ARBITRAGE EN VERTU DU RÈGLEMENT SUR LE PLAN DE GARANTIE DES BÂTIMENTS RÉSIDENTIELS NEUFS
(Décret 841-98 du 17 juin 1998)
(Loi sur le bâtiment, L.R.Q., c. B-1.1)
Organisme d’arbitrage autorisé par la Régie du bâtiment :
SOCIÉTÉ POUR LA RÉSOLUTION DE CONFLITS INC. (SORECONI)
ENTRE : Syndicat de la Copropriété 6155-6165, rue de Lusa, Brossard
(ci-après le « Bénéficiaire »)
ET : 9253-5400 Québec inc. (Faubourg Londonien)
(ci-après « L’Entrepreneur »)
ET : La Garantie Habitation du Québec inc.
(ci-après « l’Administrateur »)
Nos des dossiers de SORECONI : 171201001 et 173004001
Arbitre : |
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Me Albert Zoltowski |
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Pour le Bénéficiaire: |
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Madame Brigitte Lauzon |
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Pour l’Entrepreneur : |
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Me Christine Gosselin |
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Pour l’Administrateur : |
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Me François-Olivier Godin |
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Date de la sentence: |
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Le 17 janvier 2018
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Identification complète des parties
Arbitre : |
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Me Albert Zoltowski 1010, de la Gauchetière Ouest Bureau 950 Montréal (Québec) H3B 2N2 |
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Bénéficiaire : |
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SDC 6155-6165 de Lusa 6165-[A], rue de Lusa Brossard (Québec) J4Y 0M4
À l’attention de Madame Brigitte Lauzon, présidente
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Entrepreneur : |
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9253-5400 Québec inc. (Faubourg Londonien) 1981, Bernard-Pilon Beloeil (Québec) J3G 4S5
À l’attention de Me Christine Gosselin |
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Administrateur : |
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La Garantie Habitation du Québec inc. 9200, boulevard Métropolitain Est Anjou (Québec) H1K 4L2
À l’attention de Me François-Olivier Godin
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MANDATS :
L’Arbitre a reçu ses mandats de SORECONI le 13 janvier 2017 (concernant la première demande d’arbitrage) et le 29 mai 2017 (concernant la deuxième demande d’arbitrage).
HISTORIQUE DU DOSSIER :
7 décembre 2016 : première décision de l’Administrateur sous la plume de M. Yvan Gadbois, T.P., conciliateur
7 janvier 2017 : réception par SORECONI de la première demande d’arbitrage du Bénéficiaire fondée sur la décision de l’Administrateur du 7 décembre 2016
7 février 2017 : avis aux parties concernant la première conférence préparatoire fixée au 6 mars 2017
6 mars 2017 : première conférence préparatoire avec les parties par voie téléphonique
18 avril 2017 : deuxième décision supplémentaire de l’Administrateur sous la plume de M. Yvan Gadbois, T.P., conciliateur
30 avril 2017 : réception par SORECONI d’une deuxième demande d’arbitrage fondée sur la deuxième décision supplémentaire de l’Administrateur
12 mai 2017 : avis aux parties concernant la tenue de la deuxième conférence préparatoire fixée pour le 24 mai 2017
24 mai 2017 : deuxième conférence préparatoire avec les parties par voie téléphonique
28 juin 2017 : visite des lieux et audition
20 juillet 2017 : réception de la plaidoirie écrite de l’Administrateur
21 juillet 2017 : réception de la plaidoirie écrite de l’Entrepreneur
17 janvier 2018 : sentence arbitrale
SENTENCE :
Introduction :
1. Cette sentence découle de deux décisions de l’Administrateur qui ont été signées par Monsieur Yvan Gadbois, T.P., le conciliateur au service de l’Administrateur.
2. La première est datée du 7 décembre 2016 et la deuxième porte la date du 18 avril 2017.
3. Les deux décisions concernent un bâtiment dont l’adresse est le 6155 et 6165 sur la rue de Lusa à Brossard (ci-après appelé le « bâtiment »).
4. Malgré le fait que la deuxième décision porte la mention « Rapport supplémentaire au rapport de conciliation émis le 7 décembre 2016 », elle complète le point 16 qui a déjà été abordé dans la première décision et elle vise trois nouveaux points, soit les points 25, 26 et 27 qui seront décrits ci-dessous. À la demande des parties, les deux demandes du Bénéficiaire découlant de ces deux décisions ont été réunies devant l’arbitre soussigné (ci-après le « Tribunal » ou le « Tribunal Arbitral ») pour les fins de l’audition.
5. Au cours de l’audition, le Tribunal a entendu les témoignages des personnes suivantes :
- Monsieur Jean-Rémi Roussel (de l’unité 6165-[B])
- Madame Céline Cyr (de l’unité 6155-[C])
- Madame Brigitte Lauzon, la présidente du Bénéficiaire et propriétaire de l’unité 6165-[A]
- Monsieur Francis Boucher de la firme Cossette et Touchette inc.
- Monsieur Réjean Touchette de la firme Cossette et Touchette inc.
- Madame Marie-Pier Racine, la représentante de l’Entrepreneur
et
- Monsieur Yvan Gadbois, le conciliateur au service de l’Administrateur
6. Lors de l’audition, le Bénéficiaire a déposé en preuve diverses pièces cotées B-1 à B-6.
7. Au cours de l’audition, le Bénéficiaire a déposé également un courriel portant la date du 28 juin 2017, auquel était annexé un fichier Excel intitulé « 6155-6165 de Lusa - Suivi des travaux Trigone au 18 septembre 2016 » ainsi qu’une série de courriels datés du 13 septembre 2016 entre le Bénéficiaire et l’Entrepreneur (Monsieur Faucher); un courriel du 18 septembre 2016 adressé par le Bénéficiaire à l’Entrepreneur avec une copie à l’Administrateur et à Madame Marie-Pier Racine de l’Entrepreneur; et un sixième courriel daté du 25 septembre 2016 du Bénéficiaire à l’Administrateur.
8. De plus, le lendemain de l’audition, le Bénéficiaire a transmis par voie électronique à l’Entrepreneur, à l’Administrateur et au Tribunal six courriels (intitulés courriel 1 de 6, courriel 2 de 6, courriel 3 de 6, courriel 4 de 6, courriel 5 de 6 et courriel 6 de 6). Chacun de ces six courriels contenait des courriels et des documents échangés antérieurement entre les parties.
9. Madame Brigitte Lauzon a fait référence aux documents faisant partie de ces six courriels au cours de son témoignage. Les autres parties ne se sont pas objectées à l’envoi tardif de ces courriels après la tenue de l’audition.
14. Garde-corps détérioré à la terrasse de l’unité 6165-[B] :
10.Dans sa décision, le conciliateur Gadbois a rejeté ce point au motif que les marques d’impact à divers endroits au revêtement à clin en aluminium au muret servant de garde-corps à la terrasse de l’unité 6165-[B], n’ont pas été traités expressément comme une malfaçon par le professionnel du bâtiment de la firme Cossette et Touchette inc. dans son rapport de réception des parties communes daté du 11 avril 2016 (pièce A-5).
Preuve :
11. La date de réception des parties communes qui a été retenue par l’Administrateur est le 11 avril 2016.
12. Le rapport de réception des parties communes de Cossette et Touchette inc. porte la même date.
13. Monsieur Francis Boucher de Cossette et Touchette inc. (ci-après la « firme C et T ») a témoigné qu’il n’a pas constaté personnellement cette problématique lors de son inspection pré-réception du 9 décembre 2015.
14. Il ne se rappelle pas si cette situation a été expressément portée à son attention par le propriétaire de l’unité 6165-[B].
15. Cette situation est décrite à la section 14 du rapport de la firme C et T. Le but de cette section 14 intitulée « Commentaires des propriétaires » est décrit par la firme C et T comme suit : « Nous reproduisons textuellement, aux pages suivantes, les observations et commentaires des propriétaires. Cette rubrique vise à permettre aux propriétaires d’exprimer leurs préoccupations et à l’entrepreneur de fournir les explications et les clarifications concernant ces observations ».
16. Sous le point 14.16 de la section 14 on lit ce qui suit :
« 14.16 - Unités 6165-[D] et 6165-[B] - Le garde-corps du balcon de mon unité d’habitation est détérioré ou corrodé. »
17. Monsieur Gadbois a témoigné qu’il a vu des marques d’impact sur le clin en aluminium, tel que décrit à sa décision, mais il ne les a pas comptées.
18. Lors de la visite des lieux avant l’audition, Monsieur Gadbois a constaté des traces d’impact sur ce qu’il décrit comme le « capping » du muret. Il ne se rappelle pas si ces traces d’impact étaient présentes lors de son inspection qu’il a effectuée avant la rédaction de sa décision.
Prétentions des parties :
Position du Bénéficiaire
19. Selon le Bénéficiaire, il s’agit d’une malfaçon apparente lors de la réception des parties communes qui a été dénoncée dans le rapport de la firme C et T au point 14.16. Ce rapport daté du 11 avril 2016 a été transmis électroniquement par le Bénéficiaire à l’Entrepreneur et à l’Administrateur le 20 avril 2016.
20. De plus, selon le Bénéficiaire, ce point a été reconnu par l’Entrepreneur. À cet effet, il invoque une liste préparée par l’Entrepreneur et intitulée « Mise à jour des travaux » qui est datée du 8 août 2016 (pièce B-2). Sur cette liste l’Entrepreneur a placé cette problématique sous la rubrique des « travaux à faire ou à vérifier ».
Position de l’Administrateur
21. L’Administrateur plaide qu’il s’agit d’une malfaçon apparente malgré le fait qu’elle n’a pas été détectée par Monsieur Boucher lors de son inspection pré-réception du 9 décembre 2015.
22. Il soumet que l’inclusion du point 14.16 au rapport de réception des parties communes ne constitue pas une dénonciation valable pour les fins du Règlement.
23. Selon lui, la première dénonciation écrite qui est conforme au Règlement a été faite le 6 octobre 2016 via la transmission d’un tableau préparée par le Bénéficiaire avec comme description du problème la mention suivante «Point d’inspection : 14.16; Localisation : 6165-[B]; : Description rapport Cossette & Touchette : Le garde-corps de mon unité d’habitation est détérioré ou corrodé; Commentaires et Suivis : L’aluminium entourant la terrasse est bosselé à de multiples endroits (photos déjà transmises)».
24. L'Administrateur plaide que cette dénonciation faite presque six mois suivant la date de la réception des parties communes ne respecte pas le délai prescrit par le Règlement qui exige qu’une telle dénonciation soit faite à la date de la réception.
Position de l’Entrepreneur
25. L’Entrepreneur est du même avis que l’Administrateur.
26. Il ajoute que Monsieur Boucher de la firme C et T a témoigné qu’il n’a pas constaté personnellement cette situation lors de son inspection pré-réception et ne l’a pas inclut dans le rapport de C et T.
Analyse et décision du point 14 :
27. La disposition qui prévoit une garantie de réparation des malfaçons apparentes au moment de la réception, se trouve au paragraphe 27(2) du Règlement[1] :
« 27. La garantie d’un plan dans le cas de manquement de l’entrepreneur à ses obligations légales ou contractuelles après la réception de la partie privative ou des parties communes doit couvrir :
2. la réparation des vices et malfaçons apparents visés à l’article 2111 du Code civil et dénoncés, par écrit, au moment de la réception ou, tant que le bénéficiaire n’a pas emménagé, dans les 3 jours qui suivent la réception; »
28. Premièrement, on peut se demander si les traces d’impact sur l’aluminium qui recouvre le muret servant de garde-corps au balcon de l’unité 6165-[B] constituent une malfaçon.
29. Selon les plaidoiries de toutes les parties, il est clair qu’elles reconnaissent qu’il s’agit d’une malfaçon et, de plus, qu’il s’agit d’une malfaçon apparente.
30. Dans ce cas, la prochaine question que nous devons nous poser est de savoir si la mention au point 14.6 à la section 14 du rapport de réception des parties communes de la firme C et T, constitue une dénonciation valable de cette malfaçon apparente selon les exigences du paragraphe 27(2) du Règlement cité ci-haut.
31. Selon le Tribunal, la réponse est affirmative.
32. Dans un premier temps, cette dénonciation était suffisamment claire et explicite pour que le conciliateur Gadbois dans sa décision du 7 décembre 2016, la considère comme la problématique qui a été dénoncée. L’Entrepreneur s’est également penché sur la même problématique et dans sa liste de la mise à jour des travaux datée du 8 août 2016 (pièce B-2), l’a classée dans la rubrique des travaux « à faire ou à vérifier ».
33. Il est exact, comme le prétendent l’Administrateur et l’Entrepreneur que lors de son inspection pré-réception le 9 décembre 2015, Monsieur Boucher de la firme C et T n’a pas constaté cette problématique. Toutefois, Monsieur Boucher a témoigné qu’il jugeait que le commentaire du propriétaire de l’unité 6165-[B] qui est tiré de la correspondance provenant de ce propriétaire, était pertinent et il a admis qu’il a personnellement pris soin de l’inclure à la section 14 du rapport de réception préparé par la firme C et T.
34. Selon le Tribunal, le fait que Monsieur Boucher n’a pas constaté cette problématique lors de son inspection pré-réception qui, et ceci est un fait important, a eu lieu quelques quatre mois avant la date de réception du 11 avril 2016, n’est pas fatale. Le fait qu’il ne l’a pas constatée lors de son inspection ne signifiait pas que cette situation n’a pas existée ou n’a pas été découverte par le propriétaire de l’unité 6165-[B] au cours des quatre mois qui ont séparé la visite de Monsieur Boucher (9 décembre 2015) et la date de la version finale du rapport de réception (11 avril 2016).
35. Selon le Tribunal, les commentaires du propriétaire de l’unité 6165-[B] qui étaient inclus au rapport de la firme C et T sous le point 14.16 signifiaient que lors de la préparation de ce rapport le 11 avril 2016, cette problématique a été constatée au moins par le propriétaire de l’unité 6165.8.
36 . De plus, le Tribunal ne perçoit pas dans le texte du paragraphe 27(2) du Règlement une exigence que la problématique dénoncée soit qualifiée par un professionnel du bâtiment comme une malfaçon au moment de cette dénonciation ou dans le texte même de la dénonciation.
37. Il est clair qu’en cas d’une contestation soit par l’Entrepreneur ou par l’Administrateur d’une problématique qui fait l’objet de la dénonciation quant à sa qualification de vice ou de malfaçon, le Bénéficiaire aura le fardeau de prouver que c’est bien le cas. Cependant, dans le cas qui nous occupe, cette preuve, selon le Tribunal, n’avait pas besoin d’être faite à l’étape de la dénonciation écrite de la problématique.
38. Ni l’Administrateur ni l’Entrepreneur n’ont référé le Tribunal à une autre disposition du Règlement, du Code civil du Québec ou à une autorité jurisprudentielle, pour appuyer leur interprétation relativement à la nécessité d’une attestation par un professionnel du bâtiment, qu’il s’agit bien du vice ou de la malfaçon lors de sa dénonciation en vertu du paragraphe 27(2) du Règlement.
39. Vu cette conclusion, le Tribunal n’a plus besoin de se pencher sur les autres prétentions des parties.
16. Fenêtres tâchées : (fenêtres sur la façade en béton)
40. Le conciliateur, Monsieur Gadbois, a statué sur ce point dans chacune de ses deux décisions.
41. Avant de rédiger sa première décision, il a visité les unités 6165-[E] et 6165-[A]. Dans sa deuxième décision, il traite également des fenêtres tâchées qui donnent sur la façade en béton dans les unités 6155-[F], 6155-[C], 6165-[G] et 6165-[B]. Il a également revisité l’unité 6165-[A]. Dans ses deux décisions, il a rejeté la réclamation du Bénéficiaire à l’égard de ce point pour le même motif qu’il décrit comme suit : « l’inspection n’a pas permis de faire de lien entre la situation dénoncée à ce point et les travaux réalisés par l’Entrepreneur. »
Preuve :
42. Le Tribunal Arbitral retient les faits suivants qui lui ont été présentés lors de l’audition :
43. Ce point 16 réfère seulement aux fenêtres de diverses unités d’habitation du bâtiment qui donnent sur la façade en panneaux de béton.
44. Lors de l’inspection des parties communes le 9 décembre 2015, Monsieur Francis Boucher de la firme C et T a constaté que les vitres du bâtiment étaient sales. Selon lui, il s’agissait d’une situation normale. Il ne l’a pas identifiée comme étant une malfaçon dans la version finale du rapport de réception des parties communes du 11 avril 2016.
45. Madame Brigitte Lauzon, propriétaire de l’unité 6165-[A], a également témoigné que les fenêtres dans son unité étaient sales lors de l’inspection de M. Boucher. Elle aussi considérait qu’il s’agissait d’une situation normale. Au début de décembre 2015 mais avant cette inspection, il y avait des travaux d’asphaltage devant le bâtiment, ce qui a occasionné beaucoup de poussière dans l’air.
La découverte
46. Madame Lauzon a constaté pour la première fois que la saleté sur les fenêtres de son unité était anormale en juin 2016. Durant cette période, elle a remarqué que malgré tous les produits nettoyants, du plus doux au plus fort, qu’elle a utilisés sur les fenêtres de son unité, tant à l’extérieur qu’à l’intérieur, elles demeuraient toujours sales. Pour vérifier si les fenêtres des autres unités étaient affectées par le même problème de saleté, elle a parlé aux propriétaires des unités 6165-[G] et 6165-[B].
47. Elle a témoigné que les fenêtres de certaines unités à l’adresse 6155 étaient sales également. Elle n’a pas fait de vérification aux unités 6155-[H] et 6155-[C] car en juin 2016, car ces unités appartenaient encore à l’Entrepreneur et elle n’y avait pas accès malgré sa position de présidente du Bénéficiaire.
48. Ce n’est que le 15 juillet 2016 que cette problématique a été constatée à l’unité 6155-[C] par sa nouvelle propriétaire, Madame Cyr au cours de la visite de Madame Lauzon accompagnée de la représentante de l’entrepreneur, Madame Marie-Pier Racine.
Dénonciation verbale
49. Cette problématique a été dénoncée verbalement par le Bénéficiaire à Madame Marie-Pier Racine, représentante de l’Entrepreneur, lors de sa visite au bâtiment le 15 juillet 2016.
Dénonciation écrite par le Bénéficiaire
50. La première dénonciation écrite du Bénéficiaire à l’Entrepreneur et à l’Administrateur des fenêtres sales, apparait à la liste sur un fichier Excel préparée par le Bénéficiaire. Elle est intitulée « 6155-6165 de Lusa - Suivi des travaux Trigone au 18 septembre 2016 ».
25. Fenêtres tâchées au revêtement de brique :
51. Dans sa deuxième décision du 18 avril 2017, le conciliateur Monsieur Gadbois a écrit que ce point lui a été dénoncé pour la première fois, et ce verbalement par le Bénéficiaire lors de sa deuxième visite d’inspection le 16 mars 2017.
52. Dans sa décision, il décrit les observations des tâches des fenêtres au revêtement de brique comme suit : « Des tâches différentes et de forme irrégulière à la surface extérieure du verre extérieur aux fenêtres situées au revêtement de brique pour les unités suivantes :
- unité 6155-[F] : chambre secondaire et salle de bain;
- unité 6155-[C] : chambre secondaire et salle de bain;
- unité 6165-[G] : chambre secondaire et salle de bain;
- unité 6165-[A] : chambre secondaire et salle de bain;
- unité 6165-[B] : chambre secondaire et cuisine. »
53. Dans sa décision, le conciliateur a rejeté ce point au motif que la découverte de ce point a eu lieu, selon une déclaration du Bénéficiaire, au printemps 2016 et que l’Administrateur en a été informé seulement le 16 mars 2017. Selon lui, ce délai excède le délai maximal de six mois entre la découverte d’une malfaçon et sa dénonciation écrite à l’Entrepreneur et à l’Administrateur, tel que prévu par le contrat de garantie.
Preuve supplémentaire concernant le point 25 :
54. La représentante de l’Entrepreneur, Madame Racine, a témoigné que lors de sa visite au bâtiment en compagnie de la présidente du Bénéficiaire, Madame Lauzon, le 15 juillet 2016, le problème des tâches sur les surfaces des fenêtres donnant sur la façade en brique ne lui a pas été dénoncé. Lors de cette rencontre, seulement la problématique affectant les fenêtres donnant sur la façade en panneaux de béton (point 16) a été portée à son attention. La première fois qu’elle a reçu une dénonciation au sujet des fenêtres sur la façade en brique était lors de la deuxième visite d’inspection de Monsieur Gadbois en mars 2017.
Prétentions des parties concernant les points 16 et 25 :
Position du Bénéficaire
55. La position du Bénéficiaire est que lors de l’inspection pré-réception des professionnels de la firme C et T le 9 décembre 2015, il était impossible de conclure que la saleté sur les vitres des fenêtres constituait une malfaçon. Ces professionnels de la firme C et T n’étaient pas obligés de nettoyer les fenêtres pour pouvoir constater si la saleté pouvait être éliminée ou pas.
56. Le Bénéficiaire soumet qu’il s’agit d’une malfaçon non apparente au moment de la réception des parties communes le 11 avril 2016.
57. Selon lui, la dénonciation écrite des tâches sur les fenêtres donnant sur la façade en béton (point 16) ainsi que de celles sur les fenêtres donnant sur le mur en brique (point 25) a été effectuée au moyen de la liste soumise en format d’un fichier Excel annexée au courriel du Bénéficiaire à l’Entrepreneur et à l’Administrateur en date du 18 septembre 2016.
58. Le Bénéficiaire demande au Tribunal d’ordonner le remplacement de toutes les fenêtres tâchées et faisant l’objet des points16 et 25.
Position de l’Administrateur
59. L’Administrateur soumet que la problématique des fenêtres aux points 16 et 25 était décelable lors de l’inspection pré-réception par la firme C et T le 9 décembre 2015. Il fonde sa prétention sur le témoignage de Monsieur Boucher qui a admis avoir constaté que les fenêtres étaient sales lors de cette inspection.
60. Conséquemment, l’Administrateur soumet qu’il ne peut s’agir que de malfaçons apparentes selon les termes du Règlement.
61. L’Administrateur souligne toutefois que la firme C et T n’a pas cru bon d’indiquer cette problématique à son rapport de réception des parties communes.
62. Il plaide que selon le paragraphe 27(2) du Règlement, les malfaçons apparentes doivent être dénoncées par écrit au moment de la réception ou tant que le Bénéficiaire n’a pas emménagé dans les 3 jours qui suivent la réception. Or, la dénonciation initiale du Bénéficiaire à l’Administrateur n’a eu lieu que le 6 octobre 2016 via la transmission d’un tableau.
63. L’Administrateur plaide que ce tableau du 6 octobre 2016 vise seulement les fenêtres donnant sur la façade en béton (le point 16). Il cite un extrait de ce tableau où le Bénéficiaire a écrit « lors de l’inspection en décembre, il a été difficile de déceler ce problème. Ce n’est qu’au printemps en lavant les fenêtres que le problème a été décelé pour toutes les fenêtres en façade de béton… ».
64. En ce qui concerne le problème des fenêtres donnant sur la façade en brique, qui est visé au point 25, l’Administrateur soumet que sa dénonciation a eu lieu seulement le 14 novembre 2016, lorsque le Bénéficiaire a parfait sa réclamation, soit plus de huit (8) (sic) mois après la réception des parties communes (11 avril 2016).
65. Finalement, l’Administrateur plaide que si jamais le Tribunal accueillait la demande du Bénéficiaire, le choix de la méthode corrective appartient à l’Entrepreneur.
Position de l’Entrepreneur
66. De façon générale, l’Entrepreneur partage l’avis du conciliateur Monsieur Yvan Gadbois décrit à ses deux décisions du 7 décembre 2016 et 18 avril 2017.
67. En ce qui concerne le point numéro 16, il plaide que les fenêtres tâchées de la façade en béton de plusieurs unités ne rencontrent pas les critères de vices cachés au sens des articles 1726 et 2103 du Code civil du Québec.
68. Selon lui, la problématique du point 16, était apparente lors de l’inspection pré-réception par la firme C et T du 9 décembre 2015. Cependant, la firme C et T ne l’a pas mentionnée dans son rapport de réception des parties communes, malgré le fait qu’elle a cité le commentaire du propriétaire de l’unité 6165-[B] à la section 14 sous le point 14.26 de ce rapport.
69. L’Entrepreneur admet que la dénonciation du point 16 a été faite le 6 octobre 2016. Cependant, elle est tardive. Elle aurait dû être faite lors de la réception, le 11 avril 2016.
70. En ce qui concerne les fenêtres tâchées au revêtement de brique (point 25), l’Entrepreneur plaide comme suit :
a) après un nettoyage de certaines de ces fenêtres, lors de la visite des lieux le matin de l’audition par le Tribunal, les procureurs ainsi que les parties et leurs témoins respectifs, aucune tâche n’était visible;
b) le texte de la dénonciation du 14 novembre 2016 ne contient aucune référence à ces fenêtres;
c) la première dénonciation a été verbale et elle date du 16 mars 2017, soit la date de la deuxième visite d’inspection du conciliateur Monsieur Gadbois.
Analyse et décision concernant les points 16 et 25:
71. Le Tribunal a pu constater l’apparence des tâches décrites aux points 16 et 25 lors de sa visite des lieux qui s’est déroulée le matin avant l’audition.
72. Selon le Tribunal, en ce qui concerne les tâches aux fenêtres donnant sur la façade en béton (le point 16), il s’agit de nombreux petits cernes en forme de gouttelettes d’eau qui semblent se trouver sur les vitres extérieures des fenêtres.
73. Passant maintenant aux tâches sur les vitres des fenêtres donnant sur le mur en brique (point 25), Monsieur Gadbois a bien décrit cette situation dans sa deuxième décision, comme suit : « Des tâches différentes et de formes irrégulières à la surface extérieure du verre extérieur aux fenêtres situées au revêtement pour les unités suivantes :
- 6155-[F] : Chambre secondaire et salle de bain
- 6155-[C] : Chambre secondaire et salle de bain
- 6165-[G] : chambre secondaire et salle de bain
- 6165-[A] : chambre secondaire et salle de bain
- 6165-[B] : chambre secondaire et cuisine. »
74. Est-ce que toutes ces tâches décrites aux points 16 et 25 ci-haut pourraient être considérées comme des « malfaçons apparentes et existantes lors de la réception du bâtiment » ou des « malfaçons existantes et non apparentes lors de la réception du bâtiment » comme le prétend le Bénéficiaire?
75. Dans le premier cas, pour être couvertes par le plan de garantie, le Règlement exige une dénonciation écrite lors de la réception du bâtiment (article 27(2)) et dans le second cas, ce règlement prévoit une découverte dans l’année suivant la réception et une dénonciation écrite à l’entrepreneur et à l’administrateur dans un délai raisonnable n’excédant pas six mois suivant cette découverte : l’article 27(3)) du Règlement.
Les malfaçons
76. Est-ce que toutes ces tâches peuvent être considérées comme des « malfaçons »?
77. Selon les auteurs Me Sylvie Rodrigue et Me Jeffrey Edwards, dans leur article intitulé « La responsabilité légale pour la perte de l’ouvrage et la garantie légale contre les malfaçons »,
« … une ‘malfaçon’ est un travail mal fait ou mal exécuté. Or, un travail donné et considéré « bien » ou « mal » fait selon les normes qui lui sont applicables. Deux types de normes sont couramment employées pour établir l’existence d’une malfaçon. Premièrement, ce sont les conditions contractuelles fixées, que celles-ci soient écrites ou verbales entre les parties. Deuxièmement, en l’absence de conditions précises expressément arrêtées, recours est fait aux « règles de l’art » qui sont suivies par chaque corps de métier ou secteur pertinent. Les règles de l’art sont considérées comme intégrés par renvoi dans le contrat… »[2]
78. Selon le Tribunal, des tâches généralisées sur les vitres de fenêtres de plusieurs unités d’habitation neuve(s) qui résistent à plusieurs tentatives de leur nettoyage au moyen de divers produits de nettoyage, lesquelles on peut aussi qualifier de « tâches permanentes » sur les vitres, constituent une malfaçon, soit un travail mal fait ou mal exécuté lors de la fabrication de chaque fenêtre tâchée ou lors de son installation.
79. L’Administrateur admet dans son argumentation qu’il s’agit de « malfaçons ».
Malfaçons non-apparentes
80. La prochaine question sur laquelle le Tribunal doit se pencher est celle de déterminer si ces malfaçons étaient apparentes ou non apparentes au moment de la réception des parties communes du bâtiment, le 11 avril 2016.
81. Dans la cause Picard Équipement de Boulangerie[3], la Cour Supérieure nous enseigne en quoi consistent les vices ou les malfaçons apparents :
« [130] Les vices et malfaçons sont apparents lorsqu’ils sont facilement visibles et qu’ils peuvent être découverts par un examen général de l’ouvrage ne nécessitant pas une vérification spécifique par un professionnel ayant une connaissance dans le métier. Notons également que l’appréciation du caractère apparent doit se faire selon un critère objectif, soit celui de la personne raisonnable. »
82. Selon le Tribunal, en interprétant cette citation de la Cour supérieure a contrario, les vices ou les malfaçons sont non-apparents lorsqu’ils ne sont pas facilement visibles et ne peuvent pas être découverts par un examen général de l’ouvrage sans une vérification spécifique par un professionnel ayant une connaissance dans le métier.
La découverte
83. Selon la preuve, lors de l’inspection pré-réception du 9 décembre 2015, les vitres étaient sales et ce de façon généralisée. Non seulement Madame Lauzon mais également Monsieur Boucher qui possède une connaissance dans le métier, ont témoigné qu’ils trouvaient qu’une telle saleté généralisée était normale.
84. Cependant, il faut se demander si les tâches permanentes, c’est-à-dire résistantes à toute tentative de leur nettoyage avec divers produits, pouvaient être distinguées parmi d’autres éléments qui constituaient une saleté généralisée sur les fenêtres?
85. Selon le témoignage de Madame Lauzon, pour être capable de constater ces tâches permanentes, il fallait préalablement tenter de nettoyer les vitres des fenêtres. Selon son témoignage, elle a procédé à un tel nettoyage des vitres dans son unité seulement en juin 2016. C’est à cette période également, qu’à titre de présidente du Bénéficiaire et après une vérification auprès d’autres propriétaires, elle a découvert que les fenêtres de certaines autres unités étaient affectées de la même façon.
86. Selon la preuve, la seule exception quant à la date de la découverte des tâches permanentes sur les vitres, visait les vitres des fenêtres de l’unité 6165-[B] . Dans le rapport de réception préparé par la firme C et T, l’extrait de l’observation du propriétaire de l’unité 6165-[B] qui est cité au point 14.26 du rapport, démontre qu’il a déjà tenté de nettoyer ses fenêtres mais n’a pas réussi : « 14.26 - Unité 6165-[B]- Les fenêtres de mon unité sont sales et je ne suis pas capables de bien les nettoyer. Un résidu semble avoir été laissé sur les fenêtres après la livraison du bâtiment ». (Souligné par le Tribunal.)
87. Pour résumer : en ce qui concerne la découverte des tâches sur les fenêtres donnant sur les panneaux en béton (point 16) et sur celles de la façade en briques (point 25), le Tribunal retient comme une preuve suffisante le témoignage de Madame Lauzon que cette découverte a eu lieu en juin 2016 relativement à diverses unités du bâtiment ( qui seront énumérées ci-dessous), sauf l’unité 6165-[B]. Dans le cas de cette dernière unité, la découverte a eu lieu avant la date de réception du 11 avril 2016.
Dénonciation écrite
88. En ce qui concerne la dénonciation des malfaçons non apparentes des fenêtres mentionnées aux points 16 et 25, le Tribunal retient qu’elle a été faite le 18 septembre 2016 par l’envoi du fichier Excel. Sur ce fichier, sont énumérées les fenêtres des unités 6155-[H], 6155-[C], 6165-[G], 6165-[A].
89. Ce fichier Excel réfère également aux fenêtres de l’unité 6165-[B], et précise qu’il s’agit de fenêtres de la cuisine et celles des 2 chambres.
90. Étant donné que, sauf en ce qui concerne l’unité 6165-[B], la découverte a eu lieu en juin 2016 et que la dénonciation écrite à l’Administrateur et à l’Entrepreneur a été envoyée le 18 septembre 2016, le délai entre la découverte et cette dénonciation écrite est un délai raisonnable et conforme à 27(3) du Règlement.
91. Cet article 27(3) du Règlement se lit comme suit :
« 27. La garantie d’un plan dans le cas de manquement de l’entrepreneur à ses obligations légales ou contractuelles après la réception de la partie privative ou des parties communes doit couvrir :
3. la réparation des malfaçons existantes et non apparentes au moment de la réception et découvertes dans l’année qui suit la réception, visées aux articles 2113 et 2120 du Code civil et dénoncées, par écrit, à l’entrepreneur et à l’administrateur dans un délai raisonnable, lequel ne peut excéder six mois de la découverte des malfaçons ;»
92. En ce qui concerne la dénonciation des tâches sur les fenêtres de l’unité 6165-[B] (autres que sur les portes-fenêtres patios de cette unité, décrites au point 27 ci-dessous), le Tribunal considère que l’observation du propriétaire de cette unité, citée au point 14.26 du rapport de réception de C et T constitue une dénonciation valable selon les dispositions du paragraphe 27(2) du Règlement cité ci-dessus. Cette conclusion est fondée sur les mêmes motifs que ceux décrits aux paragraphes 30 à 38 ci-haut, avec les changements applicables.
93. Compte tenu de ces conclusions, le Tribunal n’analysera pas toutes les autres prétentions des parties concernant les points 16 et 25.
26. Verre égratignée à l’unité 6165-[E] :
94. Dans sa deuxième décision du 18 avril 2016, le conciliateur Monsieur Yvan Gadbois a indiqué que lors de ses deux inspections, il a « constaté la présence d’une marque qui s’apparente à une égratignure du verre sur la face extérieure au bas de la section fixe de la fenêtre à la chambre principale de l’unité 6165-[E]. »
95. Dans sa décision, il écrit : « Mentionnons en premier lieu que la dénonciation du syndicat concernant cette situation a été faite à même l’item de fenêtres tâchées.
Cette situation n’a fait l’objet d’aucun constat de la part du professionnel du bâtiment ayant produit ledit rapport. »
96. Selon lui, cette situation était apparente lors de la réception du bâtiment mais n’était pas traitée comme une malfaçon apparente au rapport de réception des parties communes du bâtiment par la firme C e T. En conclusion, il rejette ce point.
Preuve :
97. La preuve démontre que la description de la problématique par le conciliateur Monsieur Yvan Gadbois était juste.
98. Monsieur Francis Boucher de la firme C et T a témoigné que lors de sa visite d’inspection pré-réception en décembre 2015 à l’unité 6165-[E], aucun problème concernant les fenêtres n’a été porté à son attention.
99. Le rapport de réception des parties communes de la firme C et T ne contient aucune mention quant aux fenêtres à l’unité 6165.5, même à sa section 14 qui contient les observations et commentaires des propriétaires.
Prétentions des parties :
Position du Bénéficiaire
100. Selon le Bénéficiaire, l’égratignure à l’extérieur de la fenêtre de l’unité 6165-[E] constitue une malfaçon non-apparente lors de la réception des parties communes.
101. Selon le Bénéficiaire, la dénonciation écrite de ce point a été faite lors de la transmission du fichier intitulé « 6155-6165 de Lusa, suivi des travaux Trigone au 18 septembre 2016 » transmis à l’Administrateur et à l’Entrepreneur le 18 septembre 2016. Sur cette liste, il est écrit qu’en ce qui concerne l’unité 6165-[E] « la fenêtre de la chambre principale est tâchée ». Selon le Bénéficiaire, cette égratignure s’apparente facilement aux tâches présentes sur les vitres des autres fenêtres décrites aux points 16 et 25 ci-haut.
Position de l’Administrateur
102. L’Administrateur soumet qu’il s’agit d’une malfaçon apparente lors de la réception des parties communes, au sens des termes du Règlement.
103. Selon lui, cette problématique était observable lors de l’inspection pré-réception des parties communes le 9 décembre 2015 par M. Boucher et son collègue de la firme C et T.
104. Selon lui, la première dénonciation date du 14 novembre 2016. Cette dénonciation quelques huit mois après la réception des parties communes (11 avril 2016) est tardive et non conforme au Règlement.
Position de l’Entrepreneur
105. L’Entrepreneur soumet également que la dénonciation aurait dû être faite lors de la réception des parties communes le 11 avril 2016.
106. Contrairement à l’Administrateur, la position de l’Entrepreneur est que la première dénonciation écrite du Bénéficiaire date du 6 octobre 2016, soit la date de la liste mise à jour des travaux à faire.
Analyse et décision concernant le point 26:
107. Ce point concerne une marque qui s’apparente à une égratignure sur la face extérieure de la vitre au bas de la section fixe de la fenêtre à la chambre principale de l’unité 6165-[E] du bâtiment. La question principale est de déterminer si cette problématique était apparente ou non-apparente lors de la réception des parties communes en date du 11 avril 2016.
108. Selon le témoignage de Monsieur Boucher de la firme C et T, cette situation n’a pas été portée à son attention et il ne l’a pas constaté lui-même lors de sa visite pré-réception, quelques quatre mois avant la date de réception des parties communes.
109. Considérant la preuve devant lui et après avoir pu constater lui-même le degré de visibilité de cette égratignure sur la vitre extérieure à la chambre principale de l’unité 6165-[E], le Tribunal conclut qu’il s’agit d’une situation qui était non-apparente lors de la réception des parties communes.
110. Toutes les parties s’entendent qu’il s’agit d’une « malfaçon » au sens du Règlement.
111. Étant non-apparente lors de la réception des parties communes, il s’agit donc d’une malfaçon non-apparente lors de la réception, tel que prévu à l’article 27(3) du Règlement cité ci-haut.
112. En ce qui concerne la dénonciation écrite de cette malfaçon non-apparente, la preuve démontre qu’elle a été effectuée le 18 septembre 2016 au moyen de la liste intitulée « 6155-6165 de Lusa - suivi des travaux Trigone au 18 septembre 2016 ». La description de la problématique « la fenêtre de la chambre principale est tâchée » n’est pas très précise, ce que semble reconnaître le Bénéficiaire lors de son argumentation. Cependant, son explication que cette égratignure pourrait s’apparenter à une tâche sur les fenêtres des autres unités est crédible et non-contredite.
113. Par ailleurs, Le Tribunal note que même la dénonciation postérieure du 6 octobre 2016 qui est acceptée comme valable au sens du Règlement par l’Entrepreneur, a été faite à l’intérieur du délai maximal de 6 mois suivant la découverte, tel que prévu à l’article 27(3) du Règlement.
114. Pour ces raisons, le Tribunal conclut que cette égratignure constitue une malfaçon non apparente lors de la réception des parties communes, qui a été découverte entre la date de la réception (le 11 avril 2016) et la date de sa dénonciation le 18 septembre 2016, soit un délai raisonnable et conforme aux termes de l’article 27(3) du Règlement.
27. Saleté aux portes patio de l’unité 6165-[B] :
115. Dans sa décision, le conciliateur Monsieur Yvan Gadbois a noté que cette situation était apparente lors de la réception des parties communes du bâtiment. Toutefois, il mentionne qu’elle a été décrite à la section 14 du rapport de réception des parties communes de la firme C et T. Cette section regroupe les commentaires et les observations des propriétaires des unités.
116. Toutefois, Monsieur Gadbois a rejeté ce point aux motifs que dans son rapport de réception, la firme C et T ne l’a pas traité comme une malfaçon lors de la réception des parties communes.
La preuve :
117. Selon ce que le Tribunal a pu constater lors de sa visite des lieux, il s’agit de huit panneaux de très grandes fenêtres, du type porte-fenêtre, donnant sur le balcon de l’unité 6165-[B].
118. Le propriétaire de cet unité, Monsieur Jean-Rémi Roussel, a témoigné qu’il a découvert la problématique à la fin de l’automne 2015 ou au début de 2016.
119. Il a témoigné qu’un technicien du distributeur de ces portes-fenêtres, lui a suggéré qu’il s’agissait probablement de poussières entre les vitres et qu’elles étaient probablement mal nettoyées lors de l’assemblage de chaque porte-fenêtre.
120. Monsieur Francis Boucher de la firme C et T a témoigné que lors de son inspection pré-réception du 9 décembre 2015, il n’a pas personnellement constaté de problèmes affectant les portes-fenêtres. Toutefois, il a détecté un problème avec la porte-patio qui donne accès au balcon, un problème sur lequel il s’est penché.
121. Monsieur Boucher a confirmé qu’il a personnellement inséré la description de la problématique qui lui a été transmise avant la préparation de la version finale du rapport de réception des parties communes qui est datée du 11 avril 2016. Cette description provenait du propriétaire de cet unité. Elle apparaît au point 14.26 et se lit comme suit : «Unité 6165-[B] - Les fenêtres de mon unité d’habitation sont sales et je ne suis pas capable de bien les nettoyer. Un résidu semble avoir été laissé sur les fenêtres après la livraison du bâtiment. »
122. Madame Brigitte Lauzon, la présidente du Bénéficiaire, a témoigné que Monsieur Roussel s’est souvent plaint au Bénéficiaire que les portes-fenêtres donnant sur son balcon sont problématiques.
123. Elle a déclaré que le Bénéficiaire a dénoncé cette problématique le 18 septembre 2016 à l’Administrateur et à l’Entrepreneur au moyen du fichier intitulé « 6155-6165 de Lusa - suivi des travaux Trigone au 18 septembre 2016 ». Cette dénonciation se lit comme suit : « 6165-[B] - Fenêtres terrasse, cuisine, 2 chambres, incapable de nettoyer à cause d’un résidu ».
124. Elle a déclaré qu’aucune autre personne, sauf Monsieur Roussel lui-même, n’a tenté de laver les fenêtres de l’unité 6165-[B], y compris les portes-fenêtre, sous réserve bien sûr de sa propre tentative à nettoyer une porte-fenêtre le 23 mai 2016 au coucher du soleil et lors de la visite de Monsieur Gadbois.
125. Madame Lauzon a visité l’unité de Monsieur Roussel le 23 mai 2017 vers 17h00 lors du coucher du soleil et elle a constaté le problème. Selon elle, il est impossible de le constater simplement en prenant une photo.
126. Quand elle a tenté de laver les portes-fenêtres à l’intérieur et à l’extérieur, le problème des tâches existait toujours.
127. Le conciliateur, Monsieur Yvan Gadbois, a témoigné que lors de sa visite le 16 mars 2017, pour essayer de détecter le problème, il a utilisé une lampe torche de 600 lumens après que Madame Lauzon ait nettoyé la surface intérieure et la surface extérieure d’une vitre d’une porte-fenêtre. Il a utilisé sa lampe torche après que Madame Lauzon lui a expliqué que l’on peut voir la problématique au coucher du soleil.
128. Il a témoigné qu’il n’a pas constaté de cernes de gouttelettes sur les portes-fenêtres lors de son inspection.
129. Monsieur Gadbois a répété qu’il a rejeté ce point parce que la firme C et T ne l’a pas traité comme une malfaçon dans son rapport de réception des parties communes.
Prétentions des parties concernant le point 27 :
Position du Bénéficiaire
130. Selon le Bénéficiaire, le problème existe depuis la fin de l’automne 2015, soit depuis l’emménagement de Monsieur Roussel à son unité. Cependant, il n’était pas apparent lors de l’inspection pré-réception par la firme C et T le 9 décembre 2016.
131. Il s’agit selon lui d’une malfaçon non-apparente lors de la réception des parties communes.
132. Il demande au Tribunal d’ordonner le remplacement de toutes les portes-fenêtres donnant sur le balcon de l’unité 6165-[B].
133. Il attire l’attention du Tribunal au fait que dans sa décision, Monsieur Gadbois a statué qu’il s’agissait d’une situation apparente lors de la réception des parties communes mais il semble ne pas avoir détecté cette situation avec sa lampe torche lors de sa propre inspection.
Position de l’Entrepreneur
134. Selon l’Entrepreneur, le Bénéficiaire n’a pas réussi à prouver l’existence de la problématique.
Position de l’Administrateur
135. La position de l’Administrateur est qu’il s’agit d’une problématique qui était apparente lors de l’inspection pré-réception par la firme C et T le 9 décembre 2015. Il s’agit donc d’une malfaçon apparente qui a été dénoncée seulement le 14 novembre 2016, soit plus de huit (sic) mois suivant la réception des parties communes et ce, contrairement aux dispositions du Règlement.
Analyse et Décision concernant le Point 27 :
136. Pour permettre au Tribunal de modifier la décision de l’Administrateur sous la plume de Monsieur Gadbois, le premier élément que le Bénéficiaire avait le fardeau de prouver était l’existence de la problématique faisant l’objet de sa dénonciation écrite à l’Administrateur et à l’Entrepreneur.
137. Une fois que la problématique était prouvée, soit par le Bénéficiaire, soit par une admission de l’Administrateur et de l’Entrepreneur, le Tribunal pourrait passer à la prochaine étape de son analyse, c’est-à-dire répondre à la question si cette problématique constituait une malfaçon, ou pas . Ensuite, le Tribunal analyserait les autres éléments requis pour voir si la problématique était une malfaçon apparente ou non-apparente et les modalités de sa dénonciation par le Bénéficiaire à l’Entrepreneur et à l’Administrateur.
Preuve de l’existence de la problématique dénoncée
138. Dans le cas qui nous occupe, la problématique qui est dénoncée est la présence d’un résidu sur les vitres des portes-fenêtres donnant sur le balcon de l’unité 6165-[B].
139. Dans le cas des autres fenêtres de la même unité, ce résidu consistait en une saleté permanente en forme de cernes ou de tâches de gouttes séchées.
140. Analysons brièvement la preuve de l’existence de ce résidu selon les témoignages qui ont été entendus.
141. Monsieur Roussel a témoigné avec vigueur au sujet de la présence de cette saleté sur les vitres de ses portes-fenêtres. Selon lui, ce problème est couvert par le texte du point 14.26 à la section 14 du rapport de la firme C et T.
142. La représentante du Bénéficiaire, Madame Lauzon, a témoigné qu’elle a vu cette saleté une fois, soit le 23 mai 2017 vers 17h00, au coucher du soleil.
143. Monsieur Gadbois, le conciliateur, a témoigné qu’il a tenté de détecter cette saleté en utilisant une lampe torche de 600 lumens mais n’a pas réussi.
144. Monsieur Francis Boucher de la firme C et T a témoigné que lors de son inspection pré-réception, il n’a constaté rien d’anormal à ces portes-fenêtres.
145. Finalement, le Tribunal a tenté de voir la saleté sur les vitres de ces portes-fenêtres lors de sa visite des lieux le matin de l’audition, mais n’a pu détecter aucune saleté.
146. Toutefois, le Tribunal a facilement pu constater des tâches sur une fenêtre de la chambre à coucher de l’unité 6165-[B] qui fait partie des fenêtres traitées au Point 16 ci-haut .
147. Le Tribunal souligne que le fardeau de prouver l’existence de la problématique, en absence de son admission par les autres parties, appartenait au Bénéficiaire (article 2803 du Code civil du Québec). Pour convaincre le Tribunal, il fallait qu’il prouve que l’existence de cette problématique était plus probable que son inexistence (article 2804 du Code civil du Québec).
148. En analysant la preuve exposée ci-haut, le Tribunal conclut que le Bénéficiaire n’a pas réussi à faire cette preuve.
149. Vu cette conclusion, le Tribunal n’a pas besoin d’analyser les autres prétentions des parties sur ce point.
Remboursement des frais d’expertises :
150. Le Bénéficiaire demande au Tribunal d’ordonner le remboursement de deux factures émises par la firme C et T relativement aux honoraires des Messieurs Francis Boucher et Réjean Touchette. La première facture datée du 26 juin 2017 et portant le numéro 1798, réfère à une inspection du 2 juin 2017 relativement aux points à l’arbitrage. Le montant réclamé est de 500$ ou 574,88$ incluant la TPS et la TVQ. La deuxième facture est datée du 29 juin 2017 et porte le numéro 1804. Un montant de 1 300$ est facturé pour les honoraires de Monsieur Boucher relativement à sa préparation avant l’audition et à la présence à l’audition de Monsieur Touchette. Avec les taxes, cette facture s’élève à 1 494,68$.
151. Selon l’article 38 du Règlement, le Tribunal a le pouvoir d’ordonner à l’Administrateur le remboursement au Bénéficiaire « des frais raisonnables d’expertises pertinentes » lorsque celui-ci a gain de cause totale ou partielle. Le Bénéficiaire a eu gain de cause partielle devant ce Tribunal.
152. Étant donné que l’article 38 du Règlement prévoit le remboursement des frais d’expertises pertinentes, selon le Tribunal il s’agit des frais facturés par une personne qui est reconnue par le Tribunal à l’audience comme un expert. Dans le cas de Messieurs Boucher et Touchette, le Tribunal a maintenu les objections de l’Administrateur et du Bénéficiaire quant à leurs qualifications de témoins experts relativement à certaines questions auxquelles ils devaient répondre en soumettant leur opinion professionnelle.
153. Le Tribunal ne les a pas reconnus comme des experts parce que, préalablement à l’audition et conformément aux directives émises aux parties lors de la conférence préparatoire, ni la firme C et T, ni Messieurs Touchette ou Boucher n’ont émis de rapport exprimant leur opinion professionnelle sur les points en litige devant ce Tribunal..
154. N’étant pas qualifiés comme des experts devant ce Tribunal, ce dernier n’a pas le pouvoir d’ordonner le remboursement des frais qu’ils ont facturés au Bénéficiaire.
CONCLUSIONS SUPPLÉMENTAIRES :
155. La Loi sur le bâtiment ainsi que le Règlement ne contiennent pas de clause privative complète. L’arbitre a compétence exclusive, sa décision lie les parties et elle est finale et sans appel.
156. Selon l’article 116 du Règlement, l’arbitre statue conformément aux règles de droit; il fait aussi appel à l’équité lorsque les circonstances le justifient.
157. Selon l’article 123 du Règlement, lorsque le demandeur est le bénéficiaire les coûts de l’arbitrage sont à la charge de l’administrateur à moins que le bénéficiaire n’obtienne gain de cause sur aucun des aspects de sa réclamation, auquel cas l’arbitre départage ces coûts. Dans ce litige, le Bénéficiaire a eu gain de cause sur certains aspects de sa réclamation.
POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL ARBITRAL :
ACCUEILLE la demande du Bénéficiaire à l’égard du point 14.- Garde-corps détérioré à la terrasse de l’unité 6165-[B], de la décision de l’Administrateur du 7 décembre 2016 et ORDONNE à l’Entrepreneur de faire toutes les réparations requises au revêtement à clin en aluminium, y compris le « capping », du muret servant de garde-corps à la terrasse de l’unité 6165-[B] selon les normes et les règles de l’art de l’industrie de la construction qui y sont applicables, dans un délai de 65 jours de cette sentence et, à défaut de l’Entrepreneur d’effectuer ces réparations à l’intérieur de ce délai, ORDONNE à l’Administrateur de les effectuer à l’intérieur d’un délai supplémentaire de 15 jours;
ACCUEILLE les demandes du Bénéficiaire à l’égard des points 16 - Fenêtres tachées et 25 - Fenêtres tâchées au revêtement en brique, mentionnés aux décisions de l’Administrateur du 7 décembre 2016 et du 18 avril 2017 et ORDONNE à l’Entrepreneur de faire les réparations nécessaires conformément aux normes et aux règles de l’art dans l’industrie de la construction y applicables, à toutes les fenêtres se trouvant aux endroits suivants :
- Unité 6155-[F] : salon, salle à manger, 2 chambres et salle de bains
- Unité 6155-[H] : salon, salle à manger, 2 chambres et salle de bains
- Unité 6155-[C] : salon, salle à manger, 2 chambres et salle de bains
- Unité 6165-[G] : salon, salle à manger, 2 chambres et salle de bains
- Unité 6165-[A] : salon, salle à manger, 2 chambres et salle de bains
- Unité 6165-[B] : cuisine et 2 chambres.
L’Entrepreneur devra effectuer tous ces travaux correctifs dans un délai de 65 jours de cette sentence et à défaut de l’Entrepreneur de les effectuer à l’intérieur de ce délai, ORDONNE à l’Administrateur de les effectuer à l’intérieur d’un délai supplémentaire de 15 jours;
ACCEUILLE la demande du Bénéficiaire à l’égard du point 26 - Verre égratigné à l’unité 6165-[E], de la décision de l’Administrateur du 18 avril 2017 et ORDONNE à l’Entrepreneur de faire les réparations nécessaires conformément aux normes et aux règles de l’art de l’industrie de la construction à la fenêtre de la chambre principale de l’unité 6165-[E] dans un délai de 65 jours de la date de cette sentence et à défaut de l’Entrepreneur d’effectuer ces réparations à l’intérieur de ce délai, ORDONNE à l’Administrateur de les effectuer à l’intérieur d’un délai supplémentaire de 15 jours;
REJETTE la demande du Bénéficiaire à l’égard du point 27 - Saleté aux portes patio de l’unité 6165-[B], de la décision du 18 avril 2017 de l’Administrateur;
REJETTE la demande de remboursement du Bénéficiaire à l’égard des factures émises par la firme Cossette et Touchette inc. totalisant 2 069,56$, incluant la TPS et la TVQ;
DÉCLARE que les coûts d’arbitrage relativement à chacune des deux demandes d’arbitrage découlant des décisions de l’Administrateur du 7 décembre 2016 et 18 avril 2017 sont à la charge de l’Administrateur, La Garantie Habitation du Québec inc, avec les intérêts au taux légal majoré de l’indemnité additionnelle prévue à l’article 1619 du Code civil du Québec à compter de la date de la facture émise par l’organisme d’arbitrage, après un délai de grâce de 30 jours;
RÉSERVE à la Garantie Habitation du Québec inc. ses droits à être indemnisée par l’Entrepreneur, pour tous travaux, toute(s) action(s) et toutes sommes versées incluant les coûts exigibles pour l’arbitrage (paragraphe 19 de l’Annexe II du Règlement) en ses lieux et place, et ce conformément à la convention d’adhésion prévue à l’article 78 du Règlement.
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Montréal, le 17 janvier 2018. |
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Me ALBERT ZOLTOWSKI Arbitre/SORECONI |
[1] Règlement sur le plan de garanties des bâtiments résidentiels neufs, Q.c.B-1.1, r.0.2.
[2] La Construction au Québec : Perspectives Juridiques;Montréal : Wilson & Lafleur Ltée, 1998, page 453.
[3] Picard Équipement de Boulangerie c. 2883643 Canada Inc., Cour Supérieure, l’Honorable Michel Richard, J.C.S., 2006 QCCS 2873.