ARBITRAGE EN VERTU DU RÈGLEMENT SUR LE PLAN DE GARANTIE DES BÂTIMENTS RÉSIDENTIELS NEUFS
(Décret 841-98 du 17 juin 1998)
Organisme d’arbitrage autorisé par la Régie du bâtiment :
SORECONI
ENTRE : CARLO MAMBRO
VANESSA FERRARA
(ci-après les « Bénéficiaires »)
ET : LES CONSTRUCTIONS RÉVÉLATION R.L. INC.
(ci-après l’ « Entrepreneur »)
ET : LA GARANTIE ABRITAT INC.
(ci-après l’« Administrateur »)
Dossier : SORECONI 191103001
Adresse du bâtiment : [...], LAVAL
DÉCISION
Arbitre : Me Carole St-Jean
Pour les Bénéficiaires : Monsieur Carlo Mambro
Madame Vanessa Ferrara
Pour l’Entrepreneur : Monsieur Richard Lévesque
Pour l’Administrateur : Me Marc Baillargeon
Date de l’audition : 21 novembre 2019
Date de prise en délibéré : 21 novembre 2019
Date de la décision : 17 décembre 2019
Identification complète des parties
BÉNÉFICIAIRES : MONSIEUR CARLO MAMBRO
MADAME VANESSA FERRARA
[...]
Laval (Québec) [...]
ENTREPRENEUR: LES CONSTRUCTIONS RÉVÉLATION R.L. INC.
455, boulevard Fontainebleau
Blainville (Québec) J7B 1W7
ADMINISTRATEUR : LA GARANTIE ABRITAT INC.
5930, boul. Louis-H. Lafontaine
Anjou (Québec) H1M 1S7
ET son avocat:
Me MARC BAILLARGEON
5930, boul. Louis-H. Lafontaine
Anjou (Québec) H1M 1S7
1. Le présent arbitrage est tenu en vertu du Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs B-1.1, r.8 (ci-après le « Règlement »).
2. En date du 18 février 2019, l’administrateur a rendu la décision suivante :
1. FISSURATION ET DÉTÉRIORATION PRÉMATURÉE DES JOINTS DE MORTIER SUR LE PAREMENT DE MAÇONNERIE
2. INFILTRATION D'EAU DANS LA CHAMBRE FROIDE
ANALYSE ET DÉCISION (points 1 et 2) :
Concernant les points 1 et 2, les bénéficiaires mentionnent que l’entrepreneur a effectué les travaux correctifs. Toutefois, ils se déclarent insatisfaits des résultats obtenus.
Avec respect pour l’opinion des bénéficiaires, l’administrateur est quant à lui d’avis que les travaux exécutés par l’entrepreneur sont acceptables et conformes aux règles de l’art.
Par conséquent, l’administrateur rejette la demande de réclamation des bénéficiaires à l’égard des points 1 et 2.
POUR TOUS CES MOTIFS, L’ADMINISTRATEUR :
REJETTE la demande de réclamation des bénéficiaires pour les points 1 et 2.
Tel qu’il appert de la pièce A-10.
3. Dans un courriel en date du 11 mars 2019, les bénéficiaires soumettaient à l’organisme d’arbitrage autorisé leur demande d’arbitrage de cette décision (pièce A-11).
4. Dans une lettre en date du 6 juin 2019, l’organisme d’arbitrage autorisé confirmait aux parties la réception de la demande d’arbitrage ainsi que la nomination de la soussignée pour agir à titre d’arbitre dans le présent dossier (pièce A-11).
5. Trois (3) audiences par conférence téléphonique ont été tenues respectivement en date des 13 août, 4 septembre et 25 septembre 2019.
6. Aucune objection n’a été soulevée par les parties eu égard à la compétence du Tribunal et la juridiction du Tribunal est par le fait même confirmée.
7. Le POINT 1 : FISSURATION ET DÉTÉRIORATION PRÉMATURÉE DES JOINTS DE MORTIER SUR LE PAREMENT DE MAÇONNERIE a été retiré par les bénéficiaires.
8. Le seul point maintenu en arbitrage est le POINT 2 : INFILTRATION D’EAU DANS LA CHAMBRE FROIDE.
9. L’audience initialement fixée en date du 6 novembre 2019 a été reportée à la demande des bénéficiaires.
L’AUDIENCE DU 21 NOVEMBRE 2019
10. L’audience fixée en date du 21 novembre 2019 a débuté par une visite des lieux à laquelle ont assisté toutes les parties.
LA PREUVE DES BÉNÉFICIAIRES
Témoin assermenté : Monsieur Carlo Mambro
11. Par acte de vente passé en date du 24 mai 2012 (pièce A-3), les bénéficiaires, Monsieur Carlo Mambro et sa conjointe Madame Vanessa Ferrara, ont acheté de l’entrepreneur, Les Constructions Révélation R.L. inc., la propriété située au [...] à Laval.
12. Au mois d’avril 2015, les bénéficiaires ont découvert la présence d’une infiltration d’eau dans la chambre froide aménagée sous le balcon avant de leur propriété.
13. En date du 4 mai 2015, les bénéficiaires, par l’entremise de leur avocat Me Christopher Dimakos, ont dénoncé le vice à l’entrepreneur et à l’administrateur (pièce A-6).
14. Par décision rendue en date du 11 septembre 2017 (pièce A-8), l’administrateur a maintenu la réclamation des bénéficiaires quant à ce point et a ordonné à l’entrepreneur d’effectuer les correctifs requis.
15. Cette décision faisait suite à une inspection des lieux effectuée en date du 30 mai 2017 par Monsieur Richard Berthiaume, inspecteur-conciliateur.
16. Monsieur Richard Lévesque, président de l’entrepreneur est venu constater la situation au mois d’octobre 2017 et il avise les bénéficiaires qu’il faudra attendre au printemps 2018 pour entreprendre les travaux correctifs étant donné que les conditions climatiques prévalant à ce moment ne sont pas propices à l’exécution des travaux.
17. En date du 11 janvier 2018, Monsieur Mambro transmet un courriel à l’entrepreneur et à l’administrateur les avisant que l’infiltration d’eau est toujours présente dans la chambre froide.
18. À une date antérieure au 10 mai 2018 que Monsieur Mambro ne peut préciser puisqu’il n’était pas présent, un scellant en silicone de couleur noire a été apposé par l’extérieur dans la partie supérieure de la fondation. L’apposition de ce scellant s’est toutefois avérée inefficace puisque l’infiltration d’eau n’est pas réglée.
19. En date du 10 mai 2018, Monsieur Lévesque se présente à nouveau sur les lieux avec un représentant de Goudron-O-Bec. Une ouverture sera pratiquée dans le plafond de contreplaqué de la chambre froide pour visualiser la situation et de l’époxy sera injecté par l’extérieur dans la partie supérieure de la fondation.
20. Un test d’arrosage sera effectué par Monsieur Lévesque en date du 14 mai 2018 et le résultat de ce test fut négatif.
21. Lors de la visite d’inspection supplémentaire de Monsieur Berthiaume effectuée en date du 14 juin 2018, ce dernier a pu constater que l’infiltration d’eau dans la chambre froide ne s’était pas manifestée depuis l’exécution des derniers travaux correctifs.
22. Toutefois à peine quelques jours après la visite d’inspection de Monsieur Berthiaume, soit en date du 18 juin 2018, les bénéficiaires ont constaté que l’eau s’infiltrait à nouveau dans la chambre froide et en avisent l’entrepreneur et l’administrateur par courriel. Un second courriel au même effet sera subséquemment transmis en date du 17 juillet 2018.
23. Dans sa décision rendue en date du 20 août 2018 (suite à la visite effectuée en date du 14 juin 2018), l’administrateur constate que les travaux exécutés par l’entrepreneur n’ont pas donné les résultats escomptés et ordonne à nouveau à l’entrepreneur d’effectuer les travaux correctifs requis (pièce A-9).
24. En date du 5 septembre 2018, l’entreprise Goudron-O-Bec va retirer le pavé devant l’escalier sur une largeur d’environ trois (3) pieds, une excavation sera pratiquée et une membrane sera apposée sur la fondation.
25. Un nouveau test d’eau sera effectué par Monsieur Lévesque en date du 11 septembre 2018 et le résultat de ce test sera positif. L’infiltration d’eau persiste.
26. Selon Monsieur Mambro, Monsieur Lévesque est complètement démuni face à ce constat alors qu’il ignore quel est le correctif approprié dans les circonstances.
27. Monsieur Lévesque va recontacter les bénéficiaires en date du 12 septembre 2018 pour les informer que le service technique de l’APCHQ avait recommandé la pose d’un produit scellant connu sous le nom de Salt Block.
28. En date du 13 septembre 2018, Monsieur Lévesque a contacté à nouveau les bénéficiaires pour les informer que le produit Salt Block n’était pas disponible sur le marché. Toutefois, le représentant Givesco, une entreprise œuvrant dans le domaine de la vente de matériaux spécialisés pour la construction, suggérait un produit équivalent dont le fabricant est W.R. Meadows.
29. Une première couche de ce produit a donc été appliquée par Monsieur Lévesque sur le balcon et les escaliers avant en date du 14 septembre 2018 et la seconde et dernière couche a été appliquée le lendemain 15 septembre 2018.
30. Monsieur Lévesque aurait alors expliqué aux bénéficiaires que le produit devra éventuellement être appliqué à nouveau mais il ignorait dans quel délai.
31. Le test d’arrosage effectué en date du 17 septembre 2018 s’est avéré négatif.
32. À partir des informations jugées incomplètes fournies par Monsieur Lévesque concernant le produit scellant appliqué sur le béton du balcon, les bénéficiaires ont voulu effectuer leurs propres vérifications.
33. C’est ainsi qu’ils ont transmis en date du 18 septembre 2018 un courriel à un dénommé Glen English, représentant du fabricant W.R. Meadows, décrivant la problématique en quelques mots et demandant si le produit devra être réappliqué (pièces non cotées des bénéficiaires).
34. Ledit représentant leur a répondu dans un courriel du même jour que : the product will require re-application which will depend on the usage on the surface (pièces non cotées des bénéficiaires).
35. Ils ont également contacté par courriel en date du 26 septembre 2018 un représentant de Givesco lequel a répondu en date du 2 octobre 2019 que : you will have to redo it at least one time per year.
36. Il importe de mentionner que l’administrateur a consenti à la production de ces échanges de courriel et de la fiche technique du produit.
37. Monsieur Mambro a retransmis ces informations à l’entrepreneur et à l’administrateur.
38. En date du 11 octobre 2018, Monsieur Berthiaume procédait à une visite supplémentaire des lieux visant à revoir la situation. Monsieur Berthiaume avait en mains les deux (2) courriels transmis par les bénéficiaires.
39. Dans sa décision rendue en date du 18 février 2019, Monsieur Berthiaume conclut que les travaux exécutés par l’entrepreneur sont acceptables et conformes aux règles de l’art et la demande des bénéficiaires sera donc rejetée.
40. En réponse à la question de l’administrateur, Monsieur Mambro confirme qu’aucune infiltration d’eau ne s’était manifestée dans la chambre froide depuis l’application du produit scellant, à savoir depuis le 15 septembre 2018.
41. Monsieur Mambro reconnait que l’application du produit scellant a solutionné le problème de l’infiltration d’eau mais il exprime son insatisfaction face au caractère temporaire de cette solution dans la mesure où le produit scellant devra être réappliqué régulièrement et il demande à l’entrepreneur de fournir une solution permanente.
42. Monsieur Mambro termine son témoignage en mentionnant qu’il a fait l’achat d’une maison neuve et qu’il est anormal qu’un tel entretien soit requis sur une maison neuve.
LA PREUVE DE L’ENTREPRENEUR
Témoin assermenté : Monsieur Richard Lévesque
43. Monsieur Lévesque occupe le poste de président au sein de l’entreprise.
44. Il mentionne d’entrée de jeu que son entreprise est récipiendaire de la Palme Platine décernée par l’APCHQ.
45. Il tient à préciser que la satisfaction de la clientèle est très importante à ses yeux et qu’il est intervenu à chaque appel logé par les bénéficiaires.
46. Il explique les interventions successives effectuées sur les lieux.
47. Première intervention : de la terre a été retirée à l’extrémité de l’escalier et du goudron a été appliqué et non pas du silicone tel que mentionné par Monsieur Mambro.
48. Deuxième intervention : partant de l’hypothèse que l’infiltration d’eau se produisait possiblement à la jonction des deux (2) coulées, le pavé devant l’escalier avant a été retiré, le sol a été excavé de telle sorte à mettre la fondation à nu, de l’époxy a été injectée et une (1) membrane a été apposée de telle sorte à couvrir la jonction entre les deux coulées.
49. Le test d’eau s’étant à nouveau révélé positif, Monsieur Lévesque a contacté Monsieur Sylvain Labrosse du service technique de l’APCHQ.
50. Ce dernier a émis l’opinion que l’infiltration d’eau résultait possiblement d’un problème de capillarité du béton et a recommandé à Monsieur Lévesque de contacter l’entreprise Givesco concernant l’application d’un produit scellant.
51. Rejoint par téléphone, le représentant Givesco a recommandé le produit scellant Salt Block.
52. Toutefois, lorsque Monsieur Lévesque s’est rendu en magasin le produit n’était pas disponible et on lui a recommandé un produit équivalent, à savoir Seal Tight du fabricant W.R. Meadows.
53. Deux (2) couches de ce produit seront appliquées sur le balcon et les escaliers avant et le test d’eau s’est finalement avéré négatif.
54. Interrogé par l’avocat de l’administrateur, Monsieur Lévesque mentionnera avoir déjà éprouvé à deux (2) reprises un tel problème d’infiltration d’eau dans la chambre froide.
55. Dans premier un cas, une injection d’époxy a résolu le problème.
56. Dans l’autre cas, il a procédé à une application de goudron et le solin a été refait.
57. Il affirme que lors de l’achat du produit de W.R. Meadows, on ne lui a jamais mentionné que l’application était temporaire.
58. Il mentionne avoir avisé les bénéficiaires que l’application du produit rendrait la couleur du béton légèrement plus foncée.
LA PREUVE DE L’ADMINISTRATEUR
Témoin assermenté : Monsieur Richard Berthiaume
59. Monsieur Berthiaume agit comme inspecteur-conciliateur pour l’administrateur depuis l’année 2009 et à ce titre, il a rendu plus de 1 200 décisions.
60. Il est membre de l’Ordre des technologues depuis 1985.
61. Il exploite sa propre entreprise dans le domaine de l’inspection immobilière et il a réalisé à ce titre plus de 3 500 expertises en tout genre.
62. Finalement, il exploite sa propre entreprise comme entrepreneur général avec spécialisation dans le domaine du logement locatif.
63. Il explique que quatre (4) facteurs peuvent être à l’origine de l’infiltration d’eau dans la chambre froide, à savoir :
· Absence d’imperméabilisation des fondations
· Infiltration par le joint de coulée
· Infiltration par capillarité
· Formation de condensation
64. En ce qui a trait à l’infiltration par capillarité, il explique qu’on doit normalement aménager une pente légère de telle sorte à évacuer l’eau. L’infiltration par capillarité peut se produire lors de fortes pluies sur plusieurs jours consécutifs ou lors de chutes de neige accumulée.
65. C’est à l’entrepreneur de déterminer la méthode corrective adéquate et il a une obligation de résultat à cet égard.
66. Dans le cas présent, l’entrepreneur, après la réalisation de travaux correctifs s’étant avérés infructueux, a finalement opté pour l’imperméabilisation du béton.
67. S’appuyant sur les dispositions de l’article 2120 du Code civil du Québec, Monsieur Berthiaume soumet que l’entrepreneur est tenu de garantir les travaux correctifs durant une période d’une année et que cette année est maintenant révolue.
68. Il ajoute que les bénéficiaires doivent faire l’entretien du bâtiment dont ils sont propriétaires et qu’il s’agit d’un entretien normal.
69. Par surcroît, Monsieur Berthiaume est d’opinion que le produit scellant utilisé par l’entrepreneur pourrait tenir durant dix (10) ans tenant compte que deux (2) couches de ce produit ont été appliquées.
70. En conclusion de son témoignage, Monsieur Berthiaume affirme qu’il n’y a aucune autre façon de régler le problème et que, confronté à cette problématique, l’administrateur aurait lui-même utilisé la même méthode corrective.
71. Monsieur Berthiaume a déjà constaté ce type de problématique ailleurs et la situation a été corrigée par l’application d’un scellant.
72. Il émet finalement l’opinion que même la réfection complète des fondations ne règlerait pas le problème.
LES PRÉTENTIONS DES PARTIES
Les bénéficiaires
73. Bien que l’application du produit scellant ait solutionné le problème de l’infiltration d’eau dans la chambre froide, les bénéficiaires réitèrent que la solution n’est pas permanente puisque le produit devra être réappliqué.
74. Le fabricant et le vendeur de matériaux spécialisés ont confirmé que la protection procurée par le produit est temporaire.
75. Les bénéficiaires ont fait l’acquisition d’un bâtiment résidentiel neuf et ils demandent une solution permanente de la problématique.
L’entrepreneur
76. L’entrepreneur rappelle qu’il a fait une prise en charge complète de cette problématique.
77. La méthode corrective utilisée a été recommandée par l’expert du service technique de l’APCHQ.
78. L’exécution des travaux correctifs a résolu la problématique.
L’administrateur
79. L’administrateur est étonné de constater que les bénéficiaires n’ont d’aucune manière commenté la fiche technique du produit déposée en preuve (pièces non cotées produites par les bénéficiaires), ni au cours de leur témoignage ni au cours de l’exposé de leur prétention.
80. Quant aux exemples fournis dans les courriels échangés avec le fabricant, c’est-à-dire l’application du produit autour d’une piscine ou dans une entrée de stationnement (pièces non cotées produites par les bénéficiaires), ils sont peu ressemblants à la situation prévalant dans le cas présent.
81. L’administrateur rappelle que les bénéficiaires ont le fardeau de la preuve et que la simple crainte que l’infiltration d’eau dans la chambre froide se manifeste à nouveau n’est pas un motif suffisant pour renverser la décision de l’administrateur.
82. L’administrateur argumente qu’il n’y a aucune solution autre que l’apposition d’un produit scellant et qu’il y a absence de preuve de l’existence d’une autre produit scellant dont l’application serait permanente.
83. Il ajoute que la réapplication du produit au besoin constitue de l’entretien normal et que la responsabilité de cet entretien normal du bâtiment incombe aux bénéficiaires.
Le fardeau de la preuve
84. Conformément aux dispositions de l’article 2803 du Code civil du Québec, le fardeau de preuve repose sur les épaules de celui qui veut faire valoir un droit.
85. Ledit article se lit comme suit :
2803. Celui qui veut faire valoir un droit doit prouver les faits qui soutiennent sa prétention.
86. Également, conformément aux dispositions de l’article 2804 du Code civil du Québec, cette preuve doit être faite selon le critère de la balance des probabilités.
87. Ledit article se lit comme suit :
2804. La preuve qui rend l’existence d’un fait plus probable que son inexistence est suffisante, à moins que la loi n’exige une preuve plus convaincante.
88. Les bénéficiaires ont donc le fardeau d’établir que la décision de l’administrateur est mal fondée et que leur demande d’arbitrage doit être accueillie.
Les principes de droit applicable
89. Conformément au principe établi par la Cour Supérieure dans l’affaire de Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ c. Dupuis (2007 QCCS 4701), il importe de rappeler que l’arbitre doit tenir compte de la preuve déposée devant lui :
[75] Il est acquis au débat que l’arbitre doit trancher le litige suivant les règles de droit et qu’il doit tenir compte de la preuve déposée devant lui.
(le souligné est nôtre)
90. Que nous a donc révélé la preuve dans le présent dossier ?
91. Rappelons que les bénéficiaires ont reconnu que les travaux correctifs effectués par l’entrepreneur avaient résolu le problème d’infiltration d’eau dans la chambre froide.
92. Leurs doléances visent strictement le caractère temporaire de la méthode corrective utilisée ou plus précisément le fait que le scellant a une durée de vie limitée.
93. Au soutien de leur prétention, les bénéficiaires ont déposé en preuve des courriels échangés avec le fabricant et le détaillant ainsi que la fiche technique du produit.
94. La fiche technique décrit les caractéristiques du produit comme suit :
· Crée une membrane totalement transparente qui ne jaunira pas sur le béton neuf ou existant.
· Procure un fini durable, imperméable à l’humidité, uniforme, robuste et stable sur les surfaces extérieures de béton.
· Fait murir et scelle en une seule opération le béton fraichement coulé.
· Procure un scellement de première qualité offrant une rétention de l’humidité maximale.
· Minimise la fissuration capillaire, la fissuration, le poudrage, l’écaillage et les autres défauts courant dans le béton mal muri.
· Augmente la résistance aux produits chimiques, à l’huile, à la graisse, aux sels de déglaçage ainsi qu’à l’abrasion durant la construction.
· Procure un lustre attrayant rehaussant l’aspect naturel du béton.
· S’applique aisément … sèche aisément pour réduire les temps morts.
· Permet un nettoyage et un entretien facile … réduit les coûts d’entretien du plancher.
(le souligné est nôtre)
95. À prime abord, on constate que la réponse fournie par le représentant des ventes du fabricant à la question formulée par le bénéficiaire Monsieur Carlo Mambro, à savoir « the product will require re-application which will depend on the usage on the surface », contraste avec les caractéristiques du produit tel qu’énoncées à la fiche technique.
96. La preuve est muette quant à la disparité entre les caractéristiques du produit décrites à la fiche technique et les propos du représentant des ventes.
97. Également, les deux (2) exemples fournis par ce représentant des ventes laissent entendre que le produit devra être réappliqué mais aucun de ces deux (2) exemples ne correspond à la situation pourtant décrite par le bénéficiaire Mambro dans son courriel.
98. Finalement, on ne dispose d’aucune information relative aux qualifications de ce représentant des ventes non plus que relative aux qualifications du représentant Givesco.
99. Malheureusement pour les bénéficiaires, ces éléments de preuve sont insuffisants pour écarter la preuve prépondérante présentée par le témoin expert de l’administrateur, Monsieur Richard Berthiaume.
100. Ce dernier possède une très vaste expérience d’une part, comme inspecteur-conciliateur alors qu’il a rendu plus de 1 200 décisions à ce titre et d’autre part, comme expert-technologue ayant réalisé plus de 3 500 expertises à ce titre.
101. Monsieur Berthiaume a également eu l’avantage d’avoir examiné les lieux.
102. Or, Monsieur Berthiaume a exprimé l’opinion que la durée de vie du produit pourrait atteindre une dizaine d’années d’autant plus que deux (2) couches ont été appliquées par l’entrepreneur.
103. À supposer que la durée de vie du produit soit moindre, Monsieur Berthiaume affirme qu’il n’y a dans les circonstances aucune autre façon de régler le problème et il ajoute que même la réfection complète des fondations ne réglerait pas la situation.
104. Quant à la réapplication éventuelle du produit, Monsieur Berthiaume l’assimile à un entretien normal du bâtiment dont la responsabilité incombe aux propriétaires et il donne en exemple l’entretien du calfeutrage.
105. En l’absence de tout rapport d’expertise à l’effet contraire soumis par les bénéficiaires, le Tribunal se doit de retenir l’opinion de l’expert de l’administrateur.
106. Pour les motifs ci-haut exprimés, la décision de l’administrateur sera maintenue et la demande d’arbitrage des bénéficiaires sera rejetée.
POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL D’ARBITRAGE :
REJETTE la demande d’arbitrage des bénéficiaires;
DÉPARTAGE les coûts de l’arbitrage comme suit :
CONDAMNE les bénéficiaires à payer à l’organisme d’arbitrage la somme de 50 $ pour sa part des frais d’arbitrage;
CONDAMNE l’administrateur à payer à l’organisme d’arbitrage le reliquat des frais d’arbitrage;
LE TOUT avec les intérêts au taux légal majoré de l’indemnité additionnelle stipulée à l’article 1619 du Code civil du Québec à compter d’un délai de trente (30) jours suivant la date de la facture émise par l’organisme.
Sainte-Agathe-des-Monts,
le 17 décembre 2019
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Me Carole St-Jean
Arbitre