TRIBUNAL D’ARBITRAGE

 

 

ARBITRAGE EN VERTU DU RÈGLEMENT SUR LE PLAN DE GARANTIE DES BÂTIMENTS RÉSIDENTIELS NEUFS

 

Organisme d’arbitrage autorisé par la Régie du bâtiment : SORECONI

 

 

ENTRE :                                                        JENNIFER LEBLANC

                                                                        Et

                                                                        SÉBASTIEN BERTEAU

                                                                      

(ci-après les « Bénéficiaires »)

 

ET :                                                                9232-7204 QUÉBEC INC.;

 

(ci-après l’ « Entrepreneur »)

 

ET :                                                                RAYMOND CHABOT ADMINISTRATEUR PROVISOIRE INC. ès qualités d’administrateur provisoire du plan de garantie de La Garantie Abritat inc.;

 

(ci-après l’« Administrateur »)

 

Dossier Soreconi: 160212001

 

 

Décision amendée

 

 

 

Arbitre :                                                          Me Pamela McGovern

 

 

Pour les Bénéficiaires :                                M. Sébastien Berteau

           

 

Pour l’Entrepreneur :                                     N/A

 

 

Pour l’Administrateur :                                  Me Nancy Nantel

 

 

Date de la Décision :                                   31 août 2017, amendée le 12 octobre 2017

 

Identification complète des parties

 

 

 

 

 

Bénéficiaires :                                               Jennifer Leblanc et Sébastien Berteau

                                                                        [...]

                                                                        Saint-Lin-Laurentides (Québec) [...]         

 

 

 

Entrepreneur:                                                9232-7204 Québec Inc.

                                                                       306, rue des Celtes

                                                                       Saint-Colomban (Québec) J5K 0G7

                                                                      

 

 

Administrateur :                                            Raymond Chabot, administrateur provisoire Inc. ès qualité d’administrateur provisoire du plan de garantie de La Garantie Abritat inc.;

                                                                       7333, Place des Roseraies, bur. 300

                                                                       Montréal (Québec) H1M 2X6

 

Et son procureur :

 

                                                                       Me Nancy Nantel

                                                                       Contentieux des garanties

                                                                       7333, Place des Roseraies, bur. 300

                                                                       Montréal (Québec) H1M 2X6


Plumitif

 

02.12.2016    Demande d’arbitrage du bénéficiaire

20.01.2017    Nomination en date du 20 janvier 2017

27.03.2017    Lettre à l’arbitre de la part des procureurs de l’administrateur Raymond Chabot avec le cahier des pièces

03.04.2017    Échanges de courriel concernant la date de l’appel conférence

03.04.2017    Courriel de Me Nantel à l’arbitre avec l’avis de faillite de l’Entrepreneur au mois de mars 2015

06.04.2017    Appel Conférence et conférence de gestion

11.04.2017    Confirmation de la date et lieu de l’audience

12.04.2017    Envoi à toutes les parties du procès-verbal de l’appel conférence et conférence de gestion;

20.04.2017    Transmission d’un rapport d’expertise par le Bénéficiaire avec pièces

26.04.2017    Confirmation par le procureur de l’Administrateur qu’il n’y aura pas de contre-expertise

19.06.2017    Visite des lieux et audition de la demande d’arbitrage

25.06.2017    Courriel de M. Berteau concernant l’absence de poutre de bois

29.06.2017    Courriel de Me Nantel avec la réponse de l’inspecteur concernant l’absence de poutre

 

Admissions

 

[1]       L’arbitrage concerne un bâtiment résidentiel non détenu en copropriété situé au [...], Saint-Lin Laurentides, Québec;

 

[2]       La réception du bâtiment a eu lieu le 27 juin 2012 et la réclamation écrite fut reçue par l’Administrateur le 29 août 2016. L’inspection s’en est suivie le 4 octobre 2016 et la décision de l’inspecteur a été rendue le 1er novembre 2016;

 

[3]       Étaient présents lors de l’inspection qui a donné source à la décision de l’Administrateur, M. Sébastien Berteau (Bénéficiaire) ainsi que l’inspecteur M. Robert Roberge;

 

[4]       La décision de l’Administrateur datée du 1er novembre 2016 conclue que le problème concernant les joints de mortier craqués et le détachement des blocs de finition des rampes n’était pas couvert par la garantie;

 

[5]       Le 2 décembre 2016, le Centre a reçu de la part des Bénéficiaires, une demande d’arbitrage et la soussignée a été désignée le 20 janvier 2017;

 

[6]       Une conférence de gestion a eu lieu le 6 avril 2017 à quel moment le Bénéficiaire a indiqué que la description du point en litige était plutôt : « Joints de mortier craqués et détachement de la façade ». De plus, le Bénéficiaire a indiqué qu’il avait l’intention de produire un rapport de son expert en maçonnerie, Dominic Desjardins;

 

[7]       Le rapport d’expertise préparé par M. Desjardins a été communiqué aux autres parties le 20 avril 2017 ;

 

[8]       Le 26 avril 2017, le procureur de l’Administrateur a indiqué qu’il n’y aurait pas de contre-expertise et, a déclaré que la preuve de l’Administrateur était complète;

 

[9]       Une visite des lieux a eu lieu le 19 juin 2017 à compter de 9 :00 heures chez le Bénéficiaire et, l’enquête et l’audition a débuté le même jour au bureau de l’Administrateur;

 

Valeur en litige

 

[10]    La valeur en litige est de classe [1] (1 $ @ 7 000 $);

 

Question en litige et mise en contexte

 

 

[11]    Le seul point à décider concerne les joints de mortier craqués et le détachement de la façade ce qui n’a pas été considéré par l’Administrateur comme étant couvert par la garantie prévue au Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs (ci-après le Règlement):

 

[12]    Le Règlement énonce et encadre les obligations respectives de l’entrepreneur et de l’administrateur envers le bénéficiaire. L’administrateur assume à l’égard du bénéficiaire les obligations légales ou contractuelles de l’entrepreneur si celui-ci n’y satisfait pas et ce, à l’intérieur des limites prévues au Règlement.

 

[13]    Dans le présent dossier, la réclamation du Bénéficiaire a été transmise à l’Administrateur plus de quatre (4) ans après la réception du bâtiment. Donc, la garantie prévue à l’article 10 du Règlement est applicable:

 

La garantie d’un plan dans le cas de manquement de l’entrepreneur à ses obligations légales ou contractuelles après la réception du bâtiment doit couvrir:

 

 

5°  la réparation des vices de conception, de construction ou de réalisation et des vices du sol, au sens de l’article 2118 du Code civil, qui apparaissent dans les 5 ans suivant la fin des travaux et dénoncés, par écrit, à l’entrepreneur et à l’administrateur dans un délai raisonnable de la découverte ou survenance du vice ou, en cas de vices ou de pertes graduelles, de leur première manifestation significative;

 

                                                                                  (nos soulignements)

 

[14]    L’article 2118 du Code civil du Québec énonce :

 

2118. À moins qu’ils ne puissent se dégager de leur responsabilité, l’entrepreneur, l’architecte et l’ingénieur qui ont, selon le cas, dirigé ou surveillé les travaux, et le sous-entrepreneur pour les travaux qu’il a exécutés, sont solidairement tenus de la perte de l’ouvrage qui survient dans les cinq ans qui suivent la fin des travaux, que la perte résulte d’un vice de conception, de construction ou de réalisation de l’ouvrage, ou, encore, d’un vice du sol.

                                                                         (nos soulignements)

 

[15]    Conséquemment, le Tribunal doit décider en vertu de la garantie qui couvre la réparation des vices majeurs menant à la perte de l’ouvrage, qui apparaissent dans les cinq (5) ans suivant la fin des travaux lorsque dénoncés par écrit à l’Entrepreneur ainsi qu’à l’Administrateur, dans un délai raisonnable de la découverte ou survenance du vice ou, en cas de pertes ou de vices graduels, de leur première manifestation ;

 

[16]    Il est important de rappeler pour qu’un vice soit qualifié de majeur, il doit notamment rendre un bâtiment inutilisable aux fins pour lesquelles il a été construit[1];

 

[17]    Pour établir l’existence d’un vice majeur, le Bénéficiaire doit prouver par la prépondérance des probabilités :

 

a)    la perte de l’ouvrage;

b)    la manifestation ou la survenance de cette perte dans les cinq (5) ans qui suivent la fin des travaux;

c)    l’existence d’un vice de conception, de construction, de réalisation de l’ouvrage ou un vice de sol, et

d)    un lien de causalité entre le vice et la perte;

 

 

LA PREUVE ET LES TÉMOIGNAGES

 

[18]    Dans leur réclamation, les Bénéficiaires ont soulevé les problèmes concernant les joints qui s’effritaient dans la façade la maison incluant « les pierres dans la façade, près des marches, fenêtres et autres qui ne tiennent plus, les joints sont craqués et s’effritent », (voir A-4, Cahier des pièces);

 

 

[19]    L’inspecteur de l’Administrateur, Robert Roberge, a résumé le problème comme suit « les joints de mortier craquent à plusieurs endroits et les blocs de finition des rampes se détachent sur le dessus », (voir p. 3, A-6, Cahier des pièces);

 

[20]    L’inspecteur Roberge a noté qu’il n’y avait aucun désordre structural et que seules quelques fissures causées par les vibrations et une infiltration d’eau dans les rampes de l’escalier en façade ont été remarquées lors de sa visite en octobre 2016, (voir p. 3, A-6 Cahier des pièces);

 

[21]    L’inspecteur a conclu que les blocs ont mal été solidifiés et que les joints de mortier sur le dessus des rampes laissent l’eau s’infiltrer, abîmant les joints et le revêtement de brique. Or, ce problème était un vice caché qui n’a pas été découvert à l’intérieur des délais prescrits à l’article 104 du Règlement, soit, dans les 3 ans suivant la réception du bâtiment. La réclamation n’a pas été considérée comme recevable en vertu du Plan de garantie (voir p. 3, A-6, Cahier des pièces);

 

[22]    Le témoin Dominic Desjardins de D Design Maçonnerie a noté les points suivants dans son rapport daté du 17 avril 2017 et il réfère à des photos (pièces) se trouvant en annexe :

 

Pièces #1 - fer angle rouillé : il aurait dû y avoir de la peinture pour prévenir la corrosion ou un fer angle galvanisé. Le silicone a fissuré dû à une pression de la pierre.

Pièce #2, #3, #4, #5, #6 et #7 : Colonne gauche : joints fissurés, mortier manquant, aucune chantepleure d’installé dans le bas de la colonne. Il devrait y avoir un cap de ciment sur la colonne qui dépasse d’un pouce et demi de chaque côté de la colonne avec une coupe d’eau au lieu de la pierre. Selon la pièce #7, il n’y a aucun support qui retient la pierre.

Pièce # 8 et #9 Colonne droite : joints fissurés, mortier manquant, aucune chantepleure d’installé dans le bas de la colonne. Il devrait y avoir un cap de ciment sur la colonne qui dépasse d’un pouce et demi de chaque côté de la colonne avec une coupe d’eau au lieu de la pierre.

Pièce # 10 et # 11 fer angle rouillé, aucun espace raisonnable entre le fer angle et la fenêtre, ce qui a causé le bris de la fenêtre. Joints Fissurés.

Pièce # 12 Mur côté gauche prêt de la colonne, aucune chantepleure. La circulation d’air est alors inexistante.

Pièce # 13 Chantepleures obstruées par de la maçonnerie

Pièce # 14, #15, #16, #17, #18 et #19 Installation et qualité du solin inadéquat. Voir # 16, cela a occasionné une infiltration d’eau.

Pièce # 20 et # 21 Clous non torsadés qui ne respectent pas le code du bâtiment. Ils ont été installés à la place de feuillard.

Pièce #22, #23, #24, #25, # 26, # 27, # 28, #29, #31, # 31 et #32 Tous feuillards doivent être installés dans un rayon de 24 pouces maximum. Pour la pièce # 23 et # 24 :  éviter l’accumulation de mortier entre les parois pour que l’eau ne puisse pas migrer d’une paroi à l’autre, ce qui n’a pas été respecté. On peut constater que sur la pièce # 31, la maçonnerie n’a pas été installée du même niveau sur chaque côté de la fenêtre. Côté droit plus élevé que le côté gauche.

Pièce # 33 L’allège côté droit de la fenêtre a été installée avec une pente intérieure vers le mur au lieu d’extérieur, ce qui peut causer une infiltration d’eau.

Pièce # 34 Fer angle haut de la porte d’entrée ne convient pas à la norme, et joints fissurés.

Pièce # 35 on peut constater que le mur du côté gauche n’a pas été installé correctement comparativement au côté droit.

 

[23]    Lors de son témoignage, le Bénéficiaire a mentionné qu’il a remarqué que les joints étaient craqués et que la maçonnerie avait travaillé. Dans la 4ième année après la réception, il a constaté qu’un bloc se décollait dans un muret. Il est d’avis que ce n’est pas normal que les blocs décollent;

 

[24]    L’expert du Bénéficiaire, M. Desjardins a repris le contenu de son rapport lors de son témoignage et, a confirmé de nouveau qu’il était d’avis que le travail n’a pas été bien fait et à donner en exemple le fait qu’il n’y avait pas de feuillards mais des clous pour retenir la maçonnerie;

 

[25]    Dans son rapport, M. Desjardins a soulevé plusieurs malfaçons au niveau des travaux;

 

[26]    En contre-interrogatoire, M. Desjardins a mentionné qu’il n’a pas constaté d’infiltration d’eau mais qu’il y avait des risques à certains endroits (voir photos 14 et 15);

 

[27]    M. Roberge a témoigné pour l’Administrateur et a confirmé que lors de la visite d’inspection le 4 octobre 2016, il a constaté plusieurs micro fissures et des blocs qui se détachaient;

 

[28]    L’inspecteur Roberge a également noté certains points soulevés par M. Desjardins mais n’est pas arrivé aux mêmes conclusions :

 

Quant aux fers angles, il était d’avis que la largeur installée était suffisante;

La peinture antirouille proposée par M. Desjardins devrait être considérée comme un travail d’entretien usuel pour le propriétaire d’une maison;

Il a noté que le mortier a cédé à certains endroits mais qu’il n’y a pas eu un impact sur la solidité de l’immeuble;

Il y avait des micro fissures mais pas de signe d’affaissement;

Il a admis qu’il n’y avait pas beaucoup de champelure ce qui pourrait avoir un impact dans la colonne;

Tel qu’il appert au pièce # 35, il y avait une petite chantepleure mais que l’eau réussissait à sortir. Principalement, il y aurait eu de la fluorescence dans le bas des premières marches.

Il a noté que le mortier n’a pas collé sur la dernière portion de brique. Il a donc conclu que le mortier était mal installé.

Quant aux feuillards, il a témoigné que l’installation n’a pas été bien effectuée mais, que le travail était quand même conforme.

Nonobstant les irrégularités qu’il a constaté lors de sa visite, M. Roberge était d’avis que les problèmes n’étaient pas couverts par le plan de garantie. Il devait découvrir une défectuosité majeure, une structure ébranlée, un risque extrême.

 

 

[29]    Afin de corriger les problèmes soulevés par le Bénéficiaire, M. Roberge a conclu que la pierre devait être scellée, quelques chantepleures pourraient être ajoutées ou nettoyées et que le fer angle devait être peinturé. Quant aux attaches pour la maçonnerie, il a conclu que le mur était suffisamment retenu et ne causait pas un danger et ne pouvait donc pas être considéré comme étant un « vice majeur »;

 

[30]    Quant à la fenêtre brisée (constatée sur la pièce # 11 du rapport de M. Desjardins), M. Roberge a noté que la brique ne s’appuyait pas sur la fenêtre et il n’a pas constaté un problème structural. Si tel était le cas, il aurait noté des signes à l’intérieur de l’immeuble, autour de la fenêtre comme un gypse mouillé ou des signes d’eau ou bien que les pierres du bas auraient éclatées. De plus, si le fer angle avait bougé, il ne serait pas possible d’ouvrir la fenêtre;

 

[31]    M. Roberge a témoigné qu’il n’était pas d’avis que le mur devant la maison avait bougé donc, il a conclu que les quelques feuillards « font leur travail »;

 

[32]    En réplique, M. Desjardins a témoigné qu’il est d’avis que le fer angle s’affaisse et que le mur n’est pas adéquat;

 

[33]    Suite à l’audition, le Bénéficiaire a transmis des commentaires ainsi que des photos additionnelles. Il a indiqué que le problème concerne le mortier et la conception de la maçonnerie qui se dégrade ce qui cause le détachement des blocs de pierre. De plus, quant à la colonne principale qui supporte toutes les pierres devant la maison, jusqu’au haut du toit, il est d’avis que cette colonne n’est pas solide;

 

[34]    En réponse à cet envoi le procureur de l’Administrateur a transmis un envoi de M. Roberge qui se lit comme suit:

 

Il n’y a pas de colonne car les poutres de toit sont soutenues par le coin de mur, (ce que je ne savais pas) mais très solide et même plus qu’une colonne et le fer d’angle sera soutenue par la brique de façade comme il se doit, tout est en ordre;

 

ANALYSE ET DÉCISION

 

[35]    En gardant à l’esprit que chaque cas est un cas d’espèce, le Tribunal doit décider si les problèmes soulevés par le Bénéficiaire liés aux joints de mortier et les blocs de finition devraient être reconnus comme des vices de construction d’une gravité susceptible d’entrainer la perte de l’ouvrage et ce afin d’être couverts en vertu de la garantie prévue au paragraphe 10 (5) du Règlement ci-haut cité;

 

[36]    Il y a lieu de rappeler que dans le présent dossier, les malfaçons ainsi que les vices cachés ne sont pas couvertes par le plan de garantie puisque la réclamation a été transmise dans la 4ième année suivant la réception de l’immeuble;

 

[37]    Or, les problèmes au niveau du mortier n’affectent pas la solidité de l’immeuble, tel qu’indiqué par M. Roberge. Toujours selon l’inspecteur, les micro fissures ne démontrent pas de signe d’affaissement et constituent des malfaçons et non un vice majeur. Le Tribunal est du même avis;

 

[38]    Tel que décidé dans Syndicat de la Copropriété Les Jardins du Parc c. La Garantie des Bâtiments Résidentiels Neufs de l’APCHQ [2], une telle situation n’est pas couverte pas le plan de garantie pour des vices majeurs:

 

[51] En l’espèce, la preuve révèle que les problèmes observés n’ont pas entrainé de conséquences sérieuses. Messieurs Séguin et Fortin conviennent certes que les situations observées contreviennent aux normes de construction mais aucune d’elles n’est décrite comme susceptible de mettre en péril la solidité de l’ouvrage ou encore d’entrainer des troubles graves dans l’utilisation de l’immeuble.

 

[39]    De plus, une réclamation similaire aux problèmes de fissures décrits par les témoins dans le présent dossier, a été rejetée dans Castiglione et SBarra c. Le Groupe Platinum Construction 2001 inc. et la Garantie des Bâtiments Résidentiels Neufs de l’APCHQ Inc. :

 

(56) En ce qui concerne les fissures au parement de maçonnerie, force est de constater que celles qui sont situées au-dessus de la porte de garage sont, sans dépasser les 3 millimètres, assez larges et sont visibles de la rue. En cela, elles ne répondent pas aux critères de qualité du Guide de performance de l’APCHQ qui prévoit qu’aucune fissure ne doit être visible à plus de 20 pi (6m) ». Il est clair qu’il y a ici malfaçon.

 

(57) Toutefois, la situation ayant été dénoncée dans la troisième année de la garantie, le tribunal doit l’analyser en regard des critères du vice caché. La preuve soumise ne permet pas de soutenir que la situation répond au niveau de gravité requis pour conclure à un vice caché selon l’article 1726 du Code civil du Québec. La demande doit donc être rejetée sur le point 12 également.

 

[40]    Quant aux murets (décrits comme étant des colonnes selon M. Desjardins et des rampes selon M. Roberge) à côté des marches, le Bénéficiaire a témoigné que dans la 4ième année après la réception de l’immeuble, il s’est « accoté et les blocs étaient en train de se défaire » Il est le seul témoin qui a été entendu sur la découverte de ce problème;

 

[41]    L’Administrateur a plaidé que le muret est solide nonobstant le fait que les blocs se déplacent et l’inspecteur a même dit que cela n’affecte pas la sécurité ou l’utilisation du muret. Pour l’inspecteur, le fait que les pierres se détachent ne devrait pas être considéré comme étant un vice majeur. Le Tribunal n’est pas du même avis;

 

[42]    Dans Argonal inc c. Sector Barbacki Shemie & Associés ltée[3], la Cour supérieure a décidé que la notion de « perte » doit recevoir une interprétation large et s’étendre notamment à tous dommages sérieux subis par l’ouvrage immobilier[4];

 

[43]    Le fait que les pierres se détachent du muret devrait être considéré comme étant un vice majeur puisqu’il s’agit d’une situation dangereuse qui porte atteinte à l’intégralité ou à la structure du bâtiment. La question à être posée est la suivante : est-ce qu’on est placé dans une situation de perte d’ouvrage ou encore, est-ce qu’il y a danger d’écroulement de certaines parties?

 

[44]    Lors de son témoignage, M. Roberge a concédé qu’il n’y avait pas beaucoup de chantepleure pour évacuer l’eau de ces murets et, même s’il y avait de la fluorescence, il n’était pas d’avis qu’il y avait une « grosse » fluorescence. Or, les photos 3, 5 et 8 du rapport de M. Desjardins démontrent l’étendue de ce problème;

 

[45]    De plus, le rapport de M. Desjardins mentionne « aucune chantepleure d’installée dans le bas de la colonne » pour les deux côtés;

 

[46]    Le Tribunal conclut que le fait que les pierres sur les murets ont commencé à bouger, qu’il y a de la fluorescence, que l’entrepreneur aurait installé soit peu ou aucune chantepleure, démontre qu’il y a une perte partielle de l’ouvrage causé par un vice de construction. Cet aspect de la réclamation est accordé. Par ailleurs, les imperfections au niveau du mortier ne constituent pas une « perte » au sens du Règlement. Le Bénéficiaire n’a pas rempli son fardeau de preuve à cet égard;

 

 

Frais d’expertise

 

[47]    L’article 22 du Règlement prévoit que l’arbitre doit statuer, s’il y a lieu, quant au quantum des frais raisonnables d’expertises pertinentes que l’Administrateur doit rembourser au bénéficiaire lorsque celui-ci a gain de cause total ou partiel;

 

[48]    Le travail effectué par l’expert Desjardins a été utile pour déterminer la recevabilité de la réclamation en partie et, le Bénéficiaire a transmis la facturation pour les services rendus (voir factures du 8 avril 2017 et du 19 juin 2017) ;

 

[49]    Considérant que l’arbitre doit statuer, s’il y a lieu, quant au quantum des frais raisonnables d’expertises pertinentes que l’administrateur doit rembourser au bénéficiaire lorsque celui-ci a gain de cause total ou partiel et vu le résultat mitigé du présent arbitrage, le Tribunal accorde une somme de 250$ en remboursement partiel des frais d’expertise encourus par le Bénéficiaire ;

 

[50]    La décision initialement rendue le 31 août 2017 a été amendée pour corriger la désignation de l’Administrateur;

 

 

POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL D’ARBITRAGE :

 

ACCUEILLE la demande du Bénéficiaire en partie pour les travaux à être effectués sur les murets (également décrits comme étant des rampes ou colonnes), à côté des marches devant l’immeuble;

 

MAINTIENT la décision de l’Administrateur du 1 novembre 2016 sur la question des joints de mortier;

 

CONDAMNE l’Administrateur a remboursé une somme de 250$ pour les frais d’expertise encourus par le Bénéficiaire;

 

Le tout, avec les coûts du présent arbitrage à la charge de l’Administrateur.

 

Montréal, 12 octobre 2017

 

 

 

_______________________

Pamela McGovern, ClArb.

Arbitre



[1] Normand Lavallée et Louise Malboeuf c. 9085-1247 Québec inc., CCAC 27 avril 2009, Syndicat de la copropriété les jardins du parc c. La garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ, GAMM 28 janvier 2010;

[2] GAMM 2009-09-0003 28 janvier 2010, Me Johanne Despatis, arbitre

[3] AZ-50081857

[4] Ibid, paragraphe 23 du jugement