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TRIBUNAL D’ARBITRAGE

 

(constitué en vertu du règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs sous l’égide de la SOCIÉTÉ POUR LA RÉSOLUTION DES CONFLITS INC. (SORECONI), organisme d’arbitrage agréé par la RÉGIE DU BÂTIMENT DU QUÉBEC chargée d’administrer la Loi sur le bâtiment (l.r.q. c. b-1.1))

 

 

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

DISTRICT DE MONTRÉAL

 

DOSSIERS N° : Soreconi : 080721002

                              Maîtres Bâtisseurs : 506797

 

MONTRÉAL, le 15 juin 2009

 

 

 

ARBITRE : Marcel Chartier

 

 

 

Sylvie Collin

 

             Bénéficiaire

 

c.

Les Habitations G.G. Inc.

 

             Entrepreneur

 

et

La Garantie des Maîtres Bâtisseurs

 

             Administrateur de la garantie

 

 

 

SENTENCE ARBITRALE

 

 

 

 

 

Identification des parties

 

BÉNÉFICIAIRE

Sylvie Collin

254, Rue de la Presqu’Île

Charlemagne (Québec)

J5Z 5H2

 

 

 

ENTREPRENEUR

Les Habitations G.G. inc.

108, Île Morris

Lachenaie (Québec)

J6W 6G6

 

 

 

ADMINISTRATEUR 

La Garantie des Maîtres Bâtisseurs

Me Marc Baillargeon

Tél. :     (514) 344-4228

Fax :     (514) 344-9303

 

 

 

 

 

 

 

Liste des pièces produites au dossier

Pièce B-1 :       Rapport d’expertise de l’architecte Michel Arcand

Pièce B-2 :       C.V. de l’architecte Michel Arcand

Pièce B-3 :       Résumé de facturation de l’architecte Michel Arcand

Pièce B-4 :                                          Sentence arbitrale de Me Robert Masson en date du 12 janvier 2009 dossier     Soreconi. 071112001.

Mandat

L’arbitre a reçu son mandat de la société Soreconi, en date du 28 juillet 2008.

AUDITION du 4 juin 2009

[1]          L’audition a eu lieu au domicile de la bénéficiaire, 254, rue de la Presqu’Île.

[2]          Étaient présents à l’audition :

a)      Mme Sylvie Collin, bénéficiaire, dossier Soreconi 080721002

b)      Mme Thérèse Liboiron et M. Yvon Morin, bénéficiaires, dossier Soreconi 081001001

c)      M. Jean-Luc Crépeau, bénéficiaire, dossier Soreconi 080718003

d)      M. André Gosselin, pour l’entrepreneur,

e)      M. Daniel Gauvin, pour l’entrepreneur,

f)        M. Michel Arcand, architecte, témoin expert, pour les bénéficiaires,

g)      M. Marco Caron, conseiller technique pour l'administrateur,

h)      Me Marc Baillargeon, procureur de l’administrateur.

i)        Mme Marielle Méthot, secrétaire de l’arbitre, 

[3]          La présente fait suite à une précédente audition où les bénéficiaires ont demandé de faire faire une expertise.

[4]          La bénéficiaire est en appel de la décision de l’administrateur, ce dernier l’a intitulé: RAPPORT DE CONCILIATION  "

 

 

 

 

«Historique du dossier

 01 juillet 2007   Réception du bâtiment par les Bénéficiaires

27 mars 2008   Réclamation d’intervention de la part de l’Entrepreneur

«RAPPORT DE CONCILIATION

1. REVÊTEMENT DE PLANCHER

Le bénéficiaire mentionne que toutes les lattes du plancher de bois franc sont concaves et qu’une latte est fendu sous son lit. GMB constaté que les lattes du revêtement de plancher  de bois franc sont légèrement concaves et qu’une latte sous le lit est endommagé. GMB a constaté que les lattes du revêtement du plancher de bois franc ont été installées selon les règles de l’art. De plus, cette situation est attribuable au comportement normal des matériaux lors de leur assèchement après la réception du bâtiment et ne causerait aucune perte d’ordre financier au cas de revente du bâtiment. Tel qu’il est mentionné au contrat de garantie, les réparations rendues nécessaires suite au comportement normal des matériaux ne sont pas couvertes par la garantie.

Par conséquent, GMB demande à l’Entrepreneur de réparer la latte endommagée sous le lit et ne demande aucune autre intervention de l’Entrepreneur.

GMB exige donc que l’Entrepreneur exécute les travaux demandés dans ce présent rapport de conciliation dans les 45 jours suivant la réception du rapport»

[5]          En début d’audition, M. Michel Arcand, architecte,  dépose son C.V. (pièce B-1) et son rapport d’expertise (pièce B-2). Les pièces B-1, B-2, B-3, et B-4 font parties intégrantes du présent dossier. 

[6]          Me Baillargeon souligne que l’architecte Michel Arcand occupe comme expert dans trois dossiers différents, il va faire une continuité de preuve pour les trois dossiers en même temps soit :

1.      Soreconi 080721002 (Sylvie Collin c. Les Habitations G.G. et la Garantie  des Maîtres Bâtisseurs),

2.      Soreconi 080718003 (Jean-Luc Crépeau c. Les Habitations G.G. et la Garantie  des Maîtres Bâtisseurs) et

3.      Soreconi 081001001 (Thérèse Liboiron, Yvon Morin c. Les Habitations G.G. et la Garantie  des Maîtres Bâtisseurs).

[7]          Le procureur de l’administrateur, Me Marc Baillargeon, déclare qu’il va faire une seule preuve continue dans les 3 dossiers en même temps. Toutefois, le soussigné transcrira la preuve dans chacun des dossiers pour que chacun des bénéficiaires puissent avoir son propre dossier (voir paragraphe 6), concernant un comportement anormal de gonflement aux joints des 3 planchers de bois franc avec détérioration graduelle. 

Témoignage de l’architecte Arcand, témoin expert pour les bénéficiaires

[8]          M. Arcand fait part d’un différentiel d’humidité en dessous et en dessus du plancher de bois franc. L’architecte reconnaît le rapport de son expertise légale (produit comme B-1) concernant des revêtements de plancher de bois franc et autres vices aux 170, 250 et 254, rue de la Presqu’Île, Charlemagne. Il ferait le même rapport aujourd’hui sauf pour une dégradation certaine.  Son rapport vaut donc comme s’il était, ici, au long récité.

[9]          La déformation ne va aller qu’en se dégradant à cause des agrafes trop longues (par ailleurs déjà rouillées) et du manque d’épaisseur du contreplaqué non-conforme au Code national du bâtiment. En résumé, dit-il, il faut remplacer et refaire les planchers selon les règles de l’art et le Code national du bâtiment. Pour appuyer son témoignage, il réfère à l’annexe 1 (photo 4) de son expertise produite comme pièce B-1 où il y a, dit-il, vraiment, des espaces et une courbure concave. Le problème varie et variera selon les conditions de météo. Il attire aussi l’attention à la photo 8 où on peut constater une très grande déformation concave. Les photos ont été prises le 26 janvier 2009. L’architecte réfère ensuite aux photos 9, 10, 13, 14, 15, 16, 17 et 18 où l’on peut constater le même phénomène à l’effet que les planches de bois franc non seulement sont concaves mais qu’elles sont aussi fissurées à plusieurs endroits. Comme autre point, il y a lieu de noter, aux photos 23 et 24, les fissures importantes. Aux photos 25 et 26, l’on peut noter, dit-il, des planches concaves et une déformation visuelle importante. C’est la même chose aux photos 27, 30, 35 et 40; dans la photo 40, il y a une déformation de ¼ de pouce. Effectivement, dans la photo 44, il y a aussi une déformation très visible. Pour supporter son "expertise légale " de 35 pages, l’architecte Arcand a produit 48 photos comme Annexe 01 dans la pièce B-1.

Témoignage de Mme Sylvie Collin, 254, rue de la Presqu’Île

[10]      Mme Sylvie Collin, bénéficiaire, propriétaire du 254, rue de la Presqu’Île, Charlemagne, a lu le rapport de l’architecte Arcand, abonde dans le même sens et ajoute que, partout où elle marche, depuis environ deux mois, le plancher craque. Mme Collin termine son témoignage en disant : il y a à peu près le même phénomène chez M. Jean-Luc Crépeau qui demeure au 250, rue de la Presqu’Île près de chez elle, et chez Mme Thérèse Liboiron  et M. Yvon Morin qui demeurent au 170, rue de la Presqu’Île.  Là aussi, chez ses deux voisins, les planches sont concaves, il y a des espaces, certaines planches sont craquées et le plancher craque à la marche, ce qu’elle a pu constater elle-même avant ce jour et aujourd’hui même, lors de la visite des lieux chez Messieurs Crépeau et Morin.

[11]       Me Baillargeon, procureur de l’administrateur, questionne, à nouveau, l’architecte Arcand en ce qui concerne :

1.      Les agrafes

2.      L’épaisseur du contreplaqué

3.      Les fissures

4.      L’humidité du béton

[12]      L’architecte Arcand répond à nouveau que les agrafes dans les trois maisons sont trop longues, elles touchent au béton et elles ont commencé à rouiller. Quant à l’épaisseur du contre-plaqué; elle ne rencontre pas les normes du Code national du bâtiment qui suggère une épaisseur d’au moins 5/8", alors que l’on a ici seulement ½ pouce. L’architecte, en répondant au procureur de l’administrateur dit que les fissures vont bouger dans le temps, et qu’elles vont s’aggraver dans le temps, de façon exponentielle. Il continue en disant que, d’après lui, l’installation des planchers dans les 3 maisons, ne répond pas aux règles de l’art, aux conditions d’humidité et finalement au Code national du bâtiment de 1995. Les planchers sont visiblement et définitivement déformés dans les trois dossiers soit :

1.      Soreconi 080721001 (Sylvie Collin c. Les Habitations G.G. et la Garantie  des Maîtres Bâtisseurs),

2.      Soreconi 080718003 (Jean-Luc Crépeau c. Les Habitations G.G. et la Garantie  des Maîtres Bâtisseurs) et

3.      Soreconi 081001001 Thérèse Liboiron et Yvon Morin c. Les Habitations G.G. et la Garantie  des Maîtres Bâtisseurs).

[13]      Quant au témoignage de l’entrepreneur qui a paru un connaisseur et un homme responsable, on peut résumer son témoignage en disant qu’il s’est fié aux recommandations du manufacturier et à son expérience.

[14]      À nouveau, à la demande du procureur de l’administrateur, l’architecte Arcand intervient pour dire que, d’une part les agrafes créent un problème parce qu’elles sont trop longues et que ce n’est pas ce qui auraient dû être employé, et que, d’autre part le contreplaqué aurait dû être de 5/8" selon le Plan et préférablement de ¾ ". L’architecte conclut à des agrafes non appropriées, à un contreplaqué trop mince et à une trop grande humidité de la dalle de béton. À la fin, l’architecte produit comme pièce B-3 un résumé de sa facturation de 3 294,82$. à laquelle il faut ajouter 3 heures de déplacement à 175$ de l’heure, sa présence à l’audition, et 40$ pour copies de son C.V. Il fait remarquer qu’il a donné un crédit de 1 400$.

[15]      Mme Sylvie Collin revient en disant qu’elle devait avoir un plancher de ¾ de pouce. D’après elle, son plancher a été re-sablé à l’usine, selon ce qu’elle a su plus tard, il a donc moins que ¾ de pouce et, au surplus, le plancher est inégal. Ses poseurs de plancher n’étaient pas les mêmes que ceux qui sont allés chez ses deux voisins Crépeau et Liboiron. Sa maison n’a que deux ans et le plancher craque de partout, ce qu’elle ne peut pas accepter et ce n’est pas ce à quoi elle pouvait s’attendre.

[16]      Elle est déçue de l’acoustique car elle entend marcher les gens qui vivent au-dessus. Il n’y a pas eu de lecture d’humidité avant la pose du plancher et cela s’imposait. En juin ou juillet, elle a averti l’entrepreneur que son plancher gondolait. Selon elle, le comportement du plancher  a changé en six mois et les dommages s’accentuent. Elle termine en disant qu’elle ne pourrait pas vendre sans mentionner les problèmes sérieux qu’elle rencontre actuellement.  Elle produit, comme pièce B-4, une décision de Me Robert Masson en date du 12 janvier 2009, dossier Soreconi 071112001.

Témoignage de Mme Thérèse Liboiron, 170, rue de la Presqu’Île

[17]      Mme Thérèse Liboiron témoigne à l’effet que, lorsqu’elle a acheté, ça faisait un an que le condo était terminé. Elle reconnait avoir vu un problème chez les deux autres. Chez elle, le plancher n’était pas fait encore. C’est elle qui a choisi le plancher chez le fournisseur de l’entrepreneur. Elle a payé la différence pour avoir un meilleur plancher. Elle a le même problème que chez les deux autres soit chez Jean-Luc Crépeau et Sylvie Collin.  L’entrepreneur lui aurait dit qu’elle ne chauffait pas assez chez elle. Ses planchers sont pires qu’à l’hiver dernier. Ça se détériore progressivement, dit-elle, en finissant.

Témoignage de M. Jean-Luc Crépeau, 250, rue de la Presqu’Île

[18]      M. Crépeau témoigne à l’effet qu’il a payé un excédent de 750$ pour le bois franc. M. Gauvin, l’entrepreneur, lui a dit d’acheter un déshumidificateur. C’est ce qu’il a fait. Il a constaté lui-même que les agrafes étaient  trop longues. Son plancher a été beau pendant six semaines et il en était fier. Il a le même problème que Mme Collin et Mme Liboiron. Il dit que, comme les deux autres, tous les frais que cela lui occasionne devraient lui être payés de même que le déménagement temporaire pour la réfection des planchers. 

Comme il est midi l’audition est remise à 13 :15 H

Retour chez Mme Sylvie Collin à 13h15, toutes les mêmes personnes sont présentes.

 

[19]      À une question de Me Baillargeon, M. Daniel Gauvin témoigne à l’effet que :

1.      Il a coulé le béton au 254 et au 250, rue de la Presqu’Île le 29 mars 2007, selon ses factures. La livraison du  bois franc n’a été faite que le 20 juin 2007 pour le 254 (Mme Sylvie Collin) et l’installation le  30 juin, ou peut-être quelques jours avant.

2.       Le lendemain, 21 juin 2007  la livraison du plancher pour le 250, rue de la Presqu’Île (M. Jean-Luc Crépeau) et l’installation deux jours avant celui de Mme Collin.

3.       Pour Mme Liboiron et M. Yvon Morin au 170, rue de la Presqu’Île, le bois franc a été livré le 15 octobre 2007 et l’installation a été faite le 14 novembre 2007.

[20]      L’entrepreneur ajoute que, en ce qui concerne la pose des planchers dans les 3 condos, il y a eu trois sous-traitants différents. D’après lui, le premier a été livré autour du 22 juin 2007. M. Arcand, l’architecte, intervient pour dire qu’il est fort probable que la pose a été faite dans la semaine du 20 juin 2007.

[21]      En regardant ses notes, le témoin Gauvin ajoute que la prise de possession au 254 aurait eu lieu le 2 juillet 2007 et que l’acte notarié aurait été faite le 13 juillet 2007.  Continuant son témoignage, M. Gauvin admet qu’il y a eu d’autres propriétaires que les trois plus haut mentionnés qui ont eu des problèmes avec les planchers de bois franc. L’architecte Arcand intervient de nouveau pour dire que les agrafes du plancher rentrent dans le béton et rouillent très visiblement. À nouveau, il ajoute que le contreplaqué doit être de 5/8 de pouce et  non de ½ pouce. L’architecte termine en disant que, "by the book" il ne faut pas des agrafes mais des clous. Sur ce, M. Gosselin, pour l’entrepreneur, rétorque que tout ce qui a été fait est en respect des plans.

[22]      Mme Collin et Mme Liboiron, toutes deux, disent à nouveau que leur plancher craque et se soulève. A ce moment là, les personnes présentes se déplacent pour aller vérifier sur place l’état des planchers dans les deux autres condominiums situés aux 170, et 250 rue de la Presqu’Île. Le constat a été le même que pour le condominium de Mme Sylvie Collin situé au 254, rue de la Presqu’Île.

[23]      Le procureur de l’administrateur termine l’audition en disant qu’il a bien remarqué que le plancher était concave et que l’expertise de l’architecte était bien faite. Cependant, il ne croit pas qu’il s’agisse là d’une véritable malfaçon. Le procureur reconnait que l’architecte M. Arcand a soulevé le fait qu’il ne devait pas y avoir des agrafes mais des clous et que le contreplaqué aurait dû être au minimum de 5/8 de pouce au lieu de ½ pouce et préférablement ¾  de pouce.

 

 

ANALYSE DE LA PREUVE

[24]      Le soussigné retient le rapport d’expertise de l’architecte Arcand au complet, pour les 3 dossiers mentionnés au paragraphe 6, et plus particulièrement les paragraphes 10 et 11 dont voici la teneure :

«10          CONCLUSION

Nous sommes d’avis que les revêtements de plancher que nous avons examinés ne sont pas conformes aux règles de l’art et ni aux prescriptions de la réglementation, Nous sommes d’avis que le résultat relevé sur place est tout à fait inacceptable, tant du point de vue esthétique que du point de vue technique.

Enfin, nous sommes d’avis que la problématique ne résulte aucunement des conditions d’utilisation des condominiums par les propriétaires, mais relèvent uniquement du non respect des règles de l’art et de la réglementation lors de la mise en place des revêtements de plancher.

De plus, nous sommes d’avis que les propriétaires des condominiums ne connaissaient pas les méthodes, détails ou autres prescriptions techniques d’installation étant donné qu’aucun plan de construction, ni devis d’installation ne leur a été remis à cet effet. Dans les faits, les demandeurs avaient pris entente avec l’entrepreneur concernant la réalisation de revêtement de planchers de bois franc et s’attendaient à ce que l’entrepreneur respecte les règles de l’art et les exigences minimales de la réglementation.

Nous avons vu précédemment que même si l’entrepreneur a respecté la description prévue aux détails de construction concernant la mise en place d’unn contreplaqué de ½ " sur la dalle de béton, ce détail n’était pas approprié pour la mise en place d’un revêtement de plancher en lames de bois franc. Or, les plans et devis ne portaient aucunement sur un type de revêtement de plancher particulier et auraient dû être adaptés pour le revêtement de plancher de bois franc.

Enfin, l’installation du revêtement de plancher de bois franc au niveau du sous-sol est tout à fait inadéquate, non seulement au niveau des conditions de température et d’humidité et d’exécution du travail, mais au niveau de la conception même, laquelle ne prévoit aucun espace ventilé sous le revêtement de lattes de bois franc. Or, si on ne réalise pas un espace ventilé, il y aura toujours un risque potentiel de déformation, lequel est inacceptable.

Dans les faits, les propriétaires des condominiums localisés en sous-sol n’ont jamais été avisés des conséquences possibles concernant l’installation de revêtements de plancher de bois franc selon des conditions non-conformes aux exigences des règles de l’art nécessitant un espace de ventilation sous le plancher de lattes de bois franc.

Pour les raisons énoncées ci-après, nous sommes d’avis que les travaux sont inacceptables et doivent être corrigés.

 11        Recommandations (Correction de l’ouvrage)

Nous recommandons la reprise du revêtement du plancher de bois franc au complet de façon à ce que celui-ci respecte l’ensemble des réglementations, soit qu’il soit bien fixé et qu’il soit installé sur un support d’une épaisseur adéquate. Naturellement, les bonnes conditions d’installation devront être respectées au niveau du taux d’humidité et de la température.

Naturellement, on devra réaliser les travaux accessoires comme l’enlèvement et la réinstallation des plinthes et les correctifs à apporter au niveau des revêtements de finition de peinture qui seront touchés par lesdits travaux, tant en ce qui concerne le revêtement de plancher que la correction à apporter au niveau de la mise en place du pontage en contreplaqué, des fourrures en bois, etc.

Aussi, nous sommes d’avis que l’ensemble des travaux doit être repris, car nous croyons que c’est la seule solution qui puisse répondre aux ententes contractuelles, aux exigences de la réglementation et aux règles de l’art.

En ce qui concerne le condominium 170, nous sommes d’avis que même si les conditions prévalant lors de la mise en place du revêtement de plancher de bois franc étaient plus performantes que celles des deux autres condominiums, étant donné que la dalle de béton, la peinture et les joints étaient déjà réalisés depuis plusieurs mois, il demeure que les malfaçons que nous y avons notées relèvent de la réalisation d’un plancher de bois franc en sous-sol et de l’absence d’un échangeur d’air. En effet, nous n’avons relevé aucun système d’échangeur d’air permettant de contrôler l’humidité et cela, pour aucun des condominiums, alors que ledit système est requis par la réglementation.

Enfin, nous recommandons la réalisation d’un revêtement de plancher sur un sous-plancher ventilé et cela, pour les condominiums localisés en sous-sol., soit les 170 et 250. rue de la Presqu’Île. Cette recommandation est effectuée en considération du fait que les propriétaires doivent savoir que cette technique d’installation répond aux règles de l’art pour l’installation d’un revêtement de plancher de bois franc en sous-sol, en considération du fait que l’installation d’un revêtement de plancher de bois franc n’est pas recommandée dans un sous-sol. Aussi, nous ne pouvons donc garantir le résultat, mais la méthode retenue est celle qui sera la plus performante dans ce cadre-là.

Le lecteur doit donc noter que les travaux de réfection des condominiums de 170 et 250. rue de la Presqu’Île représentent des coûts supérieurs à ceux du condominium du 254 rue de la Presqu’Île, étant donné une plus grande complexité des travaux nécessaires afin de respecter le minimum exigé par les règles de l’art.

   11.01  Correctifs

  11.01.01 Travaux correctifs concernant le 254, rue de la Presqu’Île,  soit le   condominium situé au rez-de-chaussée

           La présente proposition représente la seule qui puisse permettre de respecter toutes les exigences de la réglementation et des règles de l’art. Nous avons inséré, en annexe 11, la Proposition 2 qui représente les travaux à être exécutés en tenant compte que l’entrepreneur doit mettre à nue la dalle de béton existante, soit prévoir l’enlèvement du revêtement de plancher de bois franc existant et son contreplaqué.

11.01.02  Travaux correctifs concernant les 250 et 170, rue de la Presqu’Île, soit les condominiums situés au sous-sol

La présente proposition représente la seule qui puisse permettre de respecter toutes les exigences de la réglementation et des règles de l’art. Nous avons inséré, en annexe 11, la Proposition 1 qui représente les travaux à être exécutés en tenant compte que l’entrepreneur doit mettre à nue la dalle de béton existante, soit prévoir l’enlèvement du revêtement de plancher de bois franc existant et son contreplaqué.»

[25]      L’entrepreneur a commis certaines erreurs comme le mentionne l’architecte Arcand, dans son rapport d’expertise, (pièce B-1), paragraphe 08.02.04, page 24 où il écrit :

«Dans le cas du présent projet, l’entrepreneur a retenu la mise en place d’un revêtement de contreplaqué de ½ " d’épaisseur, ce qui est trop faible et ne permet pas une bonne liaison des ancrages, permettant de maintenir en place, à long terme, le revêtement de plancher de bois franc. Il en résulte des craquements, étant donné que les agrafes ont déjà commencé à se désolidariser du support par mauvaise adhérence au bois, dû à son épaisseur trop faible, et cela, combiné à un contact avec la chape de béton, ce qui est tout à fait inapproprié.»

 

[26]      Précédemment à ce dernier paragraphe, à la page 23, dans la même section, l’architecte Arcand mentionne :

" 08.02.04  Conditions d’installation  " :

«….. Le plancher doit respecter certains critères de façon à ce que les résultats soient performants, dont :

Ø      Il doit être posé sur un contreplaqué de bonne qualité et de bonne épaisseur (5/8" ), avec joint embouveté préférablement de 3/4" , de façon à avoir une épaisseur minimale de bois pour que les clous ou les agrafes puissent bien jouer leur rôle d’ancrage du revêtement de bois franc..

Ø      Il doit être posé sur un contreplaqué de bonne qualité et de bonne épaisseur (5/8" ), ou encore panneau de copeaux de 5/8", à la condition que ces panneaux soient installés dans des endroits sans humidité, ce qui n’est pas le cas au sous-sol.

Ø      Il doit être posé sur des  fourrures de support espacées à 12" c/c reposant sur l’une ou l’autre des possibilités suivantes (réf. Page 37, annexe 02) :

¨      Des fourrures perpendiculaires permettant une ventilation croisée;

¨      Un pare-vapeur recouvrant la dalle de béton;

¨      Une membrane acoustique sur la dalle de béton.

[27]      Pour simplifier l’étude sur les trois planchers, l’expertise de l’architecte a fait une  relation rapprochée entre les trois planchers, et le soussigné a cru réunir les trois dossiers ainsi que l’a fait le procureur de l’administrateur, Me Baillargeon. Les mêmes causes dans les trois dossiers produisent les mêmes effets. Le résultat est le même alors qu’il y a trois sous-traitants différents i.e. un sous-traitant différent pour chaque plancher et l’entrepreneur n’a pas cru bon faire venir ces derniers pour témoigner.

[28]      L’avocat doute que ce soit un vice? Alors comment qualifier cela autrement qu’un vice couvert par l’article 19 du Règlement?

[29]      Il s’agit, en droit, d’un vice caché et d’une malfaçon puisqu’il y a diminution de la valeur du bâtiment lors d’une revente. Et d’une malfaçon, puisqu’il y a défaut de qualité dû à l’épaisseur du contre-plaqué, la longueur et l’utilisation des agrafes, l’humidité du béton. Un profane peut constater que toutes les planches des planchers de bois franc dans les 3 maisons sont concaves à un degré plus ou moins prononcé.

[30]      Même pour un profane, le plancher tel quel serait inacceptable, mais il y a plus, soit l’expertise écrite et testimoniale de l’architecte Arcand. Sans minimiser l’importance des témoignages de l’entrepreneur Gauvin qui, de bonne foi, aurait respecté les directives du fabricant, il demeure que le rapport ou plutôt l’expertise écrite (pièce B-1) de l’architecte Arcand a, en droit, une plus grande, même une très grande force probante, une nette prépondérance de preuve.

[31]      Selon l’architecte Arcand, dans son rapport d’expertise à la page 35, le montant du coût de rétablissement de l’ouvrage s’élève comme suit :

Ø      «Pour le 254, rue de la Presqu’Île :                             11 118$;

Ø      Pour le 250, rue de la Presqu’Île :                               16 252$;

Ø      Pour le 170, rue de la Presqu’Île :                               14 933$;

                  montant total :                                             42 303$.»

 

 

CONCLUSIONS

[32]      Tant dans la preuve testimoniale que dans la preuve écrite, l’on ne trouve rien qui puisse contredire le rapport de l’architecte Arcand ; l’expertise de l’architecte est détaillée, et supportée par le Code national du Bâtiment. Au surplus, les planches du plancher de bois franc sont très visiblement concaves même à l’œil qui ne les cherche pas.

[33]       Dans son expertise à la page 7, l’architecte Arcand mentionne :

" La municipalité où a été érigé le présent bâtiment a adopté comme règlement municipal le Code national du bâtiment ".

[34]      En conséquence le soussigné retient l’expertise de l’architecte Arcand et les recommandations conformes au Code national du bâtiment.

[35]      Les frais de l’expertise de l’architecte Arcand couvrent ses honoraires pour son rapport.. L’on retrouve la facturation de l’architecte Arcand à la pièce B-3 au montant de 3 294,82$. avant l’audition, ce à quoi il faut ajouter les frais encourus pour déplacement, copies et le temps lors de l’audition, pour lesquels le soussigné n’a pas les pièces justificatives.

[36]      En terminant, le soussigné ajoute qu’il n’enlèverait pas un " iota" de l’expertise " ad hoc " de l’architecte Arcand, un expert.

[37]      PAR CES MOTIFS,

[38]      CONSIDÉRANT  le Règlement, 

[39]      CONSIDÉRANT le Code civil,

[40]      CONSIDÉRANT la preuve écrite et testimoniale dans son ensemble,

[41]      CONSIDÉRANT la prépondérance de la preuve des bénéficiaires,

[42]      CONSIDÉRANT le manquement de l’entrepreneur à ses obligations légales et contractuelles,

L’arbitre,

[43]      ACCUEILLE la demande d’arbitrage des bénéficiaires pour les 3 condominiums;

[44]      DÉCLARE que chacune des décisions de l’Administrateur dans les 3 dossiers est erronée;

[45]      ORDONNE à l’entrepreneur l’enlèvement du plancher de bois franc actuel et l’enlèvement du contreplaqué de ½ " ;

[46]      ORDONNE la reconstruction des planchers de bois franc aux 3 condominiums, soit aux numéros 254, 250, et 170, rue de la Presqu’Île, Charlemagne, le tout conformément aux règles de l’art, à l’usage courant du marché et au Code national du Bâtiment, dans un délai de 90 jours de la date des présentes;

[47]      ORDONNE à l’entrepreneur de déménager et entreposer à ses frais, pendant l’exécution de tous les travaux aux 3 condominiums, tous les meubles et effets mobiliers des 3 condominiums et reloger, temporairement, à ses frais les bénéficiaires occupant actuellement les 3 condominiums, selon les dispositions de l’article 30, paragraphe 20 a), du Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs.

 

COÛTS

 

[48]      Les frais de l’arbitrage sont à la charge de l’administrateur selon l’article 123 du Règlement.

[49]      L’expertise de l’architecte Arcand est pertinente et les frais sont raisonnables. Les frais de l’expertise sont à la charge de l’administrateur conformément à l’article 124 du Règlement. Les frais de déménagement et relogement temporaire (voir paragraphe 47) sont à la charge de l’administrateur conformément à l’article 30, paragraphe 20 a), du Règlement.

 

                                           Montréal, 15 juin 2009  

 

 


                                                                                                  

                                                                                                   Marcel Chartier, avocat

                                                                                                   Arbitre (Soreconi)

 

 

P.S. Cette décision du 15 juin 2009 a été corrigée le 16 juin 2009, suite à des erreurs cléricales aux paragraphes [14] et [35] (même erreur) : le montant de l’expertise est de 4 928,35$, conformément à la pièce B-3, et non de 3 294,82$. Au paragraphe [49], le mot "administrateur", à la dernière ligne de ce dernier  paragraphe, est remplacé par "entrepreneur", conformément au paragraphe [47].