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ARBITRAGE

En vertu du Règlement sur le plan de garantie

des bâtiments résidentiels neufs

(Décret 841-98 du 17 juin 1998)

 

Organisme d’arbitrage autorisé par la Régie du bâtiment :

Société pour la résolution des conflits inc. (SORECONI)

 

 

 


ENTRE               MONSIEUR CLAUDE VIAU

(ci-après « le Bénéficiaire »)

 

ET                       CONSTRUCTION DUBÉ INC 

(ci-après « l’Entrepreneur »)

 

ET :                     LA GARANTIE HABITATION DU QUÉBEC INC (Qualité-Habitation)

(ci-après « l’Administrateur »)

 

No dossier Garantie:          QH -16816-1

No dossier SORECONI :   081020001

 

 

 

SENTENCE ARBITRALE

 

 

 

Arbitre :                                    Guy Pelletier

Pour le Bénéficiaire :                 Monsieur Claude Viau

Pour l’Entrepreneur :                  Monsieur Pierre Lavoie, jr

Pour l’Administrateur :               Me Avelino De Andrade

Date de la décision:                   le 6 janvier 2009

 

 

 

Mandat :

 

L’arbitre a reçu son mandat de SORECONI  le 22 octobre 2008.

 

Historique et pièces :

1er juillet 2004 :              Réception du bâtiment

27 juillet 2008 :              Dénonciation écrite à l’Administrateur

2 octobre 2008 :            Décision de l’Administrateur

20 octobre 2008:           Demande d’arbitrage

18 décembre 2008 :       Audition de la demande d’arbitrage

 

 Introduction :

 

[1]            Le 1er juillet 2004, le Bénéficiaire signe la réception du bâtiment et l’occupe à partir du 1er août suivant.

[2]            En mai 2005, celui-ci fait une réclamation comportant deux points dont un concernant le parquet de bois franc qui craque, dans la chambre des maîtres.

[3]            Le 22 septembre 2005, l’Administrateur informe le Bénéficiaire dans une décision partielle, qu’il ne statue pas immédiatement sur le problème de craquement du plancher, car il y a eu entre-temps une entente entre le Bénéficiaire et l’Entrepreneur.

[4]            Le 7 février 2006, constatant encore la présente d’un problème de plancher, l’Administrateur émet un addenda à sa décision émise précédemment et ordonne à l’Entrepreneur de faire les vérifications nécessaires et d’apporter les correctifs requis.

[5]            Le 27 juillet 2008, le Bénéficiaire dénonce à l’Administrateur des défauts concernant le plancher de bois, notamment un soulèvement du plancher devant le foyer.

[6]            Le 2 octobre 2008, après avoir constaté la situation, l’Administrateur rejette la réclamation du Bénéficiaire. Sa décision concernant le plancher de bois se lit ainsi :

  (extrait de la décision)

[7]            Insatisfait de la décision, le Bénéficiaire demande l’arbitrage le 20 octobre 2008.

 

L’audition :

 

[8]            Monsieur Viau témoigne à l’effet que l’Entrepreneur lui a proposé, lors de la construction, un plancher de bois franc « exotique » dont les planches ont une largeur de 3 ½ pouces. Dès le début, il a constaté que la pose du plancher était déficiente et que les clous étaient apparents.

[9]            En 2005, le Bénéficiaire rapporte que l’Entrepreneur est venu faire des réparations. À ce moment-là, il a déménagé les meubles et relocalisé dans un autre condo, le fils de monsieur Viau qui occupait l’appartement.

[10]        En février 2007, monsieur Viau précise que des réparations ont été faites dans la chambre principale pour corriger un problème de « planche enfoncée ».

[11]        À l’été 2007, monsieur Viau dit qu’il a dénoncé à l’Entrepreneur un problème de gonflement du plancher dans le salon. À la question de Me De Andrade qui lui demande s’il a fait une dénonciation écrite à l’Administrateur en 2007, monsieur Viau confirme que ce n’est qu’à la suite du départ de son fils en juin 2008, qu’il a fait une réclamation écrite à l’Administrateur en regard d’un problème généralisé avec le plancher soit un gonflement devant le foyer et dans la salle à manger de même qu’un déplacement des planches à plusieurs endroits.

[12]        L’Entrepreneur témoigne à l’effet qu’il a toujours respecté la garantie à la suite des dénonciations du Bénéficiaire. Monsieur Lavoie dit qu’il a constaté la présence d’humidité mais que les tests sur le bois ont été faits par le représentant de l’Administrateur, monsieur Normand Pitre.

[13]        Me De Andrade demande à monsieur Normand Pitre de présenter les motifs qui l’ont amené à rejeter la réclamation du Bénéficiaire en 2008.

[14]        Monsieur Pitre explique qu’il est venu faire des vérifications dans la 4ième année de la garantie et qu’il a observé un taux d’humidité de 9% sur le bois, ce qui excède, selon lui, le taux normal de 7 à 8%. Il précise qu’il n’y a pas eu de dénonciation du problème de gonflement du plancher antérieurement. Il conclut qu’il ne peut pas accueillir la réclamation tardive du Bénéficiaire en fonction des clauses du contrat de garantie.

[15]        Monsieur Viau argumente que le taux d’humidité ne dépasse pas de façon significative les normes citées par monsieur Pitre et que tous les propriétaires du rez-de-chaussée, dont le plancher repose directement sur le sol, ont reçu de l’Entrepreneur un déshumidificateur. On ne peut donc présumer, selon lui, que le Bénéficiaire est le responsable de cette situation et qu’il a fait mauvais usage du logement.

[16]        Monsieur Viau affirme de plus que la pose du plancher est déficiente puisque le bois ne dispose d’aucun espace en périphérie des murs pour prendre de l’expansion. Pour supporter cette affirmation,  monsieur Viau fait faire une visite des lieux et démontre qu’en pourtour du plancher il n’y a aucun espace de jeu derrière les plinthes, les planches étant appuyées sur le mur.

[17]        Me De Andrade argumente que le problème est apparu au printemps-été 2007 et n’a été dénoncé à l’Administrateur pour la première fois qu’au mois de juillet 2008. Le Bénéficiaire avait un délai de 6 mois de la connaissance du problème pour le dénoncer, ce qu’il n’a pas fait, ajoute-t-il.

 

Analyse :

 

[18]              Dans le présent cas, l’arbitre doit déterminer si le Bénéficiaire a respecté les délais requis pour dénoncer le problème de plancher et s’il est couvert par la garantie.

[19]              Il convient de rappeler le droit applicable dans le cas où le Bénéficiaire découvre des malfaçons ou des vices cachés. Le règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs se lit ainsi à l’article 10:

10.   La garantie d'un plan dans le cas de manquement de l'entrepreneur à ses obligations légales ou contractuelles après la réception du bâtiment doit couvrir:

  3°    la réparation des malfaçons existantes et non apparentes au moment de la réception et découvertes dans l'année qui suit la réception, visées aux articles 2113 et 2120 du Code civil et dénoncées, par écrit, à l'entrepreneur et à l'administrateur dans un délai raisonnable, lequel ne peut excéder 6 mois de la découverte des malfaçons;

 

  4°    la réparation des vices cachés au sens de l'article 1726 ou de l'article 2103 du Code civil qui sont découverts dans les 3 ans suivant la réception du bâtiment et dénoncés, par écrit, à l'entrepreneur et à l'administrateur dans un délai raisonnable, lequel ne peut excéder 6 mois de la découverte des vices cachés au sens de l'article 1739 du Code civil;

 

  5°    la réparation des vices de conception, de construction ou de réalisation et des vices du sol, au sens de l'article 2118 du Code civil, qui apparaissent dans les 5 ans suivant la fin des travaux et dénoncés, par écrit, à l'entrepreneur et à l'administrateur dans un délai raisonnable, lequel ne peut excéder 6 mois de la découverte ou survenance du vice ou, en cas de vices ou de pertes graduelles, de leur première manifestation.

(les soulignements sont de l’arbitre)

 

[20]        Le Bénéficiaire a dénoncé un problème de plancher apparu dans la chambre principale au cours la première année de garantie. Cependant, d’après le témoignage de monsieur Viau, il ne s’agissait pas, à ce moment-là, du même problème de gonflement qu’il a constaté plus tard dans le salon et la salle à manger.

[21]        La preuve présentée par le Bénéficiaire et le témoignage non contredit de ce dernier, à l’effet que tous les propriétaires du rez-de-chaussée ont reçu de l’Entrepreneur un déshumidificateur pour contrer les problèmes d’humidité, porte à croire que le problème constaté de gonflement des planches en bois n’est pas une faute qu’on peut imputer directement au Bénéficiaire.

[22]        La démonstration faite de la pose déficiente du plancher de bois de type « exotique » permet de conclure que le parquet de bois n’a pas suffisamment d’espace pour prendre de l’expansion, situation aggravée par l’installation de ce fini sur un plancher situé au rez-de-chaussée (demi-sous-sol) qui est source d’humidité.

[23]        Le Bénéficiaire a une obligation de diligence. Le Tribunal constate, malheureusement, que celui-ci a dénoncé tardivement à l’Administrateur un vice caché et que cette dénonciation écrite a été faite en juillet 2008, soit quatre ans après la réception des travaux. L’argumentation de l’Administrateur doit être retenue puisque la démarche du Bénéficiaire ne respecte pas les exigences de l’article 10.4°du Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs, le délai de trois ans étant expiré.   

 

 

 

DÉCISION :

 

[24]        L’arbitre doit statuer « conformément aux règles de droit;  il fait aussi appel à l’équité lorsque les circonstances le justifient.»

[25]         À titre d’arbitre désigné, le soussigné est autorisé par la Régie du bâtiment du Québec à trancher tout différend découlant des plans de garantie.  La décision doit prendre appui sur le texte du Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs.

[26]        Suivant mon appréciation des faits, de la preuve versée au dossier et présentée à  l’audition et du droit applicable, je suis d’avis que le problème dénoncé tardivement par le Bénéficiaire est un vice caché qui n’est plus couvert par la garantie conformément aux exigences du Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs.

[27]             En vertu de l’article 123 du Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs et comme le Bénéficiaire n’a pas obtenu gain de cause sur aucun point de sa réclamation, l’arbitre doit partager les coûts. Conséquemment, considérant que le présent règlement peut être assimilé aux autres règlements visant la protection des consommateurs, l’arbitre fixe à 98.00$ le montant des frais judiciaires à être payé par le Bénéficiaire, suivant la grille des frais de la Division des petites créances  de la chambre civile de la Cour du Québec

 

 

POUR  CES MOTIFS LE TRIBUNAL D’ARBITRAGE :

 

[28]        REJETTE la demande d’arbitrage du Bénéficiaire;

[29]        MAINTIENT la décision de l’Administrateur en date du 2 octobre 2008;

[30]        CONDAMNE le Bénéficiaire à payer 98.00$ à titre de frais d’arbitrage;

[31]        CONDAMNE l’Administrateur à payer la balance des frais d’arbitrage;

[32]        RÉSERVE les recours du Bénéficiaire devant un Tribunal civil, s'il y a lieu.

 

Guy Pelletier

Guy Pelletier

Architecte et arbitre

Laval, ce 6 janvier 2009