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ARBITRAGE EN VERTU DU RÈGLEMENT SUR LE PLAN DE GARANTIE DES BÂTIMENTS RÉSIDENTIELS NEUFS (décret 841-98 du 17 juin 1998)
Organisme d'arbitrage autorisé par la Régie du bâtiment : Le Groupe d'arbitrage et de médiation sur mesure (GAMM)
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ENTRE : |
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Mariane Vincent et Gilles Hurtubise |
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(ci-après les « bénéficiaires »)
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ET : |
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IMAX Construction inc. |
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(ci-après l'« entrepreneur »)
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ET : |
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La Garantie Habitation du Québec inc. |
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(ci-après l'« administrateur »)
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No dossier QH : 41051-2698 No dossier GAMM : 2009-09-014
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SENTENCE ARBITRALE
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Arbitre : |
M. Claude Dupuis, ing. |
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Pour les bénéficiaires : |
Me Jean-Philippe Lincourt |
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Pour l'entrepreneur : |
Me Claude Coursol |
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Pour l'administrateur : |
Me Avelino De Andrade |
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Dates d’audience : |
1er et 2 septembre 2010 / 15 novembre 2010 |
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Lieu d’audience : |
Longueuil / Anjou |
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Date de la sentence : |
6 décembre 2010 |
[1] Le contrat préliminaire de l’unité d’habitation appartenant aux bénéficiaires Vincent et Hurtubise a été signé le 25 août 2006; l’acte de vente notarié ainsi que la réception de l’unité sont en date du 26 octobre 2006.
[2] La présente réclamation des bénéficiaires portant sur le dénivellement du plancher intérieur a été reçue par l’administrateur le 20 avril 2009.
[3] Le 27 août 2009, l’administrateur a rendu une première décision que l’on pourrait qualifier d’intérimaire :
1. DÉNIVELLATION PLANCHER INTÉRIEURE [sic]
Le bénéficiaire dénonce son inquiétude concernant une dénivellation de 3/8" à 1/2" au niveau du plancher de la salle à dîner et devant la porte de chambre.
Lors de l’inspection, nous avons constaté la situation.
Par conséquent, l’entrepreneur devra faire les vérifications nécessaires et les correctifs si requis, dans un délai de quarante-cinq (45) jours consécutifs suivant la réception du présent rapport selon les règles de l’art et l’usage courant du marché.
Le bénéficiaire devra fournir dans un délai de dix (10) jours consécutifs suivant la réception du présent rapport, les permis et documents ayant servi à la construction des annexes attachée [sic] au bâtiment en rubrique. (Abri d’auto, stationnement latéral droit, galerie arrière et entrée excavée arrière.
Par conséquent, la garantie Qualité Habitation ne peut statuer sur la situation dans l’immédiat. Cependant, celle-ci procédera à une inspection supplémentaire au moment opportun, et statuera sur la situation.
[4] À la suite de la réception des documents demandés, l’administrateur a rendu une décision finale le 14 septembre 2009 :
1. DÉNIVELLEMENT DU PLANCHER INTÉRIEUR
Le bénéficiaire dénonce son inquiétude concernant une dénivellation de 3/8 de pouce à 1/2 pouce au niveau du plancher de la salle à dîner, devant la porte de la chambre.
De la part de l’entrepreneur, nous avons reçu une étude de reconnaissance de sol datée du 22 septembre 2006, de la part du bénéficiaire, une demande de permis pour bâtiment accessoire datée du 20 avril 2007 et un certificat de localisation daté du 29 mai 2008.
Suite à ces éléments, tel que stipulé à l’article 6.7.3 du contrat de garantie sont EXCLUS de la garantie : Les réparations rendues nécessaires par une faute du bénéficiaire tels l’entretien inadéquat, la mauvaise utilisation du bâtiment ainsi que celles qui résultent de suppressions, modifications ou ajouts réalisés par le bénéficiaire.
Par conséquent, compte tenu que cette tâche relève de la responsabilité des propriétaires, La garantie Qualité Habitation ne peut reconnaître ces points dans le cadre de son mandat.
[5] Par leur demande d’arbitrage, les bénéficiaires contestent cette dernière décision de l’administrateur.
[6] En présence des parties, le soussigné a effectué une visite des lieux le 1er septembre 2010 ainsi que le 15 novembre 2010.
[7] En cours d’enquête, les parties ont déposé 21 pièces et ont fait entendre les témoins suivants :
- M. Gilles Hurtubise, bénéficiaire
- M. Pierre Brassard, ing. (de la firme Geniex), expert retenu par les bénéficiaires
- M. René Vincent, ing. (de la firme Centre IEB Québec), expert retenu par l’entrepreneur
- M. Denis Robillard, conciliateur pour La garantie Qualité Habitation
[8] Lors de la signature du contrat préliminaire, les bénéficiaires avaient ajouté, entre autres, la condition particulière suivante : « CONDITIONNEL À AVOIR À L’ACTE NOTARIÉ COPIE ORIGINAL DU RAPPORT DE LA CAPACITÉ PORTANTE DU SOL » [sic]. M. Hurtubise témoigne que cette condition n’était pas nécessairement une exigence; toutefois, elle lui avait été auparavant suggérée par l’agent d’immeubles, car, affirme-t-il, il avait une inquiétude sur la qualité du sol.
[9] Selon M. Hurtubise, à la signature, les bénéficiaires avaient le choix de deux terrains, soit les numéros 471 et 474 de la rue […]; l’entrepreneur lui aurait alors recommandé le numéro 474, celui de l’autre côté de la rue (numéro 471) n’étant pas propice à la construction.
[10] M. Hurtubise nous informe que dès le 27 septembre 2006, les fondations étaient complétées; le témoin affirme que tous les jours, à vélo, il allait vérifier l’état d’avancement des travaux.
[11] Le bénéficiaire a reçu copie du document intitulé ÉTUDE DE RECONNAISSANCE DES SOLS, « TERRAIN VACANT SITUÉ AU 474, […] » À ST-AMABLE (QUÉBEC) lors de la remise de l’acte de vente, soit le 26 octobre 2006; cette étude de reconnaissance des sols, datée du 22 septembre 2006, a été réalisée par G&S Consultants, à la demande de l’entrepreneur; le témoin affirme n’avoir jamais rencontré un représentant de cette firme; il n’a consulté cette étude qu’en novembre 2008, lors de l’apparition des manifestations.
[12] M. Hurtubise a lui-même terminé le sous-sol ainsi que la descente de l’escalier arrière vers février-mars 2007. Selon des plans effectués par son ex-conjointe, et avec l’assistance d’un menuisier, il a procédé, de mai à juin 2007, à l’érection d’un abri d’auto, les fermes de toit ayant été fournies par une firme spécialisée; il avait auparavant obtenu un permis de la municipalité; lors de la construction de l’abri, M. Hurtubise n’a pas annexé l’étude des sols à sa demande de permis pour l’abri et il n’a pas tenu compte des charges supplémentaires occasionnées par l’ajout de cet abri et la neige; et il en est de même pour la galerie arrière.
[13] En résumé, depuis la réception du bâtiment, ont été ajoutés l’abri d’auto, le surplus de pierres en dessous de cet abri ainsi que le balcon arrière.
[14] Au moment de l’inspection préréception et lorsqu’ils ont emménagé, les bénéficiaires n’ont remarqué aucune manifestation.
[15] Relativement à la présente réclamation, les manifestations sont apparues à l’automne 2008 : porte de la chambre principale qui ne ferme plus, fissures en haut de cette même porte, fenêtres difficiles à ouvrir, vallon sur le plancher de la cuisine et fissures sur le mur droit des fondations.
[16] À deux reprises en 2009, l’entrepreneur a réparé les fissures en haut de la porte de la chambre des maîtres.
[17] M. Hurtubise témoigne que depuis 2008 à aujourd’hui, l’évolution des manifestations se poursuit.
[18] Lors de la visite de M. Robillard, conciliateur pour La garantie Qualité Habitation, le témoin est catégorique qu’en plus d’avoir dénoncé le vallon sur le plancher, il a aussi fait état de la porte de la chambre principale ainsi que de la fissure extérieure.
[19] Le témoin affirme qu’il n’est pas d’accord avec la décision du 14 septembre 2009 de l’administrateur, lequel attribue les manifestations aux « modifications ou ajouts réalisés par le bénéficiaire »; toutes les maisons, dit-il, ont des problèmes de sol à Saint-Amable, et l’ajout d’un abri d’auto n’en est point la cause.
[20] M. Hurtubise a retenu les services de la firme Geniex afin de connaître les causes des manifestations ainsi que les remèdes à y apporter. M. Laurent Ferland, t.p., a pris des mesures au laser à l’intérieur et à l’extérieur de l’habitation; M. Pierre Brassard, ing., cosignataire du rapport de Geniex et témoin expert dans le présent dossier, n’a jamais visité les lieux.
[21] Jusqu’à présent, les bénéficiaires n’ont subi ni infiltration d’eau, ni humidité excessive, ni moisissure.
[22] M. Pierre Brassard, ing., est le cosignataire du rapport d’expertise de Geniex, firme retenue par les bénéficiaires. Son mandat consistait à constater s’il y avait eu affaissement et, le cas échéant, de quelle envergure, en plus de vérifier si l’ajout de l’abri d’auto pouvait en être la cause.
[23] M. Brassard affirme qu’il a l’habitude de ce genre de problème et qu’il connaît bien la situation à Saint-Amable.
[24] Son technicien a procédé à des mesures de niveau, et ils ont observé un pouce d’enfoncement en périphérie des fondations, d’où la bosse ou le vallon au centre de la maison, qui lui ne bouge pas; c’est d’ailleurs ce qu’il a constaté régulièrement à Saint-Amable.
[25] Pour compléter son expertise, M. Brassard avait en main l’étude de reconnaissance des sols préparée par G&S Consultants; d’après cette étude, il constate que l’excavation est trop profonde, que la construction repose sur l’argile molle et que les semelles auraient donc dû être de 50 pouces de large au lieu de 30 pouces; voilà pourquoi la maison s’enfonce et que cet affaissement se poursuivra; il rappelle que l’on a enlevé le sable beige pour reposer sur l’argile; l’étude des sols, les photos prises lors de la construction ainsi que les relevés effectués par sa firme prouvent le tassement.
[26] Si l’entrepreneur lit correctement le rapport sur l’étude des sols, il construit hors sol sur le sable beige, sinon il doit pieuter.
[27] Selon le témoin, la différence de niveau de 0,8 pouce entre les deux murs latéraux n’est pas due à l’ajout de l’abri d’auto, car pour causer un tel tassement de sol, il faut que la cause ait été présente depuis longtemps; si la maison avait été construite en respectant l’étude des sols, l’ajout d’un abri ne causerait pas problème, vu la faible charge de cet élément.
[28] Selon M. Brassard, l’ajout de pierres concassées en dessous de l’abri est non significatif, puisque l’on a enlevé de la matière pour en ajouter une autre; la descente de sous-sol ne crée pas de tassement, tandis que l’ajout de la galerie extérieure arrière n’a aucun impact.
[29] L’expert soumet qu’un tassement de sol cause des fissures, un vallon au centre du plancher, le malfonctionnement des portes intérieures et un espace inégal entre le haut et le bas d’une porte patio; il ne recommande pas comme solution de réparer le plancher et de le remettre à niveau; dans le présent dossier, le témoin est d’avis que le vallon constitue la principale manifestation.
[30] Pour compléter son analyse, M. Brassard n’a consulté ni les plans de l’entrepreneur, ni les documents déposés à la municipalité. Il a toutefois procédé à la surveillance du pieutage d’une centaine d’habitations à Saint-Amable.
[31] Là où son rapport indique une charge totale non pondérée sur les murs latéraux de 18,9 KN/mètre de mur, c’est l’équivalent d’une charge de 1 293 livres/pied de mur.
[32] Selon le témoin, les poids des solives et poutrelles sont négligeables; le poids d’un plancher de maison est de l’ordre de 10 livres/pied carré.
[33] Dans la prise de niveau, la marge d’erreur est de ± 1/2 pouce; un tassement d’un pouce se situe donc dans les limites permises.
[34] M. Brassard affirme que le vallon au centre du plancher du rez-de-chaussée ne peut avoir été causé par l’assèchement des matériaux, car pour ce faire, il aurait fallu quatre étages de construction.
[35] Par contre, la fissure ouverte à la descente arrière ainsi que l’ondulation du vinyle sur le mur droit au-dessus de l’abri sont causées par le tassement.
[36] Si les manifestations sont peu nombreuses, l’expert conclut que c’est dû à la courte période au cours de laquelle le tassement s’est produit.
[37] Voici un extrait de son rapport :
Analyse
[…]
Selon la photo no. 1, prise lors des travaux de construction, les semelles des murs de fondation sont construites sur la couche d’argile molle, dont la capacité portante est de 30 kPa. Cette information est donnée en conclusion, à l’article 6.1 du rapport d’étude de reconnaissance des sols de la firme G&S Consultants.
L’étude recommandait d’établir l’élévation du fond de l’excavation au début de la couche sable beige d’apparence dense, c’est à dire [sic] à l’élévation arbitraire de 98,87 mètres environ.
Ainsi, pour les fondations reposant sur le sable beige d’apparence dense, la recommandation était d’utiliser une capacité portante nette admissible de 75 kPa pour fin de calcul de dimensionnement des futures fondations.
Les semelles des murs extérieurs ont approximativement 30" à 36" de largeur. Selon nos calculs, la charge totale non pondérée sur les murs latéraux du bâtiment, sans considérer la charge de l’abri d’auto, est de 18,9 KN / mètre de mur. Les semelles auraient dû avoir une largeur minimale d’approximativement 50 pouces.
Selon l’étude de reconnaissance de sol, si les semelles avaient été construites sur le sable beige, ces semelles auraient été suffisamment larges pour supporter le bâtiment.
Recommandations
Compte tenu de l’importance des tassements et de la faible capacité portante de l’argile de couleur grise et d’apparence très molle, nous recommandons que des travaux de stabilisation des fondations en sous-œuvre, à l’aide de pieux soient exécutés. Ces travaux permettront de prévenir définitivement tout autre tassement de la fondation. De plus, il est possible dans certains cas de corriger ou d’améliorer les différences de niveau.
[38] Après avoir fait la chronologie des événements, le procureur en arrive à la réclamation écrite du bénéficiaire en date du 20 avril 2009 ainsi qu’aux deux rapports de décision de l’administrateur, l’un daté du 27 août 2009 (E-4) et l’autre daté du 14 septembre 2009 (A-2).
[39] Dans le premier rapport, M. Robillard ordonne à l’entrepreneur de faire les vérifications nécessaires et les correctifs requis; l’entrepreneur n’a pas respecté cette ordonnance. Sans retourner sur les lieux, sans procéder à d’autres investigations, M. Robillard émet une deuxième décision, non motivée, et conclut que l’ajout de l’abri d’auto est la cause des manifestations.
[40] Le bénéficiaire, M. Hurtubise, s’adresse à son recours, et il n’a pas le rôle d’un enquêteur.
[41] L’expert Brassard, retenu par le bénéficiaire, avait en sa possession l’étude des sols ainsi que les photos lors de la construction, et il avait une bonne connaissance de la situation particulière de Saint-Amable; il a procédé au relevé des niveaux.
[42] Dans son rôle, M. Brassard peut utiliser ses connaissances pour orienter sa conclusion, car il doit trouver la cause du tassement; il arrive donc à la conclusion que cette maison a été construite trop profondément, puisque la recommandation de semelles de 30 pouces à 36 pouces valait pour la couche de sable beige.
[43] Et si l’on doit se retrouver dans l’argile, l’utilisation de semelles de 50 pouces ou de pieux est requise; ainsi, la présente construction ne respecte pas l’étude du sol, étude, rappelons-le, exigée par le bénéficiaire au contrat préliminaire.
[44] M. Brassard a même ajouté que sans abri d’auto, le résultat serait le même.
[45] Concernant le rapport d’expert de l’entrepreneur, le procureur est d’avis que le document de M. Vincent est rempli d’hypothèses. Appelé à témoigner, M. Vincent soumet une nouvelle notion, non indiquée dans son rapport, le fluage; il attribue les manifestations au fluage, au tassement et à l’abri d’auto, dans des proportions respectives de 60 %, 25 % et 15 %.
[46] Si l’on suit le raisonnement de l’expert et que l’on extrapole, le fluage n’étant pas causé par l’ajout, ce dernier n’est donc pas la cause des manifestations; ceci va complètement à l’encontre de la position de l’administrateur, laquelle doit ainsi être écartée.
[47] Le deuxième rapport de l’administrateur, signé par M. Robillard, est très laconique, et la décision n’est pas motivée; il a été mis au courant qu’il y avait un ajout d’abri et il lui en a attribué les manifestations.
[48] M. Robillard aurait dû savoir que les semelles ne sont pas adéquates et qu’il y avait absence de pieux.
[49] Le procureur soumet que dans le présent dossier, il n’existe aucune preuve que l’ajout de l’abri d’auto ait été la cause déterminante des manifestations.
[50] En cas de doute, l’arbitre devrait pencher en faveur du plaignant.
[51] À l’appui de son argumentation, le procureur a soumis les autorités suivantes :
− Gauthier et Bujold c. Yvon Duperron 9119-5834 Qc inc. et La Garantie des Maîtres Bâtisseurs inc., SA, 20 février 2007, arbitre Marcel Chartier.
− Construction Renoir Inc. c. Taillon et Roy et La Garantie des Bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ Inc., SA, 1er juin 2006, arbitre Marcel Chartier.
− Habitation Val-des-Forts inc. et Lessard et Raymond et La Garantie Habitation du Québec inc., SA, 23 septembre 2009, arbitre Claude Dupuis.
[52] M. René Vincent, ing., de la firme Centre IEB Québec, fut le seul témoin entendu pour l’entrepreneur.
[53] M. Vincent, avant de soumettre son rapport, a effectué une visite des lieux et a consulté l’étude de l’expert des bénéficiaires ainsi que l’étude de reconnaissance des sols.
[54] Lors de sa visite le 17 novembre 2009, il a constaté deux microfissures sur le mur de béton latéral droit; il n’y en avait pas d’autres lors de l’audience du 1er septembre 2010, et ces deux fissures étaient d’apparence similaire.
[55] Relativement à l’ajout de la descente extérieure arrière, le témoin a noté une fissure plus large dans le haut que dans le bas, donc non liée au tassement.
[56] Selon les relevés de niveau de Geniex, M. Vincent a constaté que le niveau le plus bas se situe du côté de l’abri d’auto, à environ - 1 pouce par rapport au point de référence.
[57] Il soumet que généralement dans la mesure de niveau, la précision des lectures est de ± 1 à 2 mm, alors que dans le rapport de Geniex, cette précision est de ± 1/2 pouce; ainsi, lors d’une variation de 0 pouce à − 1 pouce dans les lectures, ces dernières pourraient très bien se situer entre 0 pouce et - 1/2 pouce.
[58] M. Vincent reconnaît l’existence d’un vallon dans le centre de l’habitation, la déformation du cadre de porte de la chambre principale et le malfonctionnement des fenêtres; toutefois, il attribue ces manifestations au fluage, soit la déformation lente des matériaux, en l’occurrence une flexion normale et prévisible des pièces de bois sous le plancher (les solives). La présence de vallon sur un plancher est fréquente; cependant, celui du plancher des bénéficiaires est plus important que la normale, soit 3/8 pouce à 1/2 pouce; afin d’éviter cet état de choses, il faut renforcer les solives.
[59] Le fluage n’affecte pas la hauteur des trois appuis, soit les deux murs latéraux et le mur porteur au centre.
[60] M. Vincent prétend que la différence de niveau sur le côté droit a été causée par le tassement et le fluage, tandis que le vallon au centre a été causé par le fluage.
[61] La descente du plancher causée par le fluage a produit la difficulté d’ouvrir la porte de chambre principale.
[62] Le témoin expert met en doute la valeur réelle de la profondeur des fondations, tenant compte des photos prises lors de l’érection, du certificat d’arpentage de M. Marcel Pineault et de l’étude de reconnaissance des sols; selon son estimation, l’entrepreneur se serait trompé d’environ 12 pouces dans la profondeur, ce qui pouvait changer la capacité du sol.
[63] Selon M. Vincent, le tout est maintenant stabilisé, et il ne prévoit pas de tassement futur. Le témoin avoue qu’il n’existe aucune mesure dans son rapport; il n’a ni constaté ni mesuré la charge de neige causée par l’ajout de l’abri.
[64] M. Vincent attribue l’apparition du vallon sur le plancher du rez-de-chaussée à l’ajout de l’abri d’auto, au fluage et à la stabilisation prévisible, dans des proportions respectives de 15 à 20 %, 60 % et 25 %.
[65] Je reproduis ci-après la synthèse et la conclusion du rapport de l’expert :
CHAPITRE V - SYNTHÈSE
À la lueur des mesures prises par « Geniex », nous devons conclure que l’immeuble s’est stabilisé suivant les prévisions de l’expert en sol « G&S consultants ». Nous croyons également que l’abri d’auto a pu avoir un impact sur la section droite de l’immeuble, ce qui serait en lien avec la fissure à l’endroit de la fenêtre sur ce mur.
Nous ne pouvons actuellement pas conclure que la capacité du sol ou la largeur des semelles sont insuffisantes, puisque la charge engendrée par l’abri d’auto aurait créé un mouvement très important du côté droit de l’immeuble, ce qui ne fut pas observé. En effet, selon les considérations de « Geniex », les semelles actuellement en place ne représentent que 60% de la dimension requise (30 po versus 50 po). Dans un tel cas, l’ajout de toute charge sur une semelle jugée si étroite (par Geniex) aurait créé le mouvement mentionné. Puisque cette situation n’est pas survenue, nous devons conclure que la largeur des semelles et la capacité des sols ne seraient pas en cause.
CHAPITRE VI - CONCLUSION
Il est vrai que des dénivelés ont été observés à l’endroit de l’immeuble sous étude. Cependant, nous ne disposons d’aucune méthode pour déterminer si l’immeuble s’est affaissé ou s’il s’est tout simplement stabilisé comme prévu. Toutefois, les déformations du vinyle à la jonction du toit et du mur principal tendent à démontrer que l’abri d’auto (ajouté par le propriétaire) a un impact sur l’immeuble, ce qui s’explique par l’ajout des charges induites par la structure de l’abri, mais également par l’accumulation de neige en certaines circonstances, etc.
Nous considérons que si les prétentions de « Geniex » avaient été exactes, l’immeuble se serait gravement affaissé du côté de l’abri d’auto et aurait créé des désordres considérables à la fondation, ce qui n’a pas été observé (sauf une petite fissure sous une fenêtre de ce mur).
Pour statuer sur la stabilité de l’immeuble, des repères de nivellement devraient être mis en place par un arpenteur géomètre. Des lectures ultérieures permettront de confirmer la situation.
[66] D’entrée de jeu, le procureur souligne que la juridiction de l’arbitre se limite au plan de garantie.
[67] Dans le présent dossier, les trois régimes encore applicables se retrouvent à l’article 10 du plan de garantie, soit la réparation des malfaçons, la réparation des vices cachés ainsi que la réparation des vices de construction.
[68] Le procureur rappelle que la prise de possession est en date du 26 octobre 2006 et que la première manifestation a eu lieu en automne 2008, alors que la mise en demeure est en date du 17 avril 2009 (E-6). Une période de 30 mois sépare donc la mise en demeure de la prise de possession, ce qui élimine la garantie relative aux malfaçons.
[69] Le procureur souligne que les conséquences créées par une malfaçon n’ont pas d’importance.
[70] Le second régime concerne les vices cachés en référence aux articles 1726 et 2103 du Code civil du Québec; le vice doit remplir des critères de gravité afin d’être qualifié de caché, soit faire preuve d’une déficience d’usage.
[71] Dans certaines circonstances, la garantie a refusé des réclamations, car le défaut n’avait pas produit de conséquences ou très peu de conséquences, ces dernières n’étant pas considérées comme un vice.
[72] Dans d’autres circonstances, la garantie a refusé en constatant qu’il n’y avait pas de déficience d’usage.
[73] Dans tous les cas, il s’agit d’absence de conséquences du vice.
[74] Dans le présent dossier, il faut considérer à la fois la gravité de la conséquence du vice ainsi que la preuve de la cause du vice.
[75] M. Hurtubise, le bénéficiaire, ne s’est jamais manifesté, relativement à la bosse sur le plancher, sur les inconvénients ni sur la déficience d’usage; qu’il y ait tassement ou pas, il s’agit d’une simple bosse.
[76] L’expert Brassard, retenu par le bénéficiaire, affirme qu’il connaît la situation à Saint-Amable; il oublie toutefois que dans cette municipalité, il existe des maisons non pieutées.
[77] M. Brassard a été incapable d’expliquer la discordance entre les mesures, prises pas son adjoint, du rez-de-chaussée et du sous-sol; les mesures inscrites dans son rapport ne sont donc pas fiables.
[78] L’expert Brassard n’a pas pris de test de sol et il n’a pas fait d’excavation; il a travaillé à partir de photos d’époque; de plus, il n’a pas soumis de calcul de charge transmise par l’abri d’auto.
[79] M. Robillard, inspecteur-conciliateur, affirme qu’il existe une surcharge entraînée par l’abri d’auto.
[80] Le bénéficiaire se doit de démontrer ce qu’il avance.
[81] Le procureur estime que l’on est en présence d’une malfaçon, car il n’existe aucune cause grave permettant de conclure qu’il s’agit d’un vice caché.
[82] Le plan de garantie ne trouve donc pas application.
[83] Si jamais l’arbitre en venait à la conclusion que l’on est en présence d’un vice caché, il s’agit d’une simple bosse, et il n’existe aucune mesure fiable prouvant qu’elle résulte d’un tassement requérant le pieutage.
[84] À l’appui de son argumentation, le procureur a soumis les autorités suivantes :
− Garantie habitation du Québec inc. c. Jeanniot, 2009 QCCS 909 (CanLII).
− OGILVY RENAULT, La construction au Québec : perspectives juridiques, Wilson & Lafleur, Montréal, pp. 453-455.
− Kieu Thuy Truong et Cau Chiem et La garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ et Brunelle Entrepreneur inc., SA, 23 juin 2009, arbitre Johanne Despatis.
− Jeffrey EDWARDS, La garantie de qualité du vendeur en droit québécois, Wilson & Lafleur, Montréal, pp. 137-139.
− Guilbault c. Pelletier, 2006 QCCS 3616 (CanLII).
− Lortie c. Grimard, EYB 2007-120076.
− Laforest c. Chabot, 2008 QCCS 4340 (CanLII).
− Dufour c. Guérin, 2007 QCCQ 3106 (CanLII).
− Syndicat de copropriété 324 à 334 Wurtele et Les constructions Cholette & Papineau ltée et La garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ, SA, 4 mai 2007, arbitre Michel A. Jeanniot.
− Papillon c. Bolduc, 2010 QCCQ 1839 (CanLII).
− Boisclair c. Les entreprises E. Chaîné inc. et La Garantie des bâtiments résidentiels de l’APCHQ inc., SA, 15 mai 2009, arbitre Marcel Chartier.
[85] Dans son rapport d’inspection complémentaire daté du 14 septembre 2009, M. Denis Robillard, inspecteur-conciliateur pour La garantie Qualité Habitation, n’a traité que du vallon (dénivellement) du plancher au rez-de-chaussée; il n’a pas considéré les autres manifestations, parce que non énumérées, affirme-t-il, dans la dénonciation des bénéficiaires. Il avait auparavant obtenu le permis de construction et le certificat de localisation, de même que l’étude de reconnaissance des sols.
[86] M. Robillard estime les charges sur les murs latéraux à 1 251 livres/pied linéaire (soit 1 623 livres/pied linéaire si le facteur de sécurité est de 25 %); or, se référant à l’étude de reconnaissance des sols, des semelles de 36 pouces procurent une capacité de 1 880 livres/pied linéaire, ce qui ne laisse pas beaucoup d’espace pour l’ajout d’un abri d’auto, d’un escalier extérieur et du matériel de stationnement.
[87] Le témoin affirme que le bombement existe dans toutes les maisons et que la tolérance permise est d’un pouce sur 240 pouces.
[88] M. Robillard admet que les fondations reposent sur un fond de glaise; toutefois, la capacité portante est 30 kPa, telle que déterminée dans l’étude de reconnaissance des sols préparée par G&S Consultants (E-3).
[89] En tenant compte du calcul des charges de la propriété et de la capacité portante du sol, le témoin estime qu’il reste encore quelque 250 livres/pied linéaire de jeu favorable à la capacité du sol.
[90] M. Robillard conclut donc que l’abri d’auto ajouté après la construction possède une charge supérieure à 250 livres/pied linéaire et qu’il a causé les manifestations.
[91] Le procureur affirme que rarement un test de sol est fourni aux bénéficiaires par un entrepreneur; il s’agissait d’une demande provenant de ceux-ci. Or, avant de construire son abri d’auto, M. Hurtubise n’a pas consulté l’étude des sols; il l’a plutôt glissée dans un tiroir.
[92] L’administrateur n’a pas utilisé le prétexte de la construction de l’abri d’auto pour refuser la réclamation; M. Robillard a demandé à l’entrepreneur et aux bénéficiaires de lui fournir des documents.
[93] M. Robillard, ayant en sa possession l’étude des sols préparée par la firme G&S Consultants, a été le seul intervenant à faire le calcul des charges du bâtiment, et le résultat est qu’il n’existe aucune justification pour pieuter cette habitation; d’autant plus que le fardeau de la preuve appartient aux bénéficiaires.
[94] M. Robillard a témoigné qu’il n’est pas interdit de construire sur l’argile.
[95] Le procureur soutient que M. Brassard, expert dont les services ont été retenus par les bénéficiaires, n’a jamais visité les lieux, qu’il n’a effectué aucun calcul et que son seul intérêt était d’obtenir ultérieurement un mandat de pieutage.
[96] Comment croire un tel témoin qui ne produit aucune facture, ni pour la préparation de son rapport, ni pour son témoignage devant l’arbitre?
[97] Deux experts, Vincent (retenu par l’entrepreneur) et Robillard (retenu par l’administrateur), allèguent qu’une des causes probables du désordre est l’ajout de l’abri d’auto.
[98] C’est un non-sens d’avancer, puisque l’on construit à Saint-Amable, qu’il faut pieuter.
[99] Le procureur conclut qu’il n’existe aucune preuve que l’habitation ait perdu de la valeur et qu’elle soit invendable.
[100] Le 25 août 2006, les bénéficiaires ont signé avec l’entrepreneur IMAX Construction inc. un contrat préliminaire, lequel contenait la condition particulière suivante : « CONDITIONNEL À AVOIR À L’ACTE NOTARIÉ COPIE ORIGINAL DU RAPPORT DE LA CAPACITÉ PORTANTE DU SOL » [sic].
[101] L’étude de reconnaissance des sols, préparée par la firme G&S Consultants à la demande de l’entrepreneur, est datée du 22 septembre 2006.
[102] Le témoignage de M. Hurtubise, bénéficiaire, à l’effet que les fondations étaient complétées le 27 septembre 2006, n’a pas été contredit. La prise de possession fut en date du 26 octobre 2006.
[103] Après la prise de possession, les bénéficiaires ont réalisé un ajout à la droite de la propriété, soit un abri d’auto à aire ouverte dont la partie gauche est fixée à l’habitation, tandis que la partie droite est supportée par des colonnes.
[104] À la suite de cet ajout, soit à l’automne 2008, des manifestations sont apparues à l’extérieur, mais particulièrement à l’intérieur de la maison.
[105] La preuve est prépondérante à l’effet que la fondation de ladite habitation repose sur une couche d’argile molle; en effet, l’expert des bénéficiaires, M. Pierre Brassard, ing., l’a confirmé, et l’inspecteur-conciliateur, M. Denis Robillard, l’a admis. La largeur des semelles actuelles est de 36 pouces. De plus, l’analyse du certificat de nivellement commandé par M. Hurtubise, daté du 6 novembre 2009, préparé par M. Marcel Pineault, arpenteur géomètre, nous indique une lecture de 98,87 mètres à l’élévation du plancher au sous-sol par rapport à une élévation de départ de 100,00 mètres sur le dessus d’une borne-fontaine, ce qui, comparé à l’étude de reconnaissance des sols ci-avant citée, situe la fondation dans l’argile.
[106] Le 17 avril 2009, les bénéficiaires ont dénoncé à l’entrepreneur et à l’administrateur ces manifestations.
[107] Dans un rapport de décision daté du 14 septembre 2009, l’administrateur, s’appuyant sur l’article 12.3° du Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs, a tout simplement conclu que les réparations rendues nécessaires par les ajouts réalisés par le bénéficiaire sont exclues de la garantie.
[108] Le procureur de l’entrepreneur argumente que dans le présent dossier, il n’y a point de déficience d’usage, que les défauts n’avaient pas produit de conséquences et que M. Hurtubise ne s’est jamais plaint à cet égard; il conclut que l’on est en présence d’une malfaçon.
[109] En tout respect à l’égard de cette opinion, le soussigné a visité les lieux à deux reprises en présence des représentants des parties, soit les 1er septembre et 15 novembre 2010, et n’arrive pas à cette conclusion.
[110] Il existe une bosse d’environ 1/2 pouce au niveau du plancher de la salle à dîner, partant devant la porte de chambre et s’étendant sur une longueur importante. Même une personne non initiée ne peut la manquer. Ladite porte de chambre ne ferme pas, et ce, même après une intervention de l’entrepreneur.
[111] La porte patio n’est pas de niveau.
[112] On peut apercevoir de plus de nombreuses fissures dans la cage de l’escalier menant au sous-sol ainsi qu’au sous-sol même.
[113] À l’extérieur, il existe une fissure tout près de la fenêtre du sous-sol et une déformation du vinyle sur le parement du côté droit de la maison.
[114] Certes, il n’y a pas de déficience d’usage.
[115] Le soussigné est d’avis qu’un acheteur prudent, et non pas tatillon, apercevant uniquement la bosse (il ne peut la manquer) et étant informé que les fondations reposent sur de l’argile molle sur un terrain situé à Saint-Amable, n’achèterait point ou ferait diminuer considérablement le prix de vente, et ce, quelle que soit la source du vice.
[116] Je cite ci-après un extrait d’un jugement de l’honorable Christiane Alary, J.C.S.[1] :
[52] Pour décider si un vice est suffisamment grave pour donner ouverture à la garantie, on considère les inconvénients qu’il présente pour l’acheteur. Il n’est pas nécessaire que ce vice empêche toute utilisation du bien, mais qu’il en réduise l’utilité de façon importante en regard des attentes légitimes de l’acheteur.
[117] Je rappelle qu’il y a eu ici mouvement de la structure qu’on ne peut apparenter à une simple malfaçon.
[118] Quelle que soit la cause, le soussigné est d’avis que les manifestations rencontrent les critères énoncés à l’article 1726 du Code civil du Québec; il s’agit de défauts produisant les conséquences s’apparentant au vice caché.
[119] Le rapport final de l’administrateur, daté du 14 septembre 2009, est très laconique. On dit simplement aux bénéficiaires qu’étant donné qu’ils ont réalisé un ajout, soit l’abri d’auto, la garantie ne couvre pas. On ne leur donne aucune explication technique, aucun calcul, aucun détail.
[120] M. Robillard témoigne que les bénéficiaires ne lui avaient dénoncé que la bosse sur le plancher et non pas les autres manifestations auparavant citées; son inspection a donc été très sommaire.
[121] La conclusion de son rapport est basée uniquement sur la légalité et il ne contient aucune technicité.
[122] Un client qui a passé un contrat de garantie est en droit de s’attendre à un meilleur service de la part de son fournisseur.
[123] À l’étape du mécanisme de mise en œuvre de la garantie, à l’article 18.5° du Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs, il est stipulé que l’inspecteur doit produire un rapport écrit et détaillé.
[124] Le rôle de l’inspecteur est de faire une enquête complète et de produire aux bénéficiaires tous les détails et calculs qui ont mené à sa conclusion.
[125] Je cite ci-après un extrait d’une décision de l’arbitre Jean Morissette[2] :
[36] Le devoir de l’Administrateur lorsqu’il est appelé à vérifier une dénonciation d’un bénéficiaire du Plan de garantie n’est pas de faire peser sur le consommateur le principe de droit du fardeau de la preuve. Son rôle est de sauvegarder les droits des personnes qui bénéficient d’une protection décrite dans le Règlement. Il doit prendre toutes les mesures qui s’imposent pour rendre une décision objective et neutre, basée sur les règles de l’art et technique du monde de la construction. Il ne doit pas se satisfaire bêtement de simple document échangé sans en prendre connaissance ou n’en prendre connaissance qu’en partie. Il ne doit pas apparaître ou donner l’impression de protéger son ancien patron ou l’un de ses importants membres;
[37] Ainsi, lorsque des liens existent entre divers membres de son organisation, l’Administrateur doit apporter une attention particulière à l’apparence de conflit d’intérêt et à la protection du public. La personne qui procède à l’inspection doit toujours faire une enquête objective et complète des divers points dont se plaint un consommateur. Les bénéficiaires sont pour la plupart des gens qui ne connaissent pas les prescriptions et techniques de construction. Le Règlement a été justement adopté et laissé sous la férule de la Régie du Bâtiment pour mettre en place un processus pour la protection des acheteurs de bâtiments résidentiels neufs. L’inspection sert à la protection d’acheteurs de bâtiments résidentiels neufs et à l’application du plan de garantie;
[126] Ce n’est que lors de son témoignage que M. Robillard a produit au tribunal des détails techniques justifiant sa conclusion; ses calculs ont été griffonnés à l’endos d’un document non daté et sont présentés sans précision sur le mode de calcul.
[127] Toutefois, après analyse, lesdits calculs se sont avérés utiles à la conclusion du présent dossier.
[128] M. Robillard a estimé les charges sur les murs latéraux à 1 623 livres/pied linéaire en incluant un facteur de sécurité de 25 %; rappelons que le calcul de cette charge a été confirmé par l’expert Brassard, dont les services ont été retenus par le bénéficiaire.
[129] M. Robillard a aussi fait la conversion de la capacité portante du sol d’argile établie par G&S Consultants, soit de 30 kPa à 1 830 livres/pied linéaire, ce qui, selon son témoignage, ne laisse pas beaucoup de jeu (200 à 250 livres/pied linéaire) pour un ajout.
[130] Ce rapport a été préparé par M. René Vincent, ing., de la firme Centre IEB Québec.
[131] Dans son texte, M. Vincent attribue une large part des manifestations à l’ajout de l’abri d’auto; par contre, dans son témoignage, il introduit une nouvelle notion, non mentionnée dans son rapport, soit le fluage, ce qui consiste en la déformation lente des matériaux; il estime maintenant que les manifestations ne sont attribuables à l’ajout de l’abri d’auto que dans une proportion de 15 %.
[132] Son témoignage contredit son propre rapport ainsi que le rapport de l’administrateur.
[133] Le tribunal n’accordera pas plus de poids à cette expertise que le procureur de l’entrepreneur ne l’a fait dans son argumentation.
[134] M. Brassard possède une vaste expérience de l’état des sols à Saint-Amable.
[135] Son analyse et ses recommandations sont essentiellement basées sur l’étude de reconnaissance des sols préparée par la firme G&S Consultants.
[136] M. Brassard conclut que selon cette étude, des semelles de 30 pouces à 36 pouces de largeur auraient été suffisantes si construites sur du sable beige; construites sur de l’argile molle, compte tenu des charges sur les murs latéraux, les semelles auraient dû avoir une largeur de 50 pouces.
[137] Dans son témoignage, M. Brassard affirme que même sans l’ajout de l’abri d’auto, des manifestations seraient apparues.
[138] À la demande de l’entrepreneur, cette étude a été préparée par G&S Consultants et émise le 22 septembre 2006. Ce document renferme de nombreuses mises en garde.
[139] L’auteur fait mention de la capacité portante limitée de l’argile d’apparence molle à une certaine profondeur.
[140] L’étude recommande d’établir l’élévation du fond de l’excavation au début de la couche de sable beige, soit à l’élévation de 98,87 mètres; or, le certificat de nivellement nous démontre plutôt une élévation du plancher du sous-sol à 98,87 mètres, ce qui représente une importante déviation par rapport à la recommandation inscrite dans l’étude des sols.
[141] L’auteur de ce rapport va encore plus loin. Car même sur le sable beige, l’étude recommande une capacité portante de 75 kPa (soit 1 500 livres/pied carré), ce qui représente un peu plus du double de la capacité portante de l’argile et nécessite des semelles d’une largeur d’environ 50 pouces.
[142] En plus de recommander la présence d’un technicien expérimenté à temps plein lors des travaux d’excavation, le rapport recommande de relier structurellement la dalle avec les fondations, ce qui n’a manifestement pas été fait et ce qui expliquerait peut-être le différentiel de niveau entre le sous-sol et le rez-de-chaussée à l’étude de Geniex.
[143] Je répète que l’étude des sols a été émise le 22 septembre 2006.
[144] Cette étude a été préparée par une firme complètement indépendante du présent dossier; elle a été demandée par l’entrepreneur suite à une exigence des bénéficiaires lors de la signature du contrat préliminaire.
[145] Selon le témoignage non contredit de M. Hurtubise, en date du 27 septembre 2006, les fondations étaient terminées.
[146] Manifestement, lorsque l’entrepreneur a préparé et exécuté les plans des fondations, il n’avait pas en main cette étude des sols.
[147] S’il l’avait, il n’a pas suivi les recommandations de cette étude.
[148] Dans le présent dossier, l’ajout de l’abri d’auto aggrave la situation, mais il n’est pas la cause déterminante, cette dernière étant la non-observance de l’étude des sols, laquelle fait des mises en garde très précises, très claires, contre un sol argileux de cette nature.
[149] M. Robillard a témoigné que selon ses calculs, avec les semelles actuelles sur un sol d’argile, il reste peu de jeu compte tenu de la charge latérale. Ce jeu est si faible que l’étude de G&S Consultants indique que sur ce type de sol, le remblai peut procurer des effets significatifs sur les fondations.
[150] Aucun des trois experts qui ont témoigné n’a calculé la charge occasionnée par l’ajout d’un abri d’auto. Était-elle négligeable? Seul M. Brassard a exprimé que même sans l’ajout de cet abri, les manifestations seraient survenues.
[151] On parle ici d’un abri d’auto à mur ouvert; on ne parle pas d’un mastodonte de garage.
[152] Les besoins évoluent, et l’habitation doit s’y adapter.
[153] On peut faire des ajouts dans une propriété (tels des meubles au sous-sol ou des appareils de conditionnement physique) sans craindre que le plancher ne s’affaisse parce que le calcul des fondations est à l’extrême limite.
[154] Se référant à l’article 116 du Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs, le soussigné est d’avis qu’il ne serait pas équitable de faire supporter par les bénéficiaires le poids de ces manifestations, alors que les fondations ont été exécutées sans respect pour les recommandations de l’étude des sols.
[155] Je cite maintenant l’article 3° de l’Annexe II du plan de garantie relativement à la liste des engagements de l’entrepreneur :
L'entrepreneur s'engage:
[…]
3° à respecter les règles de l'art et les normes en vigueur applicables au bâtiment;
[156] Même si les bénéficiaires n’avaient pas exigé copie de l’original du rapport de la capacité portante, il aurait été de la responsabilité professionnelle de l’entrepreneur d’obtenir l’étude des sols avant de débuter l’excavation, surtout si le terrain concerné est situé à Saint-Amable où la situation du sol est de connaissance publique.
[157] Le tribunal est maintenant informé de la cause du défaut et il peut en évaluer les conséquences; il décrète donc qu’il s’agit d’un vice caché qui a été dénoncé dans la troisième année de la garantie; donc, la couverture s’applique. Aucune objection n’a été soumise au tribunal relativement au délai de six mois pour la dénonciation, tel que spécifié à l’article 10.4° du décret.
[158] Pour ces motifs, la présente réclamation est favorablement ACCUEILLIE.
[159] Le tribunal ORDONNE à l’entrepreneur :
- de procéder à la stabilisation des fondations selon les recommandations formulées dans le rapport de Geniex daté du 22 octobre 2009;
- de corriger et réparer les manifestations intérieures et extérieures qui ont été causées à date;
- de corriger et réparer les éléments intérieurs et extérieurs de la maison qui auront été abîmés par les travaux de redressement;
- de compléter ces travaux pour le 31 mai 2011.
[160] À défaut par l’entrepreneur de se conformer à l’ordonnance précédente, le tribunal ORDONNE à l’administrateur de procéder aux travaux correctifs requis, selon les règles de l’art, et de terminer lesdits travaux pour le 15 juillet 2011.
[161] Conformément à l'article 116 du Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs, l'arbitre peut faire appel à l'équité lorsque les circonstances le justifient. Le tribunal ORDONNE aux bénéficiaires de verser à l'entrepreneur un montant forfaitaire de six mille dollars (6 000 $) lorsque les travaux auront été complétés et acceptés. À cet égard, le tribunal, le cas échéant, CONSERVE juridiction.
[162] Conformément à l’article 21 du Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs, les coûts du présent arbitrage sont entièrement à la charge de l’administrateur.
BOUCHERVILLE, le 6 décembre 2010.
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__________________________________ Claude Dupuis, ing., arbitre |