigner les eaux de surface des fondations.

[69]            Comme le Tribunal en a décidé à l’item 12, l’Immeuble respecte la Norme BNQ d’une pente de plus de 2% du terrain. L’expert Hosseini a calculé à 3,7% la pente de terrain depuis le milieu de l’entrée principale.

[70]            Le Bénéficiaire affirme à son plan d’argumentation (p. 18) que les « experts (APCHQ, Chamberland, Cardinal, Technorm) qui s’entendent et affirment que la hauteur de la fondation est trop basse par rapport à la rue. » Cet allégué n’est pas conforme à la réalité.

[71]            M. Chamberland a pris erronément comme point de référence le palier plutôt que le rezde-chaussée de l’Immeuble, ce qui fausse sa conclusion que la pente de terrain est de moins de 1%. Son point de référence est erroné.

[72]            M. De Coux (Technorm) n’a fait aucun calcul de pente du terrain de l’Immeuble. Il a conclu à son rapport que « la gestion des eaux de surface est déficiente et pourra entraîner des infiltrations d’eau dans la résidence. », mais en tenant pour vrai la conclusion erronée de M. Chamberland d’une pente inférieure de 1% du terrain de l’Immeuble.

[73]            De plus, le Bénéficiaire passe sous silence l’opinion de M. De Coux concernant la conclusion de M. Chamberland de rehausser les fondations de l’Immeuble :

« Selon nous, il existe des solutions moins radicales que le rehaussement des fondations. En effet, l’aménagement du terrain peut être retravaillé pour éloigner les eaux de surface de la résidence. L’utilisation de la tranchée drainante et de drain serait alors nécessaire. »

[74]            M. Cardinal n’a fait aucun calcul de pente et il recommande de se référer au rapport d’expertise de M. Chamberland. L’opinion de M. Cardinal n’a donc aucune valeur.

[75]            Aucun représentant de l’APCHQ n’a été mandaté pour calculer la pente du terrain de l’Immeuble. En fait, le Bénéficiaire réfère le Tribunal à un document d’information où l’on ne présente que des conseils pour favoriser le drainage de surface.

[76]            Pour le Tribunal, seul l’expert Hosseini a présenté un rapport (A-24) éclairant et convainquant sur les conditions de sol et de drainage des eaux de surface et souterraines de l’Immeuble et le Tribunal adhère à la conclusion de son rapport (p. 11) :

« Compte tenu des bonnes conditions de drainage de surface et de drainage souterrain de la résidence à l’étude, la solution de soulèvement proposée par M. Chamberland n’a aucune justification géotechnique. »

[77]            Le Tribunal rejette ainsi l’item 33 de la réclamation du Bénéficiaire.

Item 34 - Fenestration du sous-sol et item 48 - Fenestration du sous-sol (dégagement extérieur - margelles)

[78]            Le Bénéficiaire soumet que les trois (3) fenêtres du sous-sol ne respectent pas les dimensions convenues au Contrat (A-1) et ne sont d’ailleurs pas similaires à celles installées à la maison modèle du Projet. De plus, l’installation des fenêtres ne suit pas les normes de sécurité de l’APCHQ.

[79]            L’Annexe (A-2) au Contrat (A-1) mentionne que des fenêtres de « 30″ coulissantes Energy Star » seront installées.

[80]            Les fenêtres installées par l’Entrepreneur ont 24″ (p. 277). L’Entrepreneur a donc manqué à son obligation contractuelle.

[81]            Le Tribunal accueille l’item 34 de la réclamation du Bénéficiaire et l’Entrepreneur doit changer les trois (3) fenêtres du sous-sol par des fenêtres de 48″ x 31″. L’Entrepreneur devra installer les trois (3) fenêtres du sous-sol à une distance du sol qui respecte les normes en vigueur.

[82]            Quant à l’item 48 - Fenestration du sous-sol (dégagement extérieur – margelles), il a fait l’objet de la Décision 1 de l’Administrateur. M. Bérubé écrit en effet comme suit à la page 20 de la Décision 1 (A-25) :

« L’administrateur exige également que l’entrepreneur procède à l’ajout de margelles à l’endroit des fenêtres du sous-sol afin de respecter les exigences de dégagement du mur de fondation par rapport au niveau du sol. »

[83]            La Décision 1 est exécutoire et l’Entrepreneur doit s’y conformer. Le Tribunal n’a pas juridiction pour statuer sur cet item.

Item 35 - Marches absentes au balcon de béton avant

[84]            Le Bénéficiaire demande la construction de trois (3) marches extérieures pour accéder à l’entrée principale à l’avant de l’Immeuble si le Tribunal accorde le rehaussement des fondations.

[85]            Le Tribunal ayant rejeté la réclamation du Bénéficiaire de rehausser les fondations, cet item est rejeté.

[86]            Le Bénéficiaire soumet cependant que l’annexe au Contrat signé le 21 septembre 2018 prévoit un « Perron de béton, 3 marches avant ». On ne retrouve cependant aucune marche au plan final du 28 novembre 2018 de M. Bertrand et envoyés par le

Bénéficiaire à l’Entrepreneur.

[87]            Il est par ailleurs surprenant que le Bénéficiaire n’ait pas dénoncé plus rapidement l’absence des trois (3) marches qu’il réclame aujourd’hui, alors qu’il est omniprésent durant la construction de l’Immeuble.  

Item 37 - Terrassement, Item 38 - Aménagement extérieur et Item 50 - Nivellement du terrain

[88]            Le Bénéficiaire réclame le nivelage du terrain de l’Immeuble.

[89]            Le Contrat (A-1) prévoit le « Nivelage du terrain avec terre en place ».

[90]            À la Décision 1, M. Bérubé rejette les items 37 et 38 et à la Décision 2 l’item 50.

[91]            S’agissant d’un ouvrage situé à l’extérieur de l’Immeuble, M. Bérubé rejette ces items en raison qu’ils sont exclus du Règlement (art. 12).

[92]            Le Tribunal partage l’avis de M. Bérubé et ces trois (3) items de la réclamation du Bénéficiaire sont rejetés. Le Bénéficiaire peut toutefois faire valoir ses droits contre l’Entrepreneur devant un tribunal de droit commun. Le Tribunal constate toutefois du vidéo (E-9) que les travaux semblent avoir été exécutés par l’Entrepreneur.

Item 45 - Disposition du fibrociment

[93]            En contravention de l’article 17 du Règlement, les parties n’ont pas procédé à la préréception de l’Immeuble.

[94]            Pour les motifs exposés à la Décision 1, le Tribunal a conclu que l’Entrepreneur est responsable du défaut de n’avoir pas procédé conjointement avec le Bénéficiaire à l’inspection préréception de l’Immeuble (art. 10.2 du Règlement).

[95]            Le 16 février 2019, le Bénéficiaire emménage à l’Immeuble.

[96]            Le 10 avril 2019, le Bénéficiaire dénonce à l’Entrepreneur 22 malfaçons apparentes, dont notamment l’item 45 - Disposition du fibrociment (A-5).

[97]            L’article 19.1 du Règlement stipule que le non-respect de la mise en œuvre de la garantie par le bénéficiaire ne peut lui être opposé lorsque l’entrepreneur manque à ses obligations prévues à l’article 17 du Règlement.

[98]            La preuve a démontré l’omniprésence du Bénéficiaire lors de la construction de l’Immeuble et sa nombreuse correspondance avec l’Entrepreneur parle d’elle-même et convainc le Tribunal que le Bénéficiaire aurait dénoncé à l’Entrepreneur l’item 45 au moment de l’inspection préréception de l’Immeuble n’eût été la faute de l’Entrepreneur d’y procéder conjointement avec le Bénéficiaire. Le Tribunal tient compte également du cours délai entre la date où le Bénéficiaire a emménagé et la date de sa dénonciation des malfaçons apparentes à l’Entrepreneur.

[99]            Dans les circonstances, le Tribunal considère le 10 avril 2019 (première des quatre (4) dénonciations (A-15) de la réclamation du Bénéficiaire à l’Entrepreneur) comme étant la date pour la mise en œuvre de la garantie prévue au Règlement.

[100]       Tout comme M. Bérubé à la Décision 2, le Tribunal constate que le revêtement de fibrociment n’est pas installé selon l’orientation prévue au plan sur la façade latérale gauche de la partie avant de l’Immeuble (photo à la Décision 2, p. 6).

[101]       Dans les circonstances, l’article 10.2 du Règlement est d’application et le Tribunal accueille l’item 45 de la réclamation du Bénéficiaire.

Item 46 - Fascia d’aluminium à la place de fibrociment

[102]       Le 10 avril 2019, le Bénéficiaire a dénoncé à l’Entrepreneur que les panneaux avant du toit de l’entrée de l’Immeuble ne sont pas en fibrociment (A-5).

[103]       Tout comme M. Bérubé à la Décision 2, le Tribunal constate que le revêtement de fibrociment prévu a été remplacé par un revêtement d’acier (fascia).

[104]       Le Tribunal accueille l’item 46 de la réclamation du Bénéficiaire pour les mêmes motifs que ceux exposés précédemment à l’item 45.

Item 49 – Balcon du hall d’entrée

[105]       Le Tribunal considère cette réclamation comme étant un item déguisé des items 33 (hall d’entrée extérieur trop bas) et 35 (marches absentes au balcon), qui ont tous deux été rejetés par le Tribunal à la présente sentence.

[106]       Le Tribunal rejette l’item 49 de la réclamation du Bénéficiaire pour les mêmes motifs que concernant les items 33 (hall d’entrée extérieur trop bas) et 35 (marches absentes au balcon).

[107]       La présente décision n’a cependant pas pour effet d’annuler l’obligation de l’Entrepreneur « d’effectuer les correctifs requis pour que cessent les infiltrations d’eau derrière et par l’avant du revêtement extérieur, de même qu’à travers les soffites d’aluminium à l’avant et à l’arrière du bâtiment », comme en a décidé M. Bérubé à l’item 15 (infiltration d’eau derrière le revêtement) de la Décision 1.

POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL D’ARBITRAGE :

REJETTE les items 12 (12 A et 12 B, sous réserve des commentaires au paragraphe 45 de la présente sentence), 24, 27, 33, 35, 37, 38, 49, 50, 51 et 52 de la réclamation du Bénéficiaire;

ACCUEILLE l’item 34 - Fenestration du sous-sol et l’item 48 - Fenestration du sous-sol (dégagement extérieur - margelles) de la réclamation du Bénéficiaire et ORDONNE à l’Entrepreneur de changer les trois (3) fenêtres du sous-sol de l’Immeuble par des fenêtres de 48 ̎ x 31 ̎ et à une distance du sol qui respecte les normes en vigueur;

ACCUEILLE l’item 45 - Disposition du fibrociment de la réclamation du Bénéficiaire et ORDONNE à l’Entrepreneur d’exécuter les travaux correctifs pour que soit installé le revêtement de fibrociment prévu aux plans du Bénéficiaire sur la façade latérale gauche de la partie avant de l’Immeuble;

ACCUEILLE l’item 46 - Fascia d’aluminium à la place de fibrociment de la réclamation du Bénéficiaire et ORDONNE à l’Entrepreneur de retirer le revêtement d’acier à l’avant du toit de l’entrée de l’Immeuble et d’y installer du fibrociment;

ORDONNE à l’Entrepreneur d’exécuter ces travaux au plus tard le 1er septembre 2022 et, à défaut, ORDONNE à l’Administrateur de les effectuer dans les 60 jours suivants;

AUTORISE les parties de modifier, avec le consentement du Bénéficiaire, les délais imposés aux dispositifs de la présente sentence arbitrale;

CONDAMNE l’Administrateur au paiement des frais de la demande d’arbitrage du

Bénéficiaire.

À Montréal, le 18 juillet 2022

 

Me Pierre Brossoit, arbitre * * *

AUTORITÉS ET DOCTRINES CITÉES PAR :

LE BÉNÉFICIAIRE :

Jurisprudence

-          Construction Léa inc. c. Skilling, (2019), QCCS, 5141, p. 17, no. 90;

-          Sabin c. Fiset (Contracteur Michel Fiset), (2010) QCCQ 6002, aux par. 15, 16, 17.

Doctrine

-          Deslauries, Jacques, Vente, louage, contrat d’entreprise ou de service, Application des principes généraux du contrat d’entreprise aux contrats de construction d’ouvrages immobiliers, CHAPITRE IV – LA RESPONSABILITÉ DES ARCHITECTES, DES INGÉNIEURS ET DES ENTREPRENEURS, 2e éd. (2013) Wilson et Lafleur, par. 2484 & 2486

L’ENTREPRENEUR :

Jurisprudence

-          Lefebvre et Entreprises Marc Lalonde inc., AZ-50512876, par. 11, 12;

-          Mess c. Construction Bois et Poliquin, 2006 CanLII 605509 (QC OAGBRN), par. 37-38.

L’ADMINISTRATEUR :

Référence

-          Extrait du Guide de performance de l’APCHQ concernant pente de terrain.

Jurisprudence sur la mésentente contractuelle

-          SDC de l’Apéro, Phase 1 c. 3415426 Canada inc., GAJD 20162405 (2017), Me Howie

Clavier;

-          Brisson et Brabant c. Construction Norjo, CCAC, S8-080401-NP (2008) Me Michel A. Jeanniot