TRIBUNAL D’ARBITRAGE

 

 

ARBITRAGE EN VERTU DU RÈGLEMENT SUR LE PLAN DE GARANTIE DES BÂTIMENTS RÉSIDENTIELS NEUFS

(Décret 841-98 du 17 juin 1998)

(Loi sur le Bâtiment, L.R.Q., c. B-1.1)

 

Organisme d’arbitrage autorisé par la Régie du Bâtiment :

SORECONI - Société pour la résolution des conflits inc. (ci-après « SORECONI »)

 

 

ENTRE :                                                        Village de la Gare S.E.C.

 

(ci-après « L’Entrepreneur »)

 

ET :                                                                Jacques Kirkland

 

(ci-après « Le Bénéficiaire »)

 

ET :                                                                Raymond Chabot Administrateur Provisoire inc., ès qualité d’administrateur provisoire du plan de garantie de La Garantie Abritat inc.

 

(ci-après « l’Administrateur »)

 

No dossier SORECONI :    183011001

 

 

SENTENCE ARBITRALE

 

Arbitre :

 

M. Albert Zoltowski

 

 

 

Pour l’Entrepreneur :

 

Me Jacques Renaud

 

 

 

Pour le Bénéficiaire :

 

M. Jacques Kirkland

 

 

 

Pour l’Administrateur :

 

Me Marc Baillargeon

 

 

 

Date de la sentence :

 

le 30 septembre 2020.

Identification complète des parties

 

Arbitre :

 

Monsieur Albert Zoltowski, arbitre

1010, de la Gauchetière Ouest

Bureau 950

Montréal (Québec) H3B 2N2

 

 

 

Entrepreneur :

 

Village de la Gare S.E.C.

811, boul. Laurier, bureau 201

McMasterville (Québec) J3G 0K5

 

 

 

Bénéficiaire :

 

Monsieur Jacques Kirkland

[...]

Mont-St-Hilaire (Québec) [...]

 

 

 

Administrateur :

 

Raymond Chabot Administrateur Provisoire inc., ès qualité d’administrateur provisoire du plan de garantie de la Garantie Abritat inc.

 

a/s de Me Marc Baillargeon

Contentieux des garanties Abritat / GMN

7333, Place des Roseraies, 3e étage

Anjou (Québec) H1M 2X6

 

SENTENCE :

Introduction :

1.         Par cette sentence, l’arbitre soussigné (ci-après le « Tribunal arbitral » ou le « Tribunal ») statue sur la demande d’arbitrage de l’Entrepreneur.  Ce dernier demande au Tribunal de renverser la décision de l’Administrateur datée du 29 octobre 2018 (ci-après appelée la « Décision de l’Administrateur »).

2.         Dans la Décision de l’Administrateur, son auteure, Madame Anne Delage, T.P., Inspecteur-conciliateur au sein du Service de la conciliation de l’Administrateur, rapporte que le Bénéficiaire a affirmé que l’appareil de ventilation qui a été installé dans la garde-robe du hall d’entrée de son unité de condominium n’est pas un échangeur d’air.  Or, l’article 10, paragraphe K de l’annexe E du contrat préliminaire, prévoit qu’un « Échangeur d’air conforme aux normes en vigueur sera installé dans chaque condo ».

3.         L’inspecteur-conciliateur a accueilli la réclamation du Bénéficiaire au motif que le système de ventilation mécanique dans son condo constitue un vice caché au sens de l’article 10.4 du Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs.  Dans sa décision, elle a ordonné à l’Entrepreneur de faire les travaux correctifs requis dans un délai de 45 jours suivant la réception de cette décision.

4.         Insatisfait de cette décision, l’Entrepreneur la porte à l’arbitrage auprès de SORECONI. Cet organisme nomme l’arbitre soussigné pour veiller au bon déroulement de la procédure arbitrale et pour trancher le différend.

         2 autres demandes : 

5.         Lorsque la demande d’arbitrage de l’Entrepreneur a été confiée à ce Tribunal, ce dernier était déjà saisi de 2 autres demandes d’arbitrage de l’Entrepreneur visant les condos 1403 et 1407 situés dans le même bâtiment que le condo 1306 du Bénéficiaire.

6.         Ces 2 autres demandes concernaient aussi des appareils qui, selon le contrat avec leurs copropriétaires respectifs devaient être des échangeurs d’air conformes aux normes en vigueur.  Par ces demandes, à l’instar de celle sous étude, l’Entrepreneur contestait  2  décisions de l’Administrateur sous la plume de l’inspecteur-conciliateur, Madame Delage.

7.         Selon la requête de l’Entrepreneur et avec le consentement des autres parties, les 3 demandes d’arbitrage de l’Entrepreneur ont été réunies pour être entendues devant ce Tribunal.

Conférence préparatoire et audition :

8.         Le 20 septembre 2019, une conférence préparatoire a eu lieu concernant les 3 demandes d’arbitrage.   Les copropriétaires des unités 1403 et 1407,  le Bénéficiaire ( l’unité 1306),  et les procureurs de l’Administrateur et de l’Entrepreneur ont tous participé à cette conférence.

9.         En ce qui concerne la présente demande d’arbitrage, l’audition s’est déroulée le 11 août 2020 par visioconférence.  Les personnes suivantes y ont témoigné :

-  Monsieur Serge Arsenault, l’expert de l’Entrepreneur, et

-  Monsieur Jacques Kirkland, le Bénéficiaire.

Questions en litige :

10.      Selon le Tribunal, les questions en litige pourraient être formulées comme suit :

a.   Eu égard à l’engagement de l’Entrepreneur prévu au contrat préliminaire d’équiper chaque condo d’un échangeur d’air conforme aux normes en vigueur - est-ce que l’inspecteur-conciliateur de l’Administrateur a commis une erreur en décidant que l’appareil de ventilation rend le condo 1306 du Bénéficiaire affecté d’un vice caché au sens du Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs?

b.   Si oui, est-ce que la réparation de cet appareil est couverte par une autre disposition du plan de garantie visé par ce  règlement ?

La preuve de l’Entrepreneur :

11.      L’unique témoin de l’Entrepreneur est Monsieur Serge Arsenault qui a rédigé et déposé comme pièce E-1 son rapport modifié daté du 18 octobre 2019.

12.      Le Tribunal a reconnu ce témoin comme, selon ses propres mots, «  un expert en la nature et les caractéristiques des systèmes de ventilation dans des bâtiments spécifiques ».

13.      Monsieur Arsenault a spécifié qu’il n’est pas un expert en conception des systèmes de ventilation.

14.      Dans le cadre de son mandat, il a visité 10 condos dans le même bâtiment pour inspecter les appareils de ventilation y installés.  Il a visité évidemment le condo 1306 du Bénéficiaire.

15.      En ce qui concerne le condo 1306 du Bénéficiaire, son mandat consistait à déterminer :

a)  « si les installations de ventilation déjà faites sont ou non  conformes aux normes  en vigueur à l’époque  de l’acquisition de l’unité  en mars 2014  »,  et

b)  « si ces normes ont évolué, nous  indiquer si ces mêmes installations sont ou non conformes aux normes actuelles en cette matière.                                                                                                                                                                     

c)  Dans la négative, nous informer des mesures correctives à prendre afin de modifier, raccorder ou autrement remplacer l’appareil afin qu’il soit assimilable à un échangeur d’air. »

16.       Il a fait une inspection visuelle du système de ventilation lors de sa visite au condo 1306.  La visite s’est déroulée en présence du Bénéficiaire.  Il a vu l’appareil qui est installé dans un placard.  Il a vu aussi vu le ventilateur d’extraction d’air dans la salle de bains.  L’appareil, le modèle Thermo- X- Air de la compagnie Thermolec  a été branché au ventilateur d’extraction d’air dans la salle de bains après la date d’acquisition du condo.  Avant de rédiger son rapport, il a consulté sur internet les fiches techniques de l’appareil ainsi que ceux du ventilateur à la salle de bains. Ces documents sont mentionnés au plan de l’ingénieur de ventilation du bâtiment. Il a regardé aussi le  plan mécanique  ainsi que le  plan architectural du bâtiment.

17.      Il n’est pas certain si on peut voir la plaque avec la marque du fabricant  et le modèle de l’appareil dans le placard du condo, au moyen d’une simple  inspection visuelle.

18.      Il témoigne que lors de sa  visite, son  inspection du système de ventilation  était visuelle seulement.  Il a donc vu l’emplacement de l’appareil, l’existence d’une boîte de contrôle de l’appareil, ses branchements, ainsi que le ventilateur d’extraction dans la salle de bains. Les conduits de l’appareil ne sont pas visibles.  Il a opéré le contrôle du ventilateur de la salle de bains.

19.      Il déclare que l’air qui est poussée par l’appareil Thermo-X-Air (il réfère à cet appareil comme « le Thermolec ») sort par des sorties d’air installées au plafond de chaque pièce.  Cet air provient d’un mélange d’air ambiant du condo et de l’air extérieur.

20.      Cet appareil Thermolec (sic) ne comprend pas de bouches d’évacuation d’air vicié.  Quand l’appareil est en marche, le ventilateur d’évacuation d’air de la salle de bains est mis en marche également et évacue l’air vicié.

21.      Il constate que l’appareil de ventilation Thermolec (sic) génère du bruit.  Il n’avait pas d’appareil pour mesurer le son.

22.      Le bâtiment où se trouve le condo 1306 du Bénéficiaire compte 4 étages et contient 32 unités.  Ce bâtiment a été construit en 2013-2014. 

23.      Selon le témoin, c’est le Code national du bâtiment 2005 (modifié) faisant partie du Code de Construction du Québec-Chapitre 1, Bâtiment, qui s’appliquent à cette installation. Plus précisément, ce sont les Parties 3 et 6 du CNB 2005 (modifié) qui s’y appliquent.

24.      L’article 6.2.2.8 de la Partie 6 est le seul article qui régit le système de ventilation à l’unité 1306.  Le témoin révise chacun des 19 paragraphes de cet article, y compris le paragraphe 6 qui prévoit :

« 6.  Les installations de ventilation mécanique des logements doivent comprendre les composants suivants :

a)  une installation de ventilation principale;

b)  des ventilateurs d’extraction supplémentaires. »

25.      Le témoin opine que le ventilateur d’extraction de la salle de bains satisfait les exigences du paragraphe 6.  Dans son rapport (pièce E-1) à la page 3, il explique son raisonnement comme suit :

« Bien que dans notre cas  la ventilation principale soit assurée par un seul ventilateur d’extraction, il est permis d’utiliser un groupe de ventilateurs pour assurer cette fonction.  L’article 9.32.3.3, par 3) ci-dessous établit clairement cette possibilité.

« 3)  L’exigence relative au ventilateur principal peut être                       satisfaite au moyen d’un seul ventilateur, du côté                              extraction d’un ventilateur récupérateur de chaleur ou                d’un groupe de ventilateurs, à condition que tous les                                   ventilateurs du groupe soient commandés                                    simultanément par un dispositif conforme aux                                     paragraphes 5) à 7) (voir l’annexe A). »

En résumé, la ventilation exigée par le code pour les logements est satisfaite par l’installation d’un ventilateur principal d’extraction, des bouches de soufflage d’air frais et une commande manuelle.  Il n’est pas requis d’installer un appareil unique ayant toutes ces fonctions comme un échangeur d’air, un VRC (ventilateur récupérateur de chaleur) ou un VRE (ventilateur récupérateur d’énergie). »

26.      Selon le témoin, et conformément à l’exigence du paragraphe 10 de l’article 6.2.2.8, l’appareil Thermo- X-Air et le ventilateur d’extraction dans la salle de bains possèdent la capacité d’extraction et d’alimentation indiquée au tableau 9.32.3.3 cité à ce paragraphe.

                        Le paragraphe 10 de l’article 6.2.2.8 prévoit ce qui suit :

                                   « L’installation de ventilation principale du logement doit avoir                                la capacité d’extraction et d’alimentation indiquée au tableau                           9.32.3.3. »

            Le Tableau 9.32.3.3 intitulé « Capacité d’extraction en régime normal du     ventilateur principal » énonce que dans un  logement avec 2 chambres ( ce   qui est le cas de l’unité 1306, selon le témoin), la capacité d’extraction en      régime normal du ventilateur principal, en litres par seconde est de 18               (minimum) et 28 (maximum).

            Selon le témoin,  le ventilateur de la salle de bain a une capacité d’extraction          de 24 litres à la seconde en basse vitesse et une capacité maximale de 37    litres à la seconde.

            Ce ventilateur de la salle de bains, raccordé au Thermo-X-Air et contrôlé par          l’appareil de contrôle   dans la salle de séjour, est réglé à la basse vitesse,            soit 24 L/s.

 

27.      Le témoin n’a pris aucune mesure pour voir si l’appareil Thermo-X-Air fonctionne selon les capacités requises au paragraphe 10 de l’article 6.2.2.8 .  Ceci est fait lors de l’installation. Toutefois, l’appareil permet que des ajustements y soient faits.

28.      Il lit  les paragraphes 11, 12, et 13 de l’article 6.2.2.8  et donne son opinion et ses commentaires sur chacun d’eux.

29.      Le paragraphe 11 prévoit :

                                   « 11)  L’installation de ventilation  d’alimentation d’air extérieur                                            doit avoir une capacité nominale correspondant à plus                                             ou moins 10% de la capacité d’extraction réelle en                                                 régime normal de l’installation de ventilation                                                                        d’extraction ».

Le témoin déclare qu’il n’a pas pris de mesure, ce qui devait être fait lors de l’installation et du balancement du  système. Selon le témoin, l’appareil Thermo-X-Air permet cet ajustement.

 

30.      Le paragraphe 12 stipule ce qui suit :

                                   « 12)  La prise d’air et  les bouches de soufflage d’air extérieur                                            de l’installation de ventilation principale d’un logement                                              doivent être placées  dans le plafond ou dans un mur à                                          au moins 2 m au-dessus du plancher, et être conçues et                                       installées pour favoriser la diffusion de l’air au niveau                                               du plafond. »

            Selon le témoin, cette exigence est respectée.

 

31.      Le paragraphe 13 prévoit ceci :

                                   « 13)   L’air extérieur admis doit être réchauffé à au moins                                                   12 C avant qu’il n’atteigne les espaces habitables. »

            Selon le témoin, l’air peut-être préchauffé. Ceci est ajustable selon le débit d’air maximal. Cependant  il ne l’a pas mesuré.

                                              

32.      En conclusion, il opine que selon les éléments faisant partie du système de ventilation qui sont visibles,  de leurs capacités selon les plans de ventilation, des volumes d’échange d’air fondés sur les plans de l’ingénieur en mécanique -  « de manière générale l’installation du système de ventilation à l’unité 1306 respecte les normes de l’article 6.2.2.8 » du Code national du bâtiment 2005 (modifié).

33.      Il ajoute que la modification du système de ventilation après la date de l’acquisition du condo, empêche le remplacement du filtre « sur le Thermolec ».  Cependant, ce problème a été réglé après la date de sa visite.

34.      Lors de son contre-interrogatoire, il déclare qu’il ne sait pas si le calibrage et le balancement du système sont conformes aux normes. Il présume que le système de ventilation a été bien balancé.  Il précise que son témoignage ne porte que sur le fait que le système peut être calibré afin de satisfaire aux exigences du CNB 2005 (modifié).

35.      Il reconnait que l’appareil  Thermo-X-Air à l’unité 1306 du Bénéficiaire ne constitue pas un « échangeur d’air ».  À titre d’exemple d’un appareil qui constitue un tel échangeur d’air typique, il réfère à l’appareil VENMAR, modèle EA15000, produit numéro EA1500, dont des dessins et une description ont été joints en annexe à son rapport.  Selon lui, l’appareil VENMAR et l’appareil Thermo-X-R installé chez le Bénéficiaire font la même fonction, soit renouveler l’air dans le condo.  Cependant, le Thermo- X-R fait un préchauffage de l’air, ce que l’échangeur d’air VENMAR ne fait pas.

Preuve du Bénéficiaire :

Le Bénéficiaire témoigne comme suit :

36.      Le contrat final d’achat de son condo a été signé le 5 août 2014.

37.      Son appareil de ventilation fabriqué par Thermolec n’a été accompagné d’aucun manuel d’installation ou d’entretien lors de l’acquisition du condo ou après.

38.      Au moment de l’acquisition du condo, l’appareil n’est pas raccordé au ventilateur d’extraction de la salle de bains.  Ce raccordement a été effectué par l’Entrepreneur après que d’autres propriétaires de condos du même bâtiment ont pris des procédures contre ce dernier.

39.      Ce raccordement a eu lieu quelques 20 mois après la date d’acquisition du condo.

40.      Il déclare qu’il n’utilisait pas beaucoup l’appareil car il était trop bruyant.

41.      De plus, cet appareil était installé dans un garde-robe. Il générait des « traces de noirceur » sur les pentures du garde-robe.

42.      Il répète qu’après le raccordement de l’appareil  Thermolec  (sic) et du ventilateur d’extraction dans la salle de bains, le système de ventilation était trop bruyant.  Le Bénéficiaire les a débranchés.

43.      Il affirme que dans un autre condo, après le raccordement d’un appareil de Thermolec semblable au sien  et du ventilateur de la salle de bains, le ventilateur de la salle de bains « a brulé ».

44.      En 2016, après le raccordement de l’appareil de Thermolec et du ventilateur de la salle de bains, il a reçu un mémo du représentant de l’Entrepreneur, Monsieur Ste-Marie, concernant l’utilisation du système de ventilation.  Après sa réception du mémo, le Bénéficiaire déclare qu’il a utilisé son système de ventilation pendant à peu près une semaine et ensuite il a arrêté de l’utiliser.

45.      Lorsqu’un technicien de Thermolec est venu, le Bénéficiaire lui a demandé de débrancher le système de ventilation à cause du bruit et parce qu’il avait peur de bruler le ventilateur de la salle de bains.

46.      Le 22 janvier 2020, le témoin est allé aux bureaux de  la Ville de St-Hilaire.  Un représentant lui a remis une copie des articles 6.1.1 à 6.2.2.2  paragraphe 1)  (3 pages) de la Partie 6 intitulée « Chauffage, ventilation et conditionnement d’air » du Code national du bâtiment - Canada 2010.  Le témoin désire produire en preuve ces 3 pages sous les cotes B-9.1, B-9.2 et B-9.3.  Les procureurs de l’Entrepreneur et de l’Administrateur s’y objectent au motif que seulement un expert pourrait faire cette preuve des articles du Code, une qualification que le    Bénéficiaire ne possède pas.  Le Tribunal permet le dépôt des pièces  B-9.1, B-9.2, et B-9.3  sous réserve de trancher l’objection dans sa sentence.

47.      Le témoin lit le titre de l’article 6.2.1.6 (pièce B-9.2) « Ventilateurs récupérateurs de chaleur » et affirme que cet article traite de l’installation de ces ventilateurs.  Ensuite, il réfère à l’article 6.2.2.1 (pièce B-9.2) intitulé « Ventilation exigée ».  Encore une fois, les deux procureurs s’objectent à ce témoignage et le Tribunal  prend leur objection  sous réserve.

48.       À la question du procureur de l’Administrateur « quelles sont les problèmes de ventilation dans votre condo », le Bénéficiaire répond que le seul problème de ventilation est la présence de givre en bas des fenêtres en hiver.

49.      Le témoin réfère à l’échangeur d’air typique identifié comme l’appareil VENMAR, modèle EA15000 décrit en annexe au rapport de l’expert Arsenault (pièce E-1).  Il signale qu’une des caractéristiques principales de l’appareil VENMAR est le contrôle de l’excès d’humidité.  Selon le témoin, l’appareil Thermo -X-Air de Thermolec ne récupère pas l’humidité.

50.      Ensuite, le témoin réfère au paragraphe 6 de l’article 6.2.2.8 de CNB 2005 (modifié) dont une copie a été produite en liasse sous la côte E-1 par l’expert de l’entrepreneur, Monsieur Arsenault et au sujet duquel il  a témoigné.  Selon le Bénéficiaire, ce paragraphe 6  doit être lu avec les paragraphes 11, 12 et 13 du même article. Selon le témoin, son appareil ThermoX-Air-R ne répond pas à ces critères.

51.      Encore une fois, les 2 procureurs se sont objectés à ce témoignage que, selon eux, seul un expert pourrait rendre.   Le Tribunal a pris leur objection sous réserve.

52.      En contre-interrogatoire, le Bénéficiaire reconnaît que dans sa lettre du 7 mars 2016 ( pièce A-4) adressée à l’Entrepreneur, avec copie à l’Administrateur, il se plaint seulement de la non-conformité de l’appareil installé par rapport au contrat  de d’achat, soit à son  annexe E, paragraphe 10 (k).  Dans cette lettre, il n’a pas mentionné de problème du  bruit de l’appareil.

53.      Dans une lettre subséquente adressée à l’Administrateur et datée du 16 février 2017 (pièce A-3), le Bénéficiaire se plaint qu’il lui est impossible de retirer le filtre de son  système qu’il décrit comme un « mini-système d’apport d’air frais »,  « parce que l’électricien a installé un gros fil électrique devant ce filtre… ».  Cependant, il ne fait aucune mention du bruit de ce système.

54.      Lorsqu’il a signé le formulaire de réclamation daté du 21 juin 2018 auprès de l’Administrateur, il affirme que cette réclamation se rapportait  à la non-conformité de son appareil.

55.      Il ajoute qu’en 2014, il n’a fait aucune vérification de son appareil lors de la réception de son condo.  Il avait confiance en l’Entrepreneur que son appareil était un échangeur d’air, comme d’ailleurs les autres propriétaires des autres condos dans le même bâtiment.

56.      L’Entrepreneur n’a laissé aucun pamphlet expliquant le fonctionnement et l’entretien de l’appareil.

57.      Il a reconnu qu’il n’a pas utilisé son système de ventilation parce qu’il faisait trop de bruit et aussi parce que « je suis un peu cheap ».

58.      Le Bénéficiaire conclut son témoignage en déclarant que l’appareil Thermo- X-Air installé chez lui est un « mini- système de chauffage d’air » mais pas un échangeur d’air conforme aux normes requises par la Ville de St-Hilaire.

LES PRÉTENTIONS DES PARTIES :

La version pré-1er janvier 2015 du Règlement devrait être appliquée

59.      Selon l’Entrepreneur, c’est la version du Règlement avant celle qui est entrée en vigueur le 1er janvier 2015, qui s’applique à cet arbitrage.

60.      L’Administrateur est du même avis.

61.      Le Bénéficiaire ne fait aucune représentation à ce sujet.

            Les dispositions de l’article 27 du Règlement :

62.      Selon l’Entrepreneur, la problématique dont se plaint le Bénéficiaire ne peut être couverte par les dispositions des paragraphes 27(1) à 27(3) du Règlement car le Bénéficiaire n’a pas respecté les délais y mentionnés.

            Le paragraphe 27(4) du Règlement   -  pas de vice caché :

63.      Selon l’Entrepreneur, pour que la problématique puisse être qualifiée de vice caché, il faut une preuve de gravité du déficit d’usage du condo causé par le système de ventilation y installé.  Cette preuve n’a pas été faite.

64.      Au sujet du déficit d’usage, l’Administrateur réfère au témoignage du Bénéficiaire à l’effet que son seul problème avec le système de ventilation était un peu de givre dans les fenêtres en hiver.

65.      Selon le  Bénéficiaire,  l’inspecteur-conciliateur de l’Administrateur qui a rendu la décision en qualifiant le système de ventilation dans son condo comme étant entaché d’un   vice caché,  s’est trompée.  Selon lui, elle aurait dû rejeter sa réclamation et statuer que la problématique n’est pas couverte par le Règlement.

            La non-conformité de l’appareil :

66.      Selon l’Entrepreneur, le système de ventilation est conforme aux normes selon la preuve fournie par l’expert Arsenault.

67.      De plus, il soutient qu’il n’y a aucune preuve que le fonctionnement du système est débalancé. 

68.      Selon le Bénéficiaire, il s’agit d’une mésentente contractuelle fondée sur l’annexe E, article 10, paragraphe K) du contrat préliminaire  car l’Entrepreneur a fait défaut d’installer un véritable échangeur d’air.  Selon lui, l’appareil Thermo-X-Air doit être utilisé seulement dans une maison d’une superficie minimale de 1 800 pieds carrés.  Ceci est expressément prévu dans la description du produit Thermo-X-Air publiée sur le site d’internet de « Chauffage Yves Gagné 2014 ». Il a déposé une copie de cette description en preuve sous la cote B-8.3 ( sous objection de l’Administrateur). Son condo n’a pas cette superficie minimale de 1 800 pieds carrés.

69.       Selon le Bénéficiaire, l’appareil Thermo-X-Air est un système complémentaire de chauffage.  Il n’aurait jamais dû être installé dans son condo.

70.      Selon lui, il devrait bénéficier du même traitement qu’une autre propriétaire du  même bâtiment, soit Madame Diane Pion Ignjatovic, et avoir droit à l’installation d’un vrai échangeur d’air.  Cette voisine a eu gain de cause  devant un autre arbitre[1] qui a statué que son appareil d’apport d’air  branché au ventilateur de sa salle de bains n’est pas un échangeur d’air prévu au contrat entre elle et l’Entrepreneur.

ANALYSE ET SENTENCE :

Quelle version du Règlement devrait être appliquée ?

71.      Par son  Décret 156-2014, le gouvernement a approuvé des modifications au Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs. Ces modifications sont entrées en vigueur le 1er janvier 2015.

72.      L’Entrepreneur plaide que c’est la version de ce règlement avant les modifications entrées en vigueur le 1er janvier 2015 [2] (ci-après le « Règlement ») qui s’applique à cet arbitrage.

73.      L’Administrateur partage cette position.

74.      Le Bénéficiaire ne fait aucune représentation à ce sujet.  Son silence pourrait être expliqué par le fait qu’il s’agit d’un point technique qui exige une certaine connaissance du droit.  Or, le Bénéficiaire n’est pas un juriste et il n’est pas représenté à l’audition par un avocat.

75.      Dans la cause Raymond Chabot Administrateur provisoire inc. c. Entreprises Landco Inc., 2019 QCCQ 4305 (CanLII), l’Honorable Sylvie Lachapelle, juge de la Cour du Québec a écrit comme suit :

« 22.  Ici, le début des travaux et la conclusion du contrat d’entreprise interviennent avant l’entrée en vigueur du nouveau règlement.

23.  Or, un courant jurisprudentiel majoritaire indique qu’une telle situation commande l’application de l’ancien règlement prévalant avant le 1er janvier 2015 en vertu du principe de non-rétroactivité (11). »

76.      Elle note, toutefois, qu’il existe aussi un courant jurisprudentiel minoritaire :

« 27.  À l’inverse, dans Pricewaterhouse Inc. c. Chamberland (15), l’arbitre s’appuie sur les dispositions nouvelles entrées en vigueur après la date du contrat de construction.  Ne croyant pas qu’il s’agisse d’une décision déraisonnable, la Cour supérieure reconnaît cependant qu’elle s’inscrit dans un courant différent et minoritaire.  Le débat était toutefois théorique puisque l’arbitre avait donné raison à la demanderesse et celle-ci se pourvoit devant la Cour supérieure uniquement parce qu’elle reproche à l’arbitre d’avoir utilisé les nouvelles dispositions.

28.  Ainsi, selon le courant de jurisprudence majoritaire et en vertu du principe de non-rétroactivité, l’administrateur pouvait enregistrer l’immeuble en juillet 2015 dans la mesure où le début des travaux et la conclusion du contrat opèrent avant l’entrée en vigueur des nouvelles dispositions. »

77.      Dans le présent dossier, étant donné que le contrat préliminaire, la fin des travaux et la réception de la partie privative du bâtiment par le Bénéficiaire ont tous eu lieu avant le 1er janvier 2015, soit la date d’entrée en vigueur des modifications au Règlement, je conclus en suivant le raisonnement de la Juge Lachapelle que c’est l’ancienne version du Règlement que je dois appliquer.

Les paragraphes 1, 2 et 3 de l’article 27 du Règlement :

78.      Avant de poursuivre cette analyse, le Tribunal note que l’inspecteur - conciliateur de l’Administrateur dans sa décision,  ainsi que le procureur de l’Entrepreneur lors de sa plaidoirie, ont fait référence, à tort selon le Tribunal, à l’article 10 du Règlement plutôt qu’à son article 27.  L’article 10 se trouve à la sous-section 1 du Règlement intitulée «  Garantie relative aux bâtiments non-détenus en copropriété divise ».  Or, l’unité 1306 du Bénéficiaire se trouve dans un bâtiment détenu en copropriété divise.  Par conséquent, c’est la sous-section 2 du Règlement intitulée « Garantie relative aux bâtiments détenus en copropriété divise » sous laquelle apparaît l’article 27 du Règlement qui s’applique au condo détenu par le Bénéficiaire.  Du point de vue pratique, ces références à l’article 10 plutôt qu’à l’article 27 du Règlement par l’inspecteur conciliateur et par le procureur de l’Entrepreneur  ont peu de conséquences.  Les dispositions se rapportant aux vices,  malfaçons et autres problèmes dont la réparation est garantie sous chacun de ces 2 articles sont  presque identiques, en tenant compte des différences de détention des titres de propriété d’un bâtiment.

79.      Selon les paragraphes 1 et  2 de l’article 27, les travaux de parachèvement non-complétés, ainsi que les vices et  malfaçons qui sont apparents lors de la réception de la partie privative, doivent tous être dénoncés par écrit à l’entrepreneur et à l’administrateur, soit au moment de la réception ou tant que le Bénéficiaire n’a pas emménagé, dans les 3 jours qui suivent la réception.

80.       Selon le paragraphe 27(3), qui traite des malfaçons existantes et non-apparentes au moment de la réception,  elles doivent être découvertes dans l’année qui suit la réception et dénoncées par écrit à l’entrepreneur et l’administrateur dans un délai raisonnable qui ne peut excéder 6 mois de la découverte de ces malfaçons.

81.      Selon la preuve présentée devant le Tribunal, la réception de la partie privative du bâtiment (l’unité 1306), appartenant au Bénéficiaire a eu lieu le 10 juillet 2014 et sa lettre de dénonciation à l’Entrepreneur avec copie à l’Administrateur est datée du 7 mars 2016. Ceci exclut automatiquement les travaux de parachèvement ou la réparation des malfaçons apparentes lors de la réception,  prévus aux paragraphes 27(1) et 27(2) du Règlement.

82.       Dans le cas des malfaçons existantes et non apparentes au moment de la réception, pour que le paragraphe 27(3) du Règlement puisse s’appliquer, il faudrait que la lettre de dénonciation du Bénéficiaire soit datée au plus tard dans les 6 mois qui suit l’expiration de la première année de la date de  réception de la partie privative, soit le 16 janvier 2016.  

83.      La lettre de dénonciation du Bénéficiaire du 7 mars 2016 a été trop tardive. Ceci signifie que l’application du  27(3) du Règlement doit être écartée.

84.      Afin nous assurer que nous faisons un tour complet de tous les paragraphes  de l’article 27 du  Règlement,  nous pouvons noter  que cet article  contient aussi un paragraphe 5. Il traite de ce qu’on appelle communément des vices majeurs, soit des vices de conception, de construction ou de réalisation et des vices du sol, au sens de article 2118 du Code civil. Ce paragraphe 5 n’a pas été plaidé et ne pourrait jamais s’appliquer à la problématique dans ce dossier.

85.      Pour les fins de notre analyse, il reste  seulement le paragraphe 27(4) du Règlement. Il traite de vices cachés.

Le paragraphe 4 de l’article 27 du Règlement :  Vices cachés

86.      Le paragraphe 27(4) du Règlement prévoit ce qui suit :

« 27.  La garantie d’un plan dans le cas de manquement de l’entrepreneur à ses obligations légales ou contractuelles après la réception de la partie privative ou des parties communes doit couvrir :

1)

2)

3)

4)  la réparation des vices cachés au sens de l’article 1726 ou de l’article 2103 du Code civil qui sont découverts dans les 3 ans suivant la réception et dénoncés, par écrit, à l’entrepreneur et à l’administrateur dans un délai raisonnable, lequel ne peut excéder 6 mois de la découverte des vices cachés au sens de l’article 1739 du Code civil ; »

5)

87.      Tel que déjà mentionné, l’Entrepreneur est en désaccord avec la qualification de « vice caché » afférente au  système de ventilation installé dans le condo du Bénéficiaire.

88.      Il plaide qu’il ne peut s’agir d’un vice caché car le critère de déficit d’usage grave qui fait partie de la nature même de ce vice, n’a pas été prouvé devant le Tribunal. Selon lui, ce déficit d’usage se rapporte à toute la partie privative du bâtiment appartenant au Bénéficiaire, soit au condo 1306.

89.      C’est en interprétant l’article 1726 du Code civil du Québec, auquel réfère le paragraphe 27(4) du Règlement, que la doctrine et la jurisprudence québécoise ont déterminé que le critère de déficit d’usage du bien était essentielle à l’existence d’un vice caché.

90.      L’article 1726 CCQ énonce ce qui suit :

« 1726.   Le vendeur est tenu de garantir à l’acheteur que le bien et ses accessoires sont, lors de la vente, exempts de vices cachés qui le rendent impropre à l’usage auquel on le destine ou qui diminuent tellement son utilité que l’acheteur ne l’aurait pas acheté, ou n’aurait pas donné si haut prix, s’il les avait connus.

Il n’est, cependant, pas tenu de garantir le vice caché connu de l’acheteur ni le vice apparent; est apparent le vice qui peut être constaté par un acheteur prudent et diligent sans avoir besoin de recourir à un expert. »

91.      Les tribunaux civils ont maintes fois interprété cet article.  Ainsi, dans la cause Audet c. Payette[3], un jugement que la Cour d’appel [4] a refusé de renverser, l’Honorable Juge Christine Beaudoin J.C.S., a résumé la preuve que doit faire le demandeur d’un vice caché  de la façon suivante :

« (26) Ainsi, dans un recours en vice caché, l’acheteur a le fardeau de démontrer selon la balance des probabilités que le vice dont il se plaint est grave, caché, et antérieur à la vente.  Il reviendra toutefois au vendeur, le cas échéant, de soulever la connaissance effective du vice par l’acheteur lors de la vente.33

(27)  Dans le cadre de l’analyse du critère de gravité, il est bien établi que les vices mineurs ou les vices qui n’empêchent pas l’usage auquel l’acheteur destinait le bien au moment de son achat, n’atteignent pas le seuil requis de gravité prévu par la loi.  En somme, le vice doit être grave, au point de diminuer l’usage du bien de telle sorte que si l’acheteur l’avait connu, il ne l’aurait pas acheté, ou il l’aurait acheté à un moindre prix.34

(28)  Les auteurs Beaudoin, Deslauriers et Moore, dans leur ouvrage « La responsabilité civile » précisent  le critère de gravité du vice :

« Un vice mineur ne peut suffire à entrainer la responsabilité du vendeur.  Le vice doit être de nature à rendre le bien impropre à l’usage auquel on le destine ou à tellement diminuer son utilité que l’acheteur ne l’aurait pas acheté, ou n’aurait pas donné un si haut prix, s’il l’avait connu.  Il n’est ainsi pas nécessaire que le défaut empêche toute utilisation du bien, mais simplement qu’il la réduise de manière importante en regard des « attentes légitimes d’un acheteur prudent et diligent » ou celle découlant de l’usage conventionnellement convenu (…) N’est pas  non plus  considérée  comme un vice une simple lacune par rapport aux normes actuelles du bâtiment ou celles en vigueur au moment de la construction, telles qu’on les retrouve notamment dans le Code national du bâtiment, si cette lacune n’est pas accompagnée d’une perte d’usage.  Une simple diminution du rendement d’un bien, parfois indicatrice d’une qualité moindre par rapport à un bien semblable ne constitue non plus un vice sans l’existence d’une perte d’usage associée à celle-ci ». »

92.      Selon le Tribunal, l’Entrepreneur avait raison de plaider que dans ce dossier, le déficit d’usage du bien affecté d’un vice caché réfère au déficit d’usage du condo. Ce système de ventilation  installé dans le condo  1306 en fait partie intégrante. Le formulaire d’inspection pré-réception de la partie privative appartenant au Bénéficiaire, un formulaire émis par l’Administrateur et approuvé par la Régie du Bâtiment selon l’article  69 du Règlement, semble confirmer cette interprétation. Il prévoit expressément à divers endroits que le « système de ventilation » dans le hall d’entrée, dans les corridors, la salle de séjour, la salle à manger et chambres, la cuisine et la toilette, fait partie d’une inspection de la partie privative d’un bâtiment.

93.       Lors de l’audition, le Bénéficiaire a reconnu qu’il utilisait peu l’appareil de ventilation car il était trop bruyant.  De plus, il laissait des traces noires sur les pentures du garde-robe où il était installé.  Il l‘a aussi fait déconnecter il y a 2 ou 3 ans par un technicien du fabricant de l’appareil, la compagnie Thermolec, qui est venu faire une réparation du Thermo-X-Air.  Ses motifs étaient que l’appareil était trop bruyant et il craignait aussi de faire bruler le ventilateur de la salle de bains.

94.      De plus, il a reconnu que le seul problème de ventilation de son  système, était la formation de givre sur les fenêtres en hiver.

95.      Lors de son contre-interrogatoire, le Bénéficiaire a admis que dans sa lettre de dénonciation du 7 mars 2016 ainsi que dans une lettre postérieure du 16 février 2017 à l’Administrateur, il n’a pas mentionné  le problème du bruit de l’appareil.   Il a reconnu aussi qu’il a cessé d’utiliser l’appareil quelques 2 ou 3 ans auparavant,  pas seulement à cause du bruit mais aussi « parce qu’il était un peu cheap ».

96.       Ces admissions du Bénéficiaire démontrent  clairement au Tribunal que, malgré le fait que l’appareil installé dans le garde-robe qui est branché au ventilateur d’extraction d’air de la salle de bains,  ne constituent  pas un échangeur d’air typique,  néanmoins, ils ne rendent pas l’unité 1306   impropre  à l’usage dont on le destine . La destination de ce condo est de servir de résidence au Bénéficiaire.

97.      En conclusion, il ressort de cette preuve, fondée principalement sur le témoignage du Bénéficiaire,  que son  condo n’est pas affecté d’un vice caché  résultant de l’installation de l’appareil Thermo-X-Air et plus tard de son raccordement au ventilateur d’extraction à la salle de bains. Pour cette raison, l’application du paragraphe 27(4) du Règlement doit être écartée dans ce dossier.

98.      Le Tribunal vient à cette conclusion en la fondant sur la preuve qui  lui a été présentée, plutôt que sur la reconnaissance spontanée du Bénéficiaire lors de la plaidoirie.  On se souvient que lors de sa plaidoirie, il a déclaré que l’inspecteur-conciliateur de l’Administrateur s’est trompée en qualifiant la problématique de vice caché selon les dispositions du Règlement.

99.      Finalement, étant donné que le Tribunal est venu à cette  conclusion, il n’a plus besoin de statuer sur les autres prétentions des parties.

100.   Il ne lui reste que de statuer sur  la demande de l’Entrepreneur de se faire rembourser ses frais d’expertise.  

Demande de remboursement des frais d’expertise :

101.   L’article 124 du Règlement prévoit que l’arbitre doit statuer, s’il y a lieu, quant au quantum des frais raisonnables d’expertises pertinentes qu’un administrateur d’un plan de garantie doit rembourser au demandeur lorsque celui-ci a gain de cause total ou partiel.

102.    Dans cet arbitrage, l’Entrepreneur est le demandeur et il a obtenu  gain de cause.

103.    Lors de l’audition, l’expert, Monsieur Serge Arsenault, a déposé ses factures décrites ci-dessous.

Facture 20828 datée du 31 juillet 2018 :

104.   Cette facture pour les services de Monsieur Arsenault représente 17 heures de son temps facturées au taux horaire  de 225 $.  À ce montant, s’ajoute un autre montant de 50 $ pour « frais d’ouverture de dossier » facturé par une autre personne, à titre de dépenses.

105.   Cette facture se rapporte à la visite des lieux, déplacements et la préparation d’un rapport d’expert daté du 13 juillet 2018.

106.   Selon le témoignage de Monsieur Arsenault lors de l’audition et selon les prétentions de l’Administrateur, cette facture se rapportait à 5 unités de condominium dans le même bâtiment, y compris l’unité 1306.

107.   Or, en examinant ledit rapport, le Tribunal constate  qu’il se rapporte non pas à 5 unités mais plutôt à 8 unités, incluant celle du Bénéficiaire.

108.   L’Entrepreneur plaide qu’une quote-part de 1/5 (ce qui devrait se lire 1/8 compte tenu de l’inclusion de 3 autres unités) de cette facture devrait lui être remboursée par l’Administrateur.

109.   Après cette correction, la demande de l’Entrepreneur devrait viser  un remboursement de 1/8 du montant de 3 875 $ (ou 1/8 de 4 455,28 $, incluant la TPS et la TVQ).

Facture 22998 datée du 31 octobre 2019 :

110.   Cette facture se rapporte à une visite de 2 autres unités (les unités 1403 et 1407) équipées d’un système de ventilation semblable à celui du Bénéficiaire et à la modification par l’expert de son rapport du  13 juillet 2018.

111.   L’expert a facturé 3,5 heures de son temps au taux horaire 250 $ pour un total de 875 $ (ou 1 006,03 $, incluant  la TPS et TVQ).

Facture 24595 datée du 30 juin 2020 :

112.   L’expert Arsenault a facturé 250 $, soit une heure de son temps, pour la révision du dossier.  Avec la TPS et TVQ, cette facture s’élève à 287,44 $.

Travaux en cours non-facturés par l’expert  Arsenault :

113.   Lors de l’audition, Monsieur Arsenault a déposé un relevé de ses feuilles de temps (pièce E-2, en liasse) démontrant un montant de 1 000 $  qui n’a pas été encore facturé, pour sa préparation avant l’audition.

114.   Le 12 août 2020, soit le lendemain de l’audition, le procureur de l’Administrateur a informé le Tribunal par courriel qu’il transmettra la dernière facture de Monsieur Arsenault « dès qu’elle nous sera parvenue ».

115.   Depuis cette date et jusqu’à la date de la présente sentence, aucune nouvelle facture de Monsieur Arsenault n’a été transmise au Tribunal.

116.   Selon la compréhension du Tribunal, L’Entrepreneur demande, en s’appuyant sur l’article 124 du Règlement, le remboursement par l’Administrateur des factures précitées dans les proportions suivantes :

-  Facture 20828 :  1/8 ( après la correction par le Tribunal ) de 3 875 $ avant la TPS et la TVQ ou de 4 455,28 $,en  incluant les deux taxes;

-  Facture 22998 :  875 $ avant taxes, ou 1 006,03 $, en incluant les deux taxes;

-  Facture 24595 :  250 $ avant taxes, ou 287,44 $, en incluant les deux taxes;

-  Les coûts subséquents non-encore facturés :  un montant excédant 1 000 $ selon la feuille de temps de Monsieur Arsenault déposée comme la pièce E-2 en liasse. Ceci signifie qu’il demande un remboursement de 1/3  de ce montant qui est attribuable à l’unité 1306 et le solde à être partagé entre les unités 1403 et 1407.

Analyse et sentence concernant la demande de remboursement des frais de l’expert :

117.   Le Tribunal note que l’Entrepreneur ne fait que citer l’article 124 du Règlement à l’appui de sa demande mais n’a fait aucune autre représentation.

118.    Cependant il demande également le remboursement des frais de son expert relativement à ses 2 autres demandes d’arbitrage qui visaient les condos 1403 et 1407 et qui ont fait l’objet de désistements. Le Tribunal traitera de ces 2 autres demandes, y compris les demandes de remboursements des frais de l’expert, M.  Arsenault,  dans d’autres sentences.

119.   Le Tribunal considère que  la demande de remboursement qui pourrait possiblement  être attribué à l’unité 1306, se détaillerait comme suit :

-  1/8 de la facture 20828;

-  0 $ de la facture 22998 qui ne concerne que les unités 1403 et 1407;

-  1/3 de la facture 24595;

-  1/3 de 1 000 $ pour le temps de Monsieur Arsenault non-facturé selon sa feuille de temps et se rapportant aux unités 1306, 1403 et 1407.

120.   Le Tribunal note qu’aucune facture n’a été soumise au Tribunal pour le temps de Monsieur Arsenault qui n’a pas été facturé à la date de l’audition ou après cette date.

121.   Quant à ce temps non-facturé de M. Arsenault,  le Tribunal est d’avis qu’en absence de preuve d’une facturation à l’Entrepreneur ou de paiement par l’Entrepreneur, ce dernier n’a pas le droit d’en demander un remboursement par l’Administrateur.

122.   On peut donc voir que seulement un montant de 484,37 $ ( soit 1/8 du montant selon la facture 20828) et 83,33 $ (soit  1/3 du montant selon la facture 24595) résultant en un total de 567,70 $ des frais facturés par l’expert peuvent être attribués à ce dossier.  Est-ce que ces frais de 567,70 $ sont raisonnables et est-ce que l’expertise de Monsieur Arsenault a été pertinente dans ce dossier, tel que requis par les dispositions de l’article 124 du Règlement?

123.   Selon le Tribunal, le montant de 567,70 $ qui peut être attribué à ce dossier est raisonnable et le rapport ainsi que le témoignage de Monsieur Arsenault étaient pertinents.

124.   Cependant, le Tribunal note que l’Entrepreneur n’a soumis aucun motif justifiant le remboursement de la totalité de ce montant.

125.   Étant donné que l’Entrepreneur a eu gain de cause exclusivement  sur la base des admissions du Bénéficiaire relativement à un déficit  d’usage mineur de son condo causé par le  système de ventilation, plutôt que sur la base du rapport de Monsieur Arsenault et de son témoignage, il serait plus équitable que l’Administrateur rembourse à l’Entrepreneur 50% plutôt que 100% du montant de 567.70$ attribuable à ce dossier.  

COMMENTAIRES SUPPLÉMENTAIRES :

126.   Selon l’article 123 du Règlement, les coûts de l’arbitrage sont partagés à parts égales entre l’administrateur et l’entrepreneur lorsque ce dernier est le demandeur. Dans ce dossier, l’Entrepreneur est le demandeur.

127.   La Loi sur le bâtiment[5] ainsi que le Règlement ne contiennent pas de clauses privatives complètes.  L’arbitre a compétence exclusive et sa décision lie les parties.  Elle est finale et sans appel.

128.   Selon l’article 116 du Règlement, un arbitre statue conformément aux règles de droit; il fait aussi appel à l’équité lorsque les circonstances le justifient.

 

POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL ARBITRAL :

ACCUEILLE la demande d’arbitrage de l’Entrepreneur à l’égard du Point 1 « Système de ventilation mécanique » de la décision de l’Administrateur datée du 29 octobre janvier 2019 ( Dossier de l’Administrateur no : 346505-1);

ANNULE la décision précitée de l’Administrateur;

ORDONNE à l’Administrateur de rembourser à l’Entrepreneur un montant de 283,85 $ plus 14,19 $ de TPS et 28,31 $ de TVQ, totalisant 326,35 $ pour les frais d’expertise de Monsieur Arsenault dans les 30 jours de la date de cette sentence;

ORDONNE que les frais d’arbitrage soient partagés à parts égales entre l’Administrateur et l’Entrepreneur;

RÉSERVE à l’Administrateur ses droits à être indemnisé par l’Entrepreneur pour toutes les sommes versées, incluant les coûts exigibles pour l’arbitrage (conformément à la convention d’adhésion prévue à l’article 78 du Règlement et le paragraphe 19 de l’Annexe II du Règlement) en ses lieux et place, à l’exception du montant de 283.85$, plus les TPS et TVQ  afférant au remboursement des frais d’expertise facturés par Monsieur Arsenault,  

LE TOUT, avec les intérêts au taux légal majoré de l’indemnité additionnelle prévue à l’article 1619 du Code civil du Québec à compter de la date de la facture émise par l’organisme d’arbitrage SORECONI, après un délai de grâce de 30 jours.

 

 

 

Montréal, le 30 septembre 2020.

 

 

 

 

 

 

 

ALBERT ZOLTOWSKI

Arbitre/SORECONI

Jurisprudence consultée:

·               Raymond Chabot Administrateur provisoire inc. c. Entreprises Landco Inc. et als., 2019 QCCQ 4305 (CanLII);

 

·               Micheline Leduc c. Les Développements Immobiliers BCG, sentence de Roland-Yves Gagné, arbitre, du 21 mars 2018; CCAC. no de dossier S17-122201-NP;

 

·               Micheline Fortin et Raynald Themens c. Les Constructions Éric Laflamme Inc., et al., sentence de Me Jean Doyle, arbitre, du 15 janvier 2018; GAMM : no de dossier : 2017-15-011;

 

 

·               Félix Nazco et Anna Theresa Milian c. 9181-5712 Québec inc. - décision de Me Roland-Yves Gagné, du 8 avril 2016; CCAC no de dossier S-16-011902-NP;

 

·               125385 Canada Inc. c. Groupe Collège Lasalle Inc., 2006 QCCA 522;

 

·               Audet c. Payette, 2017 QCCS 4155 et  2018 QCCA 309;

 

·               Les Immeubles Jacqueline Robitaille inc. c. La Province Canadienne des Religieux de St-Vincent-de-Paul, 2005 CanLII 43250 (QC CS);

 

·               Madame Diane Pion Ignjatovic c. Village de la Gare s.e.c. et Raymond Chabot Administrateur provisoire inc., es qualité d’administrateur provisoire du Plan de garantie La Garantie Abritat Inc., sentence de Monsieur Alcide Fournier, arbitre, du 7 juillet 2017, numéro de dossier CCAC : S16-102701-NP;

 

·               Village de la Gare s.e.c. c. Gregory Stevens et Diane Ouellette-Stevens et Centre Canadien d’Arbitrage et Raymond Chabot Administrateurs Provisoire Inc., es qualité d’administrateur provisoire du Plan de garantie de La Garantie Abritat Inc.,  2018 QCCS 883.



[1] Madame Diane Pion Ignjatovic c. Village de la Gare s.e.c. et Raymond Chabot Administrateur provisoire inc., 7 juillet 2017, Monsieur Alcide Fournier, arbitre, numéro de dossier CCAC : S16-102701-NP.

[2] R.Q. c. B 1-1, r.0.2

[3] 2017 QCCS 4155

[4] 2018 QCCA 309

[5] chapitre B-1.1, 185 et 192.