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Le Centre d’arbitrage commercial

national et international du Québec

 

No :  01-1206

 

 

2325-1010 QUÉBEC INC., faisant affaires sous le nom de Le Groupe Développeur enrg., personne morale ayant son siège social au 164 rue du Collège, à Saint-Adolphe d’Howard, district de Terrebonne,

                       

                                                                                  Demanderesse

 

                                                                                  c.

 

LA GARANTIE HABITATION DU QUÉBEC INC., personne morale ayant son siège social, à Montréal, dit district, boulevard des Galeries-d’Anjou, au numéro municipal 7400, bureau 200,

 

                                                                                  Défenderesse

                                                                                  ___________________________________

 

 

SENTENCE ARBITRALE

 

- I -

 

 

LES FAITS

 

 

            Par la sentence arbitrale, rendue le 4 juillet 2001, par l’arbitre Henri J. Labelle, dans l’affaire opposant le consommateur M.S. Galezowski à la demanderesse 2325-1010 Québec inc. (Le Groupe Développeur enrg.) et à la défenderesse La Garantie Habitation du Québec inc., cette dernière a été condamnée, par l’arbitre, à assumer et à payer les frais dudit arbitrage lesquels se chiffrent à la somme de 1 869,23$.

 

            Par la suite, la défenderesse s’est retournée contre la demanderesse pour lui en réclamer le plein remboursement.  Devant le refus de la demanderesse d’obtempérer à cette demande, la demanderesse a annulé son accréditation tout en lui réclamant, bien entendu, le montant susdit.

 

La demanderesse, ceci étant, a soumis ce différend à l’arbitrage dont je suis saisi.

 

Précisons, dès maintenant, le fait que, lors de l’audition du 1er février 2002, les parties m’ont averti que je n’avais à traiter ou à me prononcer sur cette question de l’annulation de l’accréditation de la demanderesse : les parties l’ayant réglée entre elles.

 

- II -

 

LA POSITION DES PARTIES

 

 

            Bien que les parties aient pu, lors de l’audition, s’exprimer, y faire entendre leur témoin, y faire valoir leur point de vue et argumenter en faveur de leur position respective,  je crois qu’il est non seulement utile mais encore nécessaire de reproduire la correspondance qu’elles ont échangée à ce sujet et, dans laquelle, elles expliquent le pourquoi de leur attitude respective à l’égard de ce différend.

 

- A -

 

Voici ce qu’écrit la demanderesse :

 

 

« Saint-Adolphe d’Howard, le 18 septembre 2001

 

 

M. Jean-Guy Couillard

Responsable de l’accréditation

La Garantie qualité Habitation

7400 boul. des Galeries d’Anjou, bur. 200

Anjou, Qc

H1M 3M2

 

 

Dossier :  Steven Galezowski vs nous-même

 

 

Monsieur,

 

En réponse à votre lettre du 17 septembre 2001, voici mes commentaires sur vos deux points apportés.

 

Permettez-moi de détailler l’entente verbale avec M. Beausoleil.  L’article 15.5 mentionne que les frais d’arbitrage seront partagés avec le demandeur (et peut-être assumés en totalité) dans le cas ou aucune de ses réclamations ne soit acceptée.  Afin de favoriser cette situation, nous vous avons assuré que notre dossier justificatif ne comportait aucune exagération monétaire qui compromettrait une décision arbitrale favorable en tout point.  Le jugement démontre que nous avons eu raison sur tous les points que nous avions à justifier.  Malheureusement, l’arbitre a accordé une indemnité relativement au déboisement qui ne concerne pas notre dossier justificatif.  Nous avons donc respecté notre entente et, sous ce fondement, aucune responsabilité ne nous incombe de payer ces frais.

 

Quant à l’article 16.5, il ne peut être justifié, car vous n’avez encouru aucune perte suite à un défaut d’honorer la garantie nous incombant en vertu du plan de garantie.  En effet, le montant que vous nous réclamez n’est rien de moins que des frais administratifs engendrés dans le but d’assurer le demandeur qu’il ne subit pas de perte en vertu du plan de garantie.  La conclusion finale fut de lui rembourser $2 752.90 que nous avons assumé.

 

Considérant que :

1.                  nous avons respecté notre entente verbale.

2.                  les frais d’arbitrage ne sont pas un déboursé suite à un défaut d’honorer le plan de garantie.

3.                  l’article 15.5 (sic) de notre convention et le jugement de l’arbitre vous ordonne d’assumer ces frais.

 

Nous croyons avec conviction que notre refus d’assumer ces frais, est en conformité avec notre convention et avec le jugement.

 

Espérant que ces informations sauront vous convaincre.

Acceptez mes meilleurs salutations.

 

(s) Stéphane Sanschagrin

Stéphane Sanschagrin »

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

- B -

 

Voici ce que plaide la défenderesse :

 

« 2325-1010 Québec inc./

Le Groupe Développeur

A/S M. Stéphane Sanschagrin

164, du Collège

Saint-Adolphe d’Howard (Québec)

J0T 2B0

 

Monsieur,

 

Pour faire suite à votre lettre du 10 septembre dernier, nous tenons à vous informer que oui, il y a d’autres fondements quant à la facturation que nous vous avons fait parvenir.

 

Dans un premier temps, monsieur Sylvain Beausoleil vous en avait avisés verbalement et il n’y a eu aucune contestation de votre part.  Deuxièmement, l’article 16.5 de la partie I de la convention signée est à ce sujet, on ne peut plus claire :

 

« L’entrepreneur s’engage à indemniser l’administrateur pour toute perte encourue ou à rembourser tout déboursé qu’il aura effectué suite à son défaut d’honorer la garantie lui incombant en vertu du plan de garantie ».

 

Compte tenu de la décision arbitrale rendue, nous sommes en droit de vous réclamer ce montant.

 

Bien à vous

 

(s) Jean-Guy Couillard

 

Jean-Guy Couillard

Directeur-adjoint

 

JGC/mcm »

 

- C -

 

            Avant de procéder à l’étude des questions de droit soulevées, il y a lieu, il me semble, d’examiner, dès maintenant, cette question de l’entente verbale et de la trancher et ce, à la lumière de la preuve administrée à cet effet.

 

            La preuve entendue m’a convaincu du fait que la demanderesse aurait assumé les frais de l’arbitrage concerné dans le cas uniquement d’un défaut de sa part d’honorer la garantie lui incombant en vertu du Plan de garantie.  Or, la preuve démontre qu’il n’y a pas eu de tel défaut et aucun reproche ne peut donc lui être fait, à ce niveau, quant à son dossier justificatif : le Tribunal d’arbitrage lui ayant donné raison sur cette question de son dossier justificatif.

 

La demanderesse a donc respecté son entente verbale et on ne peut rien lui réclamer à ce titre, sous ce chapitre.

 

LE DROIT

 

- A -

 

            La sentence arbitrale, rendue par l’arbitre Henri J. Labelle, le 4 juillet 2001, dans le dossier 01-0301, l’a été en vertu du Règlement sur le Plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs  (B-1, R.O.2.) a autorité de chose jugée : la décision de l’arbitre étant finale et sans appel et elle lie les parties et ce, selon l’article 20 dudit règlement.

 

« Le bénéficiaire, l’entrepreneur et l’administrateur sont liés par la décision arbitrale dès qu’elle est rendue par l’arbitre.

La décision finale est finale et sans appel. »

 

Je réfère, en plus, à la décision de la Cour supérieure, rendue dans un cas semblable, en ce qui a trait au res judicata.  Il s’agit de l’arrêt 2840-3996 Québec Inc. c. Galibois et autre,           200-05-013183-004 du 17 octobre 2000 (Cour supérieure, district de Québec).  La Cour a décidé qu’il y avait chose jugée par l’effet de la sentence arbitrale.

 

Ceci étant, il en résulte que cette décision arbitrale, dans son ensemble, ne peut plus être remise en question.  Il y a, aussi, une vérité irrécusable des faits que constate cette décision arbitrale laquelle, comme déjà sous entendue, jouit d’une présomption irréfragable) de validité.

 

            En ce qui concerne les frais de l’arbitrage, cette sentence accorde, à la demanderesse, le droit de ne pas les payer.  Ce droit, la défenderesse ne saurait vouloir y porter atteinte ni directement ni indirectement, au contraire, elle se doit de les assumer entièrement et de les payer totalement.

 

            Je n’ai pas à m’attarder davantage sur ce point :  la défenderesse ne pouvant agir à l’encontre de cette sentence arbitrale ayant la force du res judicata et ce, répétons-le, ni directement ni indirectement.

 

- B -

 

Ceci étant dit, se pose, maintenant, la question de savoir si la défenderesse peut invoquer l’article 16.5 de la convention d’adhésion intervenue entre elle et la demanderesse et ce, le 5 janvier 1999.  Cet article se lit comme suit :

 

« 16.5 A indemniser l’administrateur pour toute perte encourue, ou à rembourser tout déboursé qu’il aura effectué suite à son défaut d’honorer la garantie lui incombant en vertu du plan de garantie. »

 

Cet article connaît deux interprétations.  Celle de la défenderesse à l’effet que l’adhérent doit indemniser l’administrateur pour toute perte encourue, qu’il y ait ou qu’il n’y ait pas de défaut, de la part dudit adhérent, d’honorer la garantie lui incombant en vertu du Plan de garantie.  Celle de la demanderesse, à l’effet contraire, c’est-à-dire que l’article 16.5 ne peut s’appliquer que si l’adhérent a fait défaut d’honorer la garantie lui incombant en vertu du Plan de garantie.  En un mot, la demanderesse soutient que cet article doit se lire et s’interpréter globalement, comme un tout, tandis que la défenderesse plaide qu’il doit s’interpréter en séparant les termes, en s’arrêtant aux mots « toute perte encourue ».

 

            Il s’agit, ici, d’un contrat d’adhésion au sens de l’article 1379 du code civil.  D’ailleurs, il en porte le titre : « convention d’adhésion ».

 

            Ceci étant, il faut l’interpréter comme l’exige l’article 1432 du code civil lequel se lit comme suit :

 

« Art. 1432. Dans le doute, le contrat s’interprète en faveur de celui qui a contracté l’obligation et contre celui qui l’a stipulée.  Dans tous les cas, il s’interprète en faveur de l’adhérent ou du consommateur. »

 

Comme l’article 16.05 est susceptible de deux interprétations également valables et plausibles, il me faut prendre celle qui est la plus favorable à la demanderesse.  Je me dois donc de l’interpréter en sa faveur : et c’est ce que je fais.

 

            En vertu de l’article 16.5, la demanderesse n’a pas à rembourser les frais d’arbitrage réclamés, ici, pour la raison qu’elle n’a pas fait défaut d’honorer la garantie lui incombant en vertu du Plan de garantie.

 

 

DÉCISION

 

 

PAR CES MOTIFS, L’ARBITRE :

 

 

 

ACCUEILLE :           l’appel de la demanderesse et ce, à toutes fins utiles comme à toute fins que de droit;

 

DÉCIDE :                  que la demanderesse n’a pas à rembourser ou à verser les frais d’arbitrage réclamés (1 869,23$) à la défenderesse;

 

ORDONNE :             à la défenderesse de les assumer complètement et entièrement

 

 

 

                                                                       MONTRÉAL, le 19 février 2002

 

 

                                    

 

                                                                       L’Arbitre,

 

 

 

                                                                       __________________________

                                                                       Me Mario Du Mesnil