ARBITRAGE EN VERTU DU RÈGLEMENT SUR LE PLAN DE GARANTIE DES BÂTIMENTS RÉSIDENTIELS NEUFS
Organisme d’arbitrage autorisé par la Régie du bâtiment du Québec : SORECONI
ENTRE : NICOLE ROY
(ci-après la « Bénéficiaire »)
ET : PARC SUR RIVIÈRE-BROMONT, S.E.C.
(ci-après l’ « Entrepreneur »)
ET : LA GARANTIE CONSTRUCTION RÉSIDENTIELLE
(ci-après l’« Administrateur »)
Dossier SORECONI : 180504001
DÉCISION
Arbitre : Me Jacinthe Savoie
Pour les Bénéficiaires : Madame Nicole Roy
Pour l’Entrepreneur : Monsieur Antoine Désourdy
Pour l’Administrateur : Me Pierre-Marc Boyer
Date de l’audition : 18 septembre 2018
Dernier complément de preuve : 27 septembre 2018
Date de la Décision : 15 novembre 2018
Identification complète des parties
Bénéficiaire : Madame Nicole Roy
[...]
Bromont (Québec) [...]
Entrepreneur: Parc sur Rivière-Bromont, s.e.c.
Monsieur Antoine Désourdy
25, avenue de l’Hôtel-de-Ville
Bromont (Québec) J2L 0N1
Administrateur : La Garantie Construction Résidentielle 7171, rue Jean-Talon Est
Montréal (Québec) H1M 3N2
Et son procureur :
Me Pierre-Marc Boyer
Mandat
L’Arbitre a reçu son mandat de SORECONI le 20 avril 2018.
Historique du dossier
05-04-2018 Réception de la demande d’arbitrage de la Bénéficiaire par le greffe de SORECONI
20-04-2018 Notification d’arbitrage transmise aux parties et nomination de l’arbitre, Me Michel A. Jeanniot
14-05-2018 Réception du cahier de pièces de l’Administrateur
17-05-2018 Lettre de substitution d’arbitre confirmant la nomination de Me Jacinthe Savoie
14-06-2018 Conférence téléphonique tenant lieu et place de conférence préparatoire
14-06-2018 Transmission d’un courriel à la Bénéficiaire pour l’aviser que l’Entrepreneur, l’Administrateur et l’Arbitre l’attendent à la conférence téléphonique
18-06-2018 Réception d’un courriel de l’Administrateur demandant que les frais de la conférence téléphonique du 14 juin 2018 soit imputés à la Bénéficiaire, cette dernière ne s’étant pas présentée au rendez-vous et n’ayant soumis aucun motif à cet égard
03-07-2018 Réception d’un courriel de la Bénéficiaire afin d’indiquer qu’elle a besoin d’assistance en écoute passive de la part de son frère et de sa belle-sœur lors de la conférence téléphonique
04-07-2018 Conférence téléphonique tenant lieu et place de conférence préparatoire
04-07-2018 Réception d’un courriel de la Bénéficiaire afin de demander la suspension du présent dossier d’arbitrage
04-07-2018 Réception d’un courriel de l’Administrateur s’opposant à la demande de suspension
05-07-2018 Transmission d’un courriel à la Bénéficiaire lui demandant de préciser les motifs au soutien de sa demande de suspension
05-07-2018 Réception d’un courriel de la Bénéficiaire sans contenu mise à part l’objet qui se lit comme suit : ««Offre n° 2018-06/26 - Tech. En documentation/soutien administratif» RE : Demande de suspension dû dossier pour éclaircir les frais encourus dans ce dossier 180604001**Re : Demande d’autorisation pour mes procureuRs d’assister en écoutes passives à c…»
09-07-2018 Réception d’un courriel de la Bénéficiaire indiquant les points de la décision du 5 mars 2018 qui restent à traiter, soit les points 1, 4, 5, 6 et 10
09-07-2018 Réception d’un courriel de la Bénéficiaire pour préciser les numéros de dossier ainsi que pour demander d’ajouter ses procureurs en copie
10-07-2018 Émission du procès-verbal de la conférence téléphonique
11-07-2018 Transmission d’un courriel à la Bénéficiaire afin de lui demander :
a) le nom et les coordonnées de ses procureurs
b) en ce qui a trait aux points 5 et 10, de donner suite à l’engagement qu’elle a pris et de transmettre à tous le courriel où elle demandait l’arbitrage pour ces deux points
c) pour le point 1, la confirmation de la demande d’arbitrage
d) les motifs au soutien de la demande de suspension
11-07-2018 Réception d’un courriel de la Bénéficiaire sans contenu
12-07-2018 Réception d’un courriel de la Bénéficiaire pour préciser qu’elle n’est pas représentée par avocat mais qu’elle souhaite que la correspondance échangée soit également transmise à son frère et à sa belle-sœur
17-07-2018 Réception d’un courriel de la Bénéficiaire qui souhaite avoir de l’information quant aux frais relatifs à l’arbitrage
17-07-2018 Transmission d’un courriel à la Bénéficiaire pour la référer au Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs et à un avocat, le cas échéant
18-07-2018 Réception d’un courriel de la Bénéficiaire demandant un délai supplémentaire pour la production d’une expertise et réitérant sa demande d’information quant aux frais
19-07-2018 Transmission d’un courriel à la Bénéficiaire accordant un délai supplémentaire pour la production de l’expertise et réitérant la teneur du courriel du 17 juillet au regard des frais
19-07-2018 Réception de 8 courriels de la Bénéficiaire au sujet des points 1, 5, 6, et 10, lesquels comprennent des photographies, un courriel de Michèle St-Jean de Cuisine Action ainsi que le Guide d’entretien de Cuisine Action
20-07-2018 Réception d’un courriel de l’Administrateur demandant au Tribunal de prendre en considération, dans le partage des frais d’arbitrage, le nombre déraisonnable de communications, demandes et documents soumis par la Bénéficiaire
21-07-2018 Réception d’un courriel de la Bénéficiaire précisant que toutes les photographies transmises étaient déjà en possession de l’Administrateur et qu’elle croit légitime de fournir les documents soumis
25-07-2018 Réception d’un courriel de la Bénéficiaire afin de préciser que son expertise sera produite dans les délais
27-07-2018 Transmission d’un courriel à l’Administrateur concernant la contestation de la demande d’arbitrage des points 5 et 10, la Bénéficiaire n’ayant jamais donné suite à son engagement de transmettre la demande d’arbitrage concernant ces deux points
28-07-2018 Réception d’un courriel de la Bénéficiaire précisant que «je vous ai donnée suite et transmis les points 5 et 10 et aussi tous les autres»
30-07-2018 Réception d’un courriel de la Bénéficiaire accompagné de la demande originale d’arbitrage
30-07-2018 Transmission d’un courriel à la Bénéficiaire pour lui indiquer que le Tribunal a pris note de ses commentaires et qu’elle pourra faire valoir ses arguments lors de l’audition fixée le 18 septembre 2018
09-08-2018 Transmission d’un courriel pour confirmer le lieu où se tiendra l’audition du 18 septembre 2018
13-08-2018 Réception d’un courriel de l’Administrateur pour aviser qu’il plaidera la question de la non-recevabilité des points 5 et 10 lors de l’audition du 18 septembre 2018
05-09-2018 Réception d’un courriel de la Bénéficiaire, adressé à madame Sandra Fournier, technicienne aux réclamations chez l’Administrateur
18-09-2018 Audition
20-09-2018 Réception de 4 courriels de la Bénéficiaire dont un contenant des photographies et une vidéo au regard du point 6
27-09-2018 Réception d’un courriel de l’Administrateur commentant les photographies transmises par la Bénéficiaire
28-09-2018 Réception de 2 courriels de la Bénéficiaire suite aux commentaires de l’Administrateur.
Admissions
[1] Il s’agit de l’unité [...] d’un bâtiment détenu en copropriété divise et situé au [...], à Bromont (Unité).
[2] La réception de l’Unité est intervenue le 9 mars 2017.
[3] La Bénéficiaire a transmis une réclamation écrite le 3 novembre 2017.
[4] L’Administrateur a émis une décision en date du 5 mars 2018, laquelle traitait de 20 points. (Décision)
[5] En date du 5 avril 2018, la Bénéficiaire a formulé une demande d’arbitrage adressée à Soreconi où elle spécifiait qu’elle portait les points 4 et 6 de la Décision en arbitrage.
[6] Lors de l’audition, la Bénéficiaire a confirmé avoir porté les points 1, 5 et 10 en arbitrage le 9 juillet 2018.
Demandes d’arbitrage par la Bénéficiaire
[7] Ainsi, la Bénéficiaire a manifesté son intention de porter en arbitrage les cinq points suivant, soit :
Point 1 - Installation d’arrêts aux portes intérieures;
Point 4 - Espacement d’une planche au plancher stratifié / jonction carrelage céramique;
Point 5 - Taux d’humidité faible à l’intérieur de l’unité;
Point 6 - Problème d’étanchéité porte-patio / plante gelée à proximité;
Point 10 - Espacement à la boîte abritant le tuyau d’évacuation de la hotte.
Preuve
[8] La preuve de la Bénéficiaire a été administrée au moyen du témoignage de cette dernière. De plus, elle a produit différents documents, photographies et une vidéo dont nous traiterons dans les sections appropriées de la présente.
[9] Toutefois, contrairement à ce qui avait été annoncé par la Bénéficiaire, aucune expertise n’a été produite.
[10] La belle-sœur de la Bénéficiaire, madame Suzie Mailloux Roy, était présente à l’audition, par voie téléphonique, mais n’est pas intervenue au débat.
[11] Du côté de l’Entrepreneur, son représentant monsieur Antoine Désourdy, a témoigné.
[12] Quant à l’Administrateur, il a fait entendre l’inspectrice Marie-Pier Bédard et a déposé les pièces A-1 à A-13 ainsi que des commentaires écrits sur les photographies et la vidéo transmises par la Bénéficiaire après l’audition et concernant le point 6.
[13] Les parties ainsi que la soussignée ont procédé à la visite des lieux le 18 septembre 2018.
[14] Pour faciliter la lecture de la présente décision et pour chacun des points en litige, le Tribunal regroupera la position des parties et leur plaidoirie respective.
Point 1 - Installation d’arrêts aux portes intérieures
Faits
[15] En date du 9 juillet 2018, les autres parties ont appris que la Bénéficiaire souhaite porter ce point en arbitrage. La Bénéficiaire n’en a pas fait mention dans sa demande écrite du 5 avril 2018 et n’en a pas parlé lors de la conférence téléphonique du 4 juillet 2018, conférence qui visait notamment à circonscrire le débat.
Position de la Bénéficiaire
[16] La Bénéficiaire rappelle qu’elle s’est entendue avec l’Entrepreneur afin que ce dernier installe des arrêts aux portes de la chambre principale et de la salle de bain de l’Unité, et ce, dans les 45 jours suivant la réception de la Décision.
[17] Elle indique que malgré la fin du délai convenu, les arrêts de porte ne sont toujours pas installés.
[18] Elle porte ce point en arbitrage parce que l’entente n’a pas été respectée.
Position de l’Entrepreneur
[19] Monsieur Désourdy explique que, généralement, il n’installe pas d’arrêt aux portes des salles de bain.
[20] De plus, il n’a pas respecté le délai puisqu’il est très difficile de travailler chez la Bénéficiaire.
[21] Toutefois, il réitère qu’il est prêt à installer les deux arrêts de porte dès la fin de l’audition de la présente affaire.
Position de l’Administrateur
[22] Madame Bédard indique que l’Administrateur n’a émis aucune décision au regard du point 1.
[23] Le procureur de l’Administrateur demande le rejet de cette demande puisqu’aucune décision n’a été rendue et que l’Entrepreneur s’est engagé à procéder à l’installation des deux arrêts de porte. De plus, il ajoute que ce point a été porté en arbitrage plus de 30 jours après la réception de la Décision.
Point 4 - Espacement d’une planche au plancher stratifié / jonction carrelage céramique;
Position de la Bénéficiaire
[24] La Bénéficiaire a dénoncé un espacement à la jonction d’une planche du plancher stratifié et de la moulure de transition du carrelage de la cuisine.
[25] Lors de la visite des lieux, elle a invité l’Arbitre à se pencher et a pris une lampe qu’elle a placée dans un angle précis, afin de lui montrer l’espacement.
[26] La Bénéficiaire explique que lorsqu’elle lave son plancher, de l’eau doit pénétrer à l’intérieur et, à la longue, les planches gonfleront. Elle s’inquiète également d’un éventuel problème de moisissures.
[27] Elle précise que, puisqu’elle a échappé un seau d’eau sur le plancher, son assureur verra peut-être à remplacer le revêtement de sol au complet.
[28] En réplique, elle ajoute que la photographie de l’espacement produite dans la Décision a été prise sans éclairage particulier.
Position de l’Entrepreneur
[29] Monsieur Désourdy souligne que l’espacement n’est pas visible à l’œil et qu’il faut prendre une lampe pour le voir.
[30] Ce faisant, il plaide que cette situation est acceptable et qu’elle répond aux tolérances de l’industrie.
[31] De plus, il précise qu’on ne doit pas laisser de l’eau sur le plancher lors du lavage de ce dernier.
Position de l’Administrateur
[32] Madame Bédard témoigne qu’à hauteur d’homme, l’espacement n’est pas perceptible. En conséquence, elle conclut que la situation est acceptable.
[33] Le procureur de l’Administrateur rappelle que le test standard pour évaluer la situation est en position debout.
[34] Il précise que la photographie produite dans la Décision montre un gros plan de l’espacement.
[35] Enfin, il ajoute que la Bénéficiaire n’a pas fait la preuve d’une contravention aux règles de l’art.
Point 5 - Taux d’humidité faible à l’intérieur de l’unité
Position de la Bénéficiaire
[36] La Bénéficiaire a dénoncé à l’Administrateur la présence d’un faible taux d’humidité à l’intérieur de son unité.
[37] Lors de la visite des lieux, elle explique le fonctionnement de son système d’échangeur d’air. Elle précise qu’elle a déjà eu un taux d’humidité de 5%, ce qui n’est pas acceptable et crée des espacements entre les planches de son revêtement de sol. Elle ajoute qu’elle souhaite un taux d’humidité de 40% à 45% en raison de ses allergies.
[38] Elle termine en précisant que depuis qu’elle a ajouté un humidificateur dans l’Unité, elle n’a plus de problème.
Position de l’Entrepreneur
[39] Monsieur Désourdy précise qu’un échangeur d’air n’a pas pour fonction de contrôler l’humidité.
[40] Pour solutionner la problématique de la Bénéficiaire, il lui a suggéré l’installation d’un humidificateur.
Position de l’Administrateur
[41] Madame Bédard rappelle que lors de son inspection en janvier 2018, le taux d’humidité se situait à 44.5%, avec une température extérieure de moins 10 degrés Celsius.
[42] Elle explique que cette lecture, combinée à l’absence de condensation sur les surfaces vitrées, indique que le taux d’humidité est convenable.
[43] Elle termine en précisant qu’il est de la responsabilité de la Bénéficiaire de voir à ce que le taux d’humidité de l’Unité soit acceptable.
[44] Le procureur de l’Administrateur invite le Tribunal a rejeté ce point puisqu’il a été porté en arbitrage plus de 30 jours après la réception de la Décision.
[45] Subsidiairement, il souligne que la Bénéficiaire a admis que ce point était réglé et qu’il n’y a plus de débat à faire à ce sujet.
Point 6 - Problème d’étanchéité porte-patio / plante gelée à proximité
Position de la Bénéficiaire
[46] La Bénéficiaire a dénoncé une problématique d’étanchéité à la porte fenêtre en façade de l’Unité, causant le gel de deux plantes ainsi que la formation de glace au pourtour de la porte.
[47] Elle explique qu’elle n’a aucun problème avec ses fenêtres mais uniquement avec la porte-fenêtre.
[48] Elle affirme que lorsque la température se situe sous les moins 10 degrés Celsius, il y a formation de glace au pourtour de sa porte-fenêtre. En conséquence, il y a de la glace du mois de décembre à février.
[49] En date du 20 septembre 2018, elle a transmis quatre photographies (Photographies) dont la dernière représente des gouttes de condensation transformée en glace au bas de la porte fenêtre. Elle a aussi produit une vidéo montrant la même situation que la dernière photographie, au bas de la porte et sur le côté droit. Elle précise que les Photographies ainsi que la vidéo ont été prises le 15 janvier 2018.
Position de l’Entrepreneur
[50] Monsieur Désourdy témoigne à l’effet que la résistance thermique de la fenêtre de la porte-fenêtre est de R4.5 alors qu’un mur est de R28.5.
[51] Il admet qu’à une température de moins 20 degrés Celsius, il peut y avoir du givre sur le loquet situé au bas de la porte.
[52] Il admet également qu’une porte-fenêtre est moins étanche qu’une fenêtre.
[53] Il réitère que la variation du taux d’humidité à l’intérieur de l’Unité est tributaire de plusieurs facteurs.
[54] Il termine en affirmant qu’il a installé les mêmes portes-fenêtres dans tout le projet et seule la Bénéficiaire a soulevé une problématique.
Position de l’Administrateur
[55] Madame Bédard témoigne que lors de sa visite du 30 janvier 2018, malgré une température extérieure de moins dix degrés Celsius, elle n’a pas constaté la situation décrite par la Bénéficiaire.
[56] À l’aide d’un thermomètre infrarouge, elle a relevé des températures entre 15 et 17.2 degrés Celsius au seuil du cadrage de la porte-fenêtre. En ce qui a trait à la température prise à la jonction des moulures, elle se situait autour de 17 degrés Celsius. En conséquence, elle conclut qu’il n’y a aucun problème d’infiltration d’air à la porte-fenêtre.
[57] Elle explique que plus la température extérieure diminue, plus le taux d’humidité à l’intérieur de l’Unité doit diminuer pour éviter qu’il y ait formation de condensation.
[58] Toutefois, il arrive un point où la température extérieure est tellement basse que le taux d’humidité doit se situer sous 20%, ce qui est inconfortable pour les occupants.
[59] En conséquence, lorsqu’il fait en dessous de moins 25 degrés Celsius, il est normal qu’il y ait de la condensation sur le bas de la porte-fenêtre.
[60] En réplique à la production des Photographies et de la vidéo de la Bénéficiaire, le procureur de l’Administrateur soulève que:
[60.1] l’absence de date à laquelle les Photographies ont été prises empêche l’Administrateur de conclure réellement, situation obligeant ce dernier à déduire les conditions hivernales extérieures;
[60.2] en prenant le taux d’humidité intérieur de 23%, indiqué à l’une des photographies de la Bénéficiaire, et en analysant un tableau de condensation produit par l’Administrateur, ce dernier constate que la petite quantité de condensation sur le vitrage de la porte-fenêtre s’est formée à partir d’une température extérieure de moins 17.7 degrés Celsius;
[60.3] il est logique de penser que la condensation formée à moins 17.7 degrés Celsius ait gelée lors d’une baisse des températures oscillant entre moins 20 et moins 35 degrés Celsius, température observée fréquemment l’hiver dernier;
[60.5] bien que les portes-fenêtres aient un certain rendement énergétique, il n’en demeure pas moins qu’en période de froid extrême, la situation dénoncée par la Bénéficiaire apparaît normale;
[60.6] considérant la présence d’un pont thermique à l’endroit de l’ouverture coulissante de la porte-fenêtre, il est normal que les autres fenêtres à manivelle de l’Unité ne réagissent pas de la même façon;
[60.7] puisque la température au moment de la prise des Photographies est inconnue et que l’analyse du tableau de condensation concorde avec les conditions observées lors de l’hiver 2017 - 2018, l’Administrateur juge la situation dénoncée normale.
Point 10 - Espacement à la boîte abritant le tuyau d’évacuation de la hotte
Position de la Bénéficiaire
[61] La Bénéficiaire a dénoncé, après avoir nettoyé le haut des armoires de cuisine, un espacement à la jonction de la boîte abritant le tuyau d’évacuation de la hotte de la cuisinière.
[62] La Bénéficiaire souligne qu’il manque des joints de scellant à gauche et à droite de la boîte et que cette situation s’est produite après la réception de l’unité. Elle n’a pu s’en rendre compte lors de la réception puisqu’elle avait le bras dans le plâtre et qu’elle n’a pas pu monter pour atteindre le haut des armoires. Elle affirme qu’il fallait «monter» pour voir.
[63] Elle conclut en une finition «mal faite».
Position de l’Entrepreneur
[64] Monsieur Désourdy précise que le joint de scellant n’est pas structural et que, dans la mesure où le cache conduit subit un coup, il se déplace.
Position de l’Administrateur
[65] Madame Bédard explique que lors de son inspection du 30 janvier 2018, le joint de scellant était présent. D’ailleurs, la photographie qui a été prise à cette même date, les pieds au sol, démontre bien la situation décrite.
[66] Elle conclut que le conduit a été déplacé par la Bénéficiaire.
[67] Le procureur de l’Administrateur invite le Tribunal a rejeté ce point puisqu’il a été porté en arbitrage plus de 30 jours après la réception de la Décision.
[68] Subsidiairement, il argumente que, dans la mesure où la situation se qualifiait comme une malfaçon, elle devait être dénoncée lors de la réception de l’Unité, ce qui n’a pas été fait.
[69] Selon lui, la situation était visible les pieds au sol et ne nécessitait pas de s’approcher de la boîte pour s’en rendre compte.
Coûts de l’arbitrage
[70] En réponse à une question du procureur de l’Administrateur, la Bénéficiaire a admis avoir logé plus de 50 appels téléphoniques auprès de l’Administrateur pour le traitement de son dossier.
[71] Le procureur de l’Administrateur demande que la Bénéficiaire assume 25% des frais d’arbitrage, et ce, si elle n’a gain de cause sur aucun des points demandés.
[72] Au soutien de cette demande, il soulève les arguments suivants :
[72.1] qu’en raison des agissements de la Bénéficiaire, l’Administrateur doit monopoliser des ressources considérables;
[72.2] qu’il y a eu une énorme perte de temps dans cette affaire puisque la Bénéficiaire n’était pas prête;
[72.3] les demandes effectuées par la Bénéficiaire sont, à sa face même, non fondées;
[72.4] dans la mesure où aucune sanction n’est appliquée, la situation abusive va perdurer éternellement.
[73] Cette demande rejoint deux demandes formulées par l’Administrateur, soit :
[73.1] en date du 18 juin 2018, le procureur de l’Administrateur précisait «que si l’administrateur GCR se voit éventuellement condamner aux frais du présent dossier, le soussigné tient à souligner que les frais reliés à la conférence téléphonique manquée du 14 juin dernier devront être imputés à la bénéficiaire seulement. Celle-ci ne s’est pas présentée au rendez-vous téléphonique et d’ailleurs n’a toujours pas soumis de motifs à cet égard»;
[73.2] en date du 20 juillet 2018, le procureur de l’Administrateur écrivait que : «le soussigné est d’avis que le nombre de communications, documents et demandes faits par Mme Roy au tribunal dans le présent dossier dépasse ce qui est raisonnable. Le présent dossier est soumis à la règle de la proportionnalité comme tout dossier devant les tribunaux de droit commun. Qu’il s’agisse d’un tribunal statutaire n’y change rien.
Le soussigné demande que cela soit pris en considération dans le partage des frais d’arbitrage, même si Mme Roy devait avoir gain de cause sur au moins un des points de sa demande, car tous ces fichiers, demandes et communications deviennent abusifs et engendrent des frais d’arbitrage potentiels pour ma cliente.»
[74] La Bénéficiaire rétorque à ces arguments que :
[74.1] elle a logé plusieurs appels aux divers représentants de l’Administrateur puisque ce dernier ne respecte pas ses propres délais;
[74.2] elle affirme qu’aucune de ses actions n’a été abusive et qu’elle est de bonne foi;
[74.3] madame Bédard avait déjà en possession toutes les photographies qu’elle a produites;
[74.4] elle était préparée pour la tenue de l’audition;
[74.5] suivant les informations qu’elle a obtenues, tous les frais relatifs à l’arbitrage devraient être assumés par l’Administrateur.
DÉCISIONS
Décision quant au point 1
[75] L’article 19 du Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs[1] (Règlement) prévoit que :
«Le bénéficiaire ou l’entrepreneur, insatisfait d’une décision de l’administrateur, doit, pour que la garantie s’applique, soumettre le différend à l’arbitrage dans les 30 jours de la réception par poste recommandée de la décision de l’administrateur à moins que le bénéficiaire et l’entrepreneur ne s’entendent pour soumettre, dans ce même délai, le différend à un médiateur choisi sur une liste dressée par le ministre du Travail afin de tenter d’en arriver à une entente. Dans ce cas, le délai pour soumettre le différend à l’arbitrage est de 30 jours à compter de la réception par poste recommandée de l’avis du médiateur constatant l’échec total ou partiel de la médiation.»
(nos soulignés)
[76] L’article 106 du Règlement stipule que :
«Tout différend portant sur une décision de l’administrateur concernant une réclamation ou le refus ou l’annulation de l’adhésion d’un entrepreneur relève de la compétence exclusive de l’arbitre désigné en vertu de la présente section.
Peut demander l’arbitrage, toute partie intéressée :
1° pour une réclamation, le bénéficiaire ou l’entrepreneur;
2° pour une adhésion, l’entrepreneur.
La demande d’arbitrage concernant l’annulation d’une adhésion d’un entrepreneur ne suspend pas l’exécution de la décision de l’administrateur sauf si l’arbitre en décide autrement.»
(nos soulignés)
[77] L’Administrateur a pris note de l’entente entre les parties sans émettre de décision.
[78] Aucune décision n’ayant été rendue quant au point 1, le Tribunal n’a pas la compétence pour se prononcer à ce sujet.
[79] De plus, la demande d’arbitrage n’a pas été formulée à l’intérieur du délai de 30 jours prévu à l’article 19 du Règlement et la Bénéficiaire n’a offert aucune justification pour expliquer son retard.
[80] En effet, la Bénéficiaire a reçu la décision de l’Administrateur en date du 9 mars 2018.
[81] Dans un courriel de 9 juillet 2018, elle indiquait aux parties et au Tribunal la liste des «points restants», laquelle liste comprenait le point 1.
[82] En conséquence, le Tribunal rejette la demande d’arbitrage concernant le point 1.
Décision quant aux points 5 et 10
[83] En ce qui a trait aux points 5 et 10, la Bénéficiaire a manifesté, pour la première fois, son intention de les porter en arbitrage lors de la tenue de la conférence téléphonique du 4 juillet 2018.
[84] Par la suite, elle a confirmé ses demandes dans le courriel du 9 juillet 2018.
[85] Tout comme pour le point 1, elle n’a avancé aucune justification pour expliquer son retard.
[86] Les demandes d’arbitrage pour les points 5 et 10 n’ayant pas été formulées dans le délai de 30 jours prévu à l’article 19 du Règlement, le Tribunal les rejette.
Décision quant aux points 4 et 6
[87] Le Tribunal rappelle que la Bénéficiaire est la partie en demande et que c’est cette dernière qui a le fardeau de la preuve. En effet, «celui qui veut faire valoir un droit doit prouver les faits qui soutiennent sa prétention»[2].
[88] Ainsi, la Bénéficiaire a l’obligation de convaincre le Tribunal du caractère erroné de la Décision concernant les points 4 et 6.
[89] Ces deux éléments ont été découverts et dénoncés par la Bénéficiaire dans l’année suivant la réception de l’Unité.
[90] En conséquence, pour être couvertes par la garantie, ces deux situations doivent répondre aux critères énoncés à l’article 27 3° du Règlement, qui se lit comme suit :
«27. La garantie d’un plan dans le cas de manquement de l’entrepreneur à ses obligations légales ou contractuelles après la réception de la partie privative ou des parties communes doit couvrir:
3° la réparation des malfaçons existantes et non apparentes au moment de la réception et découvertes dans l’année qui suit la réception, visées aux articles 2113 et 2120 du Code civil et dénoncées, par écrit, à l’entrepreneur et à l’administrateur dans un délai raisonnable de la découverte des malfaçons».
Point 4
[91] La Bénéficiaire souhaite que l’espacement d’une planche du plancher stratifié à la jonction du carrelage de céramique de la cuisine soit couvert par la garantie.
[92] Or, l’espacement n’est pas visible en position debout.
[93] À l’invitation de la Bénéficiaire, la soussignée s’est penchée vers le plancher et la Bénéficiaire a dû prendre une lampe qu’elle a placée dans un angle bien précis, et ce, afin de lui montrer l’espacement.
[94] La Bénéficiaire ne s’est pas déchargé de son fardeau de preuve et n’a pas convaincu le Tribunal du bien-fondé de ses prétentions.
[95] Le Tribunal rejette la demande d’arbitrage relative au point 4 de la Décision.
Point 6
[96] La preuve de la Bénéficiaire a été offerte en deux volets, soit :
[96.1] son témoignage à l’effet que la glace se forme lorsque la température extérieure se situe sous les moins 10 degrés Celsius et qu’il y en a de décembre à février; et
[96.2] la production de quatre Photographies et d’une vidéo qu’elle a prises le 15 janvier 2018. Toutefois, elle n’a pas précisé quelle était la température extérieure au moment de la prise des Photographies et vidéo.
[97] De son côté, l’Administrateur, après avoir pris des lectures de températures au pourtour de la porte-fenêtre, écarte la possibilité d’infiltration d’air.
[98] En ce qui a trait à la formation de glace, madame Bédard n’en a pas constaté lors de sa visite du 30 janvier 2018, alors que la température extérieure était de moins 10 degrés Celsius. Ce qui contredit les dires de la Bénéficiaire.
[99] L’Administrateur argumente qu’avec les données fournies par la Bénéficiaire, il est logique de penser que la condensation formée ait gelée lors d’une baisse de température se situant entre moins 20 et moins 35 degrés Celsius.
[100] Pour l’Entrepreneur, la résistance thermique d’une porte-fenêtre n’est pas comparable à celle des murs ou même des fenêtres à manivelle.
[101] Il est courant que de la condensation se forme sur les surfaces vitrées lorsque le niveau d’humidité à l’intérieur est élevé et qu’il y a un écart important entre la température intérieure et extérieure.
[102] Avec la preuve soumise dans cette affaire, le Tribunal ne peut en arriver à la conclusion que l’Administrateur a émis une décision erronée quant au point 6 de la Décision.
[103] La Bénéficiaire ne s’est pas déchargée de son fardeau de preuve et n’a pas convaincu le Tribunal du bien-fondé de ses prétentions.
[104] En conséquence, la demande d’arbitrage est rejetée.
Décision quant aux coûts de l’arbitrage
[105] L’article 123 du Règlement prévoit ;
«Les coûts de l’arbitrage sont partagés à parts égales entre l’administrateur et l’entrepreneur lorsque ce dernier est le demandeur.
Lorsque le demandeur est le bénéficiaire, ces coûts sont à la charge de l’administrateur à moins que le bénéficiaire n’obtienne gain de cause sur aucun des aspects de sa réclamation, auquel cas l’arbitre départage ces coûts.
Seul l’organisme d’arbitrage est habilité à dresser le compte des coûts de l’arbitrage en vue de leur paiement.»
[106] L’Administrateur demande que la Bénéficiaire soit condamnée à payer 25% des coûts de l’arbitrage pour les motifs indiqués aux paragraphe 71 et 72.2 de la présente et avait également demandé que cette dernière assume les frais reliés à la conférence téléphonique du 14 juin 2018.
[107] En premier lieu, il est vrai que la Bénéficiaire ne s’est pas jointe à la conférence téléphonique du 14 juin 2018, malgré la fixation de celle-ci en fonction de ses disponibilités, de la convocation qui lui a été transmise et des tentatives pour la rejoindre après le début de la conférence.
[108] De plus, elle n’a jamais offert d’explication pour justifier cette absence.
[109] En conséquence, le Tribunal considérera les frais encourus ainsi que le temps passé au regard de cette conférence, dans le partage des coûts d’arbitrage.
[110] Toutefois, le Tribunal n’a pas l’intention de tenir compte des ressources investies par l’Administrateur dans le traitement du dossier de réclamation, pour départager les coûts d’arbitrage.
[111] De plus, nous rappelons que toutes les parties ont le droit de présenter l’ensemble de leur preuve devant le Tribunal.
[112] Suivant l’appréciation des faits, des témoignages et de la preuve offerte à l’audience ainsi que de la compréhension du Règlement, de la jurisprudence connue, le Tribunal constate l’entente stipulée au point 1 et maintient les points 4, 5, 6 et 10 de la décision de l’Administrateur, le tout sans préjudice et sous toute réserve du droit des parties de porter devant les tribunaux civils leurs prétentions.
[113] Après avoir pris connaissance des pièces, des témoignages et des arguments des parties, le Tribunal d’arbitrage, sur demande, rend les conclusions suivantes:
POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL D’ARBITRAGE :
CONSTATE l’entente stipulée au point 1 de la décision de l’Administrateur;
MAINTIENT les points 4, 5, 6 et 10 de la décision de l’Administrateur;
RÉSERVE à l’Administrateur ses droits à être indemniser par l’Entrepreneur, pour tous travaux, toute(s) actions(s) et toute somme versée incluant les coûts exigibles pour l’arbitrage (par. 19 de l’annexe II du Règlement) en ses lieux et place, et ce, conformément à la Convention d’adhésion prévue à l’article 78 du Règlement;
LE TOUT conformément au Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs, notamment les articles 116 et 123 :
Boucherville, le 14 janvier 2019
______________________________
Me Jacinthe Savoie
Arbitre / Soreconi