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TRIBUNAL D’ARBITRAGE |
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CANADA |
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PROVINCE DE QUÉBEC |
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N/d GAMM : APCHQ :
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2006-01 2005-04-002 06-025 LS (023272) |
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Date : |
23 octobre 2006 |
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DEVANT L’ARBITRE : |
Me Bernard Lefebvre |
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Alexandra Fortier et Jean-François Laporte Bénéficiaires |
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Et |
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Administrateur de La Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ inc.
Administrateur |
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Construction Réjean Lamontagne inc. Entrepreneur |
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SENTENCE ARBITRALE |
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[1] Les bénéficiaires soumettent à l’arbitrage le différend qui les oppose à l’Administrateur qui a rejeté le 5 décembre 2005 leur réclamation portant sur deux manquements de l’entrepreneur relatifs à la construction de leur bâtiment à savoir, le manque de support derrière le revêtement de vinyle et l’infiltration d’eau par la toiture.
[2] Avant d’analyser le sujet et rendre décision, nous exposons en premier lieu les considérations de faits et de droit invoquées par l’Administrateur au soutien de sa décision du 5 décembre 2005 et nous énonçons ensuite les moyens et prétentions des parties portés à notre connaissance en arbitrage ainsi que la demande de remboursement des frais et honoraires formulée par les bénéficiaires après l’audience du 8 juin 2006.
I. LA DÉCISION DE L’ADMINISTRATEUR : 5 décembre 2005
[3] M. Jacques Breault, inspecteur-conciliateur, (inspecteur) de l’Administrateur inspecte le bâtiment des bénéficiaires le 23 novembre 2005 aux fins de vérifier leur réclamation du 29 septembre 2005. L’inspecteur dépose son rapport le 5 décembre suivant.
Le manquement relatif au revêtement de vinyle
[4] L’inspecteur constate que les bénéficiaires ont reçu le bâtiment le 20 août 2001 et que le manquement relatif au support derrière le revêtement de vinyle a été dénoncé à l’entrepreneur et à l’Administrateur le 3 octobre 2005.
[5] Se référant à l’article 3 du Contrat il écrit … Nous constatons que le point qui suit ( manque de support derrière le revêtement de vinyle ) a été dénoncé par écrit après l’échéance de la garantie portant sur les vices cachés, dont la durée est de trois (3) ans à partir de la réception. Par conséquent, nous devons statuer sur ce point uniquement dans le cadre de l’article 3.4 du contrat de garantie. Or, nous sommes d’avis que la situation observée ne comporte pas le niveau de gravité d’un vice majeur tel que défini au contrat de garantie. ( parenthèse de l’arbitre )
[6] En conséquence, l’inspecteur conclut que le manquement relatif au revêtement de vinyle n’est pas couvert par le Contrat de Garantie.
Le manquement relatif à l’infiltration d’eau par la toiture
[7] Le 5 décembre 2005, l’inspecteur écrit que les bénéficiaires ont constaté les premières manifestations d’infiltration d’eau en juillet 2004 et que ce manquement a été dénoncé à l’Administrateur et à l’entrepreneur le 3 octobre 2005.
[8] L’inspecteur conclut que ce manquement n’a pas été dénoncé dans un délai raisonnable, lequel ne peut excéder six (6) mois de leur découverte ou survenance ou, en cas de vices ou de pertes graduels, de leur première manifestation.
[9] Peu après le 5 décembre 2005, les bénéficiaires informent l’Administrateur que les infiltrations d’eau se sont manifestées en juillet 2005 et non pas en juillet 2004.
[10] Le 12 décembre 2005, l’inspecteur émet un addenda à son rapport du 5 précédant, tenant compte de cette information.
II. LA PREUVE
[11] L’arbitre a tenu arbitrage les 10 mai et 8 juin 2006. L’arbitrage du 10 mai 2006 s’est limité à visiter les lieux afférents aux manquements dénoncés par les bénéficiaires car l’expert des bénéficiaires n’avait pas été requis de se présenter aux fins du dépôt de son expertise et l’Administrateur exigeait sa présence à cette fin .
[12] L’arbitrage du 8 juin 2006 a débuté par une visite sommaire des lieux et s’est poursuivi au domicile des bénéficiaires.
Le manquement relatif au revêtement de vinyle
[13] Les bénéficiaires déposent l’expertise de M. Robert Wright, B Sc A Génie, d’Adm. Les parties reconnaissent le statut d’expert du témoin Wright.
[14] M. Wright explique la cause et les effets des ondulations importantes et anormales du clin de vinyle des murs de la maison. Ces ondulations découlent d’une insuffisance du nombre de supports propres à retenir le parement à la paroi de la maison. Le parement continuera à se détériorer en raison des infiltrations d’eau en quantités indésirables et affecteront les autres composantes du revêtement du bâtiment et donnent lieu à un milieu propice à la prolifération de moisissures et causeront une détérioration prématurée des autres composantes de la maison.
[15] M. Wright recommande … Nous devons donc recommander d’enlever au plus tôt le revêtement de vinyle déficient, de réparer les composantes altérées derrière, de refaire les lattages de façon conventionnelle et de remettre en place un nouveau revêtement avant que d’autres problèmes ne surgissent et entraînent une augmentation de la facture ou que des éléments de vinyle s’arrachent de la maison …
[16] L’expert Wright donne à l’Administrateur les aspects techniques de ses recommandations et réitère que le clin de vinyle est soit mal posé ou posé sans supports suffisants. Dans les deux cas le manquement est inacceptable.
[17] L’inspecteur Breault déclare que le bénéficiaire l’a informé qu’un sous-traitant avait refait une partie du parement extérieur et il n’a pas expertisé le travail car à son avis le manquement n’avait pas été dénoncé dans le délai prévu à la Garantie.
Le manquement relatif à l’infiltration d’eau par la toiture
[18] M. Laporte, bénéficiaire, réitère qu’il a constaté les premières infiltrations d’eau en juillet 2005 et non pas en juillet 2004. Contre interrogé, M. Laporte ne peut affirmer sans équivoque l’année 2005.
[19] L’expert Wright explicite son expertise sur ce manquement de l’entrepreneur et il conclut que les infiltrations détériorent les composantes du toit de l’immeuble en plus de provoquer la prolifération de moisissures. L’expert Wright recommande de refaire le toit de la tourelle et le plafond avec des matériaux et la méthode de construction appropriés.
[20] L’entrepreneur affirme avoir constaté les infiltrations d’eau dès le mois de juillet 2004 en présence de M. Laporte.
[21] L’inspecteur Breault, déclaré expert aux fins de l’arbitrage, se réfère à ses notes d’inspection du bâtiment et il réaffirme que M. Laporte lui a dit le 23 novembre 2005 que les infiltrations avaient débuté en juillet 2004. Il a émis l’addenda du 12 décembre 2005 dans le but d’aider M. Laporte mais sans se compromettre pour autant.
[22] L’expert Breault est d’avis que les cernes qui marquent les solives ne suffisent pas à conclure à infiltration d’eau par le toit. Le bois des fermes du toit peut avoir subi les intempéries chez le fournisseur.
Les frais réclamés par le bénéficiaire
[23] Le 20 juin 2006, les bénéficiaires transmettent à l’arbitre la facture de l’expert Wright et les honoraires de son procureur.
III. ARGUMENTS
[24] Le procureur des bénéficiaires soumet que l’expertise de M. Wright prouve que les ondulations du parement extérieur constituent un vice majeur.
[25] D’autre part, la preuve de la détermination du moment des constatations des infiltrations d’eau est contradictoire mais il faut préférer le témoignage de M. Laporte et alors la dénonciation a été faite dans les délais prévus au contrat de Garantie et ce manquement est un vice majeur au sens de ce contrat.
[26] L’Administrateur demande à l’arbitre de maintenir la décision de l’inspecteur Breault au regard du rejet de la réclamation concernant le manquement relatif à l’infiltration d’eau à la toiture parce que la mémoire de l’inspecteur est cohérente tandis que celle du témoin Laporte est déficiente.
[27] D’autre part, l’arbitre devrait maintenir la décision de l’inspecteur Breault concernant le manquement relatif au parement de vinyle car l’ensemble de la preuve ne permet pas de conclure qu’il s’agit d’un vice majeur.
[28] L’Administrateur s’oppose à la réclamation des bénéficiaires concernant les frais de l’expertise et ceux de son procureur parce que le Règlement sur le Plan de garantie des bâtiments résidentiels neuf ( C. B1.1 r. O.2 ) limite la juridiction de l’arbitre en cette matière et ce Règlement indique que les honoraires de leur procureur sont à leur charge.
IV. ANALYSE ET DÉCISION
[29] J’analyse d’abord les considérations de faits et de droit se rapportant au manquement relatif à l’infiltration d’eau par la toiture et ensuite celles concernant le manquement portant sur le revêtement de vinyle et en dernier lieu la réclamation des frais et honoraires déposée par les bénéficiaires.
Le manquement relatif à l’infiltration d’eau par la toiture
[30] Nous devons fixer en préliminaire le moment des premières manifestations des infiltrations d’eau constatées par les bénéficiaires.
[31] En effet, le contrat de Garantie oblige l’Administrateur à réparer les manquements de l’entrepreneur à condition que ces manquements soient dénoncés dans un délai raisonnable, laquelle dénonciation ne peut excéder six (6) mois de la découverte des vices cachés ou majeurs, ou, en cas de vices ou de pertes graduels, dans un délai de six (6) mois de leur première manifestation.
[32] La question préliminaire n’est donc pas celle de savoir si le manquement relatif à l’infiltration d’eau constitue une malfaçon, un vice caché ou un vice majeur, mais plutôt de déterminer le moment où les bénéficiaires ont constaté ce manquement.
[33] Comme on l’a vu, la preuve de ce moment est contradictoire. M. Laporte maintient la date du mois de juillet 2005 tandis que l’inspecteur et l’entrepreneur affirment celle du mois de juillet 2004.
[34] Résumons les faits. L’inspecteur inspecte le bâtiment le 23 novembre 2005 en compagnie du bénéficiaire Laporte. L’ensemble de la preuve démontre que M. Laporte ne nie pas l’existence d’une conversation avec l’inspecteur portant sur la date des premières manifestations d’eau par le toit.
[35] À ce sujet, l’inspecteur écrit le mois de juillet 2004 dans son rapport du 5 décembre 2005. S’est-il trompé d’année comme le prétend le bénéficiaire?
[36] Examinons le sujet plus à fond.
[37] Première constatation, l’expert Wright sait que la date de connaissance des premières infiltrations d’eau par le toit est en litige et son rapport du 31 janvier 2006 ne mentionne pas cet élément à la suite de son inspection du 21 décembre 2005. La question ne lui est pas posée en arbitrage.
[38] Quand quelqu’un n’affirme rien, le principe du contradictoire inhérent à l’arbitrage perd ses droits parce qu’il n’a pas de matière où s’appliquer.
[39] Par conséquent, nous devons nous baser sur la preuve ordinaire pour déterminer le moment où les bénéficiaires ont constaté les infiltrations d’eau pour la première fois..
[40] Dans son récit des événements, M. Laporte se plaint de la lenteur de l’entrepreneur à répondre à ses nombreux appels logés avant le 1er septembre 2005 et à à exécuter les corrections demandées.
[41] La preuve indique que l’entrepreneur fait des visites sporadiques chez le bénéficiaire après la fin des travaux, fixée au 20 août 2001.
[42] Troisièmement, l’entrepreneur prend-il le fait et la cause de l’inspecteur lorsqu’il déclare en arbitrage qu’il a constaté les infiltrations d’eau par le toit en juillet 2004 et non pas en juillet 2005? Je ne peux conclure dans ce sens.
[43] D’autre part, la mémoire de M. Laporte sur la date des premières constatations des infiltrations d’eau s’avère moins précise en contre interrogatoire.
[44] Compte tenu de tous ces éléments, le tribunal conclut que les bénéficiaires ont constaté les premières manifestations d’eau en juillet 2004.
[45] La dénonciation de ce manquement à l’entrepreneur et à l’Administrateur le 3 octobre 2005 est tardive au sens du Contrat de garantie et les termes de ce Contrat indiquent que les délais de dénonciation des manquements ne sont pas facultatifs mais exécutoires à moins de circonstances exceptionnelles qui ne sont pas en preuve en l’espèce.
[46] Le Contrat de garantie ne me laisse pas le choix : je dois rejeter la réclamation afférente au manquement relatif à l’infiltration d’eau par le toit pour défaut de respecter le délai de dénonciation prévu au Contrat de garantie.
Le manquement relatif au revêtement de vinyle
[47] Le manquement relatif au revêtement de vinyle est-il un vice majeur au sens du paragraphe 3.4 du Contrat de garantie?
[48] La section A de la Garantie définit ainsi le vice majeur : Vice majeur : vice de conception, de construction ou de réalisation, et vice du sol, au sens de l’article 2118 du Code civil du Québec … ( nous soulignons et surlignons ).
[49] Pour commodité nous reproduisons l’article 2118 du Code civil du Québec;
« Article 2118. À moins qu'ils ne puissent se dégager de leur responsabilité, l'entrepreneur, l'architecte et l'ingénieur qui ont, selon le cas, dirigé ou surveillé les travaux, et le sous-entrepreneur pour les travaux qu'il a exécutés, sont solidairement tenus de la perte de l'ouvrage qui survient dans les cinq ans qui suivent la fin des travaux, que la perte résulte d'un vice de conception, de construction ou de réalisation de l'ouvrage, ou, encore, d'un vice du sol. »
[50] L’opinion de l’expert des bénéficiaires repose … sur une inspection visuelle des lieux qui fut complétée par des essais destructifs aux endroits appropriés … ( Expertise de M. Wright, 31 janvier 2006 ).
[51] L’opinion de l’inspecteur, reconnu expert pour les fins de l’arbitrage, résulte d’un examen visuel de la situation sans autre vérification car il a statué dès le départ de sa visite des lieux que … la situation observée ne comporte pas le niveau de gravité d’un vice majeur tel que défini au contrat … ( Rapport du 5 décembre 2005 )
[52] Notons toutefois que M. Wright et M. Breault conviennent que les ondulations anormales sont dues à une même cause soit l’insuffisance du nombre de supports sur lesquels sont attachés les clins de vinyle.
[53] Mais les deux experts ne s’entendent pas sur les effets de l’insuffisance de supports sur la solidité du bâtiment.
[54] Suivant les règles de preuve, l’opinion de l’expert Wright doit primer sur celle de l’inspecteur concernant les effets de l’insuffisance de supports sur la solidité du bâtiement.
[55] Sur ce sujet l’expert Wright est on ne peut plus précis : le manque de support provoque la détérioration des autres composantes de la maison.
[56] Il est évident que l’expert Wright a non seulement vu mais il a aussi compris les effets de l’insuffisance du nombre de support. Le tribunal doit s’incliner devant la rigueur de l’analyse de l’expert des bénéficiaires et la force de ses conclusions.
[57] Le tribunal décide en conséquence que le manquement relatif au revêtement de vinyle est un vice majeur au sens du Contrat de Garantie.
[58] Les bénéficiaires ont dénoncé ce vice majeur dans le délai indiqué au 3.4 paragraphe du Contrat car la dénonciation du 3 octobre 2005 a été déposée moins de cinq (5) ans de la date de réception du bâtiment, fixée le 20 août 2001.
La réclamation pour frais et honoraires
[59] Je serai bref sur ce chapitre de réclamation car il n’y a pas eu débat sur les éléments des factures déposées après l’audience alors que le principe du contradictoire inhérent à l’arbitrage commandait de soumettre ces éléments à l’analyse des parties adverses. J’appliquerais donc le sens littéral des dispositions pertinentes du Règlement .
[60] En vertu de l’article 125 du Règlement, les parties assument les dépenses effectuées pour la tenue de l’arbitrage. Je rejette donc la demande de remboursement des bénéficiaires relative aux honoraires de leur procureur.
[61] L’article 124 du Règlement autorise l’arbitre à accorder des frais raisonnables d’expertise que l’Administrateur doit rembourser aux bénéficiaires si ces dernier ont gain de cause total ou partiel. C’est le cas en l’espèce
[62] Je limite cependant la réclamation aux frais d’expertise de l’expert Wright et non pas aux frais de M. Philippe pour lequel aucune explication ne nous a été donnée en temps opportun sur ses activités dans la confection de l’expertise.
V. DISPOSITIF
[63] Pour tous ces motifs, le tribunal décide que le manquement relatif au revêtement de vinyle est un vice majeur dont la dénonciation est valide au sens du paragraphe 3.4 du Contrat de Garantie.
[64] Le tribunal enjoint à l’Administrateur de réparer ce manquement en la manière indiquée dans l’expertise de M. Wright du 31 janvier 2006.
[65] Le tribunal ordonne à l’Administrateur de rembourser aux bénéficiaires les frais d’expertise de l’expert Wright au montant de 585,00$ auquel s’ajoute la taxe sur les produits et services et la taxe de vente du Québec au taux applicable au 31 janvier 2006, sans intérêt.
[66] Le tribunal rejette la réclamation relative à l’infiltration d’eau par le toit.
[67] Les frais de l’arbitre sont assumés par l’Administrateur.
[68] Ainsi décidé à Montréal, le 23 octobre 2006.
Me Bernard Lefebvre, arbitre
Pour les bénéficiaires : Me Marcel Deschênes 740, boul. LeBourgneuf Bureau 10A Québec, (Québec) G2J 1E2
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Pour l’entrepreneur : Monsieur Réjean Lamontagne 30 des Érables St-Étienne de Lauzon Qc. G6J 1E9 |
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Pour l’Administrateur : Me Luc Séguin 5930 L-H. Lafontaine, Anjou Qc. H1M 1S7 |
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Dates d’audience : 10 mai et 8 juin 2006 Échange de notes : 20 et 22 juin 2006 Début du délibéré : 18 septembre 2006 |
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