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ARBITRAGE En vertu du Règlement
sur le plan de garantie |
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CANADA |
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PROVINCE DE QUÉBEC |
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Groupe d’arbitrage et de médiation sur mesure (GAMM) |
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Dossier no : |
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GAMM |
2014-16-015 |
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QH |
56183-6979 |
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Date : |
27 mars 2015 |
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DEVANT L’ARBITRE : |
JEAN MORISSETTE |
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PIERRE ST-LAURENT |
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-et- DENISE L’ANGLAIS ST-LAURENT
Bénéficiaire |
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c. |
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LES HABITATIONS SIGNATURE INC. |
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Entrepreneur |
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Et |
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LA GARANTIE HABITATION DU QUÉBEC INC. |
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Administrateur |
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SENTENCE ARBITRALE |
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[1] Il s’agit d’une demande d’arbitrage du 17 juillet 2014 concernant la décision rendue par l’Administrateur du Plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs;
[2] Il a été reconnu que ma nomination était faite légalement et que j’avais juridiction pour entendre et décider de l’arbitrage formé en vertu du Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs (L.R.Q., c. B-1,1-a. 185, paragraphes 19.3 à 19.6, 38 et 192), ci-après le règlement ;
[3] Les parties ont accepté que ma décision soit rendue plus de 30 jours suivant l’audition si cela s’avérait le cas;
[4] Aucune requête préliminaire n’a été présentée par l’une ou l’autre des parties;
[5] Le cahier de pièces émis par l’Administrateur est déposé de consentement pour faire preuve de son contenu;
[6] Les témoins ont été assermentés avant d’être entendus ;
CONSTATS
[7] Comme il a été établi à l’avis d’audition, je me suis transporté à l’unité sujet de la demande d’arbitrage en compagnie des parties et de leur représentant;
[8] J’ai alors fait les constats que :
· Lorsque le Bénéficiaire passe le balai, il apparaît des poussières en surface du plancher;
· À chaque fois qu’il passe le balai, il y a un amoncellement de poussière;
· Le balai utilisé est de type «balai magique»;
· Il y a quelques fendillements (3) du revêtement de plancher de bois naturel (plancher flottant, placage de bois, collés sur un substrat;
· De légers craquements se font entendre sous le pas;
· Il n’y a aucun soulèvement, bombement du revêtement du plancher apparent ou senti sous le pas;
· Le plancher a une belle apparence, il n’y a rien qui laisse soupçonner la présence d’une déficience d’usage;
LA PREUVE
[9] Les Bénéficiaires ont choisi de ne pas convoquer leur expert pour témoigner. Malgré la possibilité qui leur a été offerte de requérir la remise de l’audition puisque les procureurs des autres parties s’objectaient au dépôt du rapport en preuve, les Bénéficiaires choisissent de continuer l’audition sans faire usage de ce rapport;
[10] Comme je leur en ai fait mention, les dispositions du Code de procédure civile du Québec édictent que le rédacteur d’un document pour être admis en preuve doit être présent pour qu’une autre partie puisse vérifier de la qualité, pertinence, véracité, méthode de travail, opinions et conclusions d’u rapport d’expertise. Pour servir en preuve, un document doit avoir fait l’objet d’un avis à cet effet et ainsi les autres parties peuvent choisir ou non d’exiger la présence de la personne signataire. L’article 294.1 du code de procédure civile est formel sur ce sujet :
294.1. Le tribunal peut accepter à titre de témoignage une déclaration écrite, pourvu que cette déclaration ait été communiquée et produite au dossier conformément aux règles sur la communication et la production des pièces prévues au présent titre.
Une partie peut exiger que la partie qui a communiqué la déclaration assigne le témoin à l'audience, mais le tribunal peut la condamner à des dépens dont il fixe le montant, lorsqu'il estime que la production du témoignage écrit eût été suffisante.
[11] J’ai fait droit à l’objection et ainsi refusé le dépôt du document que les Bénéficiaires souhaitaient produire en preuve;
TÉMOINS
[12] Monsieur Pierre St-Laurent est propriétaire de l’unité depuis décembre 2010. Il débute son témoignage en soulevant que les renseignements transmis par l’Entrepreneur aux pages 6 et 7 de la décision sous examen, pièce A-2, ne sont pas exacts;
[13] Effectivement et c’est admis par les autres parties, le croquis de la page 7 qui est un extrait du plan de construction est pour un modèle de G, alors que son modèle est de type H;
[14] Il a appris par le sous-entrepreneur poseur de plancher, monsieur Dubé, que le revêtement de plancher ne provient pas de Satin Finish, mais plutôt de la firme Kultur. Ce renseignement apparait au formulaire de spécifications de plancher pour le 700, des Sureaux, appartement 5, pièce B-1, formulaire utilisé par l’Entrepreneur;
[15] Les Bénéficiaires ont fait l’acquisition d’une unité modèle et n’ont pas choisi les matériaux utilisés;
[16] Ils reconnaissent leurs signatures à la pièce A-4 du 13 octobre 2010, portant la mention « condo modèle vendu tel que vu »;
[17] Selon le Bénéficiaire, les bruits sous le pas sont produits par l’écrasement des poussières de matériaux qui n’ont pas été balayées avant la pose du revêtement;
[18] Lors de la lettre de dénonciation du 19 janvier 2014, il avait constaté les craquements plus ou moins six (6) mois avant puis il admet que le problème de poussière constaté existe depuis 2010. Il ajoutera qu’aujourd’hui, il y en a 5 à 10 fois plus;
[19] Madame L’Anglais, Bénéficiaire, mentionne ne pas vouloir témoigner n’ayant rien à ajouter à ce qu’a dit M. St-Laurent;
[20] Aucun autre témoin ne sera entendu de la part de l’Entrepreneur et l’Administrateur;
ANALYSE
[21] Selon le Bénéficiaire, il n’est pas agréable d’avoir de la poussière sous le balai à chacune des fois qu’il est passé. Il s’agit d’un gros inconvénient;
[22] Par ailleurs, il reconnaît dans sa plaidoirie que les bruits de plancher constatés ne sont pas concluants. Le matin de ma visite, il n’y avait pas, dans le silence des lieux, de bruits anormaux;
[23] Monsieur St-Laurent ira même jusqu’à admettre qu’il ne sait pas s’il y a ou non un problème dans la construction du plancher;
[24] En fait, la preuve des Bénéficiaires constitue en la présomption qu’il n’est pas normal que chaque fois qu’ils passent le balai, il se ramasse de la poussière en surface;
[25] Le léger fendillement de trois (3) lattes montrées n’est pas un aspect assez important pour ajouter à la présomption de vice de construction ou d’une malfaçon;
[26] De plus, rien dans la preuve de la présence de poussière « régulière du brin de scie que l’on balaie plusieurs fois par jour » ne me permet de conclure que cela entraine une perte partielle ou totale, voir même une diminution ou perte d’usage;
[27] Il n’y a effectivement aucun signe de perte du revêtement du plancher ou de signe qui montre que le plancher est mal posé. Il n’y a pas de preuve que la présence de poussière réduit l’usage des lieux ou est suffisamment grave pour affecter sa durée de vie ou réduire l’usage de l’unité d’habitation. Les bénéficiaires me sont apparus des gens en santé et pas du tout affectés par cette anormale présence de poussière sous le balai, sauf quant à des inconvénients de vie de gens vivant dans un milieu fortement urbanisé dont l’environnement est empreint de particules de ce qui les entoure;
[28] Il s’agit d’une unité modèle, pièces A-3 et A-4, vendue tel que vu et habité depuis décembre 2010;
[29] L’arbitre Jeanniot dans une décision du 5 septembre 2013 s’exprime ainsi au sujet des principes de preuve et de sa suffisance pour conclure à un vice caché trouvé entre la 3ième et 5ième année du plan de garantie :
« […] [58] Je rappelle ici, dans la présente instance, que les Bénéficiaires sont en demande et qu’à ce titre, ce sont ces derniers qui ont le fardeau de preuve;
[59] Sans que ce fardeau leur soit indu, ils ont néanmoins l’obligation de me convaincre que cette problématique tient du vice caché tel qu’il nous est connu de la doctrine et jurisprudence contemporaine;
[60] Sans trop m’attarder sur la définition de vice caché, nous savons qu’il doit s’agir d’une imperfection grave, un défaut inapparent, sérieux, une complication si importante que si l’acheteur en avait eu la connaissance, il aurait remis en question l’acquisition de ce bien. Ce vice doit être prouvé non seulement avec un examen approfondi mais démonstration doit de plus subsidiairement être faite de la remise en question de l’acquisition (ou de sa dévaluation). Rien ici ne m’a été suggéré;
[61] Avec respect pour tout opinion à l’effet contraire, la démonstration ne m’a pas été faite que ces « pop » ou craquements rendent la résidence impropre à l’usage auquel ses propriétaires la destine ou qui en diminue tellement l’usage que les Bénéficiaires ne l’auraient soit pas acquise ou n’en auraient pas donné tel prix s’ils les avaient connus; […][1]»
[30] Sur le même sujet, l’arbitre France Desjardins, le 13 juillet 2012 s’exprimera ainsi :
‘’ […] [67] Quoiqu’il soit légitime de se demander si l’inspecteur-conciliateur aurait rendu la même décision s’il avait été au courant du problème identifié par les experts pour le compte de l’Entrepreneur, la seule démonstration de craquements, décrits par l’Administrateur comme en deçà des seuils de tolérance généralement admis dans le milieu de la construction, permettrait tout au plus de considérer qu’il s’agit d’une malfaçon mais certainement pas un vice caché;
[68] Comme l’écrit Me Michel Jeanniot dans la décision Filomena Stante et Antonio Carriero c. Les Construction Oakwood Canada Inc et La Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ :
« les Bénéficiaires sont en demande et tel quiconque porte une demande devant un Tribunal d’arbitrage, c’est la demande qui a le fardeau de preuve, qui a le fardeau de convaincre; sans que ce fardeau ne soit indu, ce sont les Bénéficiaires demandeurs qui ont l’obligation de démontrer le caractère déraisonnable de la décision de l’Administrateur ou, subsidiairement, que les points qu’ils soulèvent sont recevables dans le cadre de l’application de contrat de garantie ».
[31] J’ajouterai qu’en vertu de l’article 2849 du Code civil du Québec, une présomption pour être conséquente doit être grave, précise et concordante, ce qui n’est pas le cas en espèce. Comme exprimé ci-avant, il est possible que la poussière provienne d’autres sources tels que l’environnement, les matières organiques, des matériaux d’usage de tous les jours (papiers de toutes sortes), travaux du quartier en construction, etc. Il n’y a pas ici de concordance entre la présence de poussière et un défaut dans la pose du plancher;
[32] De plus, les Bénéficiaires ont effectivement vécu avec la présence de poussière depuis décembre 2010. Il n’y a aucune preuve que ce soit d’un déficit d’usage. Malgré qu’ils aient recherché pendant tout ce temps la provenance des poussières, ils n’ont adressé leur plainte que le 19 janvier 2014. En plus de ne pas me convaincre de la présence d’un vice causant des dommages suffisamment graves pour me permettre de conclure à un vice caché, cette dénonciation tardive me permet plutôt de conclure, tout comme monsieur St-Laurent l’a répété, à la présence d’un inconvénient de vie tolérable. Certes, les propriétaires méritent peut-être d’en connaître la cause mais là n’est pas l’esprit du Règlement ou son application;
POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :
REJETTE la demande d’arbitrage des Bénéficiaires;
Conformément à l’article 123 du Règlement, les frais de l’arbitrage devant être payés par l’Administrateur, considérant les frais de l’expert payés par les Bénéficiaires;
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JEAN MORISSETTE |
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DENISE L’ANGLAIS ST-LAURENT PIERRE ST-LAURENT |
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Bénéficiaires |
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ME RAYMOND D’AOUST pour |
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LES HABITATIONS SIGNATURE INC. Entrepreneur |
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ME FRANÇOIS-OLIVIER GODIN pour |
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LA GARANTIE HABITATION DU QUÉBEC INC. Administrateur |
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Date d’audience : |
24 mars 2015 |
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Date de délibéré : |
24 mars 2015 |
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DENISE L’ANGLAIS ST-LAURENT PIERRE ST-LAURENT 700, rue des Sureaux, appartement 5 Boucherville (Québec) J4B 0C8 Bénéficiaires Et |
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ME RAYMOND D’AOUST |
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CROCHETIÈRE PÉTRIN. |
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5800, Louis-H Lafontaine |
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Montréal (Québec) H1M 1S7 |
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Entrepreneur |
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Et |
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ME FRANÇOIS-OLIVIER GODIN pour |
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LA GARANTIE HABITATION DU QUÉBEC INC. |
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9200, boulevard Métropolitain Est |
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Montréal (Québec) H1K 4L2 |
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Administrateur |
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[1] Laura Borrelli et Georges Sousa c. Le Groupe Platinum Construction 2001 Inc. & La Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ, CCAC : S11-051701-NP, décision du 5 septembre 2013.