ARBITRAGE
En vertu du Règlement sur le plan de garantie
des bâtiments résidentiels neufs
(Chapitre B-1.1, r. 8)
CANADA
Province du Québec
Organisme d’arbitrage autorisé par la Régie du bâtiment du Québec :
Centre Canadien d’Arbitrage Commercial (CCAC)
No dossier Garantie : 155878-9352
No dossier CCAC : S23-050302-NP
_____________________________________________________________________Entre
Syndicat de la copropriété du 2572 à 2606, avenue de la Gare
Bénéficiaire
ET
9211-4057 Québec Inc.
Entrepreneur
ET
Garantie Construction Résidentielle (GCR)
Administrateur
SENTENCE ARBITRALE
Arbitre : Roland-Yves Gagné
Pour le Bénéficiaire : Émilie Nolin, présidente
Geneviève Landry, administratrice
Pour l’Entrepreneur : Me Philippe Louis Tremblay
Me Anne-Marie Simard
Pour l’Administrateur : Me Marc Baillargeon
Dates de l’audience : 6 décembre 2023 et 31 janvier 2024
Date de la sentence : 5 février 2024
DESCRIPTION DES PARTIES
BÉNÉFICIAIRE:
Syndicat de la copropriété
du 2572 à 2606, avenue de la Gare
2582 avenue de la Gare
Mascouche, Qc. H7K 0X1
a/s Madame Émilie Nolin
ENTREPRENEUR :
9211-4057 Québec Inc.
1981, rue Bernard-Pilon
Beloeil, Qc. J3G 4S5
a/s Me Philippe Louis Tremblay
Me Anne-Marie Simard
DBL avocats d’affaires
2307 boulevard René-Lévesque Ouest bureau 230
Montréal, Qc. H3H 1R7
ADMINISTRATEUR :
Garantie Construction Résidentielle
a/s Me Marc Baillargoen
4101 3e étage, rue Molson
Montréal, Qc. H1Y 3L1
Tribunal d’arbitrage
Roland-Yves Gagné
Arbitre/Centre Canadien d'Arbitrage Commercial
Place du Canada
1010 ouest, de la Gauchetière #950
Montréal, Qc. H3B 2N2
Pièces
Le Bénéficiaire a produit les pièces suivantes :
B-1 : (Power Point – Maçonnerie Cadieux) 2606 avenue de la Gare;
B-2 : Facture #1610 Syndicat des copropriétaires;
B-3 : Facture 1234_de_UTF8QGirardC389lectrique;
B-4 : Fissure brique_acceptation;
B-5 : Preuve de suivi du SDC 2021;
B-6 : Sommaire travaux Trigone;
B-7 : Suivi remboursement luminaire;
B-8 : Suivis SDC 2021;
B-9 : Suivis_fissure;
B-10 : Courriel du 14 mars 2022 (reçu à l’audience du 6 décembre 2023);
Pièces supplémentaires produites en janvier 2024;
B-11 : Première visualisation fissure brique – 25 avril 2022 : « Avec Daniel j’ai remarqué une grosse craque sur une brique et le mortier juste au dessus de leur porte-patio. Je suis inquiète par rapport à la raison d’une telle fissure » (avec photo);
B-12 : Attente sous-traitant 28 oct 2021 (courriel de l’Entrepreneur);
B-13 : Preuve envoi aux SS_chantier (échange février 2021);
B-14 : Preuve envoi aux SS_chantier_1 (échange février 2021);
B-15 : Réception rapport des parties communes (8 janvier 2021) « Sous peu, vous recevrez une mise à jour des travaux dans lequel l’entrepreneur statuera sur les points qui serons reconnus ou non);
B-16 : Relance 2 juin 2022 (sms envoyé par le Bénéficiaire sollicitant un appel téléphonique);
B-17 : Suivi mars sept 2022;
B-18 : Visite inspection 20oct2020.
L’Administrateur a produit les pièces suivantes :
Document(s) contractuel(s)
A-1 Avis de fin de travaux signé le 9 septembre 2020;
A-2 Procès-verbal de la réunion du CA du syndicat des copropriétaires daté du 14 octobre 2020;
A-3 Rapport d’inspection pré-réception effectué par Richard Oliva daté du 6 janvier 2021, suivant la visite du 24 octobre 2020 ;
Dénonciation(s) et réclamation(s)
A-4 Courriel du Bénéficiaire transmis à l’Entrepreneur le 31 octobre 2022, incluant :
Formulaire de dénonciation (1) daté du 31 octobre 2022;
Formulaire de dénonciation (2) daté du 31 octobre 2022;
Échange de courriels daté du 6 juillet 2021 au 30 juillet 2021;
Échange de courriels daté du 5 janvier 2022 au 12 janvier 2022;
Échange de courriels daté du 7 mars 2022 au 14 mars 2022;
A-5 Formulaire de réclamation signé par le Bénéficiaire le 24 novembre 2022;
A-6 Le courriel de l'avis de 15 jours transmis par l'Administrateur à l'Entrepreneur et au Bénéficiaire le 6 décembre2022, incluant:
Formulaire de dénonciation (1) daté du 31 octobre 2022 (voir A-4);
Formulaire de dénonciation (2) daté du 31 octobre 2022 (voir A-4);
Formulaire vierge de mesures à prendre par l’Entrepreneur (non inclus dans le cahier);
Correspondance(s)
A-7 Courriel du Bénéficiaire transmis à l’Administrateur le 10 janvier 2023, incluant :
Courriel du 26 avril 2022 ;
Autre(s) document(s) pertinent(s) et/ou expertise(s)
A-8 Relevé du Registraire des entreprises du Québec concernant l’Entrepreneur;
A-9 Relevé du Registraire des entreprises du Québec concernant le Syndicat de la copropriété du 2572 à 2606;
A-10 Mise à jour des travaux;
Décision(s) et demande(s) d'arbitrage
A-11 En liasse, la décision de l'Administrateur datée du 6 avril 2023 ainsi que la preuve d’envoi au Bénéficiaire et l’Entrepreneur;
A-12 En liasse, courriel de la notification de l'organisme d'arbitrage daté du 9 mai 2023 incluant :
Demande d’arbitrage de l’Entrepreneur daté du 3 mai 2023;
Décision de l’Administrateur (voir A-10);
Lettre de notification de l’organisme d’arbitrage et nomination de l’arbitre datée du 9 mai 2023;
A-13 Curriculum vitae de la conciliatrice Anne Delage.
Table des matières
INTRODUCTION 5
Objet de l’arbitrage 5
Réception et dénonciation 6
PLAIDOIRIES 6
Le Syndicat Bénéficiaire 6
L’Entrepreneur 7
L’Administrateur 7
DÉCISION 8
Rappel du droit applicable 8
Les points dont la première étape de la demande d’arbitrage est accueillie quant aux délais de dénonciation : point 1 (revêtement extérieur de maçonnerie comportant des déficiences), point 2 (revêtement métallique, fascias et soffites déficients), point 3 (unité 2585 - main courante endommagée), point 7 (luminaire) 11
La Covid-19 11
Quant aux points 1, 2 et 3 12
Quant au Point 7 (luminaire éclairant le stationnement non fonctionnel) 13
Renvoi à l’Administrateur pour qu’il rende une nouvelle décision sur les points 1, 2 et 3 et 7 - Particularité des points 1 et 7 : des travaux ont été faits (points 2, 3 pas corrigés) 14
Quant au point 1 où le Bénéficiaire a effectué des travaux en octobre 2023 14
Quant au point 7 où le Bénéficiaire a effectué des travaux en octobre 2021 16
Les points dont la première étape de la demande d’arbitrage est rejetée et la décision de l’Administrateur maintenue 16
Point 4 revêtement extérieur: scellant multiple manquant 17
Point 6 unité 2606 - prise de courant extérieure arrière non fonctionnelle 17
Point 8 rangement intérieur à la cour arrière 17
Point 9 lampadaire de trottoir chambranlant 18
Point 10 absence de poignées aux portes des rangements sous les balcons 18
Point 11 crépi/béton aux escaliers inégal 19
Point 12 unité 2586 - fissure à la dalle de béton de la terrasse 19
Point 14 unité 2606 - perte d'espace sur le balcon 19
Point 15 unité 2582 - isolation de la porte fenêtre déficiente 19
Point 16 unité 2590 - plomberie bruyante 19
Point 18 unité 2606 - fixation de la balustrade du balcon déficiente 19
RÉSERVE DES DROITS 20
FRAIS D’ARBITRAGE 20
CONCLUSION 21
[1] Le Tribunal d’arbitrage est saisi d’une demande d’arbitrage en vertu du Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs (ci-après, le Règlement) du Syndicat Bénéficiaire, reçue par le CCAC le 3 mai 2023 et par la nomination du soussigné comme arbitre le 9 mai 2023.
[2] Lors d’une conférence de gestion tenue le 11 septembre 2023, le Tribunal a souligné au Bénéficiaire que l’Administrateur ne s’était pas prononcé sur le fond de sa réclamation, mais l’avait rejetée sur une seule base, soit qu’il considère que le délai de dénonciation n’a pas été raisonnable au sens de l’article 27 du Règlement.
[3] Suite aux discussions lors de la conférence de gestion, il a été décidé, le tout entériné dans une sentence arbitrale de gestion émise le même jour, qu’il serait dans le meilleur intérêt de la justice et des parties de procéder en deux étapes:
[3.1] 1ère étape : Puisque la décision de l’Administrateur du 6 avril 2023 ;
[3.1.1] a rejeté la réclamation du Bénéficiaire en qualifiant le délai de dénonciation de déraisonnable ;
[3.1.2] sans se prononcer ;
3.1.2.1. sur le fond des problématiques alléguées et, le cas échéant,
3.1.2.2. si le fond de ces problématiques alléguées était couvert par le Plan de Garantie,
cette réclamation était-elle recevable vu le délai de dénonciation prévu au Règlement? ;
[3.2] 2ième étape : En cas de réponse positive à la première étape, en totalité pour tous les points ou en partie ;
[3.2.1] les parties seront convoquées pour une seconde audition à une autre date, dans le but de trancher la question à savoir, l’immeuble du Bénéficiaire est-il atteint de la malfaçon ou vice allégué(s) par le Bénéficiaire et ce(s) malfaçon(s) ou vice vice(s) est-il (sont-ils) couvert(s) par le Plan de Garantie géré par l’Administrateur;
[3.2.2] alternativement, le Tribunal d’arbitrage sera prêt à considérer toute autre mesure, incluant le renvoi à l’Administrateur pour qu’il rende une décision sur le fond.
[4] Le Bénéficiaire a affirmé lors de la conférence de gestion que le Syndicat s’était désisté de sa réclamation quant au point 17 et à l’audience, se désister du point 5 puis du point 13.
[5] L’audition s’est déroulée à deux dates différentes, le Tribunal ayant conclu de façon exceptionnelle, de permettre au Bénéficiaire de chercher et produire les courriels dont sa représentante faisait référence pendant le premier jour d’audition, le tout sur la base de l’arrêt de la Cour d’appel dans Consortium M.R. Canada Ltée c. Office municipal d’habitation de Montréal[1] à l’effet que la procédure du processus d’arbitrage devait être « plus souple ».
[6] Avant le début de la seconde journée, le Tribunal a aussi souligné au Bénéficiaire par courriel que le Règlement ne prévoyait pas la couverture pour les ouvrages situés à l’extérieur du bâtiment.
[7] D’après la décision de l’Administrateur, la réception des parties communes a eu lieu le 24 octobre 2020, date de la visite du professionnel du bâtiment ; toutefois, le rapport d’inspection est daté du 6 janvier 2021.
[8] La représentante du Syndicat, Émilie Nolin, dit avoir été présente à l’inspection du 24 octobre 2020 et personne d’autre n’était présent à cette inspection à part l’inspecteur – elle affirme que l’Entrepreneur était au courant qu’il y aurait cette inspection, l’ingénieur Gabriel Dupuis qui a fait la livraison avait été avisé.
[9] Le Tribunal traitant de la preuve au même chapitre que celui où il traite de sa décision, le soussigné reproduit ici la plaidoirie des parties et de l’Administrateur.
[10] Après avoir produit leur preuve, traitée ci-après, les parties et l’Administrateur ont plaidé ce qui suit.
[11] Le Syndicat Bénéficiaire plaide que pour ses membres qui ont acheté leur propriété de Trigone (l’Entrepreneur), Trigone était une compagnie de construction qui s’imposait un professionnalisme obligatoire.
[12] De prime abord, la confiance régnait avec les acheteurs ; d’ailleurs, pourquoi auraient-ils dû se méfier de Trigone quand ils sont face à une entreprise d’une telle envergure, ne sont-ils pas entre de bonnes mains?
[13] D’emblée, c’est ce qu’ils ont cru et rien ne pouvait leur faire croire qu’ils avaient tort.
[14] Quand les premiers problèmes sont survenus, Trigone a répondu présent avec une rapidité et une efficacité redoutables.
[15] La représentante du Syndicat Bénéficiaire Geneviève Landry affirme que quand elle a acheté, ils sont venus tout de suite réparer quand elle avait des choses à réparer, il n’y avait rien qui permette de faire douter d’eux au départ.
[16] Ils (les acheteurs) ont été très satisfaits au départ du service après-vente.
[17] Après quelques temps c’est devenu plus difficile de se faire servir selon les normes.
[18] L’après-pandémie frappait dur, ils (les acheteurs) devaient être patients et indulgents ;
[18.1] la représentante veut vraiment mettre l’accent sur cela car tout le temps où ils se sont parlés, on était vraiment de bonne foi et on n’arrêtait pas de se dire, si c’est dur ce qu’on vit, ça doit être dur pour eux aussi, ils ont pleins de problèmes à régler, il faut être patient, on ne voulait pas les condamner au départ.
[19] De plus, Trigone continuait de répondre à leurs messages, ce qui leur laissait croire à un proche règlement, rien ne leur faisant croire que la compagnie allait les laisser tomber.
[20] C’était impossible dans leur tête qu’ils (Trigone) désertent sans leur donner de réponse.
[21] Maintenant qu’ils (le Syndicat) connaissent la suite des choses, après coup, ils auraient dû réagir plus rapidement.
[22] Maintenant qu’ils connaissent la réputation de Trigone, qu’ils savent qu’elle ne respecte pas ses engagements, on aurait pu agir plus efficacement mais il faut se reporter au moment des évènements, pourquoi auraient-ils douter de Trigone, pourquoi blâmer aujourd’hui leur bonne foi au lieu de blâmer leur non-engagement.
[23] En bref, ils ne sont que des personnes ordinaires qui ont investi pour la plupart la totalité de leurs économies dans ce qui leur semblait être un bon choix.
[24] Ils ont agi selon leur connaissance et ils ont décidé de laisser la chance au coureur de réparer leurs vices et leur tort.
[25] Il n’est pas juste d’être condamné pour avoir tenté de bien faire, juste ce qu’ils veulent, c’est un immeuble en santé, demande qui est totalement légitime.
[26] La procureure de l’Entrepreneur dit s’en remettre à la décision du Tribunal.
[27] Elle souligne que l’Entrepreneur n’a plus de permis de la RBQ pour effectuer des travaux correctifs sur cet immeuble, à supposer que de tels travaux soient ordonnés.
[28] Le procureur de l’Administrateur rappelle que le fardeau de la preuve repose sur le Syndicat Bénéficiaire.
[29] Le Syndicat doit démontrer en quoi la décision rendue ne respecte pas le Règlement ou devrait être renversée ou modifiée par le Tribunal.
[30] En regardant la preuve au dossier et à l’audience, cela vient renforcer la décision déjà rendue.
[31] Le délai n’a pas été respecté contre la GCR.
[32] Quant aux points déjà corrigés, pour le point numéro 7, luminaire qui éclaire le stationnement, la facture de l’électricien est de 2021, ces travaux ont été faits avant même que la réclamation ait été faite, avant même qu’il y ait eu une dénonciation à la GCR.
[33] Dans un tel cas on ne peut pas juste fournir une facture par après pour des travaux effectués avant une dénonciation ; le but du Règlement est de permettre à GCR, dès qu’elle reçoit une dénonciation à l’effet qu’il y a un problème quelconque, que l’on puisse aller inspecter, puisse aller constater des choses et voir si c’est couvert et dans la mesure où c’est couvert, là d’intervenir.
[34] Quand le Syndicat a déjà fait des travaux avant même de dénoncer et qu’il réclame des remboursements ce n’est pas couvert ; ce qui est offert n’est pas une assurance qui paie les factures justifiées selon les circonstances, le but premier de GCR est de faire les réparations nécessaires quand c’est couvert par le plan.
[35] En réponse à la plaidoirie du Syndicat Bénéficiaire qui ne peut laisser insensible, le Tribunal souligne qu’il n’entend pas un recours contre Trigone ou la société Entrepreneur en vertu du droit commun mais contre l’Administrateur du plan de garantie en vertu du Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs.
[36] L’Administrateur du plan de garantie GCR ne gère pas un plan d’indemnisation universelle.
[37] Avec égards, le Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs n’est pas un chapitre du Code civil, ni une loi de l’Assemblée nationale, mais un Décret gouvernemental adopté en vertu de la Loi sur le bâtiment, Règlement qui stipule, à ses articles 7 et 74 :
7. Un plan de garantie doit garantir l'exécution des obligations légales et contractuelles d'un entrepreneur dans la mesure et de la manière prévues par la présente section.
74. Aux fins du présent règlement et, en l'absence ou à défaut de l'entrepreneur d'intervenir, l'administrateur doit assumer tous et chacun des engagements de l'entrepreneur dans le cadre du plan approuvé.
[38] Notre Cour d’appel[2] a jugé à plusieurs reprises que le Règlement était d’ordre public.
[39] Comme mentionné au paragraphe [3], l'audience d’arbitrage a visé à déterminer si le Bénéficiaire avait produit sa réclamation dans un délai raisonnable au sens du Règlement (articles 27 et 35.1), qui est le motif de rejet de sa réclamation selon la décision de l’Administrateur, portée en arbitrage :
[39.1] pour le lecteur peu familier avec le Règlement, le deuxième alinéa de l’article 35.1 du Règlement a été ajouté en 2015[3], tout comme l’article 27 a été modifié pour enlever la limite de six mois au délai raisonnable; ces modifications rendent caduques beaucoup de décisions arbitrales et judiciaires rendues pour des bâtiments construits avant 2015, qui impliquaient d’autres plans de garantie que la GCR arrivée en 2015 ;
Article 27 La garantie d’un plan dans le cas de manquement de l’entrepreneur à ses obligations légales ou contractuelles après la réception de la partie privative ou des parties communes doit couvrir:
1° le parachèvement des travaux dénoncés, par écrit:
a) [...];
b) par le professionnel du bâtiment, au moment de la réception des parties communes. Pour la mise en œuvre de la garantie de parachèvement des travaux du bâtiment, le bénéficiaire transmet par écrit sa réclamation à l’entrepreneur et en transmet copie à l’administrateur dans un délai raisonnable suivant la date de fin des travaux convenue lors de la réception;
2° la réparation des vices et malfaçons apparents visés à l’article 2111 du Code civil et dénoncés, par écrit, au moment de la réception ou, tant que le bénéficiaire n’a pas emménagé, dans les 3 jours qui suivent la réception. Pour la mise en œuvre de la garantie de réparation des vices et malfaçons apparents du bâtiment, le bénéficiaire transmet par écrit sa réclamation à l’entrepreneur et en transmet copie à l’administrateur dans un délai raisonnable suivant la date de fin des travaux convenue lors de la réception;
3° la réparation des malfaçons existantes et non apparentes au moment de la réception et découvertes dans l’année qui suit la réception, visées aux articles 2113 et 2120 du Code civil et dénoncées, par écrit, à l’entrepreneur et à l’administrateur dans un délai raisonnable de la découverte des malfaçons;
4° la réparation des vices cachés au sens de l’article 1726 ou de l’article 2103 du Code civil qui sont découverts dans les 3 ans suivant la réception et dénoncés, par écrit, à l’entrepreneur et à l’administrateur dans un délai raisonnable de la découverte des vices cachés au sens de l’article 1739 du Code civil; [...]
Article 35.1 Le non-respect d’un délai de recours ou de mise en œuvre de la garantie par le bénéficiaire ne peut lui être opposé lorsque l’entrepreneur ou l’administrateur manque à ses obligations prévues aux articles 33, 33.1, 34, 66, 69.1,132 à 137 et aux paragraphes 12, 13, 14 et 18 de l’annexe II, à moins que ces derniers ne démontrent que ce manquement n’a eu aucune incidence sur le non-respect du délai ou, à moins que le délai de recours ou de mise en œuvre de la garantie ne soit échu depuis plus d’un an.
Le non-respect d’un délai ne peut non plus être opposé au bénéficiaire, lorsque les circonstances permettent d’établir que le bénéficiaire a été amené à outrepasser ce délai suite aux représentations de l’entrepreneur ou de l’administrateur.
[40] La preuve démontre que l’Entrepreneur n’a pas participé à l’inspection pré-réception comme c’est son obligation selon le troisième alinéa de l’article 33.1 du Règlement, auquel fait référence le premier alinéa de l’article 35.1 du Règlement, toutefois, le remède indiqué à cet article est limité à un an (art. 35.1 : à moins que le délai de recours ou de mise en œuvre de la garantie ne soit échu depuis plus d’un an).
Les parties communes visées par la garantie doivent être inspectées avant leur réception. Cette inspection doit être effectuée conjointement par l’entrepreneur, le professionnel du bâtiment choisi par le syndicat de copropriétaires et ce dernier à partir d’une liste préétablie d’éléments à vérifier fournie par l’administrateur.
[41] Reste le second alinéa de l’article 35.1 du Règlement : alors que le Code civil (art. 2803[4]) stipule que le fardeau de la preuve appartient à qui fait une demande en sa faveur, c’est le Bénéficiaire, sous l’article 35.1 du Règlement, qui doit prouver que « les circonstances permettent d’établir que le bénéficiaire a été amené à outrepasser ce délai suite aux représentations de l’entrepreneur ».
[42] Les acheteurs d’une unité de copropriété, et le Syndicat, n’ont aucune obligation de faire appel à la Garantie GCR en cas de problème toutefois, s’ils veulent bénéficier de la garantie offerte par le Règlement, ils doivent impérativement se conformer aux dispositions du Règlement.
[43] Dans son arrêt Consortium MR Canada ltée c. Montréal (Office municipal d'habitation de)[5], la Cour d’appel confirme la coexistence des recours en vertu du Règlement et du droit commun, le Règlement étant un complément aux garanties du droit commun :
[17] La juge avait raison de souligner les différences de vocation entre les recours arbitral et de droit commun.
[18] La procédure d'arbitrage expéditive prévue au Règlement pour réparer rapidement les malfaçons est, comme le note la juge, un complément aux garanties contre les vices cachés du Code civil. [...].
[44] Vu la preuve, vu le Règlement, vu le droit applicable, le Tribunal considère n’avoir d’autres options que d’accueillir favorablement, à la première étape, la demande d’arbitrage du Bénéficiaire quant aux points 1, 2, 3 et 7, soit une dénonciation faite selon les conditions prévues au Règlement.
[45] Le Tribunal rappelle que sa décision ne porte que sur la première étape, le délai de dénonciation, et non sur le fond de la réclamation, sans que ce rappel ne puisse être interprété comme une opinion sur le fond dans un sens ou dans l’autre.
[46] C’est à la lumière de la preuve que le Tribunal considère l’application favorable de l’article 35.1 du Règlement pour les points 1, 2, 3 et 7 :
Article 35.1 Le non-respect d’un délai de recours ou de mise en œuvre de la garantie par le bénéficiaire ne peut lui être opposé lorsque l’entrepreneur ou l’administrateur manque à ses obligations prévues aux articles 33, 33.1, 34, 66, 69.1,132 à 137 et aux paragraphes 12, 13, 14 et 18 de l’annexe II, à moins que ces derniers ne démontrent que ce manquement n’a eu aucune incidence sur le non-respect du délai ou, à moins que le délai de recours ou de mise en œuvre de la garantie ne soit échu depuis plus d’un an.
Le non-respect d’un délai ne peut non plus être opposé au bénéficiaire, lorsque les circonstances permettent d’établir que le bénéficiaire a été amené à outrepasser ce délai suite aux représentations de l’entrepreneur ou de l’administrateur.
[47] Une évidence, évoquée dans plusieurs décisions arbitrales, est que chaque cas est un cas d’espèce, et le présent dossier est tout autant particulier.
[48] Le présent dossier est d’autant plus un cas d’espèce que les évènements clés se sont produits pendant la pandémie de la Covid-19.
[49] Il est de connaissance judiciaire qu’en octobre 2020, lors de l’inspection des parties communes, une grande partie du Québec était en zone rouge.
[50] Le Tribunal d’arbitrage réfère, pour ceux qui ne l’ont pas vécu, à la « ligne du temps 2021 » (et celles de 2020 et 2022 ») établie par l’Institut national de santé publique du Québec[6], consultée pendant le délibéré.
[51] Si cette situation est déterminante, à elle seule, la période influencée par la Covid n’est pas suffisante pour prolonger un délai, encore faut-il dans notre dossier, selon l’article 35.1 du Règlement, que l’Entrepreneur ait fait des représentations qui permettent d’établir que le Bénéficiaire a été amené à outrepasser le délai de dénonciation normalement jugé comme raisonnable.
[52] Les évènements qui suivent sont considérés par le Tribunal d’arbitrage dans le contexte particulier de la pandémie de la Covid-19.
[53] Madame Nolin dit avoir constaté les déficiences le 24 octobre 2020.
[54] Pour le point 1, il s’agit de la photo cotée entre autres A-7 (page 27 de 180 dans le pdf/cahier de pièces de l’Administrateur).
[55] Ajoutons que, bien que la date de l’inspection pré-réception soit le 24 octobre 2020, le rapport de cette inspection est daté du 6 janvier 2021 (pièce A-3), alors transmis à l’Entrepreneur, qui répond le 8 janvier 2021 qu’il allait lui revenir sur ce qui était accepté ou non « Sous peu, vous recevrez une mise à jour des travaux dans lequel l’entrepreneur statuera sur les points qui serons reconnus ou non ».
[56] En plus du contexte de la Covid-19, il y avait aussi le contexte hivernal : le 10 février 2021 (pièce B-13), l’Entrepreneur parle que des travaux ne pourront être effectués que dans des conditions estivales.
[57] Quant aux points 1, 2, et 3, le 28 octobre 2021 (pièce B-12), l’Entrepreneur s’engage encore une fois à faire les travaux :
Bonjour,
Nous travaillons toujours activement sur votre rapport d’inspection.
Voici une mise à jour des sous-traitants qui n’ont pas encore complétés les travaux :
- Maçon (page 16-17-18) : [Ajout du Tribunal : Point 1]
Nous l’avons relancer et celui-ci nous a mentionné qu’il allait nous revenir rapidement avec une date. Un suivi sera fait avec lui la semaine prochaine.
- Aluminium (page 21-37-50) : [Ajout du Tribunal : Point 2]
Nous l’avons relancer et celui-ci nous a mentionné que les travaux devraient débuter dans deux semaines. Nous ferons le suivi pour s’en assurer.
- Électricien (page 68-69-71) :
Nous l’avons relancer et celui-ci nous a mentionné qu’il allait nous revenir rapidement avec une date. Un suivi sera fait avec lui la semaine prochaine. Le luminaire défectueux sera retiré à ce moment et vous sera remis. Nous viendrons le chercher et vous donner le nouveau qui est présentement en commande pour que l’électricien l’installe.
- Main courante (page 37) : [Ajout du Tribunal : Point 3]
Nous avons une demande de service en cours pour remplacer la main courante bossé. Nous vous tiendrons au courant lorsque nous l’aurons reçu.
[58] Les conditions hivernales passées, l’Entrepreneur assure le même suivi avec les mêmes points le 14 mars 2022 (pièce B-10) :
Bonjour,
Vous trouverez ci-dessous mes commentaires pour chaque point.
Points sous-traitants : À noter que ceux-ci ont tous été contactés en date d’aujourd’hui et une relance sera effectué au mois d’avril.
- Maçon (page 16-18-22) :
J’ai relancé le sous-traitant, mais je n’ai pas eu de retour. Je vais vous faire un suivi lorsque j’aurai une réponse.
- Aluminium (page 21-37-50) :
J’ai relancé le sous-traitant, mais je n’ai pas eu de retour. Je vais vous faire un suivi lorsque j’aurai une réponse.
- Main courante (page 37) :
J’ai parlé avec le représentant au téléphone et celui-ci m’a confirmé que le changement va se faire cet été sans faute en même temps que d’autres travaux qu’ils doivent faire à Mascouche.
[59] Un SMS aussi produit dans A-7 daté du 26 avril 2022, confirme le rendez-vous à ce sujet pour le 9 mai 2022.
[60] Personne ne vient, de juin à septembre, le Bénéficiaire cherche à rejoindre l’Entrepreneur qui avait finalement cessé ses activités/transféré ses opérations.
[61] Le Tribunal conclut que le Bénéficiaire a rempli son fardeau de preuve sous l’article 35.1 du Règlement que les circonstances permettent d’établir que le bénéficiaire a été amené à outrepasser ce délai suite aux représentations de l’entrepreneur.
[62] La réclamation sur ce point n’est pas d’effectuer les travaux correctifs mais de rembourser une facture (pièce B-2) d’électricien daté du 28 octobre 2021, dont le remboursement a été promis par l’Entrepreneur, alors que la dénonciation a été envoyée à la GCR en octobre 2022.
[63] La pièce B-7 montre :
[63.1] le 12 janvier 2022, l’Entrepreneur affirme « votre facture a été transférer à la comptabilité. Elle sera payée dans les prochaines semaines » ;
[63.2] le 24 mars 2022, l’Entrepreneur s’engageait encore une fois par écrit à rembourser la facture : « Bonjour, J’ai bien vu le commentaire et la facture, merci. Je vais relancer le tout aujourd’hui et vous revenir dès que possible. Je serai indisponible la semaine prochaine alors je serai en mesure de vous revenir à partir du 4 avril. ».
[64] La présente sentence porte sur un délai de dénonciation pour une facture pour des travaux effectués un an avant la dénonciation à la GCR.
[65] Un reproche du procureur de l’Administrateur à l’audience a été le défaut par le Syndicat Bénéficiaire de ne pas avoir envoyé un préavis à l’Administrateur en octobre 2021 quand il a décidé de faire les travaux qui, d’après le Bénéficiaire, étaient urgents et nécessaires.
[66] Le Tribunal fait sienne l’interprétation du deuxième alinéa de l’article 35.1 du Règlement de son confrère Jean Philippe Ewart, arbitre, dans l’affaire Syndicat des copropriétaires N'Homade et Cap Immo Gestion inc.[7], qui résume ainsi la jurisprudence (le soussigné réfère aussi aux différentes décisions judiciaires citées dans cette décision avant les extraits ici reproduits) :
[97] Tentons de pourvoir à sommaire des éléments causals selon le Tribunal d’extension d’un délai autrement déraisonnable pour les fins du Règlement:
Suite à des travaux correctifs effectués de bonne foi par un entrepreneur, il peut y avoir suspension alors qu’un certain délai peut être requis pour constat si les correctifs ont eu l’effet escompté ;
Il est requis de procéder à une évaluation de nature factuelle du préjudice réel subi car il doit s’agir de plus qu’un simple préjudice de droit ;
Le délai a été outrepassé par un bénéficiaire suite aux représentations de l’entrepreneur ou de l’administrateur, et selon le cas, sujet à suspension du délai ou interruption ;
Dans un cadre de représentations frauduleuses, de dol, et généralement d’actions ou omissions de mauvaise foi de l’Entrepreneur ceci peut emporter une interruption du délai, alors que le temps écoulé ne compte plus et un nouveau délai commence. […]
[117] L’art. 35.1 al.2 ne caractérise pas les représentations de l’entrepreneur ou de l’administrateur, tant que ce soit, de bonne foi, de mauvaise foi, de déni de responsabilité, de dol ou frauduleuses.
[67] Vu les dispositions du deuxième alinéa de l’article 35.1 du Règlement, vu la preuve, le Tribunal ne peut conclure autrement que d’accueillir également ce point, au stade de la première étape, la demande du Bénéficiaire.
[68] L’Administrateur devra rendre une nouvelle décision sur les points 1, 2, 3 et 7, et le Bénéficiaire devra lui transmettre toute preuve qui n’a pas été produite.
[69] Les points 2 et 3 n’ont pas fait l’objet de travaux correctifs.
[70] Les point 1 et 7 ont déjà fait l’objet de travaux.
[71] Quant au point 1, le Syndicat Bénéficiaire a effectué des travaux correctifs, dans les circonstances qui suivent.
[72] Le Syndicat a fait réparer la fissure en octobre 2023, « car si on laisse une maçonnerie ouverte on ne peut pas laisser cela pendant trois ans, elle ne pouvait pas laisser un joint complet ouvert [...] pour ne pas passer un troisième hiver sans protection ».
[73] La représentante n’a pas envoyé d’avis avant de le réparer, car « ils ne nous répondaient plus » depuis octobre 2022, elles ne savaient même pas que Trigone avait changé de courriel et n’avait plus de téléphone.
[74] Il n’y a plus de travaux à faire sur ce point 1, ça a été réparé.
[75] En réponse au Tribunal qui demande ce qui lui est demandé, elle répond que ces travaux soient payés.
[76] Elle n’a pas produit la facture, car elle attendait le sort de l’audience.
[77] En contre-interrogatoire du procureur de l’Administrateur :
[77.1] si elle avait reparlé à Madame Delage, la conciliatrice depuis que la décision avait été rendue pour l’aviser entre autres que le Syndicat avait l’intention de faire des travaux, elle répond par la négative, la conciliatrice lui avait dit d’aller en arbitrage donc elle n’a pas discuté de travaux ;
[77.2] le Tribunal note qu’il n’y a aucune référence dans la preuve que Madame Delage, qui n’a pas témoigné à l’audience, ait fait une visite des lieux entre la réception de la dénonciation le 31 octobre 2022 et l’émission de sa décision au nom de l’Administrateur le 6 avril 2023 ;
[77.2.1] il n’y a aucune mention de cette visite des lieux dans sa décision ;
[77.2.2] interrogée à ce sujet, la représentante du Bénéficiaire répond qu’elle n’a pas eu connaissance d’une telle visite.
[78] En contre-interrogatoire du procureur de l’Entrepreneur :
[78.1] la représentante du Syndicat Émilie Nolin affirme que pour elle ;
[78.1.1] le rapport d’inspection a été envoyé en janvier 2021, on s’attendait à ce que les travaux de maçonnerie ce soit fait après l’hiver car on ne peut pas faire des travaux adéquats en hiver, on s’attendait à ce que ce soit fait dans le premier été ;
[78.1.2] vu qu’on était en pandémie on a été conciliant jusqu’à l’été suivant, c’est pour cela qu’à la fin de l’été suivant et qu’on avait jusqu’au premier gel pour faire les travaux de maçonnerie adéquatement, c’est pour cela qu’on a fait la demande à la GCR au mois d’octobre 2022 ;
[78.1.3] puis on a fait les travaux en octobre 2023 pour ne pas passer un troisième hiver sans protection.
[79] Le Tribunal rappelle les dates au présent dossier (à mettre en parallèle avec les mêmes dates prévues au Règlement) :
[79.1] Dénonciation du Bénéficiaire (A-4) : 31 octobre 2022 ;
[79.2] Réclamation du Bénéficiaire (A-5 – datée du 24 nov., d’après décision reçue) : 1er déc. 2022 ;
[79.3] Décision de l’Administrateur sans visite des lieux (A-11) : 6 avril 2023 ;
[79.4] Notification par CCAC de la demande d’arbitrage (A-12) : 9 mai 2023 ;
[79.5] Communication du « dossier » par l’Administrateur : 8 août 2023 ;
[79.6] Conférence de gestion - première date disponible (à part le soussigné disponible avant) : 11 sept 2023 ;
[79.7] Travaux du Bénéficiaire : oct 2023 ;
[79.8] Audience – première date disponible (à part le soussigné disponible avant) : 6 déc. 2023.
[80] Le Bénéficiaire affirme qu’il y avait urgence : c’est un gros stationnement, il y avait eu un vol de catalyseur de voiture, il y avait eu 5 vols dans le dernier mois – on était dans la mire des voleurs, l’Entrepreneur leur avait dit que cela allait être remboursé.
[81] Cela avait été réparé rapidement par le Syndicat pour des enjeux de sécurité et de vol à la demande de la police de la ville.
[82] Trigone a dit qu’ils allaient rembourser– ils n’ont jamais refusé mais ne l’a pas fait, c’est quand ils ont compris que Trigone allait faire faillite qu’ils ont compris qu’ils n’allaient pas être remboursés.
[83] Vu la preuve, vu le Règlement, vu le droit applicable, le Tribunal considère n’avoir d’autres options que de rejeter la demande d’arbitrage du Bénéficiaire quant aux autres points, et de maintenir la décision de l’Administrateur à l’effet que l’obligation de dénonciation dans un délai raisonnable n’avait pas été respectée, pour les motifs qui suivent.
[84] Le Règlement prévoit que le Bénéficiaire qui souhaite faire appel à la garantie doit suivre les dispositions du Règlement.
[85] Quand l’Entrepreneur refuse d’apporter les correctifs, ou ne donne aucune représentation justifiant que les délais de dénonciation soient outrepassés, il est impossible de conclure qu’il a fait des représentations qui amènent le Bénéficiaire à outrepasser son délai de dénonciation.
[86] Qui plus est, le Règlement n’a pas prévu que le Bénéficiaire puisse attendre jusqu’à ce qu’il décide, de façon personnelle, que c’est le bon moment pour tout faire ses réclamations ;
[86.1] le Tribunal soussigné n’a pas la compétence juridictionnelle de modifier un décret du Gouvernement (le Règlement) que la Cour d’appel a jugé comme étant d’ordre public.
[87] Le Bénéficiaire affirme que ce point fut d’abord accueilli dans la liste des travaux acceptés dont le tableau de février 2021 est produit en A-10 (2e page, premier point), toutefois, il semble y avoir eu un désaccord sur les travaux correctifs à être effectués, le Tribunal n’a pas vu de représentations favorables de l’Entrepreneur à cet effet.
[88] La réclamation est rejetée et la décision de l’Administrateur maintenue.
[89] D’une part, l’Entrepreneur n’a jamais fait de représentations à l’effet qu’il allait corriger ce point, à tout le moins, aucune preuve n’en a été faite, même si la représentante allègue que la prise a été montrée au représentant de l’Entrepreneur – pour le Tribunal, « montrer » ne signifie pas « acceptation ».
[90] D’autre part, dans son courriel du 14 mars 2022 (pièce B-10), l’Entrepreneur écrit au Bénéficiaire qu’il refuse la réclamation :
Points service après-vente observé lors du dernier constat :
1. Prise électrique arrière du balcon du 2606 non fonctionnel
- La prise défectueuse qui est mentionné au rapport n’est pas celle mentionné à ce point. Dans le rapport, on indique que toutes les autres prises sont fonctionnelles. Or, cette demande est hors délai
[91] Avec égards, non seulement le Bénéficiaire n’a pas rempli son fardeau de preuve qui justifie l’application de l’article 35.1 du Règlement, mais aussi depuis au moins le 14 mars 2022, le Bénéficiaire est au courant que l’Entrepreneur refuse sa réclamation sur ce point – de plus, le Bénéficiaire a effectué les travaux correctifs sur ce point « pour cause de fonctionnalité ».
[92] Vu la preuve, le Tribunal n’a d’autres options que de maintenir la décision de l’Administrateur.
[93] Au rapport A-3, c’est à la page 76 et 77 (page 87 du pdf), on voit que les travaux ne sont pas complétés, la porte et le cadrage de porte sont laissés « à l’air », pas terminés, pas de finition.
[94] Le tableau des sous-traitants de février 2021 (pièce A-10) le mentionne (pas de finition), mais les travaux ne peuvent être faits que l’été, la neige empêchant l’accès.
[95] Le Bénéficiaire n’a pas de courriel de représentations faites à ce sujet par l’Entrepreneur.
[96] Elle affirme qu’on en a discuté en mars 2022 quand ils sont revenus sur place.
[97] Elle n’a pas de suivi par courriel.
[98] Avec égards, « discuté » n’est pas une preuve de représentations par l’Entrepreneur au sens de l’article 35.1 du Règlement.
[99] La réclamation est rejetée et la décision de l’Administrateur maintenue.
[100] La représentante affirme qu’en février 2021, ils ont reconnu d’envoyer un électricien.
[101] Le 9 novembre 2021 (pièce B-8), soit près d’un an avant la réclamation à la GCR, l’Entrepreneur affirme qu’il refuse de réparer ce point : « 2. Les petits lampadaires au trottoir nécessitent d’être solidifié car bougent – [réponse] – Ceci n’est pas au rapport et il s’agit d’entretien normal ».
[102] A l’évidence, le Bénéficiaire n’a pas rempli son fardeau de preuve de représentations favorables de l’Entrepreneur.
[103] La réclamation est rejetée et la décision de l’Administrateur maintenue.
[104] De façon subsidiaire, le Tribunal peut voir la localisation du lampadaire au rapport d’inspection A-3, p. 71 et 72 – le poteau est fixé dans la terre (comme l’affirme aussi la représentante du Bénéficiaire), ce sont des petits poteaux qui éclairent le devant du bâtiment.
[105] A l’article 1, le Règlement définit ainsi le bâtiment qui est couvert :
«bâtiment»: le bâtiment lui-même, y compris les installations et les équipements nécessaires à son utilisation soit le puits artésien, les raccordements aux services municipaux ou gouvernementaux, la fosse septique et son champ d’épuration et le drain français
[106] Au paragraphe 9 de l’article 29, le Règlement exclut de la couverture les ouvrages à l’extérieur du bâtiment :
Sont exclus de la garantie :
9° les espaces de stationnement et les locaux d’entreposage situés à l’extérieur du bâtiment où se trouvent les unités résidentielles et tout ouvrage situé à l’extérieur du bâtiment tels les piscines extérieures, le terrassement, les trottoirs, les allées et le système de drainage des eaux de surface du terrain à l’exception de la pente négative du terrain;
[107] Avec égards, le Tribunal d’arbitrage est d’accord avec l’opinion de son ancien collègue Jean Rover, arbitre, dans une décision rendue il y a 23 ans dans Amyot c. C.L. Légaré construction inc., 2001 CanLII 27665 (QC OAGBRN) :
Le bénéficiaire a indiqué de nouveau que l'entrepreneur n'avait pas terminé les travaux d'électricité, notamment la pose d'un fil pour le lampadaire extérieur.
Nous sommes aussi d'avis que cette omission n'est pas couverte par le Plan de garantie vu que ce sont des travaux extérieurs au bâtiment.
[108] Dans son courriel du 14 mars 2022 (B-10), l’Entrepreneur écrit :
2. Manque poignées des rangements sous le balcon des 5 1/2
- Ceux-ci ne viennent pas avec des poignées. Le point est fermé.
[109] Encore une fois, la représentante affirme en avoir rediscuté, rediscuté n’est pas une représentation favorable.
[110] La réclamation est rejetée et la décision de l’Administrateur maintenue.
[111] La représentante n’a aucune preuve de représentation favorable, affirmant que le suivi a été fait de façon verbale.
[112] Le suivi n’est pas preuve de représentations favorables.
[113] La réclamation est rejetée et la décision de l’Administrateur maintenue.
[114] La représentante n’a aucune preuve de représentation favorable, affirmant que le suivi a été fait de façon verbale.
[115] Le suivi n’est pas preuve de représentations favorables.
[116] La réclamation est rejetée et la décision de l’Administrateur maintenue.
[117] L’Entrepreneur a refusé de corriger ce point par écrit en mars 2022 (pièce B-10) :
4. Perte d’espace sur le balcon du 2606 avec la balustrade plus loin que les autres
- La balustrade a été installer de cette façon puisqu’elle serait devant une prise électrique si elle était à la même place que les autres
[118] La réclamation est rejetée et la décision de l’Administrateur maintenue.
[119] La représentante affirme qu’il y a eu des changements de personnels, qui les ont empêchés de faire des suivis adéquats.
[120] Le Tribunal conclut encore que le fardeau de preuve de représentations favorables n’a pas été rempli.
[121] La réclamation est rejetée et la décision de l’Administrateur maintenue.
[122] Ils n’ont pas de preuve de représentations favorables par l’Entrepreneur.
[123] La réclamation est rejetée et la décision de l’Administrateur maintenue.
[124] Le point avait d’abord été partiellement réparé, mais l’Entrepreneur a refusé dans son courriel du 16 mars 2022 (pièce B-17) de faire d’autres travaux :
Dans le rapport d’inspection (pages 32 à 36), il est mention seulement de solidifier les garde-corps et ceci a été fait à l’été 2021. De plus, le rapport mentionne l’importance de traiter régulièrement le bois selon les recommandations du fabricant. Je vais tout de même mentionner à Daniel de faire le tour de ces points sur place avec vous lors du rendez-vous prévu le 31 mars.
[125] A la question : Daniel a fait le tour ? – la représentante dit « c’est ça, Daniel voulait pas y retoucher », le 9 mai 2022.
[126] La réclamation est rejetée et la décision de l’Administrateur maintenue.
[127] Le Tribunal d’arbitrage soussigné n’a été saisi que des recours à l’encontre de l’Administrateur du plan de garantie en vertu du Règlement.
[128] L’article 11 de la Loi sur le bâtiment[8] stipule :
11. La présente loi n'a pas pour effet de limiter les obligations autrement imposées à une personne visée par la présente loi.
[129] Le Tribunal rappelle la décision de la Cour supérieure dans l’affaire Garantie d'habitation du Québec c. Jeanniot[9] :
[63] Il est clair des dispositions de la Loi et du Règlement que la garantie réglementaire ne remplace pas le régime légal de responsabilité de l'entrepreneur prévu au Code civil du Québec. Il est clair également que la garantie prévue à la Loi et au Règlement ne couvre pas l'ensemble des droits que possède un bénéficiaire, notamment en vertu des dispositions du Code civil du Québec et que les recours civils sont toujours disponibles aux parties au contrat.
[130] La Cour d’appel réitère ce principe dans l’arrêt Gestion G. Rancourt inc. c. Lebel[10] :
[10] Le plan de garantie constitue « un complément aux garanties contre les vices cachés du Code civil ». Rien dans le Règlement n’impose au bénéficiaire de renoncer au droit d’action que le Code civil lui reconnaissait avant l’institution d’un Plan et qu’il lui reconnaît encore aujourd’hui.
[131] Sans que cette affirmation puisse être interprétée comme étant une opinion, dans un sens ou dans l’autre, sur le bien-fondé de la position du Bénéficiaire dans un éventuel recours contre l’Entrepreneur dont la solvabilité actuelle a sérieusement été remise en question lors de l’audience, le Tribunal d’arbitrage réserve leurs droits de porter leurs prétentions devant les tribunaux de droit commun contre toute personne autre que l’Administrateur du Plan de Garantie, le tout, sujet aux règles de la prescription civile et de droit commun.
[132] L’article 21 du Règlement stipule :
21. Les coûts de l'arbitrage […] Lorsque le demandeur est le bénéficiaire, ces coûts sont à la charge de l'administrateur à moins que le bénéficiaire n'obtienne gain de cause sur aucun des aspects de sa réclamation, auquel cas l'arbitre départage ces coûts.
[133] Le Bénéficiaire ayant eu gain de cause partiel, les coûts de l’arbitrage seront à la charge de l’Administrateur, sous réserves de ses recours récursoires contre l’Entrepreneur.
[134] PAR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :
[134.1] Quant aux points 1, 2, 3 et 7 :
[134.1.1] ACCEUILLE sous les termes de la première étape de la demande définis au paragraphe [3] ci-haut, la demande d’arbitrage du Syndicat Bénéficiaire et DÉCLARE recevable, quant au délai de dénonciation seulement, leur réclamation à l’Administrateur GCR pour les points 1, 2, 3 et 7 ;
[134.1.2] RETOURNE le dossier de cette réclamation pour les points 1, 2, 3 et 7 à l’Administrateur pour qu’il rende une décision sur le fond de la réclamation étant entendu que les droits du Bénéficiaire et de l’Entrepreneur sont réservés pour se pourvoir en arbitrage à la suite de cette nouvelle décision, s’ils le souhaitent, le cas échéant, dans les délais prévus au Règlement ;
[134.2] Quant à tous les autres points (4, 6, 8, 9, 10, 11, 12, 14, 15, 16, 18) :
[134.2.1] REJETTE la demande d’arbitrage du Bénéficiaire pour tous les autres points/éléments, MAINTIENT la décision de l’Administrateur sur ces autres points/éléments ET RÉSERVE les droits du Bénéficiaire, à supposer qu’il ait un recours fondé, de porter ses recours devant les tribunaux de droit commun, contre toute personne autre que l’Administrateur et sujet aux règles de droit et de la prescription civile ;
[134.3] Frais d’arbitrage :
[134.3.1] LE TOUT, avec les frais de l’arbitrage, à la charge de Garantie de Construction Résidentielle (GCR) (l’Administrateur) conformément au Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs, avec les intérêts au taux légal majoré de l’indemnité additionnelle prévue à l’article 1619 du Code civil du Québec à compter de la date de la facture émise par CCAC, après un délai de grâce de 30 jours ;
[134.3.2] RÉSERVE à Garantie de Construction Résidentielle (GCR) ses droits à être indemnisée par l’Entrepreneur 9211-4057 Québec Inc., pour les coûts exigibles pour l’arbitrage (par.19 de l’annexe II du Règlement) en ses lieux et place, et ce, conformément à la Convention d’adhésion prévue à l’article 78 du Règlement.
Montréal, le 5 février 2024
__________________________
ROLAND-YVES GAGNÉ
Arbitre / CCAC
[1] 2013 QCCA 1211 au paragraphe [19].
[2] Gestion G. Rancourt inc. c. Lebel 2016 QCCA 2094, paragraphe [19] ; Consortium M.R. Canada Ltée c. Office municipal d’habitation de Montréal 2013 QCCA 1211 paragraphe [18] ; Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l'APCHQ inc. c. MYL 2011 QCCA 56 paragraphe [13] ; La Garantie des Bâtiments Résidentiels Neufs de l’APCHQ Inc. c. Maryse Desindes et Yvan Larochelle, et René Blanchet mise en cause AZ-50285725, J.E. 2005-132 (C.A.), paragraphe [11].
[3] D. 156-2014, G.O.Q. 2e partie, 2014, no 10, p. 869.
[4] 2803. Celui qui veut faire valoir un droit doit prouver les faits qui soutiennent sa prétention.
Celui qui prétend qu'un droit est nul, a été modifié ou est éteint doit prouver les faits sur lesquels sa prétention est fondée ; sur le fardeau de preuve du bénéficiaire quant au respect du délai de dénonciation, voir Habitations Sylvain Ménard inc. c. Labelle 2008 QCCS 3274 (15 juillet 2008, Hon. Hélène Langlois, J.C.S.).
[5] 2013 QCCA 1211.
[6] https://www.inspq.qc.ca/covid-19/donnees/ligne-du-temps
[7] 2021 CanLII 13990 (QC OAGBRN).
[8] L.R.Q., B-1.1
[9] 2009 QCCS 909 (Johanne Mainville, J.C.S.).
[10] 2016 QCCA 2094.