ARBITRAGE EN VERTU DU RÈGLEMENT SUR LE PLAN DE GARANTIE DES BÂTIMENTS RÉSIDENTIELS NEUFS
(Décret 841-98 du 17 juin 1998)
Organisme d’arbitrage autorisé par la Régie du bâtiment : SORECONI
ENTRE : SYNDICAT DU 6060-6062 GABRIELLE-ROY (ALBÉNI DÉGARIE)
(ci-après « les Bénéficiaires »)
ET : HABITATIONS GRAND CONFORT
(ci-après « l’Entrepreneur »)
ET : LA GARANTIE QUALITÉ HABITATION
(ci-après « l’Administrateur »)
No dossier SORECONI : 061114001
No. bâtiment: 6088-1
Arbitre : Me Michel A. Jeanniot
Pour les Bénéficiaires : M. Albéni Dégarie (unité #3)
M. Jean Perreault (unité #1)
M. Louis Parent,
(ingénieur-conseil)
Pour l’Entrepreneur : M. Bernard Héroux
Pour l’Administrateur : Me Avelino De Andrade
M. Normand Pitre
Date d’audience : 21 décembre 2006
Lieu d’audience : 6062, Gabrielle-Roy, app 3
Date de la sentence : 5 janvier 2007
Identification complètes des parties
Arbitre : Me Michel A. Jeanniot
Gross, Pinsky
2, Place Alexis Nihon
Suite 1000
Montréal (Québec)
H3Z 3C1
Bénéficiaires : Syndicat du 6060-6062 Gabrielle-Roy
6062, Gabrielle-Roy, app. 3
St-Hubert (Québec)
J3Y 9B9
Et leur représentants :
Entrepreneur: HABITATIONS GRAND CONFORT INC..
A/s. M. Bernard Héroux
C.P. 85056
Mont Saint-Hilaire (Québec)
J3H 5W1
Administrateur : La Garantie Qualité Habitation.
7400, Galeries-d’Anjou
Suite 200
Anjou (Québec)
H1M 3M2
Et son procureur :
Me Avelino De Andrade
Décision
L’arbitre a reçu son mandat de SORECONI le 24 novembre 2006.
31 mai 2001 : Fin des travaux parties communes;
31 mai 2001 : Réception de l’unité résidentielle
30 mars 2003 : Réclamation écrite du Bénéficiaire;
8 mai 2003 : Inspection du bâtiment par M. Normand Pitre;
20 mai 2003: Rapport d’inspection (8 mai 2003) du bâtiment;
5 juin 2003 : Addenda au rapport d’inspection du 20 mai 2003;
15 mars 2004 : Réception de la partie commune;
15 novembre 2004 : Réclamation écrite du Bénéficiaire;
18 janvier 2005 : Inspection du bâtiment
31 janvier 2005 : Rapport d’inspection (18 janvier) du bâtiment;
21 décembre 2005 : Réclamation écrite du Bénéficiaire;
5 mai 2006 : Lettre du Bénéficiaire à l’Administrateur;
15 juin 2006 : Réclamation écrite du Bénéficiaire;
3 juillet 2006: Lettre du Bénéficiaire à Normand Pitre (Administrateur);
28 septembre 2006 :Inspection du bâtiment;
12 octobre 2006 : Rapport d’inspection (28 septembre 2006) du bâtiment;
14 novembre 2006 : Demande d’arbitrage du Bénéficiaire;
17 novembre 2006 :SORECONI obtient copie du dossier relatif à la décision de l’Administrateur;
24 novembre 2006 :Nomination de l’arbitre;
24 novembre 2006 : Lettre de l’arbitre aux parties les informant du processus à venir;
29 novembre 2006 : Lettre de l’Administrateur à l’Arbitre;
4 décembre 2006 : Lettre du Bénéficiaire à l’Arbitre, incluant pièces supplémentaires;
5 décembre 2006 : Lettre de l’Administrateur à l’Arbitre;
12 décembre 2006 : Lettre de l’Arbitre aux parties, confirmant que la date d’arbitrage aura lieu le 21 décembre 2006, à 11h30, au domicile du Bénéficiaire.
21 décembre 2006 : Audience.
Objection préliminaire :
[1] Aucune objection préliminaire n’a été soulevée par les parties, l’arbitre constate que juridiction lui est acquise et l’audience, de consentement, est ouverte à 11h30 am, jeudi le 21 décembre 2006, au domicile de Monsieur Albéni Dégarie (unité #3).
[2] Je précise que la demande se limite aux points 2, 3 et 4, de la décision de l’Administrateur du 12 octobre 2006, sous la plume de Normand Pitre, conciliateur pour l’Administrateur (ci-après « la Décision »).
Admissions :
[3] Il s’agit d’un bâtiment d’unités résidentielles détenues en copropriété, la première réclamation écrite est en date du ou vers le 15 novembre 2004 et l’inspection, objet de la Décision du 31 janvier 2005, est en date du 18 janvier 2005.
[4] Aucune preuve n’a été faite quant à la date de réception des parties communes, cependant les parties m’ont fait part qu’elle eue lieu en 2004.
[5] Suite à un tour de table (question - réponse), le soussigné et l’Administrateur reconnaissent à M. Louis Parent, le statut d’ingénieur - expert - conseil et le représentant des Bénéficiaires.
[6] Afin de faciliter à la fois lecture et compréhension de la présente décision, j’identifierai les prochains chapitres en fonction des points de la Décision.
Preuve :
Point 2 - Ventre de bœuf dans le stationnement :
[7] M. Parent dénonce et dépose, au soutien de sa visite des lieux du mercredi le 7 juin 2006, et son évaluation écrite datée du 13 juin 2006.
[8] Il expose, et ceci n’est pas contredit, qu’après avoir procédé à deux (2) puits d’exploration, il a constaté l’absence d’un drain français en périphérie de la fondation devant les portes de garage.
[9] Ce constat, jumelé à des hypothèses de travail l’habilitent à opiner et suggèrent que l’état des lieux ne procurait pas une protection suffisante contre le gel (avec des conséquences importantes au niveau de l’intégrité à long terme du bâtiment).
[10] L’expert retenu par les Bénéficiaires précise et représente, entre autre, que le Code National du Bâtiment (Article 9.14.2.1.1 (CNB 1995, version Québec)) prévoit que le drain français doit être placé à l’extérieur des semelles des fondations pour éviter la conséquence du gel et dégel au périmètre de la fondation.
[11] En réponse à ce point, l’Entrepreneur reconnaît que le drain français n’est pas situé à cet endroit ( l’extérieur de la fondation) mais bien sous et à l’intérieur.
[12] L’Entrepreneur nous représente que le drain français doit être du même niveau, tout autour de la structure, et que pour se faire, s’il devait passer à l’extérieur des fondations devant les portes de garage, le drain français ne serait pas assez bas pour éviter le gel (le niveau du sol étant plus bas d’au moins cinq (5) pieds à cet endroit) et c’est pour cette raison que le drain a été intentionnellement posé à l’intérieur de la semelle (parce que moins sujet au gel).
[13] L’Entrepreneur précise de plus que cet endroit n’est pas sujet à recevoir du drainage parce que la zone immédiate devant les portes de garage est asphaltée et que, se retrouve à proximité (devant les portes de garage) un drain collecteur d’eau de surface.
[14] En contre-interrogatoire, il est précisé que le préambule à l’Article 9.14.2.1.1 (CNB 1995, version adaptée Québec) n’est pas une disposition stricte puisqu’il est de plus précisé :
« (…) sauf s’il peut démontrer qu’il n’est pas nécessaire. ».
[15] Dans la collégialité et avec l’expert retenu par les Bénéficiaires, certaines exceptions à l’Article 9.14.2.1.1 furent identifiées. Ces exceptions sont :
- s’il y a pente (et drainage naturel);
- s’il y a raccordement (à un système alternatif adéquat);
- si le bâtiment est sur une dalle;
- s’il y a substitution par de la pierre concassée.
[16] Il appert de la preuve que le bâtiment est sur de la pierre concassée et sur dalle.
[17] Lors du contre-interrogatoire de l’expert des Bénéficiaires, ce dernier a de plus reconnu que, et considérant que la fin des travaux remonte à 2001 et que la réception des parties communes eue lieu en 2004 :
[17.1] Aucun dommage est perceptible en fin 2006; et
[17.2] En toute probabilité, l’on peut présumer que le bâtiment ne connaît pas de troubles structurels.
[18] Monsieur Pitre, pour l’Administrateur, complète sa Décision et précise qu’il n’a pas constaté de dommages, qu’on ne lui a fait aucune mention de problèmes d’eau ou autres formes d’infiltration; seule une demande (grief) lui était faite concernant le ventre de bœuf (situé à deux (2) pieds des fondations) à l’entrée charretière.
[19] Cette demande des propriétaires (corrections au ventre de bœuf) fut l’objet de trois (3) décisions, une première en date du 20 mai 2003, une seconde en date du 5 juin 2003 et une troisième en date du 12 octobre 2006.
[20] L’Administrateur représente que les décisions de mai et juin 2003 n’ont pas été portées en appel (aucune demande d’arbitrage), et que depuis la position de l’Administrateur vis-à-vis le ventre de bœuf a acquis force de chose jugée et que, pour cette raison, ce point est irrecevable (pour le présent arbitrage).
[21] Avec respect pour toute opinion à l’effet contraire, je crois que les motifs qui ont soulevé la demande d’arbitrage du 14 novembre 2006, avaient comme assise le constat qui résultait des puits d’exploration du mercredi 7 juin 2006, qui, aux yeux des Bénéficiaires, s’apparentait à la découverte d’un vice caché (par opposition à mal façon visible et/ou apparente, objet des décision précitées de 2003).
Point 3 - Profondeur des fondations :
[22] Dans le cadre de l’interrogatoire mené par l’Administrateur, l’expert des Bénéficiaires admet ne pas avoir mesuré l’épaisseur de la semelle des fondations, seule le remblai au-dessus de la semelle de la fondation fut mesurée (1050 mm).
[23] Il est admis de toutes les parties, que la quantité de remblai nécessaire pour protéger les fondations de l’emprise de la gelée est de 1200 mm, à partir du dessous des semelles des fondations.
[24] La preuve, non contredite, offerte par l’Entrepreneur est à l’effet que la semelle des fondations a 300 mm pour un total de 1350 mm de remblai.
[25] Séance tenante, l’Administrateur dépose comme pièce supplémentaire cotée A-7, un extrait du Code National du Bâtiment 1995 (version adaptée Québec), et plus particulièrement le tableau de l’Article 9.12.2.2, discutant des profondeurs minimales des fondations (faisant partie intégrante du paragraphe 9.12.2.2.1). Ce tableau établit que la profondeur minimale doit être de 1200 mm. Le présent bâtiment bénéficie de 1350 mm (et je rappelle, aucun signe de désordre structurelle n’a été constaté).
Point #4 - Mur de soutènement
[26] Les Bénéficiaires déposent au soutien de leurs prétentions, deux (2) nouvelles épreuves photographiques (B-1 et B-2).
[27] Sur B-1, nous voyons une fissure qui a d’ailleurs été reconnue par l’Administrateur le 31 janvier 2005 et qui a fait l’objet de travaux par l’Entrepreneur depuis.
[28] Les Bénéficiaires reconnaissent que les travaux ont été effectués, se déclarent ou représentent être insatisfaits de la méthode corrective. Si tel en est le cas, ils doivent en faire une demande auprès de l’Administrateur (contester la méthode corrective) et il en demeure à l’Administrateur de se prononcer par une nouvelle décision et il s’ensuit de soumettre tout possible différend à un médiateur et/ou à l’arbitrage.
[29] Ces photos exposent de plus une partie de la fondation de l’immeuble et du mur de soutènement à l’avant et force nous est de constater que pour l’endroit où il eut excavation, il n’y a pas de semelle.
[30] En réponse à cet élément, l’Entrepreneur précise qu’il a posé semelle partout où les plans et devis le prévoyaient, que les plans et devis ne prévoyaient pas de semelle à cet endroit précis, à savoir à la jonction du bâtiment et de la fosse de protection contre le gel (« frost pit ») L’Entrepreneur précise qu’il ne peut y avoir de semelle à cet endroit puisque la fosse signifie proximité de remblai et parce que la semelle flotterait alors.
[31] Les Bénéficiaires prétendent que cette absence de semelle est possiblement plus importante que suggérée par l’Entrepreneur et que les fissures antérieures (qui ont faites l’objet de réparations) en sont la preuve.
[32] L’Administrateur et l’Entrepreneur représentent que cette fente (indice suggéré des Bénéficiaires) provient d’une poussée hydraulique latérale, résultant de l’emplacement de la gouttière. Le déplacement de la gouttière ayant réglé ce problème (les réparations ayant tenues), cette fissure ne peut être le résultat d’une carence au niveau de semelle.
[33] L’expert des Bénéficiaires a d’ailleurs reconnu que le parement de briques semble être resté stable à la jonction du bâtiment. L’absence et/ou carence de semelle causerait (de toute évidence) une pression verticale, la preuve ayant été déposée à l’effet que la fissure résultait d’un mouvement latéral (non vertical), je ne peux croire qu’elle est la résultante d’une absence de semelle et j’ai tendance à accepter la position de l’Entrepreneur a l’effet que cette absence de semelle est pour approximativement deux (2) pieds linéaires, au-dessus (ou en périphérie) de la fosse de protection contre le gel (« frost pit »)
[34] Je rappelle que dans le présente dossier les Bénéficiaires sont demandeurs et qu’à cet effet, puisqu’ils sont en demande, ils ont le fardeau de la preuve, et, sans que ce fardeau leur soit indu, ce sont les Bénéficiaires qui ont l’obligation de me convaincre que la décision de l’Administrateur est mal fondée.
[35] Nous savons que l’arbitre désigné est autorisé par la Régie à trancher tout différend découlant des plans de garantie[1] et que ceci inclus toute question de faits, de droit et de procédures. La loi et le Règlement ne contiennent pas de clause privative complète. L’arbitre a compétence exclusive, sa décision lie les parties et elle est finale et sans appel[2]. Enfin, l’arbitre doit statuer (conformément aux règles de droit), bien qu’il puisse faire appel à l’équité lorsque les circonstances le justifient.
[36] Pour cause, suivant mon appréciation des faits et ma compréhension de la loi et de la jurisprudence connue, je suis d’opinion que les explications soumises pour proposer que le Décision de l’Administrateur est déraisonnable, ne peuvent être retenues.
[37] Je précise que le tout est sans préjudice et sous toutes réserves du droit qui appartient aux Bénéficiaires de porter devant les tribunaux civils leurs prétentions ainsi que de rechercher les correctifs qu’ils réclament, sujet bien entendu aux règles de droit commun et de la prescription civile.
[38] En vertu de l’Article 123 du Plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs et considérant que les Bénéficiaires n’ont pas obtenu gain de cause sur au moins un des aspects de leur réclamation, je me dois de départager les coûts du présent arbitrage entre les Bénéficiaires et l’Administrateur.
[39] En conséquence, aussi bien en droit qu’en équité selon les Articles 116 et 123 du Plan de garantie, les frais seront partagés entre les Bénéficiaires pour la somme de cent dollars (100.00$) et pour le reliquat à l’Administrateur du Plan de Garantie.
POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL D’ARBITRAGE :
REJÈTE la demande d’arbitrage des Bénéficiaires pour les points 2, 3 et 4;
MAINTIENT la Décision de l’Administrateur du 12 octobre 2006, sous la plume de Monsieur Normand Pitre, conciliateur pour l’Administrateur;
LE TOUT avec frais contre les Bénéficiaires pour la somme de cent dollars (100.00$) et contre l’Administrateur pour le reliquat.
Montréal, ce 5 janvier 2007
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ME MICHEL A. JEANNIOT
Arbitre / SORECONI