CANADA
PROVINCE DE QUÉBEC Centre d'Arbitrage Commercial National et International du Québec.
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NO : 01-01207
MARIO LAPOINTE
Bénéficiaire
c.
9014-2050 QUÉBEC INC. (CONSTRUCTION ÉCLAIR )
Entrepreneur
et
LA GARANTIE HABITATION DU QUÉBEC INC.
Administrateur
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SENTENCE ARBITRALE
Le bénéficiaire confia à l'entrepreneur la réalisation d'une résidence aujourd'hui désignée comme étant le 110 du Bosquet, à La Malbaie.
Le bénéficiaire y déplaça les meubles à la fin du mois de février 1999, pour occuper la résidence le 1er mars 1999.
Le bénéficiaire paya alors les travaux, sauf une retenue pour s'assurer qu'une rampe soit installée dans la descente d'escalier: ce qui fut fait peu de temps après, suivi du paiement intégral.
Au printemps suivant, le bénéficiaire se plaint auprès de l'entrepreneur de vibrations au plancher et, d'une fissure au solage.
L'entrepreneur proposa d'installer une cloison au sous-sol pour supporter les solives du plancher et ainsi réduire de moitié la portée afin de contribuer à la réduction des déflexions et vibrations: ce qu'accepta le bénéficiaire.
Quant aux murs de fondation, l'entrepreneur installa une poutre d'acier pour retenir le mur. Cette mesure fut déclarée satisfaisante par le témoin expert Enrico Bouchard mais, le bénéficiaire craint encore le comportement.
Puis, le bénéficiaire continua de se plaindre verbalement des vibrations et, en particulier, de difficultés à obtenir un chauffage adéquat.
Une première plainte écrite ne fut faite que le 16 mars 2001, par une demande de renseignements adressée par e-mail à la Régie du bâtiment.
C'est le 27 avril 2001 que le bénéficiaire adressa à l'entrepreneur une première "Liste des anomalies" écrite, dont copie fut transmise à l'administrateur.
Une inspection eut lieu, en présence des parties, le 5 juin 2001 et fut suivie, le 18 juin 2001, d'un rapport d'inspection de l'administrateur.
Essentiellement, l'administrateur rejeta tous les points parce que présentés tardivement, sauf pour le point 2 (main courante et palier) pour lequel des correctifs ont été demandés puis exécutés par la suite.
Insatisfait de cette décision, le bénéficiaire a demandé le présent arbitrage comme prévu à l'article 6.12 du plan de garantie, dont bénéficie le bâtiment résidentiel du bénéficiaire.
Les points soulevés à l'arbitrage sont ceux traités par l'administrateur, à savoir:
1. - Le mur du solage réparé en 2000, s'est de nouveau fissuré.
2. - L'escalier du sous-sol n'a pas de main courante et n'est pas munie d'un palier près de la porte est.
3. - Les murs vibrent en fermant les portes du sous-sol.
4. - Par temps froid, la partie tourelle devient inconfortable et les fenêtres du salon laissent passer l'air froid.
5. - La fenêtre avant du salon vibre lorsque l'on marche sur le plancher.
6. - La trappe d'accès de l'entretoit n'a pas de coupe-froid.
7. - Il y a de la buée dans les fenêtres.
8. Les fenêtres ne semblent pas étanches.
auxquels le bénéficiaire ajoute une demande d'ordonnance exigeant une inspection de préréception prévue au paragraphe 6.8 du plan.
Pour le point 1, l'entrepreneur a pris à l'audience l'engagement à procéder à une inspection du mur après l'hiver 2001-2002 et, de faire des corrections s'il y a eu un déplacement postérieur aux corrections faites en 2000. En cas de désaccord, la décision devra être prise par un expert choisi par le bénéficiaire et l'Entrepreneur. Le soussigné entérinera donc cette entente.
Le point 2 fut corrigé, de sorte qu'il n'y pas de litige sur ce point.
Quant au point 6, il y a un engagement, pris à l'audience, de la part de l'entrepreneur qu'il corrigera ce point. Le soussigné entérinera donc également cette entente et ne se penchera pas sur ce point.
Pour ce qui est de l'ordonnance demandée, le pouvoir de l'arbitre n'est que de statuer sur la décision de l'administrateur (Article 6.12.1 du plan , Isabelle Galibois et Sébastien Paquet c. Gignac Construction Inc., CACNIQ 00-0204). Ainsi donc, il aurait fallu que la demande d'ordonnance ait été faite antérieurement à l'administrateur, ce qui n'a pas été fait. L'administrateur avait fait une demande à l'entrepreneur pour obtenir des formulaires "Inspection-préréception/fin des travaux-réception du bâtiment" mais cela ne dispensait pas le bénéficiaire d'en faire une demande s'il voulait que l'administrateur statue sur ce point spécifique.
Pour les autres points, l'administrateur oppose que le recours du bénéficiaire est périmé.
Selon l'article 6.4.2 du plan, la garantie, dans les cas de malfaçons ou de vices cachés, ne peut excéder 6 mois après leur découverte au sens de l'article 1739 C.c.Q. Tous les points soumis à l'arbitrage ont été découverts et mentionnés à l'entrepreneur plus de 6 mois avant le 16 mars 2001, sauf peut-être le point 1 qui reproche un comportement d'une réparation effectuée durant l'année 2000.
Puisqu'il s'agit d'une réparation d'une fissure, cet item 1 doit de toute façon être exclu par l'article 6.7.2 du plan.
Pour les autres points, le bénéficiaire a donc constaté les manifestations des vices depuis le début ou au plus tard durant l'hiver 1999-2000 mais cependant n'a connu leur cause que lors de l'inspection de son expert, M. Roméo Bouchard, le 14 décembre 2001. La cour d'appel a déjà décidé que la connaissance d'un vice était la connaissance de la manifestation et non pas de la cause (Hamel c. Jeté, 1982 C.A. 577 ). D'ailleurs, les délais raisonnables visent aussi la diligence à déterminer les causes (Cie Lachance Dominion c. Doncar Construction Inc., REJB 98-4519.)
Pour se justifier, le bénéficiaire plaide que l'absence d'inspection - préréception prolongerait d'autant les délais de dénonciation. Il est admis que cette inspection n'a pas eu lieu, contrairement à ce qui est prévu à l'article 6.8.1 du plan, malgré des demandes répétées de l'administrateur à l'entrepreneur.
Les délais prévus au paragraphe 6.4.2 du plan courent à compter de la réception et non pas à compter de l'inspection préréception.
Il est vrai que l'article 6.8.4 prévoit que le bâtiment doit être inspecté avant la réception mais, comme toute exigence, les parties peuvent y renoncer.
Reste à déterminer s'il y a eu réception du bâtiment. L'article 6.0.9 définit que la réception est l'acte par lequel le bénéficiaire déclare accepter le bâtiment qui est en état de servir à l'usage auquel on le destine et qui indique le cas échéant les travaux à parachever ou à corriger.
La jurisprudence a souvent déclaré que le paiement par le propriétaire présume de l'acceptation (Rozycki c. Multi Construction Service Inc., REJB 98-7777; Reliance c. Chayer, 1978 C.S. 301 ).
Ainsi donc, je suis d'avis qu'il y a eu réception du bâtiment lors du paiement effectué au cours de mars 1999, avec une seule réserve qui concernait la main courante.
Il faut conclure que le recours du bénéficiaire pour les points 3, 4, 5, 7 et 8 est hors délai puisque exercé plus de 6 mois après la découverte des malfaçons ou des vices cachés.
Selon l'article 6.12.4, le soussigné doit départager les coûts de l'arbitrage. La négligence de l'entrepreneur à procéder à une inspection préréception a laissé croire au requérant que la réception n'avait pas eu lieu et que les recours en vertu du plan lui seraient toujours ouverts. D'autre part, l'administrateur n'a pas transmis au bénéficiaire ses demandes du formulaire d'inspection, lui faisant perdre une chance de savoir qu'il pouvait exiger une telle inspection.
Il faut considérer que le plan est d'intérêt public et que son application doit être expliquée autant que possible aux consommateurs, ce qui aurait pu être fait en transmettant au bénéficiaire une copie des demandes des formulaires à l'entrepreneur.
Pour ces raisons, je suis d'avis que les coûts de l'arbitrage doivent être assumés par le bénéficiaire, l'entrepreneur et l'administrateur, en parts égales.
Quant aux frais d'expertise, aucune preuve en fut présentée de sorte que chaque partie doit supporter les frais de son expert.
PAR CES MOTIFS, JE:
PRENDS ACTE que l'entrepreneur s'est engagé, au printemps 2000, à poser un coupe-froid à la trappe d'accès de l'entretoit.
PRENDS ACTE de l'engagement de l'entrepreneur de vérifier le comportement du mur du solage qui fut réparé en 2000 et d'y faire les corrections nécessaires s'il y a eu déplacement. En cas de désaccord avec le bénéficiaire, qu'il sera procédé selon les recommandations d'un tiers choisi par le bénéficiaire et l'entrepreneur.
CONFIRME la décision de l'administrateur rendue le 18 juin 2001.
REJETTE la réclamation du bénéficiaire.
DÉPARTAGE les coûts de l'arbitrage en part égale entre l'administrateur, l'entrepreneur et le requérant.
DÉCLARE que chaque partie doit assumer ses frais d'experts.
Québec, le 18 février 2002.
_______________________________ René Blanchet, arbitre.