TRIBUNAL D’ARBITRAGE
Sous l’égide de
CENTRE CANADIEN D’ARBITRAGE COMMERCIAL (CCAC)
CANADIAN COMMERCIAL ARBITRATION CENTRE (CCAC)
Organisme d’arbitrage autorisé par la Régie du bâtiment
ARBITRAGE EN VERTU DU RÈGLEMENT SUR LE PLAN DE GARANTIE
DES BÂTIMENTS RÉSIDENTIELS NEUFS
(Décret 841-98 du 17 juin 1998)
CANADA
PROVINCE DE QUÉBEC
Dossier no: S09-240201-NP
ANTHONY DESCHÊNES
Bénéficiaire
c.
construction QUALIMAX INC.
Entrepreneur
et
LA GARANTIE DES BÂTIMENTS
RÉSIDENTIELS NEUFS DE L’APCHQ INC.
Administrateur
______________________________________________________________________
DÉCISION ARBITRALE
______________________________________________________________________
Arbitre : Me Jean Philippe Ewart
Pour les Bénéficiaires : Anthony et Nathalie Deschênes
(Présence en conférence préparatoire)
Pour l’Entrepreneur : Nil
Pour l’Administrateur : Me François Laplante (Savoie Fournier)
M. Luc Bondaz, Insp.- Conciliateur
Date de l’enquête et audition : 24 août 2009
Date de la décision arbitrale : 28 janvier 2010
Identification des Parties
BÉNÉFICIAIRE : ANTHONY DESCHÊNES
17330, rue du Grand Prix
Mirabel (Québec)
J7J 2M4
(le « Bénéficiaire »)
entrepreneur: CONSTRUCTION QUALIMAX INC.
M. Mario Laroche
117, rue des Cascades
St-Jérôme (Québec)
J7Y 4Z4
(l’« Entrepreneur »)
ADMINISTRATEUR: SAVOIE FOURNIER
Me François Laplante
5930, Louis-H. Lafontaine
Anjou (Québec)
H1M 1S7
(l’« Administrateur »)
Chronologie
2002.31.12 Contrat préliminaire et contrat de garantie (Pièce A-1).
2003.06.25 Déclaration de réception du bâtiment (Pièce A-2).
2003.06.25 Acte de vente (Pièce A-3).
2008.02.17 Lettre de mise en demeure du Bénéficiaire (Pièce A-4).
2008.03.10 Lettre du Bénéficiaire (Pièce A-5).
2008.07.09 Avis de 15 jours à l’Administrateur et à l’Entrepreneur (Pièce A-6).
2009.01.21 Décision de l’Administrateur (Pièce A-7).
2009.02.25 Notification de la demande d’arbitrage et demande d’arbitrage (En liasse - Pièce A-8).
2009.02.25 Notification de la demande d’arbitrage par le Centre.
2009.03.16 Nomination de l’arbitre au dossier.
2009.05.27 Appel conférence préparatoire.
2009.05.28 Décision intérimaire quant au déroulement de l’instance avec report d'enquête et audition à la demande du Bénéficiaire.
2009.07.13 Lettre du Bénéficiaire quant au choix de la date pour l’enquête et audition.
2009.07.13 Avis d’enquête et audition.
2009.08.24 Enquête et audition - ni le Bénéficiaire ni l’Entrepreneur ne se présentent.
2009.08.25 Confirmation au Tribunal quant à la licence de l'Entrepreneur.
Mandat et juridiction
[1] Le Tribunal est saisi du dossier par nomination du soussigné en date du 16 mars 2009 suite à une demande d’arbitrage des Bénéficiaires reçue en date du 25 février 2009. Aucune objection quant à la compétence du Tribunal n’a été soulevée par les parties et juridiction du Tribunal a été alors confirmée.
Litige
[2] Le litige est un appel d’une décision de l’Administrateur émise en application du Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs (L.R.Q. c. B-1.1, r.02) (le « Règlement »), datée du 21 janvier 2009 (dossier 045626-1) (la « Décision ») et qui portait sur 4 point(s) (« Point(s) ») :
Point no 1 : Système de distribution d’eau intérieur;
Point no 2 : Manque d’isolant au vide sous toit;
Point no 3 : Fissures à la fondation;
Point no 4 : Cadre de la porte-fenêtre déformé.
[3] Lors de la conférence préparatoire, le Bénéficiaire confirme que sa demande d’arbitrage ne vise que les Points 1 à 4 tels que couverts par la Décision.
Déroulement de l’instance
[4] Une objection préliminaire a été soulevée telle que plus amplement décrite ci-dessous. Le Tribunal a décidé de statuer en premier lieu sur cette objection. L’enquête et audition préliminaire s’est tenue aux bureaux du Tribunal.
[5] Les pièces contenues au Cahier de l’Administrateur et dont référence sera faite aux présentes sont identifiées comme A-, avec sous-numérotation équivalente à l’onglet applicable au Cahier visé.
Objection préliminaire
[6] L’Administrateur, par l’entremise de son procureur, a soulevé par moyen préliminaire lors de la conférence préparatoire et par la suite à l’audition, la non recevabilité du recours des Bénéficiaires contre l’Administrateur pour cause de non dénonciation à l’Administrateur dans le cadre des éléments requis de dénonciation ou du calcul des délais prévus au Règlement en conformité de la Loi sur le bâtiment (L.R.Q. c. B-1.1) pour ce faire, que les malfaçons, vices cachés ou vices majeurs, quelque soit le cas, se doivent d’être dénoncés par écrit à l’Entrepreneur et à l’Administrateur dans un délai raisonnable, lequel ne peut excéder six (6) mois de leur découverte ou survenance ou, en cas de vices ou de pertes graduels, de leur première manifestation.
Les faits pertinents
[7] Selon la preuve devant le Tribunal, la réception du bâtiment est effectuée le 23 juin 2003 (Pièce A-2).
[8 La Décision indique qu’une dénonciation des points sous étude a été faite à l’Entrepreneur par écrit en date du 12 mars 2008.
[9] Suite à l'envoi à toutes les parties d'un avis d'audition, de contacts téléphoniques du greffe avec l'Entrepreneur, de diverses correspondances avec le Bénéficiaire sur ce sujet et réception par ce dernier d'un avis d'audition fixée avec son consentement, de commentaires faits au Tribunal par le Bénéficiaire que celui-ci est en contact avec l'Entrepreneur, ni l'Entrepreneur ni le Bénéficiaire ne se sont présentés à l'enquête et audition.
[10] Le procureur de l'Administrateur avise le Tribunal suite à l'audition que l'Entrepreneur ne détient plus de licence de la Régie du Bâtiment depuis le 19 novembre 2007, et qu'il n'a pas renouvelé son adhésion au plan de garantie de l'Administrateur.
Prétentions et plaidoiries
L’Administrateur
[11] Le procureur de l’Administrateur soumet d’une part la non recevabilité du recours des Bénéficiaires contre l’Administrateur pour cause de non-dénonciation à l’Administrateur dans le cadre des éléments requis de dénonciation ou du calcul des délais prévus pour ce faire au Règlement, ce délai ayant excédé dans les circonstances six (6) mois de la découverte ou première manifestation de tout vice ou perte allégué.
[12] L’Administrateur soutient que le délai de six (6) mois est un délai de déchéance et que celui-ci court de la connaissance du vice ou malfaçon.
[13] De plus, l’Administrateur indique que les Points ont été dénoncés dans la cinquième année de la couverture de la garantie, s'il en est, tenant compte de la date de réception des parties communes et donc que ceux-ci pour bénéficier de la garantie doivent entre autre rencontrer les critères du vice majeur, et soutient que, dans les circonstances, les Points ne rencontrent pas les critères du vice majeur au sens du Règlement et que, conséquemment, l’obligation de réparation sous la garantie du plan de garantie (le « Plan ») ne trouve pas application dans les circonstances.
Analyse et motifs
Dispositions applicables du Règlement
[14] Ce recours s’exerce selon le Règlement en conformité d’un plan de garantie conforme au Règlement qui garantit l’exécution des obligations légales et contractuelles de tout entrepreneur en bâtiments résidentiels neufs telles que prévues au Règlement et résultant d’un contrat conclu avec les Bénéficiaires.
[15] Le Tribunal s’appuie donc pour les présentes, dans les circonstances particulières du cas sous étude et de l’objection préliminaire soulevée, que le Règlement est d’ordre public et prévoit que toute disposition du Plan qui est inconciliable avec le Règlement est nulle[1].
[16] La couverture du Plan dans le cas sous étude et les délais applicables, s’il en est, sont prévus au Règlement, que ce soit pour parachèvement des travaux, malfaçons, vices cachés ou vices de conception, de construction ou de réalisation et des vices du sol et se lisent, plus particulièrement pour les bâtiments non détenus en copropriété divise :
« 10. La garantie d’un plan dans le cas de manquement de l’entrepreneur à ses obligations légales ou contractuelles après la réception du bâtiment doit couvrir :
1o le parachèvement des travaux relatifs au bâtiment et dénoncés, par écrit, au moment de la réception ou, tant que le bénéficiaire n’a pas emménagé, dans les 3 jours qui suivent la réception;
2o la réparation des vices et malfaçons apparents visés à l’article 2111 du Code civil et dénoncés, par écrit, au moment de la réception ou, tant que le bénéficiaire n’a pas emménagé, dans les 3 jours qui suivent la réception;
3o la réparation des malfaçons existantes et non apparentes au moment de la réception et découvertes dans l’année qui suit la réception, visées aux articles 2113 et 2120 du Code civil et dénoncées, par écrit, à l’entrepreneur et à l’administrateur dans un délai raisonnable, lequel ne peut excéder 6 mois de la découverte des malfaçons;
4o la réparation des vices cachés au sens de l’article 1726 ou de l’article 2103 du Code civil qui sont découverts dans les 3 ans suivant la réception du bâtiment et dénoncés, par écrit, à l’entrepreneur et à l’administrateur dans un délai raisonnable, lequel ne peut excéder 6 mois de la découverte des vices cachés au sens de l’article 1739 du Code civil;
5o la réparation des vices de conception, de construction ou de réalisation et des vices du sol, au sens de l’article 2118 du Code civil, qui apparaissent dans les 5 ans suivant la fin des travaux des parties communes ou, lorsqu’il n’y a pas de parties communes faisant partie du bâtiment, la partie privative et dénoncés, par écrit, à l’entrepreneur et à l’administrateur dans un délai raisonnable, lequel ne peut excéder 6 mois de la découverte ou survenance du vice ou, en cas de vices ou de pertes graduelles, de leur première manifestations. »[2]
Nos soulignés.
[17] Le Tribunal note d’autre part l’article 18 al.1 du Règlement :
« 18. La procédure suivante s’applique à toute réclamation fondée sur la garantie prévue à l’article 10 :
1o dans le délai de garantie d’un, 3 ou 5 ans selon le cas, le bénéficiaire dénonce par écrit à l’entrepreneur le défaut de construction constaté et transmet une copie de cette dénonciation à l’administrateur en vue d’interrompre la prescription »[3].
Délais et Vices allégués
[18] En résumé, le Tribunal est d’avis, tel qu’il l’a énoncé sous certaines de ses conclusions dans diverses décisions récentes[4] , que :
- la dénonciation prévue à l’article 10 du Règlement se doit d’être par écrit, et est impérative et essentielle;
- le délai maximum de six (6) mois prévu aux paragraphes 3e, 4e et 5e respectivement de l’article 10 du Règlement est de rigueur et de déchéance et ne peut conséquemment être sujet à extension, et si ce délai n’est pas respecté, le droit d’un bénéficiaire à la couverture du plan de garantie visé et au droit à l’arbitrage qui peut en découler sont respectivement éteints, forclos et ne peuvent être exercés.
[19] Le Tribunal est d'avis, et quoiqu'il n'est pas essentiel au jugement aux présentes, tenant compte de l'ensemble de la preuve non contredite devant lui, qu'aucun des Points ne constitue des vices de conception, construction ou réalisation au sens de l'article 2118 C.c.Q. ni ne rencontre les critères applicables à la couverture de l'article 10(5) du Règlement.
Conclusions
[20] Pour l’ensemble des motifs ci-haut repris, et tenant compte de la preuve non contredite devant le Tribunal, le Tribunal maintient la décision de l’Administrateur et rejette la demande d’arbitrage des Bénéficiaires.
[21] Le Tribunal, s’autorisant de l’article 116 du Règlement qui édicte :
« Un arbitre statue conformément aux règles de droit; il fait aussi appel à l’équité lorsque les circonstances le justifient. »
est d’opinion que les frais de l’arbitrage se doivent d’être à la charge de l’Administrateur, sauf à distraire 50$ à la charge des Bénéficiaires.
POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL D’ARBITRAGE :
[22] REJETTE la demande des Bénéficiaires.
[23] ORDONNE que l’Administrateur assume les frais du présent arbitrage, sauf pour un montant de 50$ à être assumé par les Bénéficiaires.
DATE : 28 janvier 2010
______________________
Me Jean Philippe Ewart
Arbitre
[1] Article 5 du Règlement, (L.R.Q. c. B-1.1, r.02) D.841-98, a.5
[2] (L.R.Q. c. B-1.1, r.02) - D. 841-98, a. 10; D. 39-2006, a.1.
[3] (L.R.Q. c. B-1.1, r.02) - D. 841-98, a. 18; D. 39-2006, a.6.
[4] Danesh c. Solico Inc. et La Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ inc., Me Jean Philippe Ewart, Arbitre, Décision arbitrale en date du 5 mai 2008 au dossier Soreconi No 070821001; et Moustaine & El-Houma c. Brunelle Entrepreneur inc. et La Garantie des bâtiments résidentiels neufs de L’APCHQ inc., Me Jean Philippe Ewart, Arbitre, Décision arbitrale en date du 9 mai 2007 au dossier Soreconi No 070424001.