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ARBITRAGE

En vertu du Règlement sur le plan de garantie
des bâtiments résidentiels neufs

(Décret 841-98 du 17 juin 1998, c. B-1.1, r.0.2, Loi sur le bâtiment, Lois refondues du Québec (L.R.Q.), c. B-1.1, Canada)

Organisme d’arbitrage autorisé par la Régie du bâtiment :

Centre canadien d’arbitrage commercial (CCAC)

______________________________________________________________________

 

Entre

PAULETTE ARSENAULT

Et

DANIEL ARSENAULT

Bénéficiaires

Et

9158-0001 Québec Inc., en faillite

Entrepreneur

Et

LA GARANTIE DES BÂTIMENTS RÉSIDENTIELS NEUFS  DE L’APCHQ INC.

Administrateur

 

No dossier Garantie :

130098-1

No dossier CCAC :

S08-200501-NP

Nos dossiers Arbitre :

12 913-23 / 12 913-23-1

______________________________________________________________________

 

SENTENCE ARBITRALE

______________________________________________________________________

 

Arbitre :

Me Jeffrey Edwards

 

 

Pour le Bénéficiaires:

Monsieur Philippe Gauthier

Monsieur Gilbert McNeil

 

 

Pour l’Entrepreneur :

9158-0001 Québec Inc., en faillite

 

 

Pour l’Administrateur :

Me Stéphane Paquette
Savoie Fournier

 

Date de l’audience:

Le 20 octobre 2008

 

 

Date de la décision :

Le 7 novembre 2008

______________________________________________________________________


APRÈS AVOIR PRIS CONNAISSANCE DES PROCÉDURES, ENTENDU LA PREUVE ET Les ARGUMENTS DES parties, le Tribunal d’arbitrage rend la sentence suivante:

 

1. LES FAITS

[1]                Le tribunal d’arbitrage est saisi de deux demandes des Bénéficiaires en remboursement des acomptes versés à l’Entrepreneur dans le cadre de deux promesses de ventes concernant respectivement les unités 20 et 30 des immeubles à construire et à être situés à 1501, rue St-Grégoire, Montréal.

[2]                L’Administrateur a refusé les deux demandes des Bénéficiaires pour les motifs identiques que nous examinerons ultérieurement, d’où ces demandes d’arbitrage. Il a été proposé par le soussigné aux parties de réunir les deux demandes pour les fins d’une audition commune, ce à quoi toutes les parties ont accepté.  À l’audition, cette préférence a été reconfirmée par les parties présentes.

[3]                Les deux contrats préliminaires sont intervenus le 11 septembre 2006 (pièce A-2 dans les deux dossiers).  À un moment contemporain, des contrats préliminaires sont intervenus entre les Bénéficiaires, au nom de Les Habitations Pearl Inc. (pièce B-7) et l’Entrepreneur.

[4]                Selon la preuve non contestée, la raison d’être des contrats préliminaires au nom de Les Habitations Pearl Inc. était d’avoir certains avantages fiscaux et les actionnaires de Les Habitations Pearl Inc. sont les Bénéficiaires.

[5]                Les Bénéficiaires ont remis un acompte sur l’unité 20 au montant de 11 354 $ (chèque encaissé, A-5, dossier 08-132 SP)  et sur l’unité 30 au montant de 11 481 $ (chèque encaissé, A-5 dossier : 08-132.1 SP) par le bias de cette compagnie. Par la suite, les Bénéficiaires se sont révisés et ont demandé de procéder sur la base des contrats préliminaires en leurs propres noms. L’Entrepreneur alors a accepté de résoudre les contrats préliminaires avec Les Habitations Pearl Inc. et de procéder avec les contrats préliminaires signés par les Bénéficiaires personnellement.  Toujours selon la preuve non contestée, l’Entrepreneur a accepté  de considérer par la suite que les acomptes déjà reçus étaient au nom des Bénéficiaires personnellement.  Les Bénéficiaires allaient donc acquérir les unités en leurs propres noms.

[6]                Selon les contrats préliminaires, les unités devaient être «substantiellement terminés et prêts pour l’occupation à la date du 1 mars 2007».

[7]                Malheureusement, cette date n’a pas été respectée par l’Entrepreneur. La date fut reportée par l’Entrepreneur à plusieurs reprises et le dernier report était pour le 30 septembre 2007. Ensuite, l’Entrepreneur ne retournait plus les appels des Bénéficiaires et ceux-ci ont envoyé des mises en demeure du 18 octobre 2007 (pièce A-2) et du 22 novembre 2007 (pièce A-3) constatant les divers défauts de livraison aux dates convenues et reportées, demandant le remboursement des acomptes versés et constatant, implicitement du moins, la résolution extrajudiciaire des contrats préliminaires.

[8]                Le 13 décembre 2007, l’Entrepreneur est mis en faillite.

[9]                Au mois de décembre 2007, devant la situation et conformément au Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs[1] (art. 26, alinéa 1 (a)), les Bénéficiaires ont demandé à l’Administrateur le remboursement des acomptes versés à l’Entrepreneur.

[10]            Le 29 avril 2008, ces demandes sont rejetées par la décision de l’Administrateur (pièce A-8).


Les motifs de la décision de l’Administrateur, identiques dans les deux espèces, se lisent comme suit :



« Attendu que les Bénéficiaires ont déposé auprès de l’Administrateur une demande de remboursement d’acompte;

 

Attendu que l’Entrepreneur est en faillite en vertu d’un jugement prononcé le 13 décembre 2007;

 

Attendu que ce jugement fut porté en appel par l’Entrepreneur, que cet appel fut déclaré déserté et fut retiré du rôle de la Cour d’Appel en date du 15 avril 2008;

 

Attendu que le syndic à la faillite de l’Entrepreneur a écrit en date du 8 février 2008 à l’Administrateur afin de lui faire part de son intention de compléter l’immeuble et de livrer les unités de condos aux promettant-acheteurs;

 

Attendu que le syndic a obtenu, le 14 mars 2008, de la Cour supérieure division commerciale une autorisation à vendre les parties communes et les parties privatives de l’immeuble sis au 1501, St-Grégoire à Montréal.

 

 

 

 

 

Considérant l’intention du syndic de compléter l’immeuble et de vendre les unités de condos aux promettant-acheteurs;

 

Considérant l’ordonnance prononcée par la Cour supérieure division commerciale le 14 mars 2008;

 

Considérant l’absence de tout jugement prononçant la résolution judiciaire du contrat préliminaire liant les bénéficiaires.

 

Considérant que le délai de livraison prévu au contrat préliminaire n’est pas un délai de rigueur.  

 

Pour tous ces motifs, l’Administrateur :

 

Rejette la demande de remboursement d’acompte des Bénéficiaires. »

 

[11]           La preuve a été faite par les Bénéficiaires lors de l’audition que les unités et le reste du bâtiment ne sont toujours pas complétés (photos en liasse, pièce B-5). L’Administrateur plaide devant nous néanmoins que le syndic en faillite qui parle maintenant pour l’Entrepreneur désire compléter les travaux et vendre les unités du projet en question.

 

[12]           Le représentant du syndic de faillite a été dûment convoqué à l’audition d’arbitrage, mais ne s’est pas présenté.

 

[13]           Étant donné son défaut, et l’absence de toute preuve convaincante à ce sujet, il est impossible pour le Tribunal d’arbitrage de conclure que l’Entrepreneur désire encore garder en vigueur les contrats préliminaires intervenus avec les Bénéficiaires.

 

[14]           Les représentants (Philippe Gauthier pour Paulette Arsenault et Gilbert McNeil pour Daniel Arsenault (voir procurations pièces B-1 et B-2)) des Bénéficiaires à l’audition ont clairement et expressément renoncé à tout droit en vertu des contrats préliminaires signés et ils en demandent la résolution. L’Administrateur a raison de signaler dans sa décision que le délai de livraison n’est pas un délai de rigueur. Cependant, il nous paraît manifeste que les délais de livraison et pour passer titre en l’espèce, sont déraisonnables et ne peuvent être extensionnés aussi loin devant les demandes répétées des Bénéficiaires d’obtenir la livraison de leurs unités et à défaut que les contrats préliminaires soient annulés (nuls et on avenus) et que les acomptes versés soient remboursés.  En effet, l’Entrepreneur est en défaut de livrer depuis le 1 mars 2007, ce qui constitue un délai d’un an et 7 mois. Les auteurs et la jurisprudence sont clairs que même si le délai en cause n’est pas de rigueur, il ne peut non plus être déraisonnable.  (Jobin, La Vente, 3e édition, Yvon Blais, p.58;  Sabelli c. Chaussé, EYB1988 - 57684 (C.A.) (délai de 10 mois considéré déraisonnable)).

 

[15]           Les délais écoulés dans les présents dossiers et les défauts multiples et successifs de l’Entrepreneur de passer titre aux Bénéficiaires sont déraisonnables.  Il n’est pas raisonnable de considérer que les Bénéficiaires sont encore liés par des promesses de vente que l’Entrepreneur ou son successeur, le syndic de faillite, après 17 mois, s’est montré incapable de respecter.

 

[16]           De plus, le défaut du représentant du syndic de faillite de se présenter à l’audition est important.  Ce syndic parle maintenant pour et au nom de l’Entrepreneur quant aux droits de ce dernier dans ces contrats préliminaires.  Cette absence indique qu’il ne conteste pas la demande des Bénéficiaires pour la résolution des contrats préliminaires et le remboursement conséquent des acomptes versés.  De même, selon la preuve devant le Tribunal d’arbitrage, le syndic de faillite n’a pas contesté des demandes de résolution déposées en Cour supérieure par d’autres signataires de contrats préliminaires dans ce projet immobilier.

 

[17]           Cependant, afin d’éliminer toute ambigüité sur la question, avec l’accord des parties présentes, le président du Tribunal d’arbitrage a téléphoné, lors de l’audience, au syndic de faillite chez KPMG (bureau de comptables agrées) chargé de la faillite de l’Entrepreneur, soit Monsieur Gaetano Di Guglielmo, C.A. Or, ce témoin a affirmé, sur l’option main-libre du téléphone, et ce, devant toutes les parties présentes, qu’il n’avait pas d’objection à la résolution des contrats préliminaires, en autant que les Bénéficiaires renoncent à leur droit de procéder à la signature des actes de ventes pour les unités visées par leurs contrats préliminaires.

 

[18]           Ainsi, les Bénéficiaires et le représentant dûment autorisé pour parler maintenant au nom de l’Entrepreneur pour les contrats préliminaires ont convenu de résoudre les contrats préliminaires en question dans les présents dossiers.

 

[19]           Ainsi, il n’y a donc plus aucun motif pouvant faire obstacle au devoir légal de l’Administrateur de rembourser aux Bénéficiaires les acomptes versés par eux.

 

[20]           Ainsi, le Tribunal d’arbitrage ordonne à l’Administrateur d’effectuer ces remboursements, sans plus de délais. 



Pour tous ces motifs, le Tribunal d’arbitrage :

 

 

ACCUEILLE les deux demandes d’arbitrage;

 

CONSTATE la résolution, de consentement entre les représentants des Bénéficiaires et le représentant de l’Entrepreneur en faillite, des deux contrats préliminaires qui font l’objet des deux dossiers d’arbitrage en l’instance;

 

Condamne l’Administrateur à verser les montants de 11 481 $ et de 11 354 $ aux Bénéficiaires;

 

Condamne l’Administrateur à payer les frais d’arbitrage des deux demandes d’arbitrage dans les présents dossiers, conformément à l’article 123, alinéa 2 du Règlement.

 

 

 

(s) Me Jeffrey Edwards

 

Me Jeffrey Edwards, arbitre

 



[1]  R.Q. c. B-1.1, r.0.2. (ci-après le « Règlement »).