ARBITRAGE EN VERTU DU RÈGLEMENT SUR LE PLAN DE GARANTIE DES
BÂTIMENTS RÉSIDENTIELS NEUFS |
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CANADA |
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PROVINCE DE QUÉBEC |
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Groupe d’arbitrage et de médiation sur mesure (GAMM) |
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Dossier no : |
GAMM 2010-12-011 |
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GQH 23799-3080 |
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ENTRE : SYNDICAT DE LA COPROPRIÉTÉ DES BERGES DU FLEUVE PHASE I (ci-après le bénéficiaire)
ET : GARANTIE QUALITÉ HABITATION (ci-après l’administrateur)
ET : LES PROPRIÉTÉS BELCOURT INC. (ci-après l’entrepreneur)
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DEVANT L’ARBITRE : |
Me Johanne Despatis |
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Pour le bénéficiaire |
Me Patrick Henry, procureur, assisté de : Mme Nicole Rousseau |
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Pour l’administrateur |
Me Avelino de Andrade, procureur, assisté de : M. Normand Pitre M. Martin Gignac |
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Pour l’entrepreneur |
Me Benoit Larose, procureur, assisté de : M. Nathan Vineberg M. Richard Lauzon |
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Date de l’audience |
8 novembre 2010 |
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Lieu de l’audience |
Montréal |
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Date de la sentence |
7 janvier 2011 |
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Adjudex inc.
1007-8370-GAMM
SA 8083
I
INTRODUCTION
[1] Dans une demande d’arbitrage présentée le 30 juin 2010 le Syndicat de la copropriété des Berges du Fleuve Phase I, le bénéficiaire, conteste, en vertu de l’article 35 du Règlement sur le Plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs (décret 841-98), le Règlement, deux éléments d’une décision rendue le 6 mai 2010 par la Garantie Qualité Habitation, l’administrateur, suite à des réclamations relatives aux parties communes de son immeuble détenu en copropriété construit par Les Propriétés Belcourt inc., l’entrepreneur.
[2] La décision de l’administrateur se lit ainsi :
3. Plates-formes des balcons (dénonciation reçue 30 septembre 2009)
Le syndicat nous mentionne dans leur lettre du 30 septembre 2009 qu’un bon nombre de nouvelles plates-formes de fibres de verre se sont fissurées à différents endroits et par le fait même, se sont détériorées et le syndicat demande à ce que toutes les plates-formes soient remplacées.
Lors de notre inspection, nous avons constaté la situation, toutefois nous tenons à préciser que la dénonciation faisant état de nouvelles plates-formes de fibres de verre ne peut être traitée, à même la dénonciation faite en octobre 2007. De ce fait, La garantie Qualité Habitation se doit de statuer de la façon suivante, et ce, compte tenu du fait, que le vice caché sur l’immeuble est terminé depuis le 23 aout 2009.
Le point 3 n’ayant pas été dénoncé par écrit à l’entrepreneur et à La Garantie Qualité Habitation dans les 3 ans suivant la réception des parties communes, nous devons nous prononcer dans le cadre d’un vice de construction au sens de l’article 2118 du Code civil du Québec (article 6.4.2.5 du texte de garantie).
Or, selon ce qu’il nous a été possible de constater lors de notre inspection, ce point ne peut être considéré comme un vice de construction pouvant entrainer la perte partielle ou totale de l’immeuble résidentiel.
Par conséquent, La Garantie Qualité Habitation ne peut reconnaitre ce point dans le cadre de son mandat.
[...]
5. Formation de glace à l’avant-toit (dénonciation reçue 16 février 2010)
Le syndicat nous mentionne qu’en période hivernale il y a formation de glaçon sur le bord de la toiture, laquelle semblerait être reliée à un problème de ventilation.
Lors de notre inspection, nous n’avons pas pu constater la situation, toutefois nous avons pu regarder les photos remises par le syndicat à cet effet. Par contre, La Garantie Qualité Habitation se doit de statuer de la façon suivante.
Tel que stipulé aux articles 6.4.2.3 et 6.4.2.4 du contrat de garantie, les situations décrites doivent être dénoncées par écrit à l’entrepreneur et à l’administrateur dans un délai raisonnable, lequel ne peut excéder six (6) mois de la découverte des vices et des malfaçons.
Les situations décrites doivent être réclamées par écrit à l’entrepreneur et à l’administrateur dans un délai raisonnable, lequel ne peut excéder trois (3) ans [de] la réception des parties communes.
Le point 5 n’ayant pas été dénoncé par écrit à l’entrepreneur et à La Garantie Qualité Habitation dans les 3 ans suivant la réception des parties communes, nous devons nous prononcer dans le cadre d’un vice de construction au sens de l’article 2118 du Code civil du Québec (article 6.4.2.5 du texte de garantie).
Or, selon ce qu’il nous a été possible de constater lors de notre inspection, ce point ne peut être considéré comme un vice de construction pouvant entrainer la perte partielle ou totale de l’immeuble résidentiel.
Par conséquent, La Garantie Qualité Habitation ne peut reconnaitre ce point dans le cadre de son mandat.
[3] En prévision de l’instruction de l’affaire, une conférence téléphonique réunissant les parties ainsi que l’arbitre s’est tenue le 19 aout 2010. À cette occasion, l’administrateur et l’entrepreneur ont d’entrée de jeu opposé un moyen d’irrecevabilité invoquant la tardiveté de ces réclamations. Selon eux en effet, ces demandes auraient dû être été formulées avant l’échéance de la garantie contre les vices cachés et elles ne l’auraient pas été. Vu la nature préjudicielle du moyen opposé, il a alors été convenu que j’allais d’abord décider de ce moyen.
[4] À l’audience, hormis la documentation produite, les parties n’ont présenté aucune autre preuve. Elles ont convenu que la preuve pertinente ressortait de la documentation produite au dossier mentionnée en cours de plaidoirie.
II
PREUVE
[5] Les réclamations en litige visent les parties communes d’une copropriété construite par l’entrepreneur dont il est admis qu’elle est couverte par le Règlement.
[6]
La date de la réception
du bâtiment ainsi que celle de la fin des travaux ne sont pas des questions en
litige. Selon la documentation au dossier, la réception de la bâtisse remonte
au
23 aout 2006. La fin des travaux se situe au 1er décembre 2004.
[7] Concernant le point 3. Plates-formes des balcons, la documentation au dossier révèle qu’une inspection des parties communes a été réalisée par la firme St-Pierre à la demande du bénéficiaire le 20 décembre 2006. On lit à ce rapport d’inspection :
5.2 Balcons
Les balcons sont constitués d’une structure d’acier galvanisé supportant des panneaux de contreplaqué recouverts de fibres de verre. Les gestionnaires ont porté à notre attention plusieurs déficiences, notamment la fissuration des panneaux de fibres de verre (voir phots #66, #67,# 68, #69, #73,# 74). De plus, on a observé que plusieurs vis d’ancrage n’étaient pas en acier galvanisées et rouillées. Ces déficiences sont importantes et devraient être réparées sous la garantie de l’entrepreneur.
Pour l’étude Fonds de prévoyance, nous prévoyons le remplacement des panneaux en fibre de verre dans ± 20 ans.
[Caractères gras ajoutés]
[8] Le 2 octobre 2007, le bénéficiaire présente une première réclamation à l’entrepreneur et à l’administrateur concernant notamment ce point 3. On y lit :
Relativement au dossier cité en titre, la présente fait suite à de nombreuses lettres et conversations téléphoniques concernant les trois (3) vices majeurs suivants, à savoir :
A. [...]
B. Balcons : imperméabilité du revêtement de fibre de verre et calfeutrage des ancrages :
C. [...]
Ces vices vous ont tous été dénoncés au fil des derniers mois par le Syndicat de la copropriété Les Berges du fleuve (« ci-après « le Syndicat ») et des travaux de réparation ont été entrepris par Les propriétés Belcourt inc. (ci-après « Belcourt ») ou ses sous-traitants, lesquels travaux sont toujours en cours. Toutefois, ces travaux ne sont pas satisfaisants et risquent de causer de sérieux dommages à l’intégrité de l’immeuble situé au [...]
[...]
B. Balcons
B.1 Imperméabilité du revêtement de fibre de verre
Tel qu’indiqué à la page 10 du Rapport, les balcons sont constitués d’une structure d’acier galvanisé supportant des panneaux de contreplaqué recouverts de fibre de verre. Nous vous avons dénoncé la présence de fissures et de moisissure sur le revêtement de fibre de verre de certains balcons de même que des vis d’ancrage rouillés.
Les rampes des balcons (et certaines unités de climatisation) ont été vissées à travers le revêtement de fibre de verre créant de l’humidité dans la planche de bois sous [sic] trouvant dessous qui causa éventuellement de la moisissure. De plus, certaines de ces vis d’ancrage n’étant apparemment pas en acier galvanisé sont rouillées. Sachez que le Syndicat s’est fait indiqué que la garantie du manufacturier des balcons était résiliée compte tenu que le revêtement de fibre de verre a été perforé!
Comme cette façon de fixer les rampes aux balcons a été utilisée pour tout le projet, il s’agit de 144 balcons! De ce nombre des problèmes de fissures et de moisissure ont été constaté [sic] à plusieurs de ces balcons et des travaux de réparation ont été entrepris par votre sous-traitant, M.D.G. Universal. [...]
Nous vous sommons de
procéder rapidement à des correctifs avant qu’il ne soit trop tard. Nous vous
mettons formellement en demeure de superviser le travail de votre
sous-traitant, lequel devra remplacer :
(1) les balcons fissurés/rouillés et (2) les vis d’ancrage n’étant pas en acier
galvanisé par des vis qui le sont. [...]
[Caractères gras ajoutés]
[9] Le 18 janvier 2008, monsieur Normand Pitre, conciliateur au service de l’administrateur, procède à une visite des lieux en vue de vérifier ce qui en est des problèmes dénoncés. Il écrit au sujet des balcons dans le rapport qu’il fait le 26 février 2008 :
Décision de l’administrateur
Lors de notre inspection, le syndicat et l’entrepreneur […] se sont entendus à l’effet que ce dernier procédera aux travaux ci-dessous mentionnés [...] le 1er juin 2008.
1. Balcon
Le syndicat nous mentionne que plusieurs déficiences sont présentes dans les plateformes de fibres de verre des balcons.
Lors de notre inspection, il a été entendu entre les parties qu’une nouvelle liste des balcons déficients sera remise à l’entrepreneur pour vérification et ce, selon la première liste qui avait déjà été émise par le surintendant de ce dernier.
Or, suite à cette constatation, l’entrepreneur s’est engagé à procéder aux correctifs sur les balcons sur lesquels son employé constatera ou a constaté la présence de déficiences.
Par conséquent, La garantie Qualité Habitation n’a pas à statuer sur ce point dans l’immédiat. Cependant, si l’entrepreneur ne donne pas suite ou ne donne suite qu’en partie à ses engagements dans le délai ci-dessus mentionné, La garantie Qualité Habitation statuera sur ce point dans le cadre du texte de garantie.
[10] Selon la documentation au dossier, des discussions ont effectivement lieu entre les intéressés en mai et juin 2008 et le bénéficiaire et l’entrepreneur identifient de concert un certain nombre de balcons qui seront l’objet de correctifs. Comme question de faits, cette entente conclue ne visait pas tous les balcons.
[11] Puis, le 28 septembre 2009, le bénéficiaire transmet une seconde dénonciation à l’entrepreneur et à l’administrateur concernant les balcons. Elle vise ceux qui n’avaient pas fait l’objet de l’entente en 2008 :
Dans le dossier des balcons qui fait l’objet d’une réclamation écrite datée du 02 octobre 2007, le Syndicat de la copropriété Les Berges du Fleuve (…), a constaté plusieurs autres déficiences dans les plateformes de fibre de verre et a aussi constaté que la peinture est écaillée sur plusieurs rampes de balcons à l’avant de la bâtisse et sur le côté (…).
Le Syndicat a mandaté une firme-conseil, à savoir Consultek Expert-Conseil. Nous les avons mandaté d’effectuer une inspection visuelle partielle de l’immeuble et de rédiger un rapport d’expertise sur l’état des pontages de fibre de verre installés aux balcons avant, de côté et arrière de la copropriété. […]
Dans leur rapport, nos experts arrivent à la conclusion que les pontages comportent des anomalies importantes et un vieillissement prématuré qui non seulement vont réduire de façon importante leur durée de vie utile et constitué un enjeu de sécurité important mais, au surplus, vont augmenter de façon considérable les coûts d’entretien de ces pontages et des joints d’étanchéité ceinturant ces pontages.
[12] Suit quelque mois plus tard, la dénonciation du bénéficiaire concernant le point 5. Formation de glace à l’avant-toit. Cette dénonciation datée du 8 février 2010 se lit ainsi :
Il y a deux ans, monsieur Vermette et monsieur Montpetit, administrateurs du Conseil d’administration avaient fait part à monsieur Richard Lauzon, Gestionnaire du projet de Belcourt du problème de formation de gros glaçons à l’arrière des bâtiments 4 et 5 à partir du toit. Ce qui a causé une détérioration de notre bâtisse. Un des ancrages pour les fils électriques s’était détaché au bâtiment 5.
Monsieur Lauzon avait alors déterminé que le problème pouvait venir d’un débordement de gouttière entre les bâtiments 4 et 5 et avait alors réduit celle-ci. Il a également fixé de nouveau l’ancrage des fils électriques au bâtiment.
Durent l’hiver 2008-2009, le problème de glaciation s’est reproduit : certainement causé par un problème d’isolation ou de circulation d’air dans les entre-toits.
En juin 2009, monsieur
Lauzon a envoyé un employé vérifier les bouches d’aération dans la frise de
l’entre-toit arrière et il a constaté que celles-ci étaient bloquées par des
isolants. Il a donc, renvoyé par la suite
2 employés pour faire les corrections dans tous les bâtiments.
Le 21 septembre dernier, vous nous avez fait parvenir une lettre à madame Ziam, Présidente du CA confirmant que les travaux requis avaient été complétées. Nous en avons déduit que le problème ne se reproduirait plus.
Début janvier 2010, nous avons encore constaté que des glaçons se formaient cette fois à la majorité des bâtiments [...] et qu’ils étaient gigantesques surtout aux bâtiments 4, 6 et 9, partant du toit jusqu’au sol [...]. En même temps, nous avions des infiltrations d’eau dans le garage sous ces endroits.
[13] Monsieur Pitre inspecte une nouvelle fois les lieux le 19 mars 2010 et fait rapport le 6 mai suivant. Son rapport dont l’essentiel pertinent est reproduit plus haut soulève entre autre la question de la tardivité de la dénonciation faite à l’administrateur et à l’entrepreneur.
III
PLAIDOIRIES
Bénéficiaire
[14] Se tournant d’abord vers le point 3. Plates-formes des balcons, le procureur soutient qu’il n’y a aucune distinction entre la première dénonciation remontant à octobre 2007 et celle de septembre 2009. Selon le procureur, la première dénonciation visait déjà l’ensemble des balcons et elle a été présentée avant l’échéance de la garantie contre les vices cachés. Selon lui, le problème affectant tous les balcons était déjà bien décrit dans la première dénonciation. Il s’agit d’un problème qui se serait manifesté graduellement de sorte que certains balcons ont présenté des problèmes plus rapidement que d’autres.
[15] Pour le procureur la dénonciation de septembre 2009 n’est que la continuité de celle faite en 2007 et, il ne faut pas confondre vice et ses manifestations. Or, selon lui, l’entrepreneur est informé dès 2007 de l’ensemble de la situation. i.e. du fait qu’il y a un problème qui affecte les 144 balcons. Selon le procureur, l’entrepreneur avait dès lors l’obligation d’inspecter et de corriger tous les balcons affectés. Or, pour le procureur, en n’identifiant que certains balcons comme atteints d’un problème, l’entrepreneur a été négligeant et il serait déraisonnable aujourd’hui de lui permettre de ne faire que quelques réparations et d’échapper à son obligation de corriger le tout. En effet, poursuit le procureur, tous ces balcons ont été conçus de la même façon. Il était donc probable et prévisible qu’ils se détériorent tous et l’entrepreneur n’a pas rempli ses obligations en ne les corrigeant pas tous.
[16] En ce qui a trait au point 5. Formation de glace à l’avant-toit, le procureur situe au 23 aout 2006 le point de départ du délai de la garantie contre les vices cachés. Selon lui, la dénonciation de ce problème faite le 23 février 2010 respectait donc le délai relatif à la garantie contre les vices cachés.
[17] Le procureur a invoqué et commenté les autorités suivantes : Séguin et Séguin et Lemay Construction (1998) inc. et La Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ inc., 2005 CanLII 59154 (QC O.A.G.B.R.N.); Guerrera et Mancini et Construction Naslin inc. et La Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ inc., 2005 CanLII 59096 (QC O.A.G.B.R.N.); Brodeur et Boucher et Groupe Construction Royale inc. et La Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ inc., 2006 CanLII 60433 (QC O.A.G.B.R.N.);
Administrateur
[18] D’entrée de jeu, le procureur de l’administrateur affirme qu’aucune décision n’a été rendue par l’administrateur concernant le point 3. Plates-formes des balcons puisque cette question a été l’objet d’une entente entre l’entrepreneur et le bénéficiaire. Cela dit, affirme le procureur, si monsieur Pitre avait eu à se prononcer, la dénonciation d’octobre 2007 aurait été jugée tardive et donc la réclamation non recevable. En effet, selon lui, le bénéficiaire connaissait le problème depuis 2006 et ne l’a dénoncé qu’un an plus tard soit à l’extérieur du délai de 6 mois prévu au Règlement. Autrement dit, s’il n’y avait pas eu entente, l’administrateur aurait tout simplement rejeté cette réclamation.
[19] En ce qui en trait au point 5, le procureur soutient que ce problème a été dénoncé plus de trois ans après la réception et ne peut donc être examiné sous l’angle de la garantie contre les vices cachés.
[20] Le procureur n’a invoqué aucune autorité.
Entrepreneur
[21] Après avoir passé en revue l’article 27 du Règlement, le procureur rappelle que le délai prévu à son alinéa 4 en est un de rigueur. Selon lui, tant la dénonciation de 2009 concernant le point 3 que celle de 2010 concernant le point 5 sont tardives n’ayant pas été faites à l’administrateur dans les 6 mois suivant la découverte du problème dénoncé.
[22] En effet, soutient le procureur, il ne suffit pas en vertu du Règlement qu’un immeuble soit atteint d’un vice et pour le bénéficiaire de le connaitre pour que celui-ci bénéficie de la garantie, encore faut-il qu’il le dénonce par écrit et dans un délai raisonnable ne pouvant excéder six mois de la découverte.
[23] Or, concernant le point 3, le procureur soutient que le bénéficiaire connaissait ce vice allégué depuis décembre 2006, alors qu’il ne l’a dénoncé qu’en octobre 2007, soit à l’extérieur du délai de 6 mois.
[24] Subsidiairement, avance le procureur, même si la dénonciation d’octobre 2007 était jugée valide, il reste qu’une entente de règlement est intervenu entre le bénéficiaire et l’entrepreneur, entente qui a mis fin au litige et que rien ne nous permet de mettre de côté.
[25] Concernant le point 5, le procureur soutient que l’extrait suivant de la lettre de février 2010 comporte un aveu extrajudiciaire à l’effet que le bénéficiaire connaissait le problème affectant le toit depuis à tout le moins l’hiver 2008-2009. On peut y lire :
Durant l’hiver 2008-2009, le problème de glaciation s’est reproduit : certainement causé par un problème d’isolation ou de circulation d’air dans les entre-toits.
[26] Or, poursuit le procureur, la dénonciation de ce problème allégué à l’administrateur n’a été faite qu’en février 2010, soit plus de 6 mois après sa découverte.
[27] Le procureur a invoqué et commenté les autorités suivantes : Mazza et Grieco et La Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ inc. et Edil Nord inc., 2007 CanLII 74621 (QC O.A.G.B.R.N.); McGinn et Dasilva et Gestion Dub inc. et La Garantie Qualité Habitation, SA, 27 juillet 2010, arbitre Jean-Philippe Ewart; Hazel et Constructions Jean Péloquin inc. et La Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ inc., SA, 28 juillet 2009, arbitre Claude Dupuis; Carrier et Construction Paul Dargis inc. et La Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ inc., 2010 CanLII 19923 (QC O.A.G.B.R.N.); Bolduc et Boutin et 2739-8775 Québec inc. (P.H. Construction) et La Garantie Qualité Habitation inc., SA, 19 mai 2010, arbitre Reynald Poulin; Champagne c. La Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ inc., 2010 QCCQ 3332 (CanLII); La Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ inc. c Desindes, 2004 CanLII 47872 (QC CA); Lapointe et Fortin et Construction Réjean D’Astous inc. et La Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ inc., 2006 CanLII 60494 (QC O.A.G.B.R.N.); Stante et Constructions Oakwood Canada inc. et La Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ inc., SA, 2 juillet 2009, arbitre Michel A. Jeanniot.
IV
ANALYSE ET DÉCISION
[28] Les réclamations exercées en vertu du Règlement sont assujetties à certaines règles. Je dois pour décider du présent litige voir si le bénéficiaire a présenté sa réclamation concernant les points 3 et 5 en conformité des exigences du Règlement.
[29] L’article 27 du Règlement stipule :
27. La garantie d'un plan dans le cas de manquement de l'entrepreneur à ses obligations légales ou contractuelles après la réception de la partie privative ou des parties communes doit couvrir :
1. le parachèvement des travaux dénoncés par écrit :
a) par le bénéficiaire, au moment de la réception de la partie privative ou, tant que le bénéficiaire n’a pas emménagé, dans les trois jours qui suivent la réception;
b) par le professionnel du bâtiment, au moment de la réception des parties communes;
2. la réparation des vices et malfaçons apparents visés à l'article 2111 du Code civil et dénoncés, par écrit, au moment de la réception ou, tant que le bénéficiaire n'a pas emménagé, dans les trois jours qui suivent la réception;
3. la réparation des malfaçons existantes et non apparentes au moment de la réception et découvertes dans l'année qui suit la réception, visées aux articles 2113 et 2120 du Code civil et dénoncées, par écrit, à l'entrepreneur et à l'administrateur dans un délai raisonnable, lequel ne peut excéder 6 mois de la découverte des malfaçons;
4. la réparation des vices cachés au sens de l'article 1726 ou de l'article 2103 du Code civil qui sont découverts dans les trois ans suivant la réception et dénoncés, par écrit, à l'entrepreneur et à l'administrateur dans un délai raisonnable, lequel ne peut excéder 6 mois de la découverte des vices cachés au sens de l'article 1739 du Code civil;
5. la réparation des vices de conception, de construction ou de réalisation et des vices du sol, au sens de l'article 2118 du Code civil, qui apparaissent dans les cinq ans suivant la fin des travaux des parties communes ou, lorsqu'il n'y a pas de parties communes faisant partie du bâtiment, de la partie privative et dénoncés, par écrit, à l'entrepreneur et à l'administrateur dans un délai raisonnable, lequel ne peut excéder 6 mois de la découverte ou survenance du vice ou, en cas de vices ou de pertes graduelles, de leur première manifestation.
[30] En outre de la garantie applicable au moment de la réception des parties communes, le Règlement comporte trois garanties dont la durée respective est d’un an pour les malfaçons non apparentes; de trois ans pour les vices cachés; et de cinq ans pour les vices de construction. Cela dit, la présence d’une malfaçon, d’un vice caché et même d’un vice de construction n’est pas suffisante à elle seule pour ouvrir droit à un recours en faveur d’un bénéficiaire. Il faut aussi que le problème soit découvert puis dénoncé, à l’administrateur et à l’entrepreneur, et dans les délais prescrits.
[31] Plus précisément les vices cachés sont couverts par la garantie en autant qu’ils soient découverts dans les trois ans suivant la réception et dénoncés à l’entrepreneur et à l’administrateur dans un délai raisonnable n’excédant pas six mois de leur découverte.
[32] Or même si pour les fins d’analyse je considérais que l’un ou l’autre des points en litige ou les deux, concernent des vices cachés, ce qu’il n’est pas nécessaire de décider, il reste que le recours du bénéficiaire devrait quand même être rejeté pour tardivité. Car en effet, et malheureusement pour lui, même dans l’hypothèse où ces problèmes seraient qualifiés de vices cachés, le bénéficiaire avait quand même l’obligation de les dénoncer à l’intérieur d’un délai n’excédant pas six mois de leur découverte.
[33] Concernant le point 3, la preuve révèle que le problème affectant les balcons est décelé dès décembre 2006. Or, selon la documentation au dossier, le bénéficiaire n’a dénoncé la situation qu’en octobre 2007, soit neuf mois plus tard.
[34] Il en est de même pour la réclamation concernant la toiture, le point 5. En l’espèce, la documentation révèle que le bénéficiaire dénonce à l’entrepreneur des problèmes affectant le toit dès 2008. Il n’en avisera toutefois l’administrateur qu’en 2010. Quand il écrit à l’entrepreneur en transmettant la première fois à l’administrateur une copie en février 2010, c’est à cette occasion qu’il fait état de ces différentes démarches au sujet de cette réclamation. Or, le problème affectant le toit découvert en 2008 est dénoncé à l’administrateur pour la première fois en février 2010. Or, sa dénonciation a eu lieu plus de six mois après la découverte.
[35] En somme, les deux dénonciations dont il s’agit n’ont pas été faites à l’administrateur dans les six mois de la découverte des problèmes dénoncés. D’une part, la découverte du problème affectant les balcons remonte à décembre 2006 alors que sa dénonciation n’est faite qu’en octobre 2007. D’autre part, concernant la toiture, la découverte se situe, à l’hiver 2008-2009 et sa dénonciation en février 2010. Les problèmes faisant l’objet de ces réclamations n’ont donc pas été dénoncés à l’administrateur dans les six mois de leur découverte.
[36] La raison d’être de dispositions exigeant que des dénonciations soient faites à l’intérieur de délais, est de permettre, notamment à l’administrateur qui s’est engagé à cautionner certaines obligations de l’entrepreneur, de prévenir une dégradation plus grande du bien en lui fournissant l’occasion d’agir rapidement s’il le désire. Or, selon le Règlement, le fait que l’entrepreneur reconnaisse à un moment donné auprès du bénéficiaire qu’il y a problème et convienne de s’en occuper ne dispense pas malheureusement ce dernier de l’obligation d’aviser directement l’administrateur à l’intérieur du délai stipulé de six mois de l’existence de ces problèmes parce que ceux-ci demeurent susceptibles d’être couverts par le Règlement.
[37] En l’espèce, hormis la documentation produite au dossier et le fait que le bénéficiaire s’en est remis à l’entrepreneur pour la solution du problème concernant le point 5, la preuve ne fait état d’aucune démarche du bénéficiaire à l’endroit de l’administrateur. Le bénéficiaire n’a du reste présenté aucun argument susceptible de me permettre de raisonnablement le relever de ce défaut. Or, avec égards, le Règlement est explicite : un avis, écrit, doit être donné à l’entrepreneur, et un tel avis écrit doit aussi être donné à l’administrateur dans le délai. Or, il ne l’a pas été.
[38] Il en résulte que les réclamations relatives aux points 3 et 5 n’ont donc pas été engagées en conformité du Règlement de sorte que je n’ai guère le choix que de conclure à leur rejet; et de là, à celui du présent recours, celui-ci étant limité à ces deux seuls points.
[39] En vertu de l’article 37 du Règlement, je départage les coûts de l’arbitrage selon les proportions suivantes : 95 % à l’administrateur et 5 % au bénéficiaire.
Montréal, ce 7 janvier 2011
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__________________________________ Johanne Despatis, arbitre
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Adjudex inc.
1007-8370-GAMM
SA-8083